[10/04/2109]Cigarette en solitaire

Depuis quand s'était-elle mise à fumer? Cela faisait quelques mois maintenant. Mais, en général, elle ne le faisait que lorsqu'elle était seule. Comme si elle avait peur du jugement que les autres pourraient émettre sur elle. Ne pas décevoir. C'était bien une chose qui ne changeait pas avec Amy. Cette crainte qu'elle avait de lire de la déception dans le regard des gens. Pourtant, elle n'était plus la douce Amy qu'elle était avant. La jeune femme avait commencé à s'endurcir. Déjà très secrète sur elle-même, elle l'était plus encore. Cela ne l'empêchait pas, pourtant, d'entretenir de bons rapports avec son entourage.

La jeune femme était bien décidée à profiter de cette journée de printemps, à l'extérieur. Vêtue d'une longue jupe en jean qui lui arrivait aux pieds, des bottes à talons, un petit pull gris, rien ne laissait présager son revirement au niveau de ses sentiments. Tout passe, tout casse. Etait-elle seulement encore humaine? Ou n'était-elle plus que mutante? Parfois, elle se posait la question. Mais bon. Les mois écoulés, pourtant, avaient été calmes. Mais l'approche du jugement et du départ à Genosha la poussaient à se poser encore et toujours des questions.

Et puis... Le premier semestre avait été ric rac. Elle avait eu des matières à repasser. Il faut dire aussi que tout ce qu'il s'était passé n'avait pas été des plus simples à vivre. La jeune femme, assise sur le perron, tira une bouffée de sa cigarette. Dans une petite housse passée à son cou, son portable, son communicateur et un chewing-gum attendaient qu'elle ait besoin d'eux. Le second semestre serait décisif pour son passage en deuxième année, et elle était bien déterminée à les valider. Aussi prit-elle dans sa main libre le manuel qu'elle avait descendu de sa chambre, s'adossant à la colonne derrière elle, et commença-t-elle à réviser ses cours. Elle aurait bientôt une interro en TD. Ce n'était pas le moment de se planter.

Si Amy s'attendait à pouvoir fumer sa clope et à réviser tranquillement sa psycho, c'était sans compter le télépathe mâle de l'institut qui ne tarda pas à faire son apparition, tirant la fille de diplomate de ses pensées en lui prenant la cigarette des mains. La jeune femme fronça les sourcils, levant la tête vers lui alors qu'il lui faisait un petit commentaire.

"Je sais. Mais ça destresse." fit-elle d'un ton calme et posé.

Ce ton que tout le monde lui avait toujours connu et qui était loin de correspondre à son état d'esprit. Elle ne put retenir un sourire en le voyant tirer une latte de l'objet du délit avant de grimacer et de la lui rendre.

"J'ai commencé il n'y a pas si longtemps que ça... Pendant les partiels cet hiver." expliqua-t-elle en grimaçant.

Elle n'avait pas envie de s'étendre sur le pourquoi du comment. Sur les partiels qu'elle avait plus ou moins ratés, sur sa mère qui n'appréciait pas Robin, sur son père qui défendait les choix de sa fille, sur sa mère qui avait compris qu'elle était mutante, parce que Robin l'était et que cela se voyait à son regard, et que si Amy sortait avec un mutant, c'était qu'elle en était une aussi... Bref. Sa mère qu'elle avait maintenu dans l'ignorance toutes ces années avait enfin compris la vérité, ce qui n'était pas réellement une bonne chose. Non, Amy n'avait pas envie de s'expliquer sur le pourquoi elle avait commencé, même si elle savait parfaitement qu'il suffirait au télépathe d'une légère incursion dans son esprit pour le découvrir, ces pensées affleurant rapidement à son esprit du fait de la conversation. Elle préférait penser et parler d'autre chose.

"C'est pour quoi, ces deux ordis? Quant aux autres, ils finiront bien par savoir que je fume, de toute façon... Ca ne restera pas secret très longtemps encore... Et qui sait. Ca serait peut-être mieux comme ça..."

Elle haussa les épaules. Dans le fond, elle s'en foutait un peu. Elle se "cachait", entre guillemets surtout pour ne pas qu'on lui pose de questions et pour ne pas enfumer les autres. Mais après... Elle avait déjà fumé occasionnellement auparavant. Maintenant, c'était juste régulier. Ce qui ne l'empêchait pas de rester sportive. Très sportive, comme avant. Son jogging tous les matins, ses entraînements pour le combat, même si elle le faisait seule, natation quand elle pouvait... Elle s'était promis une chose. Que fumer ne réduirait pas son endurance, et elle tenait à respecter ce principe. De toute façon, elle ne fumait pas non plus comme un pompier. 4 à 6 clopes par jour, c'était le grand maximum. Et la première, c'était à la pause du matin à la fac. Pas avant.

Mais Alex ne tarda pas à enchainer sur Georgia qui semblait être un peu dans le même état d'esprit qu'elle. Cette fois, Amy laissa échapper un petit rire.

"J'adore Georgia. Mais son esprit a toujours été en fouillis. Je pense qu'il ne faut pas chercher à le mettre en ordre, ça serait plus problématique qu'autre chose. Quant à moi..."

Elle ne termina pas sa phrase. Elle ne la terminerait pas, de toute façon. Simplement, un geste vague de la main pour expliquer que c'était trop compliqué et qu'il ne valait mieux pas y penser, puis elle ajouta:

"Mais je peux comprendre que ton pouvoir soit parfois une gêne pour toi. D'un autre côté, tu sais ce que les gens pensent de toi, s'ils sont sincères, comme ça..."

Essayer de distinguer le positif du négatif. C'était bien là une tâche ardue. Pas toujours simple avec un pouvoir comme la télépathie. Non, vraiment, ça ne devait pas aider dans les relations de tous les jours. Parvenait-il à se retenir de lire dans ses pensées en cet instant, par exemple? Ou bien, bien à part lui entendait-il les questions qu'elle se posaient? Quoiqu'il en soit, il ne tarda pas à reprendre la parole. Amy l'avait rarement vu aussi bavard en sa présence, même si elle se serait bien passée de la révélation qu'il lui fit. Non pas qu'il n'était pas à son goût. Si elle n'avait été avec Robin, elle n'aurait pas été insensible aux charmes du jeune homme, bien au contraire. Et, alors même qu'elle était en couple, elle ne l'était pas. D'autant que c'était le genre "gendre idéal", venant d'une bonne famille, bien sous tous rapports, avec une mutation non visible. Sa mère serait enchantée. Comble de la bienséance pour sa mère, il était blanc. Bref. Le regard d'Amy se voilà et elle tira une nouvelle bouffée sur sa cigarette, sans trop savoir comment réagir.

Là encore, elle ne put s'empêcher de se demander s'il avait lu ses pensées et elle reporta sur Alex ses prunelles brunes qu'elle avait détournées.

"Rassure-moi... Tu ne lis pas mes pensées, en cet instant?"

Les partiels lui manquaient? D'un certain côté, elle pouvait comprendre. Même si c'était particulièrement stressant. La jeune femme tira la dernière bouffée de sa cigarette alors qu'il parlait de la NYCU. AMy fronça les sourcils en éteignant son mégot qu'elle posa à ses côtés pour l'instant, faute de mieux.

"Tu n'as pas pu t'inscrire ici? Comment ça se fait? On est plusieurs à être inscrits à l'université d'ici... Rob en journalisme, par exemple, moi en psycho, et nous ne sommes pas les seuls! Et puis hey! Avec ton pouvoir, tu pourrais convaincre le doyen de la fac de t'inscrire!" fit-elle avec un clin d'oeil.

C'était vrai qu'à la fac, ils restaient souvent entre eux lorsque leurs horaires le leur permettaient. En même temps, ils se côtoyaient tous les jours, pratiquement vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Cela n'empêchait pas Amy de sympathiser un peu avec ses camarades de cours, mais malgré tout, elle ne se liait pas tant que ça à eux. Elle préférait, d'une certaine façon, garder ses distances. Ils n'étaient qu'humains. Comment réagiraient-ils s'ils apprenaient qu'elle était mutante? Elle préférait ne pas le savoir. D'ailleurs, après un temps de silence, Alex répondit à sa question sur les ordinateurs. Le plus récent d'abord, puis le plus ancien.

"Des photos de toi? Vas-y! Montre!"

Quant au reste, ses connaissances en informatique étaient celles du tout un chacun. Elle fit quand même quelques propositions:

"Il démarre? Sinon, tu peux peut-être sortir le disque dur pour le brancher en disque dur interne sur ton ordi? J'ai un disque dur dans ma chambre. Je pourrai t'en passer le boîtier, s'ils sont compatibles..."

Le sujet changea à nouveau, sur ce que les gens pensaient d'Alex. Amy ne put que hocher la tête. Si elle-même ne pouvait pas lire les pensées, elle n'en avait pas moins le même problème que le jeune homme, préférant se concentrer sur les autres que sur elle-même. C'était pour cela, entre autre, qu'elle faisait psycho. Pour s'occuper des autres et s'oublier elle-même.

"Je suis comme toi, sur ce point. M'occuper des autres m'aide. Mais je ne me confie pas, je ne parle pas de ce qui ne va pas quand quelque chose ne va pas. Je n'aime pas montrer que je peux faillir. Je n'aime pas parler de moi."

La séance de confidence sur comment elle pouvait se comporter face aux problèmes des autres, et des siens, était visiblement achevée, et par une phrase sans équivoque qui plus était. D'ailleurs, fort heureusement pour Amy, il lui révéla que non, il ne lisait pas dans ses pensées. Devait-elle le croire? Visiblement oui, puisqu'il ne tarda pas à lui expliquer ce qu'il se passait lorsqu'il faisait appel à son pouvoir.

"Merci pour ta franchise. Rien ne t'y obligeait" répondit-elle lorsqu'il eut son hésitation avant de conclure.

Le parangon. Sombre passage de sa vie. Le seul moment où elle avait craqué en public depuis longtemps. Le moment qui avait précipité un grand changement dans sa vie, six mois plus tôt. Elle s'était retrouvée en couple. Elle l'était toujours, d'ailleurs, même si, parfois, elle regrettait sa solitude. Ce n'était pas toujours simple. Mais ce n'était pas pour ça que ce jour-là avait été dur. Amy se revoyait encore parcourir les rangées de cadavres pour voir s'il y avait eu des survivants. Mais il était vrai que ça avait dû être dur pour Alex de contrôler cette chose, qui était en fait un être humain pour le pousser à tuer. Amy posa une main sur celle d'Alex, en geste de soutien, de réconfort.

"Marianne?"

Amarenna n'en connaissait qu'une seule, de Marianne, qu'elle avait rencontré sur le campus de la NYCU. Une fille ailée et particulièrement débile. M'enfin. Elle-même ne l'avait pas réellement affrontée. C'était plutôt les autres, les anciens Lex qui lui avait fait face. Laura, Ivy et Matt. Aujourd'hui, il n'en restait plus un seul à l'Academy. Ils étaient tous partis. A l'époque, cela ne faisait que quelques semaines qu'Amarenna était à l'institut. Aujourd'hui, ça faisait plus d'un an. Un an que sa vie entière avait changé. Complètement changé. Et pas uniquement en bien. La jeune femme poussa un soupir.

Elle ne regardait pas l'écran de l'ordinateur qu'Alexander était entrain d'allumer. Son regard était porté au loin. Ce ne fut que lorsque le fond d'écran dévoilà un petit "film" que le regarde de la franco-américaine se porta sur celui-ci.

"Jolies filles..." dit-elle d'une voix neutre alors qu'il commendait à l'ordinateur d'ouvrir le dossier photo.

A nouveau, elle détourna le regard. Cela ne la regardait pas forcément. Et même pas du tout. Il avait beau s'être installé à côté d'elle, elle ne lui en gardait pas moins droit à sa vie privée, même si elle pouvait aisément voir l'écran de l'ordinateur. Elle-même songea qu'ils avaient deux façon différentes d'utiliser leurs ordinateurs. Elle, elle était plutôt vieux jeu à ce niveau là. Dans le sens où elle préférait toucher l'écran tactile plutôt que de commander à voix haute à l'ordinateur. Peut-être parce que c'était plus discret. Sans doute, même. Oui, elle était renfermée sur elle-même à ce point là. A aimer le silence, voire même, parfois, la solitude. Etre en compagnie d'autres personnes ne lui déplaisait pas, mais elle aimait conserver son jardin secret. C'était important pour elle.

Alex commençait à parler de franchise lorsqu'elle posa sa main sur la sienne. Il s'intérrompit aussitôt. Après un temps de silence les yeux clos, il se contenta de la remercier avant d'enlever sa main. La jeune femme hocha la tête. Rapidement, il lui tendit son ordinateur pour qu'elle puisse regarder la photo qu'il avait affichée dessus. Un petit garçon qui lui ressemblait beaucoup. Amy fit mine de réfléchir un instant avant de répondre:

"Hum.... Je dirais toi... Mais c'est que tu étais mignon à cet âge-là, dis donc!"

Etonnamment, c'était bel et bien de la même Marianne qu'il s'agissait. C'était réellement surprenant. Qu'avait-elle donc contre les personnes sans pouvoirs? Il fallait croire qu'elle avait été complètement, totalement, intégralement lobotomisée. Si elle était passée par l'institut, elle aurait dû apprendre le respect de l'être humain sans pouvoirs. Pourtant, il semblait que ce n'était pas le cas. La jeune femme secoua la tête avant de dire simplement:

"Je l'ai rencontré, également. Enfin... Les anciens Lex, nous l'avons rencontrée. Esther nous avait demandé d'aller récupérer des documents dans le bureau de feu Robert Bateson, à l'université. On était séparés en deux groupes. Tu ne les as pas connus, je crois. Ah si! Je crois que Juan était encore là quand tu es arrivé. Hjördis est morte sur Genosha l'année dernière, Math, Laura et Ivy sont partis."

Un petit sourire désabusé se dessina sur ses lèvres. Oui, elle était la dernière de l'ancienne mouture de l'équipe. Son regard se perdit un instant dans le vague en repensant à Hjördis. L'islandaise avait toujours été un peu brute de décoffrage, mais Amy l'aimait bien. La jeune fille était sympathique quand on arrivait à passer son rempart de froid. Elle préparait de bons petits plats, d'ailleurs, même si Amy n'y avait jamais trop touché, étant pratiquement végétarienne - pratiquement, car elle mangeait tout de même un peu de poisson... Mias bon. Là n'était pas le sujet. Le sujet, c'étaient les photos. Et les deux filles sur le fond d'écran animé étaient les soeurs d'Alex. Amy esquissa un sourire.

"Je sais ce que c'est, les petits chieurs. J'ai un petit frère aussi. Il s'appelle Micha. Et maintenant, il a 11 ans. Et il me manque. Tous les soirs, je me connecte pour parler avec lui via la web cam. Etonnamment, Mark, mon jumeau ne me manque pas autant. Il faut dire qu'on n'a pas la même relation, lui et moi."

Oui, aussi surprenant que cela pouvait être, elle n'avait pas de relation fusionnelle avec son frère jumeau, alors que c'était pratiquement le cas avec Micha. Peut-être que le fait que Mark soit très proche de leur mère et elle de leur père y était-il pour quelque chose. Elle aurait été bien incapable de le dire. Micha et son père savaient qu'elle était mutante. Micha adorait ça. Son père ne l'avait pas rejetée. Sa mère avait des doutes, à présent, maintenant qu'elle avait vu les yeux de Robin. Mark l'ignorait peut-être encore. Mais elle espérait que sa mère ne l'avait pas découvert. Elle n'avait pas besoin du rejet de celle-ci en plus de celui de l'ancien sénateur - son propre grand-père maternel.

Mieux valait en revenir aux photos et à la petite taquinerie qu'elle avait lâchée à l'adresse d'Alex qui changea d'ailleurs de photo.

"Je n'ai pas dit que tu étais moche maintenant, hein..." fit-elle en le poussant gentiment du coude.

Il était vrai, en tout cas, que le look sur la nouvelle photo changeait beaucoup. Elle ne put s'empêcher de prendre son menton dans sa main, pensive, essayant d'imaginer Alex avec les cheveux longs. Mais ce n'était rien à côté de la troisième photo qu'il lui montra. Si la première était spéciale au niveau du look en lui-même, la dernière était carrément... Carrément... Ridicule, c'était le cas de le dire. Son commentaire était tout à fait à propos. Et d'ailleurs, Amy ne put s'empêcher de rire aux dépens du jeune homme à ses côtés.

"Clairement... Entre cette photo... Et celle où tu es gamin... Il n'y a pas photo... Tu étais plus mignon... Avant... Ce côté fille... Ca ne te va... Pas, mais alors... Pas du tout..."

Depuis combien de temps n'avait-elle pas ri comme ça? Bonne question. En tout cas, c'était bel et bien un rire qui sortait du coeur. Oh... Elle aussi, elle avait des photos dossier, sur son ordinateur. Qu'il se rassure. Amarenna, une fois calmée, reprit la parole.

"Je te rassure, tu es bien mieux aujourd'hui. Et je te rassure encore, moi aussi, j'ai des photos dossier sur mon ordinateur. Si tu veux les voir, tu me dis..."

Ouais, bon. Ce n'était pas forcément une bonne idée. Mais au moins, ça les remettrai sur un pied d'égalité, d'autant qu'elle s'était carrément moquée de de lui quelques secondes auparavant...

En fait, c'était plus compliqué que ça, par rapport à Micha. Beaucoup plus compliqué que ça. Le regard de la jeune femme s'assombrit, avant qu'elle ne lâche brusquement:

"J'ai été séparée de lui pendant 4 ans. Mon pouvoir s'est déclenché quand je l'ai vu pleurer. Sa nourrice l'avait giflé parce qu'à 4 ans, il refusait de parler à quelqu'un d'autre que moi. Mon sang n'a fait qu'un tour, et mes pouvoirs se sont déclarés. J'ai failli étrangler cette femme avec mes ombres. Bien qu'elles ne soient pas solides, elle a suffoqué. Mon père a eu peur et il m'a renvoyé à Washington chez mes grands parents maternels. Nous vivions en Chine, à l'époque. Rapidement, mes grands parents ont compris ce que j'étais. Et au bout de quelques jours, ils m'ont envoyée en internat. Je n'en suis pas ressortie jusqu'à il y a 3 ans, quand mon père a compris que je vivais mal cette situation. Ils sont revenus à Washington."

Quatre ans. Elle avait perdu quatre longues années avec son petit frère. Des années qui ne seraient jamais retrouvées. D'une certaine façon, vivre à l'institut, c'était pareil. Ce qu'elle se garda bien de préciser, c'était qu'elle avait failli plonger dans l'anorexie. Qu'à une période, elle avait failli tenter de se suicider, aussi. Ses grands-parents ne supportaient pas de la voir. C'était réciproque. Les vacances? C'était juste l'horreur. Autant les week ends elle avait la possibilité de rester à l'internat, autant les vacances ce n'était pas possible. Alors elle était envoyée dans des camps de vacances, ou autre, pour être maintenue éloignée de l'ancien sénateur et de sa femme. Comme si la mutanité était une chose contagieuse. A l'époque, elle redoublait d'audace pour vivre à 100 à l'heure. Les sports extrêmes étaient, et sont toujours, son crédo.

Elle se força à se reconcentrer sur les paroles d'Alex. Se plonger dans ses souvenirs n'était pas une bonne idée. Surtout en cet instant.

"Tu ne le sauras pas si tu ne les contactes pas. Mais je sais que pour Micha, je suis son "héroïne". Peut-être serais-tu un "héros" pour tes soeurs?"

Pourtant, le coeur n'y était pas. Il n'y était plus. Sa voix était plus terne, moins joyeuse. Il fallait, à tout prix, qu'elle pense à autre chose. De nouveau, elle fixa son regard sur l'écran de l'ordinateur. C'était plus simple. Moins douloureux. Même si elle appréhendait déjà le fait qu'il rebondisse sur sa proposition pour les photos. Certaines ne seraient pas très réjouissantes pour elle, ne serait-ce que pour la période à laquelle elle avait vécu ces situations. Le rire d'Alex, pour autant, lui fit du bien, à nouveau, la soulageant d'une partie du poids de ses souvenirs. Elle s'autorisa un sourire, alors que son regard s'éclaircissait à nouveau. La photo suivante montrait Alex en tenue de cowboy. C'était, déjà, nettement moins ridicule.

"Sympa le stetson... Tu l'as toujours? Je pourrai l'essayer?" demanda-t-elle, se forçant malgré tout à plaisanter.

La bonne humeur reviendrait. Elle n'en doutait pas. Elle y arriverait, même s'il confirmait vouloir voir les photos à présent. Et pour ça, le plus tôt serait le mieux. La jeune femme s'apprêtait à lui proposer d'y aller tout de suite quand une jeune fille fit son apparition, bientôt suivie de Cerebra et de deux jeunes hommes qui semblaient déjà se connaître.

La jeune fille semblait timide. Peut-être se demandait-elle si elle était à sa place ici? Sans doute, même. A moins que ce ne soit son origine, britanique à n'en pas douter. Amarenna lui adressa un sourire rassurant, réconfortant. Mais elle n'eut pas le temps de répondre que, déjà, l'un des deux garçons, visiblement un latino commençait son show. Amy rqua un sourcil surpris avant de penser, à l'adresse d'Alex, dont elle pinça légèrement la main pour attirer son attention:

*Il parle de quoi, par Novela?*

Bon. En toute logique, il devait s'agir de film. Sûrement, même. Mais elle préférait être sûre. Le dernier du trio prit alors la parole, avec un accent germin relativement prononcé. A nouveau, Amarenna haussa un sourcil en entendant le surnom du Latino. Bien que franco-américaine, elle connaissait un peu l'histoire de Rapunzel. L'ombre d'un sourire apparut sur son visage alors qu'elle attendait qu'il termine pour les présenter, Alex et elle.

"Bonjour, bienvenus à l'Institut. Je m'appelle Amy et voici Alex. Solveig? Je te rassure, nous avons tous été nouveaux un jour."

Elle ne rebondit pas sur la question de la dangerosité. Certes, le fameux Michaël parlait de son copain Pablo. Mais ici, ils étaient tous dangereux. Tous étaient responsable de la mort d'une ou deux personnes au moins. La jeune femme serra les poings avant de répondre à Michaël:

"Ca doit pouvoir se trouver. Tu verras, ici, c'est moderne et confortable, bien que cela puisse paraître un peu vieux d'extérieur. On a une gigantesque cuisine, des sous sols à couper le souffle. Le tout, ça va être pour les chambres. Vous n'avez qu'à poser vos affaires dans la mienne pour l'instant. Michaël, tu pourras aller aux toilettes et te doucher, si tu veux. Quand vous aurez vu le professeur Zachary, vous récupérerez tout ça pour les mettre au bon endroit. Vous en pensez quoi? Ca vous convient?"

Comme ça, ça leur ferait une petite visite au passage et Amy pourrait récupérer son ordi pour, par la suite, montrer les photos à Alex. A moins que le directeur n'arrive sur ces entrefaites pour s'occuper des trois nouveaux? Cerebra l'avait sans doute prévenu de l'arrivée des nouveaux, non? Elle ouvrit quoiqu'il en soit sa housse pour prendre un chewing-gum et en proposa un à Alex, ainsi qu'aux trois jeunes gens en face d'eux.

[ chambre d'Amy et Jolène]