Passe temps

En ce jour d'orage Jeckel déambulait dans les couloirs de l'institut sans autre but que de se balader à l'abri des gouttes.
Il avait finalement fini par croiser Nathan et lui remettre le trèfle confié par Ivy, il n'avait donc plus d'obligation et découvrait pièce par pièce l'immensité du bâtiment en poussant des grands Ah et Oh.
En passant devant l'amphithéâtre, il s'arrêta à la vu de visage connus, dont celui de Gilles dans lequel un bille de plastique était en train de s'incruster, sans que celui-ci ne semble s'en apercevoir. La bille, mut par une force surhumaine, finit par tomber au sol sous le regard de l'adolescent qui prit alors conscience de sa présence.
A ses côtés se tenait un jeune homme que Jeckel avait croisé le jour de son arrivée sur le terrain de sport, il n'avait pas l'air étonné par l'action et conversait calmement.
Cette scène bien étrange laissa Jeckel songeur quelques instants, puis il se décida à approcher.

"Salut les gars.
Je rouille un peu, je peux vous tenir compagnie ?"

Tout en les saluant, Jeckel fut pris d'une petite angoisse, ces mecs avaient l'air méchamment balèze et sûr d'eux, et les passages à tabac chez les mutants ne devaient pas avoir grand chose à voir avec les roustes subits dans son bidonville.
Face à cette possibilité, sa bêtise crasse habituel aurait intérêt à être maîtrisée.
Ils n'avaient pas l'air agressif non plus mais ayant vu plus de choses bizarres en quelques jours que durant sa vie entière, Jeckel se mit sur ses gardes, donnant un peu l'impression derrière un sourire de pouvoir partir en courant d'un instant à l'autre.

Jeckel se détendit en voyant l'accueil que lui réservaient les deux adolescents, en pleine introspection et donc apparemment bien loin de vouloir lui faire subir un bizutage.
Grégory l'invita à entrer d'une voix calme, extrêmement posée, comme s'il vérifiais la structure de ses phrases tout en les prononçant. Plus expansif, Gilles lui rappela son allure de déterré lors de leur premier rencontre, Jeckel apprécia fortement qu'on lui trouve si ce n'est une bonne mine, au moins une meilleur mine, ce qui était un compliment dont sa sale gueule orgueilleuse était friande.
Il s'assit sur une table près d'eux et, tout content de ne pas s'être fait virer prit part à la conversation :

"Oh ? Tu l'as vu c't'émission de taré ? Ça rendait aussi mal à la télé qu'en vrai ?" tout en parlant il réalisa qu'il n'avait pas encore pris de nouvelles de tous les intervenants. Il se demanda si Damien, un des candidats éliminé par la production, s'en était tiré sain et sauf...

"Mais, non, pour répondre à vos question, pas de problème avec mon pouvoir, vu que... ben j'essaye de pas trop m'en servir. Il parait que je contrôle les sons, mais de mon point de vue, juste je met des claques quand je gueule. Pas très discret ni très utile dans la vie de tous les jours, quoi. Mais au moins si je l'oubli, c'est pas comme Mina ou d'autre, j'suis comme les... vrais humains ?", il grimaça en prononçant ces derniers mots, il se sentait toujours plus humain que mutant et n'intégrait pas exactement la séparation entre les deux.

"Et vous les gars, c'est quoi les prouesses que votre code génétique foireux vous a fourgé ?" ayant peur de choquer ses camarades sur le reste de leur code, gène X excepté, il ajouta "En dehors du fait de vous avoir calibrer un sacré style bien sûr ! Faite gaffe, y'a un concurrent de plus sur la liste !" dit-il, souriant largement, persuadé que malgré tous les efforts du monde son style à lui resterait inimitable (Dieu nous en préserve).

La discutions allait bon train et Jeckel avait l’air moins farouche. Il y a quelques instant, Gilles se demandait même si l'asiatique n’allait simplement pas dire bonjour et détaler le plus vite possible. Lorsqu’on lui demanda s’il avait l’émission anti-mutant le canadien sourit. Malheureusement oui, ils passaient tellement de temps devant la télé qu’il pouvait faire un étiquetage des programmes du plus mauvais au plus culte.

« Ouai j’ai vu cette émission sur le net, un site anti-mutant. D’ailleurs je passe trop de temps derrière un écran… un vielle habitude lorsque j’étais cloitrer chez moi. »

Ensuite Jeckel partagea avec le groupe ses problèmes.

*Genre… on dirait une veille réunion d’alcoolique anonyme. Bonjour Jeckel. Viens te libérer du poids de tes actes… ça fout la trouille.*

Le canadien se voulut rassurant en répondant à leur nouveau camarade :

« Bah au moins tu nous fous pas une claque à chaque fois que tu parles. Tu vois c’est un peu ça le truc foireux de ma génétique. J’ai une super force. Waaaaah trop cool, oui mais ce serait encore mieux si elle n’était activé TOUT le temps. »

Le communicateur de Jeckel sonna le prévenant l’arriver d’un message, ce qui surpris Gilles :

« Tiens à peine arriver ici que t’as déjà des rencarts ? Tu es plein de ressource ! »


(hrp : désoler pour le temps de réponse un peu long)

L'échange était plutôt agréable et Jeckel s'était complètement détendu, ayant posé les pieds sur le dossier d'une chaise, toujours assis sur une table, et se décontractant les jambes.
Grégory expliqua ses capacités et il devint évident que les éclairs ne devaient en effet pas le rassurer.

"Tu vole ? Whoua le kif ! Du coup je capte le souci avec les orages... Me dit pas que t'as déjà mangé du 200 000 volt ? Ça doit pas mal chatouiller..." dit Jeckel, jetant un regard à l'extérieur et imaginant voir la perturbations comme la voyait l'homme volant lors de l'utilisation de son pouvoir. Un peu comme si lui même essayait de hurler au fond d'une piscine, les réactions risquaient d'être imprévisibles.

Gilles quand à lui avait vu l'émission Mute Ants, mais Jeckel ne rebondit pas sur cette information pour lui demander les détails qui lui manquaient, décidé à se replonger dans cette histoire uniquement au moment opportun.
Ceci étant, il pu faire le point sur les souci du jeune bourrin, et comprit les raisons de son embarras... Une super force incontrôlable... quelle angoisse ! Il avait eu par le passé une certaine inhibition de ses capacités, l'empêchant de s'en servir selon son bon vouloir, mais il n'avait jamais eu de déclenchement involontaire... alors en permanence.

"Ça veut dire que tu peut pas toucher une meuf sans la casser en deux ? Dur... très dur..."

Jeckel réfléchi un instant, hésita à offrir le fruit de ses réflexions sur le cassage de meuf en deux, puis se reprit :

"En même temps, ça te condamne à 100% te faire dorloter... ça doit pas être mal non plus. D'ailleurs, ça a marché avec la goth' de l'aut' jour ?"

La discussion fut interrompue par un appel sur le communicateur, qui fit une nouvelle fois sursauter le sonokinésiste. Il reconnu la voix de Kanata, ne trouva pas le bouton pour répondre, mais hurla malgré tout devant l'appareil :

"Oh, t'es toujours là ? Ça dérange si j'amène du monde ?"

Étonné de ne pas avoir de réponse, il colla à plusieurs reprise le communicateur près de son oreille, l'observa en détail sans tenir compte du probable regard circonspect de ses camarades et finit, découragé, par le ranger dans sa poche.

"C'est le collègue de galère. Kanata." dit Jeckel pour répondre à Gilles.
"J'ai pas eu trop le temps de lui faire la causette depuis notre arrivée, je vais aller voir c'qui veut. J'vous le présente ? Il est plutôt cool."

Jeckel attendit les réponses et fit signe de le suivre vers la chambre qu'il partageait avec Kanata, espérant fortement qu'ils le suivraient, et que cette rencontre avec un individu peu banal changerait les idées de ceux pour qui sa sympathie commençait à atteindre un niveau appréciable (il lui en fallait peu).

Chambre de Jeckel et Kanata

Grégory leva un sourcil intéressé lorsque Jeckel fit part de sa remarque sur la relation entre la peur des orages de Greg et son pouvoir. Le guadeloupéen d'origine n'avait jamais volé par ce temps mais imaginait à présent sans problèmes les difficultés et dangers inhérents. Et il se surpris à imaginer que peut-être existait-il un lien entre sa crainte de la foudre et son habilité. Peut-être qu'au fond de lui cette crainte répondait pour l'instant aux faiblesses de ses capacités. Comme un instinct animal de conservation en quelques sortes...

*Très intéressant! Je n'avais jamais pensé en ces termes... Il faudrait se pencher sur cet axe de recherche un jour. Je vais me documenter, quelqu'un l'a surement déjà fait...*

C'est une voix venant d'une petite boîte métallique qui ramena Greg à la réalité, tout perdu dans ses pensées qu'il était. Il sursauta lui aussi légèrement lorsque Kanata se fit entendre dans le communicateur. Le métis avait encore du mal à se faire à cet outil au combien utile en mission. Jeckel les invitait Gilles et lui dans sa chambre avec Kanata. Greg jeta un rapide coup d'oeil au Captain Canada, puis regarda le vide un instant lorsqu'un autre violent coup de tonnerre résonna:

"Bah... Tant pis pour... la lecture. I'm in!"

Greg se leva en se détendant le dos, attrapa son bouquin et enquilla le pas à Jeckel. Il tourna la tête vers Gilles:

"Tu viens? Ca va être sympa."

Chambre de Jeckel et Kanata