[10 Avril] Avoir les crocs

La conversation prenait une tournure que l'inuit n'appréciait pas du tout. Josh l'accusait d'avoir déclenché tout ça.

" Je me lamente pas sur mon sort, t'es gonflé de me dire ça. Je réfléchissais juste à la situation en mangeant ! Je voulais pas en parler moi à la base, alors si c'est pour recevoir des reproches la prochaine fois je dirai rien ! Je vous ai juste répondu... "

Lui il était venu pour demander à Charis s'il pourrait dormir dans sa chambre. Il n'avait pas prévu de devoir s'expliquer et le c'était davantage pour une raison sociale, parce qu'ils étaient une équipe et pour se rapprocher de Josh, qu'il avait accepté de répondre. Mais l'effet résultant était l'inverse.

Deux solutions. Aller lui parler ou se taire. Kalalli ne savait pas quoi faire, mais il n'avait certainement pas envie qu'on aille parler à sa place. Charis était pour discuter mais le garçon se voyait mal aborder le sujet aussi vite avec le Yun.

" J'ai pas le choix de toute façon. On va bien finir par se recroiser dans l'Institut ou alors dans la chambre. C'est ma chambre, alors je vais pas déménager. J'aviserai quand on se reverra. "

Totalement en mode boudeur suite aux remarques, Kala se ferma et se mit à lire l'étiquette de son paquet de biscuit en grignotant de minuscules bouchées de son gâteau. Il avait rien demandé lui. Il voulait juste danser tranquillement...

Bien sûr que Kalalli n'appréciait pas qu'on lui fasse la leçon. Charis le comprenait parfaitement. En plus, elle l'avait d'une certaine manière forcé à parler et le pauvre Inuit allait s'en mordre les doigts pendant un bon moment. Peut-être même qu'il lui en voudrait franchement. Mais en même temps, s'il ne fallait que se contenter de faux-semblants entre amis, ça n'irait pas du tout sur le long terme. Charis préférait encore qu'il la déteste, mais elle aura été honnête et ses paroles n'étaient que le résultat de l'inquiétude qu'elle pouvait ressentir face à Kalalli. Combien de fois il avait redouté une menace? Autant qu'elle. Mais lui était plus jeune, et avait donc dû encaisser plus durement les choses. Pourtant, il ne s'énervait jamais au point de chercher à faire du mal à un semblable. Pour atteindre ce point, il devait en avoir gros sur la patate. C'était donc normal de lui dire d'agir, non? Des amis, les vrais s'entend, ne se contentaient pas de dire des choses qui faisaient plaisir à entendre. Les vrais amis devaient parfois aussi se pousser les uns les autres. C'était encore l'un des meilleurs moyens d'aller de l'avant.

Mais il y avait quand même encore une différence entre pousser quelqu'un à avancer et pousser quelqu'un dans ses retranchements. Alors quand elle vit Josh bondir sur la table, elle se tendit nerveusement. Non pas qu'elle pensait Josh capable de faire du mal à Kalalli. En fait, ce qu'elle redoutait, c'était que l'inuit, sur la défensive, se renferme d'avantage et devienne hermétique à n'importe quelle option. Déjà qu'ils se mêlaient de ses histoire sans vraiment lui demander son avis...

"Heu... Josh..."

Mais elle n'alla pas plus loin. Après tout, ce que disait le lycan était vrai. Et Kal pourrait parfaitement comprendre ça. Elle resta néanmoins à l'affut de la moindre réaction de l'inuit. C'était pile ou face. Ou il accepterait ce point de vue, ou il leur reprocherait leur implication excessive et quitterait la cuisine en courant. En tout les cas, elle serait prête à le suivre si la seconde possibilité devenait la bonne.

Concentré sur son paquet de biscuits, Kalalli entendit Josh s'approcher de la table sans y porter de réelle attention. Après tout, il boudait. Jusqu'au moment où le lycan bondit sur la table. L'Inuit sursauta sans pour autant s'inquiéter. La journée était tellement mauvaise qu'il pouvait bien se faire attaquer par Josh qu'il n'aurait pas vraiment été surpris, des fois qu'il perde son contrôle.

Le loup l'observa dans les yeux en battant de la queue. Il voulait se faire imposant probablement, au dessus de lui et menaçant. Il reprit le cours de la discussion que le garçon essayait d'arrêter en montrant son mécontentement de la situation. Pourtant Josh ne semblait pas voulait en rester là, lui. Alors il lui faisait encore la morale, en répétant encore qu'il fallait aller parler au Yun, en répétant que Kalalli avait la trouille, des fois qu'il se le soit pas encore assez rentré dans le crâne.

Exaspéré, Razgriz lâcha en fixant l'Oryx :

" Tu as devant toi un garçon qui en a marre que tu le traites de poule mouillée trois fois par phrases et qu'on se mêle de ce qui regarde personne d'autre que lui. Tu me fais pas peur. "

Il se releva, énervé comme il ne l'avait pas été depuis son écartement des Kozax, et approcha son visage de celui de Josh :

" Je sais pas ce que tu veux faire en essayant de m'intimider. Mais me cherche pas. Je peux t'écraser en une seconde. Je t'ai rien demandé. Lâche moi. "

C'était le monde à l'envers aujourd'hui. Il était tellement énervé qu'il en était clairement agressif, voire provocateur. Chose encore plus rare, l'Inuit venait d'être orgueilleux, preuve qu'il avait prit confiance en son pouvoir. Il devait probablement ressembler à ces oiseaux ou poissons qui se gonflent pour impressionner leurs prédateurs. Mais après tout, Josh semblait vouloir ça pour le pousser autant à bout.

Tout en essayant de contenir son emportement en commençant à trembler, Kalalli laissa son gâteau en plan avec le paquet et se dirigea vers la sortie de la pièce les poings serrés. Il se serait probablement attiré les foudres d'une nouvelle personne aujourd'hui. A croire que tout le monde s'était passé le mot pour le pousser dans ses derniers retranchements.

[tout de Charis sauté sur sa proposition]

Kalalli entendit Josh lui imposer verbalement de rester, mais il n'en avait rien à faire. Lui lancer à la figure toutes ces choses n'était certainement pas fait pour qu'il reste dans cette pièce plus longtemps, alors cette phrase sonnait particulièrement faux.

Sur ces paroles, le loup s'avança rapidement jusqu'à la porte et la boucha pour empêcher l'Inuit de partir. Il n'en avait pas fini avec lui. Ca voulait dire quoi ça ? Qu'il allait passer à la prochaine étape, comme lui arracher la cuisse comme la panthère en Russie ? Qu'il essaye, pensa le garçon. Il en était arrivé à un état de rage où il se moquait de se faire déchirer les chairs par le garou.

Puis ce dernier sembla tenter de se défendre et rajouta encore qu'il fallait prendre ses responsabilités ce qui brisa le barrage de retenue que Kalalli tentait de maintenir en place. Le problème avait changé. Il n'était plus d'essayer de trouver une solution pour se débarrasser de Kanata. Il était de repousser son "camarade" Oryx et de tenter de retrouver une situation calme, loin de tout ce stress que l'Inuit essayer d'éviter à tout prix en se rendant dans la cuisine avec des personnes à priori non hostiles.

Mais il semblait qu'il s'était trompé et que seule la solitude aurait pu l'aider contrairement à ce qu'il voulait. Le garçon savait pertinemment que parler à Kanata si rapidement ne mènerait à rien mais Josh ne comprenait pas. Le garçon s'en moquait. Il ne voulait pas parler à Kanata. C'était tout. Et le garou ne respectait pas sa volonté. Ca commençait à faire beaucoup en une après midi. Beaucoup trop.

" Laisse moi partir ! JOSH !! "

Sans réfléchir, Kalalli se jeta sur le garou sans même savoir ce qu'il voulait lui faire. Ce qui était sûr, c'est qu'il n'allait pas le frapper, juste rouler en lui tirant les poils au pire et essayer de se retrouver au dessus de lui pour le calmer, sans user son pouvoir. Pas encore.

Bien vu. Kalalli prit purement et simplement la fuite. Lâcheté? Charis estimait qu'il ne s'agissait que d'un réflexe d'auto-défense, tout simplement. L'inuit se sentait menacé fatigué d'avoir à se justifier, et surtout épuisé d'avoir sans cesse à se défendre et à parler alors qu'il n'en avait pas la plus petite envie. En même temps... Il aurait pu ignorer la première question de Charis au départ. S'il avait concéder à répondre, c'était en un sens parce qu'il était prêt à le partager, non? Dans le cas contraire, il n'aurait eu qu'à dire qu'il n'avait juste pas envie d'en parler, que ce n'était pas contre eux, Charis aurait simplement compris, et Josh aussi. Inconsciemment, Kalalli n'avait-il pas comme une toute petite, une infime envie de trouver une solution pour ne pas avoir à encaisser le fait de devoir attaquer une nouvelle fois un élève de l'Institut?

Mais Josh l'interrompit dans sa fuite, remettant la couche de trop. Elle n'aurait su dire ce qu'il aurait fallu faire dans le cas présent. Elle aussi se serait probablement imposée entre Kalalli et la sortie si Josh n'avait pas été le plus rapide. Mais il y avait tout de même exagération. Pousser quelqu'un à ses limites était en soi une bonne chose, mais franchir les limites en était une autre. Tendue, Charis était restée silencieuse sans trop savoir si elle devait intervenir. Elle aurait probablement dû...

Elle fit un bond en avant en voyant Kal se jeter su Josh, mais avant qu'elle n'ait pu les rejoindre, le lupin avait roulé au sol et bloquait déjà leur camarade OryX sur le sol. Elle se figea, mais la dernière proposition de Josh, bien que rétractée, ne lui convenait pas du tout. ça aussi c'était une fuite, en somme. Mieux valait qu'elle s'en mêle.

"Je crois que ça suffit pour les conditions. Relâche-le, s'il te plait."

Elle s'avança, pour s'interposer entre eux, posant une main sur l'épaule de Josh pour lui signifier qu'elle voulait qu'il libère Kalalli. Ce qui ne l'empêcha pas de poursuivre.

"Kal... La dernière chose qu'on veuille, c'est t'embêter. Mais cette histoire te nuit suffisamment pour te ronger si tu la laisse s'éterniser. On ne te veut pas de mal, bien au contraire. Tout ce qu'on voudrait, c'est que tu puisse aller de l'avant, sans avoir à regretter ton geste ou à redouter des conséquences. Je ne prétend pas que tu es lâche, Josh non plus."

Elle jeta un regard équivoque à Josh, et en revint à l'inuit.

"Mais ça te fait du mal et ça se voit. Moi, ça m'inquiète. Josh et moi, on voudrait pouvoir t'aider du mieux possible, même si ça signifie que tu dois en venir à nous détester. On tient trop à toi, tu comprends?"

Tant qu'à faire, autant jouer cartes sur table. Peut-être qu'elle se permettait un peu trop de supposer des sentiments réels de Josh. Mais pour qu'il s'implique à ce point, il devait tout de même tenir sacrément à Kal.

L'inuit le savait en se jetant sur Josh. La possibilité de le surpasser en force physique était nulle. Une fois de plus, il avait préféré se sacrifier sans faire de mal à l'autre, preuve qu'il avait apprit de son action sur le Yun. En un instant, Kalalli se retrouvait sur le dos, poignets plaqués au sol et bassin bloqué. Il tenta désespérément de se défaire de la prise du loup sans succès avec toute la fougue d'un animal luttant pour sa survie dans ses derniers instants.

" Lâche moi ! Lâche moi !! "

La rage et ses tentatives de libération achevaient de l'épuiser. Il avait envie de pleurer mais se retenait autant qu'il le pouvait. Josh établit une nouvelle "règle". Le regard rempli d'incompréhension, presque outré, Kala fixa le lupin sans comprendre comment il pouvait lui proposer ça.

" Tu... Tu crois que j'essayais de faire quoi en venant ici ? Tu crois que j'essayais quoi ?! Et pourquoi tu crois que je veux partir ? Et toi depuis le début tu cherches à m'empêcher de me calmer ! "

La fin de la phrase était montée dans les aigus. Il s'arrêta soudainement de se débattre et laissa sa tête retomber lourdement sur le sol. Des larmes commencèrent à couler sur le côté de son visage alors que Charis tentait de justifier l'action de Josh et son inaction à elle. Mais toutes ses paroles sonnaient faux pour lui. Josh avait fait que l'embêter depuis qu'il était arrivé.

" Vous me faites plus de mal que cette histoire... " lança-t-il les yeux fermés en pleurant.

Et dire qu'ils ne pensaient pas qu'il était lâche était une aberration pour lui. Kala était persuadé qu'ils le pensaient. Et maintenant elle prétendait que Josh voulait l'aider. C'était tellement gros. Lui qui depuis le début l'empêchait de penser à autre chose et ramener sans cesse le sujet sur le tapis.

Son (ancienne ?) amie conclut en disant qu'elle était prête à se faire détester de lui et qu'ils faisaient ça pour son bien... Mais dans l'immédiat, il était incapable de trouver quoique ce soit qui ait été fait dans son intérêt, si ce n'est de s'inquiéter de ce qui n'allait pas.

" Je vous déteste... "

Et il les aimait. Mais sur le coup, il avait dit ce qu'il ressentait sincèrement. Même s'il ne s'était jamais particulièrement bien entendu avec Josh, il se sentait trahi par Charis qui avait tout laissé faire et qui maintenant arrivait avec de belles paroles qui sonnaient comme des mensonges pour le calmer uniquement.

" Pourquoi vous me faites ça..."

Une idée folle lui traversa l'esprit soudainement. Est ce que Kanata se vengeait ? Est-ce qu'il était l'un ou l'autre ? Non... Il l'avait vu dans le Hall. Le garçon avait l'impression de devenir paranoïaque. Tous contre lui complotaient. Il chassa cette pensée stupide et se dégagea doucement de Josh de façon lasse.

" Le premier qui s'approche, je le paralyse. "

Sur cette dernière mise en garde, il quitta la pièce d'un pas normal en s'essuyant les yeux, épuisé et déprimé.

Vers je sais pas où ^^

Non, il ne comprenait pas. Normal. Charis s'y attendait après tout. Sous la colère et la tristesse on ressentait souvent des choses contradictoires avec l'habitude. On devenait plus blessant, on voulait faire du mal pour qu'on arrête de nous en faire à nous. Kal ne faisait que se défendre, rien de plus. Tout ça, elle le savait. Mais n'empêche... ça faisait quand même mal à entendre. Elle allait s'en mordre les doigts. Pourtant d'un point de vue purement objectif, la méthode avait un fondement de juste. La réaction avait été même prévisible. Mais l'impact de la réaction de Kal avait été très mal estimé. Charis ne voulu même plus parler en voyant les larmes de l'inuit. Il allait les détester, et pour un bon moment après ça. D'ailleurs il le dit à haute voix et Charis préféra reculer, renonçant définitivement à toute tentative d'arrondissement d'angles.

Pire encore, sous la colère, et bien que Josh aussi ait renoncé, il alla jusqu'à la menace. Il pouvait les menacer, par vexation, par fatigue ou dieu savait quoi encore. Leur cohésion était donc si fragile que ça? Charis croisa les bras, détourna les yeux, alors que Kalalli s'enfuyait avec un minimum de self contrôle. Elle allait regretter pendant un moment d'être restée aussi passive. Mais tout bien considérer, ça en changerait rien pour elle. Kal restera le petit frère qu'elle n'a pas eu et elle continuerait de faire de son mieux pour veiller sur lui, qu'il l'accepte ou non. Les lèvres pincées, elle se reporta sur Josh après le départ de Kal, sans prononcer le moindre mot.

Elle ne lui en voulait pas le moins du monde. Après tout, elle avait approuvé la méthode et ses actions avait prouvé qu'il tenait à l'inuit. Lui aussi avait accepté de se faire détester de toute évidence. Finalement, elle le connaissait encore trop peu, elle qui l'avait cru au départ plus individualiste que ça.

"Demain... Peut-être."

Ou pas. Sa raison lui disait que Kal ne pourrait pas la haïr indéfiniment, pas avec ce qu'ils avaient tous vécu au sein de l'institut. Mais le coup au coeur avait été un peu trop brutal pour qu'elle puisse rester réellement optimiste. Tant pis. Après tout, elle l'avait bien cherché.

"Désolée... C'est pas juste pour toi non plus."

Pour la peine, elle hésitait à mettre les voiles à son tour. Dans l'immédiat, elle n'avait vraiment plus faim.Cette histoire lui avait franchement coupé l'appétit.

Le Yun passa la tête dans la cuisine. Aucun merdeux en vue. La voie était libre ! Il rentra donc tranquillement dans la pièce. " Yo les gens. Ca gaze wolfi ? ". Il se dirigea droit vers le frigo et retira un à un cinquante produits afin de dégager un bol de mousse au chocolat qu'il s'était soigneusement caché dans un coin obscure du Saint Frigo américain, taille XXL. Il rebourra tout dans le frigo rapidement et chopa une cuillère avant de se caler à la table.

Kanata commença à enfourner des cuillères énormes de mousse en observant les deux présents. Il avala, et commenta : " Waw, c't'ambiance de tarés. Vous jouez à celui qui pleurera le premier ? ". Le Yun rechoppa une grosse cuillerée en les observant encore.

Le chocolat, ça détendait ! C'était pas lui qui le disait. C'était des études. Alors si c'était les études qui le disaient...

Josh avait peut-être été le plus offensif. Mais Charis n'avait aucune excuse. Elle connaissait Kal depuis plus longtemps, elle aurait dû tout anticiper. Ou agir à la place de Josh. Être détester, passe encore, mais elle l'avait laissé lui aussi se faire détester. L'un dans l'autre, elle n'avait tout simplement pas été à la hauteur. Ils n'avaient même pas pu poursuivre la conversation sur le sujet que Josh fut interrompu une nouvelle fois par une autre entrée... Le Yun en personne. Pas de bol. Pourtant, Charis ne changea strictement rien dans son expression. Après tout, elle n'avait eu qu'une version de l'histoire. Non pas qu'elle doutait de la sincérité de Kal, ou même du sadisme de Kanata dans ses blagues régulièrement pourrie, mais après ce qu'il avait dit lui avoir fait, elle trouvait surprenant la facilité avec laquelle Kitsune faisait comme si de rien n'était. Elle aussi excellait à ce jeu-là. Pas comme Josh.

Pour lui, c'était de toute évidence plus difficile à tenir. Là où Charis n'avait lâché qu'un "s'lut" poli et à première vue sans la moindre arrière-pensée, le lupin, lui, se montrait autrement plus agressif. Il était temps de vraiment mettre les voiles. Et puis Charis pour sa part, avait déjà mangé de toute manière. Elle remarqua sans peine le geste du menton de Josh. D'accord, pas de problème. Elle répondit d'abord à Yun, sur un ton de bonne humeur malgré la tête qu'elle avait tiré avant son entrée.

"Il y a des jours avec et des jours sans. Là, c'est plutôt sans. Mais ça va passer!"

Elle ne voulait pas entrer en matière. Pas sans le consentement de Kal. Elle se reporta sur Josh, et lança une excuse qui n'avait juste rien à voir.

"Bon, tu viens m'aider pour le dernier exercice de Madame Fouba? Je trouve décidément pas la solution."

Un bon moyen de s'éclipser avec une excuse qui ne souffrait d'aucune autre explication. Charis se redressa, passa derrière Kanata, lui donna une petite tape dans le dos, et ajouta...

"Un conseil d'une fille qui vient du pays du chocolat. Avec un grand verre de lait, c'est encore meilleur! Profites bien de ta mousse!"

Puis sur ce, elle quitta la sortie, supposant que Josh ferait de même.


Vers autre part...

Waw. Le garou devait surement avoir terminé sa pâté pour se foutre en rogne comme ça. "Oh, j'ai bien le droit de bouffer ici aussi, c'est pas parce que y'a ta gamelle que la pièce t'appartient Géronimo ! ". Au moins, Charis lui causait gentiment, à savoir normalement. Il leur avait rien fait qu'il sache. Le Yun acquiesça juste. Maintenant elle s'éclipsait en proposant à Médor de finir un exo. Tant mieux, au moins il pourrait bouffer tranquillement sans sentir cette odeur de fauve.

Finalement, elle lui proposait de se prendre un verre de lait avec sa mousse. Il leva sa cuillère comme s'il portait un toast : " Gotta !". Sauf que... Sauf que là, il avait la méga flemme de se lever. Il enfourna la cuillère dans la bouche et se gratouilla le nez en réfléchissant. Comment il allait se comporter envers le merdeux. Soit il se vengeait puissance dix et il risquait derrière de vivre une vie parallèle jusqu'à sa mort dans cette illusion. Soit il faisait profil bas. Soit il essayait de faire copain-copain avec le mioche... Cette dernière solution attira son attention.

Elle lui laissait ouverte toutes les portes. Si un jour il voulait trahir le gamin, il pourrait. Et en attendant, il serait juste peinard. Dans l'affaire, puisqu'il était la victime, il n'aurait aucun mal à gratter l'amitié du mioche. Ouai. Bonne idée ça ! Le Yun se félicita d'être un génie du mal, vil manipulateur. Manquait plus qu'on lui offre un rôle de vilain dans un film, ça lui irait super bien !

Josh se sentit sortir de ses gonds lorsqu'il entendit la réflexion de Kanata. En soit, il avait le droit de manger ici, mais il n'apprécia pas du tout le coup de la gamelle, le reportant a la condition canine la plus basse, a savoir le cabot de l'institut. Un sujet sensible, très sensible, auquel il ne fallait surtout pas tenter de vanne foireuse ni même faire un parallèle entre Josh et un chien, ce qui avait tout particulièrement le don de l'énerver au plus haut point.

Il le fusilla du regard alors que Charis lui proposait une excuse bidon pour mettre les voiles. Tant mieux, ça lui épargnerait un bain de sang dans la cuisine pour aujourd'hui. Le lupin fit un signe de tête approbateur a Charis mais resta a sa place jusqu'à ce qu'elle parte de la cuisine. Après quoi, il monta sur la table pour être a la même hauteur que le Yun et s'avança lentement vers lui, le visage plus furieux que jamais.

Il s'arrêta et approcha sa tête de la sienne pour le fixer droit dans les yeux.

"Un conseil..."

Il pointa son index en direction de la poitrine du Yun et lui enfonça très légèrement sa griffe, juste assez pour qu'une douleur perçante se fasse sentir.

"Insinue encore UNE FOIS que je suis un chien, et je t'envoie a l'hosto en pièces détachées, c'est clair?" dit-il en claquant des crocs, comme pour mimer qu'il allait le mordre.

Et il était sérieux, ça pouvait se lire dans ses yeux. On pouvait rigoler de tout, mais pas avec tout le monde. Josh avait déjà fait de la charpie avec Alixtide, il pouvait recommencer si on l'y poussait. Sauf qu'il serait responsable de ses actes et ne regretterait rien cette fois-ci.

Il n'attendit pas une éventuelle réponse du Yun. S'il restait pour ça, il en profiterait pour le provoquer et lui faire commettre l'irréparable. Il décida a la place de suivre les pas de Charis. Josh descendit de la table et se dirigea vers la sortie. Arrivé au pas de la porte, il tourna la tête et lança un dernier regard haineux a Kanata, puis s'en alla.

Ailleurs

hall


Puisque Yun le lui avait proposé, elle l'avait donc suivi. Du moins, avait-il filé et elle était resté un peu derrière, et n'était arrivé à la cuisine qu'au moment où Josh en partait. Certes, elle avait été surprise de voir ... ce genre de mutants, puisqu'elle ne s'y était jamais attendue, mais avait fait profil bas. De toute manière, il avait eu l'air de filer sans la voir, et c'était tant mieux. Elle avait attendu cinq, dix secondes, et avait continué sa route jusqu'à la cuisine, où Yun était en train de s'attaquer avec appétit à une mousse en chocolat. Elle resta une petite minute sur le seuil, où elle hésita d'abord sur la conduite à adopter, ou sur ce qu'elle devait sans doute dire.

"Heu.... Merci... de m'avoir proposé de venir..." finit-elle par bredouiller, les joues un peu rouge.

Un peu formel, mais pour une jeune fille qui n'avait pas l'habitude des rapports sociaux, ce n'était pas si mal. Et puis, elle hésitait à aller vers le frigo. Elle avait été invité certes, mais elle ne se sentait pas chez elle pour se servir copieusement. Du moins, pas pour l'instant. Restait tout de même que son ventre vide commençait à se faire sentir, et que la mousse en chocolat du jeune homme n'était pas pour la laisser indifférente. Du lait peut-être ? Tout le monde en avait chez soit, et elle était certaine d'en trouver ici. Timidement, et maladroitement, avec les joues toujours aussi rouges et évitant quelque peu le regard de Yun, elle s'avança vers le frigo et attrapa la brique de lait. Avant de se tourner plus ou moins vers lui.

"Heum... Pardon, où sont les... verres, s'il te plait ?" demanda-t-elle, dansant presque un pied sur l'autre, comme une petite fille qui avait peur de se faire disputer.

Et qui en réalité, avait une autre question qui lui brulait la gorge ; à savoir s'il était japonais ou non. Certes, cela sonnait presque comme une évidence, de son prénom à son visage, mais si c'était le cas, elle aurait presqu'envie de parler en japonais avec lui. Car après tout, en fuguant, elle avait aussi tourné le dos à ses cours de langues, et elle n'avait jamais vraiment détesté les prendre. Elle aurait seulement voulu ne pas être obligé de sortir pour cela. Cela dit, la timidité la rongerait trop si elle osait essayer d'aborder ce sujet-là. Aussi, se contenta-t-elle d'attendre bien gentiment qu'il lui indique ou non l'emplacement des verres.

Le Yun fut tiré de ses pensées par la petite mignonne qui était entrée, probablement attirée par son charme naturel... ou la bouffe. Ptête plutôt la bouffe. Et puis c'était bien connu, on était toujours plus à l'aise pour taper la discute autour d'un truc à grailler. "T'inquiète ! Vas y sers toi au frigo. Prend ce qui te fait plaisir. ". Il l'observa se sortir du lait en continuant à manger sa mousse jusqu'à ce qu'elle cherche des verres.

Elle avait l'air asiat', ça c'était sûr. Mais d'où précisément ? D'ici à ce qu'elle soit américaine, ça l'étonnerait même pas. "Sont dans le placard là. " indiqua-t-il en illustrant d'un geste. Sa mousse rapidement terminée, il avait toujours faim. Rassemblant le peu de courage non flemmard qu'il avait, Kanata se leva et prit de la confiture dans le frigo, du beurre et du pain et commença à se préparer son petit goûter tranquillement sans s'intéresser particulièrement à la jeune fille.

Puis soudainement, le Yun lui demanda, en japonnais : " Et tu viens d'où comme ça ? J'ai pas saisi ton nom." et switcha de nouveau en anglais : " T'en veux ? " en parlant des tartines de confiture rouge. Il allait bien voir à quoi elle répondait.

Encouragée par le jeune homme, elle s'était néanmoins contenté de prendre la brique de lait. Non sans hésiter, timidement. Et se dirigea de la même manière vers le placard contenant les verres alors que ce dernier s'était levé pour saisir quelque chose dans le frigo. Moment durant lequel elle en profita pour jeter un coup d'oeil vers lui, en biais, puisqu'il ne la regardait pas. Car après tout, elle ne l'avait vu que vaguement, elle qui baissait plus souvent la tête qu'elle ne regardait les gens dans les yeux. Ce n'était pas non plus comme si c'était le premier asiatique ou même japonais qu'elle rencontrait ; elle en avait déjà croisé lorsqu'elle devait suivre ses cours de langue japonaise. Mais ceux-ci s'était plus amusé à la tourner en ridicule à cause de son petit carnet et de son mutisme ; alors que ce Yun avait au moins le mérite d'avoir été beaucoup plus sympathique avec elle.

Le verre en main, accompagné du fameux lait dont elle ignorais totalement la farce que ce dernier avait été victime, elle s'assit donc et s'en versa un verre. Et après en avoir avalé une ou deux gorgées, elle lui trouva un étrange gout, et réprima une petite grimace. Serait-il avarié ? songea-t-elle l'espace d'un instant, et tournant la brique pour vérifier la date. Il lui sembla que oui, mais elle aurait juré qu'il y avait quelque chose d'étrange sur cette date. Mais avant qu'elle puisse aller plus loin dans sa réflexion, Yun lui parla en japonais, avant de lui demander en anglais si elle en voulait. En tournant la tête surprise vers lui, elle supposa qu'il parlait alors des tartines. Néanmoins, elle fut ravie de voir qu'il s'était sans doute poser la même question qu'elle, et eut un petit sourire tout en baissant le regard vers les tartines.

"Je m'appelle Leah, je viens de New York. Et toi ?" lui répondit-elle en japonais, sans bégayer cette fois-ci ; après tout, elle n'avait jamais eut l'occasion de réellement parler japonais de vive voix, et était beaucoup trop concentré sur son accent ou ce qu'elle disait, pour penser à être timide. Avant de le remercier, toujours en japonais, en attrapant une des tartines et croquer doucement dedans.

Un japonais très formel et très bien articulé. Voire trop. Si elle était de New York, soit elle n'avait jamais appris nativement la langue, soit elle avait bien perdu. Elle semblait trop concentrée pour parler. Kanata l'observa un instant puis reprit : New York ? Oh bha ça va. Tu viens pas de loin du tout. Moi Tokyo. ". Entre NY et Salem, devait pas y avoir trois quarts d'heure de monorail. Au moins elle pourrait retourner chez elle souvent si elle le voulait.

Le Yun l'observa sans réagir à sa grimace pour le lait. "Ouai. La bouffe américaine. Au début on trouve ça dégueu, à part les fast food. Après on s'habitue un peu." Et comme une association d'idée menait à une autre idée, il demanda " Tu sais cuisiner ? Si je trouve les ingrédients, tu saurais faire des Onigiris ? du Gyūdon ? Ho des Unagis ! Ou un Kitsune Udon ?? " Qu'est ce que ça pouvait lui manquer de manger un vrai truc. Puis un déclic se fit. "Ha mais merde. Si t'es de New York, tu sais rien faire de tout ça." Elle devait même pas savoir ce que c'était. L'engouement soudain venait de se faire doucher. Et il se retrouvait avec ses vieilles tartines, visiblement déçu.

Bon, c'était pas dégueu non plus les tartines. Mais ça valait quand même pas un Mochi ou un Daifuku. " Un jour je retournerai au Japon. On m'a viré parce que j'étais à un concert avec de la musique de Jagal Pimp. Je suis un terroriste d'après eux. Quelle bande de cons. C'est que de la musique. Tu connais Jagal Pimp ? Il est américain alors ça doit te parler. "Le Yun se gratta l'arrière du crâne. "Enfin bon. Je sais pas quand je pourrai. Si on me repère, on va ptête me refoutre sur une île déserte avec des gars qui veulent me buter pour la télé. Mais dans le genre sans effets spéciaux, tu vois le truc ? Des types avec moi y sont restés. Mais moi je suis encore là. Ma famille croit que je suis mort. Mes potes aussi. Mon ex aussi. Sans famille, sans patrie. La joie. "

Il enfourna une demie tartine dans sa bouche et mastiqua rapidement. "Et comment t'as atterris là toi, Leah ? ". Pourquoi le Yun s'intéressait spécialement à elle comme ça ? Il n'en avait aucune idée. D'asiatique, elle semblait n'en avoir que le physique. Rien pour lui rappeler vraiment sa culture ou d'où il venait. Elle était un peu ce qu'il allait devenir. Peut être ce qu'il était déjà devenu. Un jap américanisé. Pensée gerbante dans le fond. Il aimait son pays même s'il en avait été chassé. Mais reparler la langue lui faisait quand même plaisir. Ca faisait si longtemps qu'il n'avait pas sorti un mot dans sa langue natale. D'ailleurs il avait parlé en jap ou en anglais sans faire vraiment attention. Il aurait été incapable de dire dans quelle langue il pensait...

S'il y eut un silence, il ne dura que quelques secondes. Tout juste le temps pour elle de mâcher le bout de tartine qu'elle venait de prendre et de l'avaler. Puis, Yun partit dans une grande tirade, commençant par lui indiquer qu'il venait de Tokyo. Tokyo ! C'était vraiment loin, songea-t-elle, un peu surprise. Etait-il venu exprès pour cet institut...? Avait-il vécu longtemps là-bas ? Autant de questions qui se bousculait dans sa petite tête. Avant qu'il ne lui parle de nourriture. Fast-food ? Elle n'avait aucun avis dessus, n'en ayant tout simplement jamais gouté. Il aurait d'abord fallu qu'elle sorte pour cela... Avant de lui demander si elle savait cuisiner quelques plats typiquement japonais. Hôchant la tête, en regardant la table, elle lui répondit en hésitant. Non pas par timidité, mais plutôt le temps de choisir ses mots ;

"Ma mère est japonaise... Elle m'a un peu montré, quand mon père n'était pas là. Je ne sais faire que des plats simple, comme les onigiris, les sushis, les omerice... Désolée." finit-elle, s'excusant presque de ne savoir faire que ça, un peu gênée finalement.

Un sentiment qui se dissipa bien vite de toute manière quand il lui raconta la manière dont il s'était fait éjecté d'un concert. Elle ne put se retenir d'imaginer la scène, amusée, et réprima un rire en mettant une main sur sa bouche, instinctivement. Ou peut-être que c'était la façon dont il racontait ça. Néanmoins, elle acquiesça à sa question.

"Oui, je connais un peu...", du moins, à défaut de sortir, elle avait souvent lu et trainé sur le net. Des articles sur ce chanteur, il y en avait suffisamment pour ne pas passer à côté...

Avant de se poser de nouveau mille et une question sur le sujet du jeune homme, en jouant un peu avec sa propre tartine, les yeux rivés dessus. Le tuer, pour de la télévision ? Elle était perplexe, et se demandait surtout qu'il n'y avait eu que cette histoire de musique lors d'un concert. Pouvait-on vraiment abattre quelqu'un à cause de .... musique ? Et pourquoi le croyait-on mort ? Mystère, visiblement.

"Moi j'ai fugué", répondit-elle, choisissant de son mieux ses mots. "Mes parents ne s'entendaient plus, c'était invivable chez moi." . Avant de rajouter une question, sans réfléchir, mais dont elle resterait fort curieuse d'entendre la réponse ; "Tu ... es mutant, non ? Tu fais quoi, toi ?", interrogea-t-elle, en se mordillant la lèvre. Elle ne savait pas vraiment comment formuler ceci, et la question était sans nul doute assez maladroite.

Elle pouvait cuisiner des trucs ! Miracle ! C'est sûr que le Yun allait pas rater l'occasion et lui rapporterait des ingrédients ! "Va pour les onigris alors ! Ca fait trop longtemps que j'en ai pas mangé !" Quand il raconta son éjection du concert, Leah se foutait de sa gueule.

Kanata arqua un sourcil, dubitatif. "Hé te marre pas ! La descente de flic était violente ! J'ai failli réussir à me barrer. Sauf que cet abrutis s'est cassé la gueule en descendant du mur. Je suis allé le récupérer et forcément je me suis fait gauler et on m'a retenu parce que j'étais le seul mutant du groupe..." Soirée de merde. Il aurait mieux fait d'aller voir à la nouvelle boite ou la démo du nouveau jeu au centre commercial...

Bon elle connaissait Jagal Pimp. Elle venait d'esquiver une descente à l'étage ringarde au moins. Puis elle expliqua qu'elle avait fugué. "Mes parents s'engueulaient avec moi. Chacun son truc. Doivent s'en foutre que je sois mort. Ca leur fait des vacances. Mon père au moins aura put se faire son bureau à la place de ma chambre." C'était plus simple de se dire qu'on était détesté là où on ne pouvait plus aller plutôt qu'attendu...

Puis la question habituelle arriva. C'est quoi ton pouvoiiiiir. Chez les adultes, la question était de savoir quel job ils faisaient pour se définir entre eux. Chez les jeunes mutants, c'était le pouvoir. "Je suis un polymorphe. D'où mon nom de code Kitsune. Tu sais le yōkai. " En temps normal, il aurait fait une superbe démo de son pouvoir mais là...non. La dernière transformation avait mal terminée et il avait eu sa dose pour la journée au moins. "Et toi ? Capable de disparaître ? " Timide comme elle avait l'air d'être, ça aurait été un pouvoir sensé. Enfin. Si les pouvoirs avaient un réel lien avec la personne. A moins que ce soient les gens qui influent sur leur pouvoir.

L'espace d'un instant, elle songea qu'elle aurait du mieux réfléchir. Elle avait répondu à sa question sur la cuisine sans réaliser qu'admettre qu'elle avait quelques notions revenait à accepter de lui cuisiner quelques petites choses. Mais après tout, sa mère aurait été ravie de la voir parler japonais et mettre en pratique ce qu'elle lui avait appris. Avant qu'il ne lui réponde sur le concert et la descente des flics. "Cet abrutis ?" s'interrogea-t-elle quelques secondes, avant de réaliser par la suite qu'il parlait sans doute d'un ami ou d'une connaissance à lui.

"Et... c'est p-p-pour ca qu'on a voulu te tuer ?" demanda-t-elle timidement.

Mais dans tout les cas, elle avait un peu du mal à comprendre. Tuer quelqu'un pour de la musique ou parce que c'est un mutant... N'est-ce pas idiot ? Vint l'explication de ce dernier sur ses parents, tandis qu'elle avala quelques petites bouchées de plus de la tartine qu'elle avait attrapé. Néanmoins, elle se sentit presque désolée pour lui lorsqu'il avança l'hypothèse que son père avait sans doute transformé sa chambre en bureau. Et se demanda comment réagissaient les siens, de parents. Sur qu'ils avaient remarqué son absence, sa fuite. S'étaient-ils engueulés de plus belle ? Ou suffisamment inquiet pour la boucler un peu ?

Un polymorphe, apprit ensuite Leah. Comme le yōkai, qu'elle avait déjà vu vaguement dans elle ne sait quel bouquin. Des livres de légendes et de mythologies, elle en avait souvent lu, après tout. Mais elle n'aurait jamais pensé qu'une personne puisse faire cela, et un peu surprise ou étonnée, elle leva enfin les yeux vers lui.

"Tu pourrais prendre mon apparence, par exemple ?" demanda-t-elle, particulièrement curieuse cette fois-ci. Quoique qu'une foule de questions se bousculait dans sa petite tête. "Comment était-ce possible?" entre autres. Et hocha négativement la tête en rougissant un petit peu. Invisible, elle ? ... Elle aurait aimé, réalisa-t-elle brusquement avec amertume. Etre invisible, ne pas être vue, pouvoir fuir discrètement. Au lieu de ça, elle pouvait se protéger. Impliquant bien sur qu'elle fasse face pour cela.

"Non... je peux plutôt créer un bouclier pour me protéger", répondit-elle, presque dégoutée finalement de ne pas pouvoir disparaitre et devenir invisible. Avant de rajouter, réfléchissant presqu'à voix haute pour une fois. "Enfin... C'est une.... c-comme une sphère, donc si ça trouve, si quelqu'un est avec moi à l'intérieur, il sera peut-être protégé aussi."

Elle y avait souvent songé, surtout ces derniers jours. En théorie, cela lui semblait presque possible. En pratique, elle n'avait jamais eu l'occasion de vérifier cette idée.

Ouai bon. Le Yun réalisait soudainement qu'il avait pas été très clair en expliquant son affaire de jeu télé. "En fait quand je me suis fais gauler, j'étais dans une prison mobile dernier cri et j'ai été un peu vendu à un jeu télévisé. On était plusieurs mutants à vivre sur une île dont on avait pas le droit de se tirer, et y'avait un vote du public pour dégager ceux qu'ils aimaient le moins. Et dégager quelqu'un, c'était pareil que de dire qu'on le retrouvait éventré le lendemain ou noyé. Ce genre de trucs. " Il renifla puis se gratta l'arrière du crâne en réfléchissant à la suite.

Fallait être clair cette fois."J'ai tenu une semaine ou deux et après c'était méga tendu. Finalement y'a des gens d'ici, enfin d'anciens d'ici, qui ont débarqué de je sais pas trop où et qui m'ont amené ici. Puis après j'ai appris que le présentateur télé qui avait organisé tout ça était contrôlé mentalement par un robot super balèze en afrique du sud. Il était à la tête d'une sorte de trafic de mutant. Il faisait capturer des mutants et les revendait comme des produits de consommation courants. Un mutant pour vous aider à dormir ? Cherchez pas, on en aura un du brésil dans une semaine. Un mutant pour de la démolition ? On va avoir un mutant avec des marteau piqueurs au bout des bras. Fin voilà. Bon je te rassure, il est mort le robot. "

Ca c'était du résumé ! "Et moi pendant ce temps là je réglais le compte des responsables du massacre sur l'île de Génosha. Je suis un peu un héros. Tu vois le genre. " Kanata fit un clin d'oeil à Leah et se cala dans le fond de son siège, un sourire triomphant au visage. Sans lui les LeX étaient rien. Tout le monde était bien au courant ! Et il décida même d'en rajouter. "Y'avait trois mecs à éliminer. Un gars avec une armure bizarre en liquide. Lucas et Abaigh étaient sur lui. Un super illusionniste. Ca c'était Yanis et Jolène dessus. Et moi je me suis occupé tout seul d'un super télékinésiste. Il était super méga balèze. Il pouvait balancer des espèces de boules d'énergie ou je sais pas quoi. Une vraie teigne. Tu sais le gars qui a le cerveau grillé là, aux infos ? Bha c'était lui avant que le Yun passe ! Hé hé. " Bon, après il précisait pas qu'il avait juste occupé Hippias quelques minutes avant qu'Esther lui crame la cervelle. Mais c'était moins classe comme ça.

Puis Leah s'intéressa à son pouvoir. Coooool. "Ouai je peux. Les garçons et les filles je peux imiter. Rien qu'en voyant une personne, je peux imiter son corps à la perfection. Si je vois ta main, je peux même reproduire tes fesses. Genre aucun rapport. Je dois m'imprégner de l'ADN de la personne ou un truc du style. Bon, regarde bien. " Si une fan lui demandait, il ne pouvait pas refuser. Le visage et le gabarit de Kanata changea progressivement en un court instant pour devenir une copie conforme, hors habits, de la jeune fille. Il engouffra la seconde moitié de sa tartine qu'il machouilla quelques instants pour qu'elle ait le temps de réaliser. Par contre, il avait toujours sa voix de garçon. "Si tu veux me tripoter, tu peux. Il parait que tout fait très vrai. " Comme les fesses. Ou les seins.

Finalement, elle lui révéla à son tour son pouvoir. Un bouclier sphérique. "Genre un champs de force ? Cool. Au moins tu pourras te protéger. Des fois c'est encore le mieux de revenir vivant quand c'est dangereux. C'est un peu la merde des fois, quelque soit la gueule que je chope. Une blessure est une blessure. Georgia elle peut transférer des blessures de gars à d'autres. Donc si elle se chope une balle dans l'épaule, elle se soigne et envoie la blessure sur un ou plusieurs types. Et ils ont tous la blessure à l'épaule ! C'est classe hein ! Elle est cool ma meuf ! " Pour le coup, il était ravi. Et très fier. "Et sinon. Quand tu parles jap tu te concentres beaucoup. C'est parce que tu parles plus depuis longtemps ? Tu vis à New York depuis combien de temps ? Tu te sers de ton bouclier depuis quand ? "

Ce dernier avait dû se rendre compte qu'il avait été trop vague pour elle, car il se lança alors dans une explication détaillée, à sa manière. Au fur et à mesure qu'il racontait, elle blêmissait progressivement. Elle ne comprenait pas le pourquoi. Non, elle ne voulait même ne pas comprendre une telle raison, si elle existait... Se réjouir de ce genre de choses, être amusée par la souffrance ou la mort, c'était des choses qui lui échappait.

"C-c-c'est horrible..." fut la seule chose qu'elle murmura quand il renifla et se gratta l'arrière du crâne.

En revanche, elle se perdit un peu avec l'histoire du robot. Du moins, il lui fallut quelques précieuses secondes pour digérer tout cela, tant cela semblait assez délirant. Dire que elle, quand elle avait fugué, elle avait juste manqué d'être abusé et avait rencontré personnellement les Divas grâce à Charles. Elle avait presque le sentiment d'être une enfant de riche, un peu pourrie-gâtée sur les bords. Ce n'était pas si faux, songea-t-elle brusquement, amère. Tout les parents du monde auraient été bien loin de lui offrir ce petit luxe dont elle avait bénéficié. Elle avait eu des bijoux, des gardes-robes loin d'être vilaine, une nourrice, des professeurs particuliers... Tout ce dont elle avait eu besoin, elle l'avait eu. Et ils n'avaient jamais été endettés ou quoique ce soit.

Néanmoins, elle eut le sentiment qu'il se vanta un peu sur le suite, et cela l'amusa. Un peu. Et ne put s'empêcher d'être relativement admirative lorsqu'il raconta l'histoire du "gars qui a le cerveau grillé là, aux infos". Balèze, fut le seul mot qui lui vint à l'esprit. Ce n'était pas elle qui pourrait faire ça.

Puis, il changea de sujet pour lui répondre ; et elle écouta les explications de ce dernier sur son propre pouvoir, avant de changer lui-même. Lorsqu'elle le réalisa, elle releva la tête.... pour se regarder elle-même, dans le blanc des yeux, bouche bée. C'était donc à cela qu'elle ressemblait ? Bon certes, elle s'était déjà vu dans un miroir. Plusieurs fois même. Mais se voir comme ça, c'était juste.... surréaliste, songea-t-elle. C'était comme cela qu'on la voyait, comme cela qu'elle était lorsqu'elle mâchait quelque chose. Et sursauta lorsqu'elle parla avec une voix d'homme. C'était elle, avec une voix plus grave, et des vêtements totalement... différents. Le genre qu'elle ne portera pas. Et sans réfléchir, elle toucha sa propre joue du bout des doigts avant de toucher celle de sa copie, ébahie. Avant de se souvenir que ce n'était pas elle, mais "maitre Yun", et de se rétracter un peu gênée et détournant les yeux.

"Heu...." commença-t-elle à répondre devant son avalanche de questions. "Je.... je n'avais parlé japonais avant", dit-elle, rougissant parfaitement. "C'est la première fois en fait... J'ai juste suivi des cours depuis quelques années, c'est tout. Je suis née à New-York, et... j-je ne me suis pas vraiment servi de mon bouclier en fait. Je me suis entrainée chez moi, en s-s-secret."

Elle se sentit un peu minable, du moins assez insignifiante face à lui. Après tout, elle n'avait jamais testé dehors son bouclier, si ce n'était qu'avec des livres qui tombait sur la tête, ou des casseroles chaudes quand elle était réellement seule chez elle. Il allait surement deviner qu'elle était resté tout ce temps chez elle, bien gentiment. Et qu'il se moquerait d'elle.