Départ de Capetown

[hrp : à partir de là, le courtier se charge d'interprêter les pnj.]

La famille s'était installée à une table du restaurant, et commençait à regarder la carte. Au cadre, on voyait que l'établissement était de bonne qualité. La salle était d'ailleurs très révélatrice du clivage racial du pays : en un coup d'oeil, Lerrys s'aperçut bien vite que les noirs et les blancs étaient globalement répartis d'un côté à l'autre de la salle, hormi un jeune couple de couleur à la table voisine de celle de sa famille, qui faisait office d'enclave ethnique dans les tables caucasiennes.
Certains regards virulents étaient d'ailleurs tournés vers eux, autant du côté des blancs que des noirs.

Le père de Lerrys jeta un coup d'oeil au couple, puis reporta sans mot dire son regard sur la carte.

"Je suis sûre que tu t'y plairas une fois que tu te seras habitué, tu vas t'y faire plein d'amis, des gens qui te respecteront tel que tu es." répondit sa mère.

"Vous avez choisi ?" s'enquit le serveur en revenant auprès d'eux. La sensation d'une émotion qui s'insinuait en lui attira l'attention de Lerrys. Ce n'était pas la première qu'il ressentait ça. Il semblait une vive hostilité dans la pièce, une tension critique qui bourdonnait dans son crâne comme un essaim d'abeilles tueuses.

Les parents de Lerrys firent leur commande et le serveur repartir en cuisine. Ses parents se mirent à discuter du voyage, mais Lerrys ne parvenait pas à se concentrer sur leur conversation. La sensation d'hostilité lui emplissait la tête, l'empêchait de raisonner tranquillement. Où était Lerrys et ou commençaient les sentiments des autres ?
Le jeune mutant commençait à avoir la nausée.

Scrutant fièvreusement la salle, Lerrys ne remarqua personne d'apparence malade. Le bourdonnement émotionnel dans son crâne lui jouait peut-être des tours.

Le serveur ramena les apéritifs que ses parents avaient commandés, puis jeta un regard inquiet à Lerrys.

"Monsieur ne se sent pas bien ? Vous devriez peut-être vous rafraîchir aux toilettes." proposa le jeune serveur avec politesse, tout en indiquant la porte des commodités au mutant.

Les toilettes pour homme du restaurant sur lequel les Di Harray avaient jeté leur dévolu étaient impeccable et sentaient bon le désodorisant, peut-être même un peu trop. Cet excès de parfum ne contribuait pas à arranger les nausées du jeune mutant alors qu'il se débarbouillait au lavabo.

Ironiquement, la réponse à la question du jeune homme lui parvint une seconde plus tard sous la forme d'une vive émotion en provenance de la salle du restaurant.
Il sentait une aura morbide, une pulsion meurtrière se contracter comme une boule d'énergie destructrice dans sa tête.
Lerrys s'en rendit compte immédiatement en retournant dans le restaurant :

Un homme blanc, d'âge mur et au visage agité de tics nerveux, tenait un révolver braqué sur le couple noir installé dans le "coin blanc" du restaurant. Plus personne ne semblait bouger dans la salle, les gens retenaient leur souffle, les serveurs tenaient leurs plateaux vides devant eux comme s'ils pouvaient leur sauver la vie.

L'homme et la femme attablés avaient levé les mains en l'air. La femme sanglottait. L'esprit de Lerrys fut frappé par la terreur qui étreignait la poitrine de toute la salle, du couple, de ses parents, des serveurs... en plus de sa propre peur. Et la haine farouche de l'homme armé pulsait dans sa tête comme une plaie purulente.
Personne ne semblait avoir remarqué Lerrys à la sortie des toilettes.

En se concentrant, Lerrys parvenait peu à peu à reprendre le dessus sur son don. Pendant ce temps, le type armé houspillait le couple de couleur dans un flot d'injures que le jeune mutant ne comprit pas tant qu'il était focalisé sur son pouvoir.
Il y eut des gestes, que Lerrys vit au ralenti, comme s'il était détaché de ses sens humains. Apparemment, le preneur d'otage, car c'est ce qui commençait à se profiler, ordonnait au couple de quitter sa table pour rejoindre le côté "noir" de la pièce.
Les deux jeunes gens s'exécutèrent en se soutenant mutuellement. La jeune femme était au bord de l'hystérie et sanglottait bruyamment.
Le preneur d'otages quant à lui, recula de quelques pas dans la zone "blanche" de la salle, et s'arrêta près des Di Harray, eux aussi tétanisés par la peur, pour pointer son révolver sur les clients de couleur.

"Mettez-vous tous à terre !" beugla-t-il. Les gens se jettèrent immédiatement au sol, mains sur la tête.

Lerrys était à moitié masqué par un ficus posé devant la porte des toilettes. Cette maigre protection lui faisait gagner un temps précieux. La peur de mourir était si forte chez les clients qu'il était inutile d'essayer de les calmer, c'était au-dessus de ses forces.
La haine de l'exalté cependant, était comme une brèche vers son esprit. Lerrys sentait qu'il avait accroché l'esprit de l'homme, et put tenter de lui inspirer le calme, de gommer la folie qui l'avait conduit à agresser les clients. Le mutant commença à sentir le bloc de haine se ramollir progressivement.
Le type tenait toujours la foule en joue, mais semblait plus calme, moins fébrile.

L'homme en un mouvement de recul en voyant débarquer Lerrys de derrière la plante. Il braqua instantanément son arme sur le jeune mutant, bien que celui-ci ne soit visiblement pas armé.

"Qu'est-ce que tu fous là toi ? Reste où tu es !" beugla-t-il avant de s'éponger le front, qui suait abondament.

"Oh, seigneur, Lerrys !" sanglottant sa mère.

"La ferme, toi !" cria le preneur d'otages en prenant son gilet au niveau de l'épaule pour la secouer brutalement.

Lerrys ne savait plus trop comment réagir. Certes, il avait joué cette partie de manière un peu bancale et avait tenté une approche franchement osée. Cela avait marché... presque. Disons que même si il ne braquait plus le couple noir, il se retrouvait maintenant avec sa mère a moins d'un mètre. Guère rassurant. Que faire, il n'en savait rien, d'autant plus que sa tête commençait a le refaire souffrir. La peur s'ajoutait a ce mélange d'émotions et rendait la scène plutôt explosive.

L'idée du jeune homme n'était plus si géniale que ce qu'il avait pu croire en entreprenant une hypothétique négociation. Il se retrouvait maintenant avec quelque chose a gérer qui le dépassait de beaucoup.

Lerrys se mit légèrement en retrait et regagna un coin plus caché, histoire de présenter moins de surface pour recevoir l'éventuelle balle de ce taré.

- Je reste là! Voyez, je ne bouges plus. S'il vous plait, évitez un massacre.

Il essayait de se montrer le plus rassurant possible, utilisant au mieux son don pour calmer l'homme. Atténuer sa peur, sa colère, sa haine et tout autre sentiment négatif et néfaste. Il était cependant loin d'être sûr de faire le bon choix...

Le pouvoir et le comportement de Lerrys calmèrent le preneur d'otages, qui lâcha le gilet de sa mère. Cette dernière, choquée, s'effondra contre le père de Lerrys, terrorisée.
Le type braquait son arme sur la salle, mais ne prononçait plus aucune parole. Cet acte de haine dans un restaurant n'était motivé par rien en soi-même. Il devait s'agir d'un désaxé, car il n'avait même pas songé à faire connaître les conditions d'une quelconque rançon.

"Des massacres, ça on en voit des massacres dans nos rues ! T'es de quel côté, gamin, au juste ?!" s'écria-t-il en se rencentrant enfin sur les paroles de Lerrys.