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Starlette mutante Empty Starlette mutante

Mar 30 Déc 2008 - 20:06
Des portes claquent, on entend des cris dehors, des cris féminins très aigus et presque effrayants. Un groom court plein d'urgence, de la sueur coulant sur son visage. Un homme de très grande taille qui semble être un garde du corps arrive dans le lobby, suivi par un autre type lui ressemblant.

Derrière ce cortège musclé un jeune homme plus petit s'approche de l'accueil. Il porte des lunettes de soleil bien qu'il fasse sombre dans ce hall luxueux. Il ne sourit pas et s'emmitoufle dans un long manteau noir un peu déchiré qui laisse entrapercevoir un costume très coloré et moulant en dessous. D'ailleurs il est possible de voir des collants rouges entre le bout de son manteau et ses bottines.

Un groom s'approche d'un autre et lui murmure à l'oreille :

"Alors c'est lui ? "
"Oui, c'est Konrad"

Il est très impressionné et pourtant il tremble de peur. Un troisième groom arrive :

"Une deuxième groupie vient de s'évanouir, on doit aider dehors. Ces catins nous font trimer. Je déteste cet enfoiré"


L'enfoiré rentre dans l'ascenseur avec ses deux gorilles. Il n'a toujours pas dit un mot, tout comme ceux qui l'entoure. L'un deux croit comprendre que le boss tremble mais ne dit rien. La porte d'ascenseur s'ouvre au 10ème étage et une dizaine de personnes l'attendent au pas de sa porte. Des individus très classes, très branchés, parfois munis d'appreils photos numériques à format réduit ou de cigarettes. Tout le monde s'engouffre dans la suite deluxe.

Le jeune homme jette son manteau en arrière sans prendre garde à sa retombée, qui finit dans les bras d'une assistante zélée. Un homme gras, moustachu et cintré dans une chemise à fleur matte allègrement les fesses musclées de la star moulée dans un costume rouge flamboyant prolongé par une petite cape. Il tremble un peu plus et un assistant essaye de s'approcher de lui : il le rejette d'un brusque mouvement qui le fait valdinguer anormalement à l'autre bout de la pièce, à moitié conscient. On entend un "S'il te plait Konrad..."


Le jeune homme fait un pas et s'envole. Il lévite, allongé dans les airs, au dessus d'une superbe jeune femme blonde aux formes généreuses qui semble elle aussi exaspérée. Elle est vautrée et l'homme plonge son regard vertical dans son décolleté généreux. Cela le lasse très vite, il sort un paquet de cigarettes et en allume une, maintenant allongé en l'air. Des spasmes lui remontent le long des jambes sont visibles.

"Super prestation Konrad, tu leur en as mis plein la vue, le looping final avec le soulevé de camion et la..."

"Ferme ta gueule, où est l'acide ? Acide, acide, acide, acide, acide..."

Il répétait le mot sans discontinuer, furieux et presque violent. Un vent de panique prit la pièce et le petit homme gras se détacha de la cour pour lui tendre une pilule rose que la star engloutit. Certains ne cachèrent pas leur déprime. On faisait à présent le débriefing pendant que l'autre se défonçait en l'air. Quelle idée de vouloir atteindre le septième ciel alors qu'on pouvait s'y rendre physiquement. La tournée avait commencé depuis trois mois et le spectacle de Konrad avait lieu tous les soirs un peu partout en Russie. Tout était plein à craquer, on parlait de lui partout, l'argent tombait, ils changeaient de ville tous les deux jours en bus. Paradoxalement, Konrad détestait l'avion. Les rumeurs affluaient, on le disait épuisé, fou, violent, défoncé en permanence au speed, nihiliste.

Ce jeune blond adulé et volant tourna la tête lors d'une brutale montée d'adrénaline : par la fenêtre on voyait dehors un gigantesque panneau numérique qui diffusait ses exploits tout en incitant les passants à venir le voir beau et souriant dans son costume en latex de super-héros commercial, voltigeant dans les airs avec une aisance surnaturelle tout en profitant de sa force anormale pour jouer avec divers objets. Au même instant, le photographe lisait à haute voix la critique dithyrambique d'un journal le surnommant "la rockstar mutante". Il sourit.


...


Deux semaines plus tard, la même cour sort du stade national de Vladivostok. Cette fois-ci le héros porte une tenue en or fantasque qui ne fait qu'aggraver les cris hystériques. Il a les yeux injectés de sang mais un sourire jusqu'aux dents. Il signe des autographes qui sont souvent ratés. Il descend les grandes marches d'un air théâtral et plein de confiance : il est un dieu couvert d'un million de regards.

On entend un coup de feu. Les cris sont hystériques mais aussi terrifiés. Tout le monde court dans tous les sens. Un deuxième coup retentit. Un de ses gardes du corps tombe dans une flaque de sang. En un instant il plonge sous un pan de mur pour se protéger. Tout en jetant un coup d'oeil pour essayer d'identifier un ennemi, il voit son deuxième garde du corps se recevoir une balle en pleine tête. Il chute dignement, les deux genoux au sol avant de s'effondrer.

Tout le personnel de sécurité semble exécuté et sa tenue de cuir le gêne : il la dégrafe au niveau du torse. Son cœur bat à tout rompre, emporté par l'effet de la drogue et la peur de mourir. Tout ceci ressemble étrangement à ses hallucinations paranoïaques mais cette fois, l'odeur du sang semble bien réelle.

Ses muscles se tendent, ses sourcils effectuent un étrange mouvement, il identifie les ennemis, renoue avec les expériences du passé. D'un bond il s'envole gracieusement dans les airs, retombe en piqué en évitant une balle. Le tranchant de sa main s'abat sur la nuque du premier tireur et sa tête se décolle. Il atterrit sur une jambe, se repropulse et sombre dans les airs, entre deux bâtiments. Il arrive tout juste à temps pour enfoncer la cage thoracique du deuxième malfrat. Il encaisse un chassé : cela ne serait jamais arrivé auparavant, comme lui faisait remarquer certaines connaissances mutantes il se rouillait. Il fond si rapidement sur le dernier agresseur que celui-ci lâche son fusil et pleure : il a compris. La pointe de pied bottée touche sa trachée d'où provient un hideux petit bruit de craquement. Il fouille hâtivement ses vêtements et découvre le pendentif caractéristiques du Front russe anti-mutant.

Une vague de tristesse l'envahit, il rejaillit en l'air, fuit la scène du triple meurtre par légitime défense et vole jusqu'à un squat non loin. Il devra être rentré pour huit heures ce soir, pour son spectacle, "Konrad le prodige mutant".
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