Re: Problème d'attention [New York]

Bientôt, ce fut le tour de Camille de s'avancer au niveau de du distributeur de billet. Une personne de plus attendait derrière elle, lesm ains profondement enfoncée dans les poches et le bonnet baissé jusqu'au oreilles.

A son tour, elle entra sa carte dans la fente de la machine à sous où on gagne à tous les coups.

Vingt-sept malédictions silencieuses sur la lenteur des gens, l'inefficacité de l'informatique à l'aube du XXIIème siècle et la rareté des banques plus tard, Camille était devant la machine. Etait ENFIN devant la machine. Elle ouvrit son portefeuille, voulut glisser la carte, s'aperçut qu'elle la tenait dans le mauvais sens, la retourna, et c'était gagné.

Enfin non. Elle devait se rappeler son code avant, bien sûr. Son talon d'Achille, elle hésitait toujours entre deux. Celui de ses parents - elle s'amusait souvent plus petite à le composer - et le sien. Manque de chance, ils se ressemblaient.

Elle se gratta la tête, faillit commencer à taper, renonça, si, non, finalement, c'était plutôt l'autre, si, rah mais t'es une cruche ma fille. Elle se retourna avec un petit sourire d'excuse à l'attention des personnes qui attendaient derrière elle.

De la personne.

*L'air louche. Il détonne pas dans le paysage.*

Elle se plaça de façon à ce que le client suivant ne puisse pas la voir composer, puis appuya sur quatre chiffres.

*"Nous interrogeons votre banque"...oui, oui, c'est celà...ah, gagné ! Du premier coup en plus !*

Elle décida de prendre la plus petite somme possible. Vingt dollars, pour un aller en bus, ce devrait être suffisant. Non, elle ne voulait pas de reçu. Oui, elle avait compris qu'elle devait retirer sa carte pour recevoir ses billets.

*Y m'énerve ce truc à me prendre pour une demeurée !*

Passablement sur les nerfs, Camille saisit ses billets et les plaça dans son portefeuille qu'elle rangea dans son sac. Une fois celui-ci refermé, elle garda sa main dessus. Préventivement. Puis fit demi-tour.

La route était encore longue.

Alors qu'elle avancer toujours plus vers le nord dans la rue déserte, l'homme qui se trouvait derrière elle l'interpella.

"Mademoiselle! Attendez."

Il commença à trottiner derrière Camille.

*Grmgnffff qu'est-ce qu'y me veut ?*

Volte-face. La main serrant toujours étroitement son sac. Il fallait qu'elle tombe sur un pénible.

Quoi ? Qu'est-ce que vous voulez ?

Pas de douceur dans le ton, ce n'était ni le lieu, ni le moment pour jouer aux petites filles effrayées. Camille le jaugea, s'arrêtant sur le bonnet. Il faudrait qu'elle essaie, peut-être que ça lui irait, elle qui avait toujours froid aux oreilles en hiver ?

Pas le sujet.

Seule avec un type lourd, dans une rue déserte d'un quartier miteux, on avait vu des situations plus reluisantes.

J'peux faire quelque chose pour vous ?

Elle essaya sans trop de succès de parler sur un ton égal, mais sa voix qui charriait des glaçons n'aidait en rien. Elle esquissa un sourire forcé, qui tint un quart de seconde avant de retomber.

*Bah. S'il m'énerve, je cours.*

L'homme ralentit quand la Camille lui répondit.

"C'est pas la peine de vous enerver M'Dame, vous avez juste laissé tombé ça sur le trottoi en sortant votre porte feuille."

Il lui tendit alors le vieux journal qu'Estelle lui avait donné et où figurait l'adresse de l'institut, son objectif.

Je...euh...

*J'ai l'air con. Bravo l'héroïne.*

La rougeur était monté vitesse grand V aux joues de Camille, qui prit le journal, la contrition peinte sur le visage, et relut l'adresse, qu'elle mit en rapport avec ce qu'elle savait du plan.
Elle s'était rapprochée. Bonne chose. Notez qu'elle aurait eu du mal à s'éloigner, mais là n'est pas le problème. Le problème est qu'elle venait faire preuve de la plus élémentaire méchanceté à l'encontre d'un type qui n'avait l'air de lui vouloir aucun mal. Pas très très sympathique de sa part.

Je suis désolée. J'ai eu peur, je me suis emportée. Je n'ai pas confiance, quand je suis toute seule.

Elle avisa l'homme, qui lui paraissait toujours louche, mais pas méchant. Idée.

Dites...vous n'iriez pas par là, par le plus grand des hasards ?

Elle lui indiqua l'adresse de l'Institut.

Je ne connais pas bien le quartier...si vous n'y allez pas, ce n'est pas grave, mais peut-être connaissez-vous le chemin le plus court pour vous y rendre ?

Cette fois, son sourire fut moins forcé et plus long que le précédent. Peut-être parce qu'il était naturel. Le réconfort après la frayeur.

"Voyons si je peux vous aider"

L'homme regarda les quelques mots de Camille lui montrait, il jeta également quelques coups d'oeil au reste de l'article.

*L'institut mutant! C'est donc là qu'il est? Mais...mais c'est à 2 pas de chez moi, la poisse.*

Pendant quelques secondes, il eut le regard vide puis un éclair traversa son esprit et l'homme prit peur.

*Si elle cherche cet endroit, c'est que c'est une mutante. Faut pas que je traîne.*

"Désolé mais j'connais pas... Adieu."

Et l'homme déguerpit sans même repasser par le distributeur qu'il avait quitté pour rendre le journal de Camille.

*Zut.*

Camille s’imaginait presque avoir trouvé un compagnon de route, forcément sécurisant, mais à la vue du lieu, elle se demanda si l’adresse qu’elle lui avait montré était celle d’un simple Institut ou d’une jungle urbaine très mal famée. En plus, le type était parti avant même qu’elle puisse lui demander de s’expliquer. Bah…

*Y’a des gens étranges partout*

Elle remit la coupure de journal dans son sac et se remit en route, seule, les mains dans les poches. Elle pensait. Elle laissait courir son imagination, sur ce qu’elle allait devenir en arrivant là-bas, qui elle y trouverait, ce qu’elle raconterait pour faire enrager Ava…c’était de bonne guerre, depuis le temps que sa meilleure amie la tannait à propos de son lycée qui jouxtait le centre d’entraînement des pompiers !

Si elle y arrivait.

Parce qu’elle n’y était pas encore. A vue de nez, une heure de marche, voire une heure trente. En bus, vingt minutes.

Si seulement ce type ne s’était pas enfui.

Enfui ? Qu’est-ce qui l’avait fait déguerpir comme ça ?

Camille reprit le journal.

*Stupid girl !*

Celà ne la choquait pas, elle, mais le mot “mutant” s’étalait en gros sur la Une, juste à côté de l’adresse de l’Institut.
Parfait !

Elle venait de se dévoiler à un inconnu, qui avec un peu de malchance était déjà en train de donner son signalement à la Police. Si les flics étaient un brin finauds, ils feraient le rapprochement avec l’affaire qui s’était passée devant le café breton, trouveraient ça louche, et déploieraient un dispositif de degré supérieur pour l’appréhender.

Sa marche s’accéléra brutalement.

*De l’aide, de l’aide, il me faudrait de l’aide.*

Mais avec Estelle, elle avait déjà pas mal grillé ses cartouches de chance en stock. Son cœur se mit à battre un peu plus fort, tandis qu’elle cherchait à arriver à destination en empruntant les rues les moins fréquentées possibles, le genre d’endroits que toute jeune fille sensée évite comme la peste..

20 minutes plus tard, d'une marche effrénée, Camille s'arreta enfin sur les genoux à Salem. Appuyée contre un mur, Camille essayait de reprendre son souffle.

Une fois de plus son pouvoir s'était activé inopinement et elle ne comprenait pas pourquoi celui-ci s'emballait.

Personne ne se concentre sur sa marche. C'est un phénomène naturel, un réflexe, les muscles travaillent indépendemment de la pensée. Normalement...

Aussi lors de sa marche forcée, Camille s'était mise à divaguer, à penser à ceci, à celà, à ses parents...

*...qui doivent m'imaginer en train de potasser des réactions acido-basiques...*

...à Ava...

*...qui doit m'en vouloir à mort, je vais passer un sale quart d'heure au prochain appel...*

...à cet Institut...

*...et à ceux que je vais y rencontrer et dont je ne sais rien, en supposant que j'y parvienne...*

...et enfin à elle-même...

*...qui est partie pour débarquer sans crier gare et sans une affaire à se mettre dans un endroit inconnu, joli programme.*

En clair, la dernière chose à laquelle s'intéressait Camille, c'était aux mouvements de ses jambes, à ses contractions musculaires répétées et tout ce qui allait avec. Tout juste regardait-elle où elle posait ses pieds...

*...parce que les chiens se croient vraiment tout permis de nos jours.*

Elle s'arrêta un instant pour regarder son plan, compta les rues qui lui restaient à traverser, évalua le temps, une heure et quart, reprit sa marche.

En pensant.

Et sans faire attention aux panneaux qui défilaient à toute vitesse, à cette avenue qu'elle n'aurait dû traverser que bien plus tard, à cette voiture qui freina brusquement, à ce clochard sur le banc qui la vit passer avec des yeux médusés.

Jusqu'à un certain point. Salem, précisément.

Ce quartier où elle se trouvait déjà. Une heure et quart, avait-elle dit. Elle regarda sa montre.

*Douze minutes et quarante secondes.*

Et cette fatigue qui montait, d'un coup. Camille chancela, puis s'adossa contre le premier obstacle qu'elle rencontra. Un mur tout ce qu'il y'avait de plus banal, mais qui se trouvait être providentiel. Elle était vidée, lessivée.

*Est-ce que je suis vraiment dangereuse ?*

Elle jaugea la situation. Présentement, non, elle n'était pas une menace pour la ville. Mais qui sait...? Sur un pont, elle pourrait bousculer des gens...et même sans qu'il n'y ait d'altitude, si elle renversait une personne âgée, à sa vitesse...elle n'avait jamais été férue de mécanique, science aussi inutile que la chimie selon elle, mais elle en savait assez pour être consciente des risques de son énergie cinétique.

*Bonne nouvelle. Je suis presque arrivée.*

Elle jeta de nouveau un coup d'oeil à son plan. Elle se rendit seulement compte que le gros pâté sur l'affiche correspondait à l'ensemble de Salem. Elle était...boaf...dans un rayon de trois kilomètres autour du lieu qu'elle cherchait.

Mais hors de question qu'elle parte en courant. Elle resta encore quelques minutes appuyée pour reprendre son souffle, puis se remit en marche.

Pas à pas, doucement.

Avec une faim de loup. Le Couign Amann de tout à l'heure n'était même pas une réserve suffisante, alors même qu'il n'était constitué que de beurre et de sucre, pour autant que la jeune fille s'y connaisse en cuisine.

Là, elle en aurait bien avalé trois ou quatre. Comme entrée.

Camille se trouvait en plein centre ville, elle se trouvait à deux pas de l'institut mais elle se trouvait déjà en dehors de son plan. Il lui fallait trouver un autre moyen de trouver l'institut.

La rue était déserte à part une vieille dame assise à un arret de bus et qui donnait des miettes de pains aux pigeons.

[Tu arriverras au cours de l'après-midi de la journée qui vient de commencer.]

Trouver un Institut dans Salem, c'est comme chercher le sachet gratuit de Mistrals Gagnants : on sait pertinemment qu'au bout du compte, on y parviendra, mais ça peut prendre longtemps.

*Surtout avec le sens de l'orientation d'une cuiller à soupe.*

Camille roula le journal en boule, le papier froissé avait toujours calmé ses nerfs. Elle eut un regard circulaire sur la rue vide, une poubelle, chouette. En cinq pas, elle y fut.

*De l'aide, n'importe quoi, une carte au trésor, une plume qui vole, ou...*

Ou une vieille qui donne à manger aux pigeons.

*Une terroriste de plus. Encore un peu de fientes en grains ? Qu'est-ce qu'ils ont les vieux à absolument vouloir nourrir les pigeons en permanence ? Ils trouvent que leur ville n'est pas assez blanche ?*

Faute de mieux, c'est vers cette pourvoyeuse de mauvaises surprises aériennes que se dirigea le jeune Bretonne. Approche hésitante, les mains dans les poches, et voix tranquille.

Bonjour madame, je...

La réaction de son précédent "informateur" lui revint en mémoire. Pas rassurée. Les mutants avaient mauvaise réputation, dans ce village, sans prétention.

...je suis journaliste, apprentie. Je fais euh...un reportage sur une école avec...des gens bizarres, à Salem. Vous sauriez où elle se trouve ?

*Bien, tu apprends la subtilité, dis-donc...*

Camille ne réalisa qu'après coup qu'elle n'était pas vraiment capable de résister à une longue argumentation et à une belle présentation que prisaient les personnes inquisitrices. Elle résolut alors, tout en continuant la discussion, de s'inventer une identité temporaire. Et puis une journaliste, ça pourrait toujours servir à un autre moment, vue la tendance à faire s'éloigner les gens.

*Alors...Jamie ? Non, pas Jamie, c'est grillé que je suis française. Angélique, Angélique Harris. Mon père est américain, de...l'Illinois, mais ma mère est de Paris, et j'y ai grandi. Beuh...obligée de me considérer comme titie parisienne...bref...études de journalisme, pigiste au...voyons...à l'Independent Tribune. Du New Jersey. Voilà, un nouveau quotidien. Parfait.*

La vieille dame continuait à jeter allègrement ses miettes de pains aux pigeons qui n'en avait cure préfèrant les bon juteux ver de terre qu'il pouvait trouver dans les parterre de fleurs.

"Petit, petit, petit, venez voir mamie.."

Concentrée, elle n'avait pas vu ni entendu Camille qui essayait tant bien que mal de trouver l'institut mais qui jouait de malchance puisque son interlocutrice était sourde comme un pot.

"Qu'est ce que vous avez dits, jeune fille? Parlez fort à droite"

*Une émule de Beethoven...c'est bien ma veine.*

Voyant qu'elle était positionnée à la gauche de son efficace informatrice, elle la contourna, tout en veillant à ne pas faire fuir les pigeons qui s'agglutinaient autour d'elle. La vexer n'était pas la meilleure manière d'entamer une discussion qui s'annonçait déjà longue et douloureuse.

Ce devait être le destin qui se vengeait de Camille, laquelle n'avait pas assez profité de la longue marche qui aurait du l'attendre pour arriver jusqu'à Salem. En retour, il lui proposait une conversation usante.

Je suis u-ne jour-na-liste !

*Du calme, du calme, moins de sarcasme dans la voix.*

Je cher-ch'un en-droit où vi-vent des gens qui font des cho-ses é-tranges à Sa-lem pour fai-re un re-por-tage.

Secrètement, la Bretonne priait de tout son coeur pour que la Troisième Âge à qui elle parlait n'aie pas en plus les syndromes de l'Alzheimer. Si c'était le cas, elle doutait de parvenir à répéter plus de trois fois ce genre de phrases pour se faire comprendre.

Regard vers les pigeons qui s'amassaient stupidement sur le trottoir. Subitement, l'envie d'en shooter un était devenue dévorante. Ce serait un exutoire au cas où la vieille ne lui apprenne rien de bon.

*J'ai toujours rêvé de mettre de grands coups de latte dans une de ces saletés...*

Camille inspira fort. Non. Garder la maîtrise de ses nerfs, encore une petite demi-heure, le temps de trouver l'endroit. Car ça n'allait pas lui prendre plus d'une demi-heure, hein ? Après, elle serait dans un endroit nouveau, qui serait sans pigeons, sans vioques bouchés, sans flics, sans tout ce qui l'avait contrariée aujourd'hui.

Le rêve.

*Allez, ma grande, un petit effort, de la bonne volonté, montre que c'est pas un sacerdoce pour toi de l'interroger...*

Elle s'approcha un peu plus de la vieille dame, pour avoir à parler moins fort.

Je m'appelle Angélique Harris. C'est mon premier reportage, et on m'a dit qu'il y'avait des sortes de...de sorciers qui vivaient à Salem. Vous en avez entendu parler ?

Dans un effort surhumain, un sourire parvint même à se plaquer sur ses lèvres. Après tout...mieux valait une petite grand-mère qu'une bande de zonards.

La vieille femme sur saute et prit peur en voyant Camille s'approvhar aussi prêt.

"Mais ne criez pas, vous allez me faire avoir une crise cardiaque."

Elle reprit quelque peu ses esprits.

*Qu'est ce qu'elle me veux? Elle peut pas me laisser tranquille? Ah oui, les sorcières...*

"Vous avez raisons jeunes filles, j'étais petite mais je me souviens très bien, les bûchets, on les avait tous aligné sur la place du village et on les a tous brulés ces érétiques satanistes. L'histoire fait date maintenant. Vous n'aviez jamais entendu parler des sorcières de Salem. Vous faîtes une piètre journaliste pour ne pas savoir ça. Mais je vous rassure, il n'y a plus de problème à Salem depuis tout ce temps."

La culture de Camille n'était pas fondamentalement identique à celle de n'importe quel gosse pur américain. Bien que "Sorcières de Salem" ne soit pas une expression qui lui soit absolument étrangère...mais elle s'en voulait d'être tombée sur une personne de cet âge. Encore un peu et elle l'entendait déjà se plaindre de la fin de la traite des Noirs.

Une bonne WASP bien comme il fallait avant...

Si elle avait connu l'épisode des sorcières, elle devait avoir dans les quatre cents ans. Donc c'était simplement une vieille nostalgique touchée par l'Alzheimer. Ou une réincarnation d'un Inquisiteur de l'époque.

Sorcières de Salem...

Dites-moi...ces hé...hérétiques, comme vous dites...savez-vous où elles ont été brûlées, dans le quartier ? Je...je voudrais faire un point historique, voir ce qu'est devenu l'endroit...

Si effectivement c'était dans ce Salem là qu'on avait brûlé les "sorcières", alors Camille imaginait bien le petit malin fondateur de l'Institut s'installer sur le lieu de l'ancien bûcher. Une intuition, sans doute totalement à côté de la plaque, mais ça valait le coup d'essayer...

Après tout...ce serait un symbole fort !

Elle-même ne croyait pas aux sorcières, mais les contes de son enfance en étaient remplis. Forcément, quand on loge à moins de cinquante kilomètres de Brocéliande...

Et maintenant, en l'état, elle se prenait elle-même plus ou moins pour une magicienne. Elle faisait des choses que, normalement, personne n'était capable de faire. Les autres dans son cas avaient dû passer par ce stade avant de s'accepter tels qu'ils étaient. Elle ne croyait pas qu'un matin, un type aie pu se réveiller en se disant "Tiens, ce matin, c'est cool, je suis capable de devenir invisible, la vie continue".

En tout cas, H.G. Wells ne l'avait pas imaginé comme ça.

La vieille dame était beaucoup plus attentive à ce que disais Camille qui n'avait plus besoin de parler aussi fort.

"Pour les vstiges, allez voir dans la vielle ville. Vous continuer et vous tournez à gauche dans Greymalkin Lane ensuite, c'est toujours tout droit jusque Templar square. Vous ne pouvez pas vous tromper."

La dame baissa soudain d'un ton.

"Mais faites attention, il y a depuis peu des gens bizarres, je crois qu'une nouvelle chasse aux sorcières va arriver."

Puis elle reprit son travail en arrosant le trottoir de miettes de pain dont aucun pigeon ne voulait.

Le sourire intérieur de Camille fit pétiller ses yeux. Elle prit une mine de conspiratrice, en fronçant les sourcils, puis répondit à voix basse, se penchant un peu plus.

Ne vous inquiétez pas madame...s'ils y'a des gens louches, je les dénoncerai aux autorités. Merci beaucoup en tout cas !

Puis sa joie s'afficha sur ses traits, elle fit un petit signe de la main et s'éloigna sur le chemin que lui avait indiquée son informatrice-à-son-insu.

Si elle avait su qui j'étais...je serais certainement encore en train de recevoir une avalanche de coups de sac à main.

Petite réflexion.

Et si ledit sac est rempli de grain, ça doit faire mal...

Qu'importait. Elle était en bonne voie, et elle le sentait. Pour un peu, elle se serait mise à courir, mais elle se souvint de ses expériences précédentes, et se décida pour une marche prudente.

En sifflotant. Parce que la vie était belle. Une vieille chanson bretonne, qu'un artiste contemporain avait remixée. Tri Martolod, ça s'appelait, "Trois marins". Camille se souvenait encore de son père parlant de l'histoire de cette chanson et de tous ceux qui l'avaient interprété, certains changeant même les paroles et arrêtant de chanter pour se mettre à parler vite sur la musique ! Heureusement que cette mode était passée...

Et elle guettait...Greymalkin Lane...Templar Square...à chaque pas, son rythme cardiaque accélérait. Doucement, du calme, se dit-elle. Ils ne voudront pas d'une puce dopée à la caféine. Il lui fallait être présentable.

Camille marche tranquillement, elle tourna dans la rue indiquée pour rejoindre Templar Square. Le nom de Greymalkin Lane lui resonnait aux oreilles pendant sa recherche.

Elle entra dans une longue rue bordée d'arbres, de grands portails donnait sur des parcs. Cela devait être une rue avec de riches propriètaires. Un calme malsain regnait malgré tout, pendant son avancée.

Elle continua longtemps à siffloter, et ne s'interrompit que lorsqu'elle se rendit compte que sa musique était le seul bruit audible. Banlieue paisible ? Bien plus que ça alors...

La jeune fille s'était habituée à l'habitation du centre-ville New-Yorkais, là, elle se croyait revenue dans son village près de Vannes, en hiver, lorsqu'il n'y avait pas de vent : le silence absolu.

Pas une voiture, pas une télé allumée...C'est un quartier de fantômes ou quoi ?

Son imagination s'égara un peu, elle se souvint que c'était dans ce genre de situations qu'arrivait l'Ankou pour annoncer la mort d'une personne...même s'il limitait son aire d'influence à la Bretagne, ce faisait beaucoup avec les sorcières de la vieille. Beaucoup de coïncidences.

Assez pour arrêter de siffloter, en tout cas. Et pour avoir le pouls qui accélère de nouveau, d'inquiétude cette fois.

La marche de Camille s'accéléra, mais son esprit se dispersait. Simultanément, elle tentait de contrôler sa vitesse, de ne pas se laisser gagner par la peur, de chercher une explication à cette ambiance...glauque, oui, glauque était le mot, tout en continuant à tirer des plans sur la Comète au sujet de l'Institut.

Son sourire avait disparu de son visage. Elle jeta un regard derrière elle, pour être sûre de ne pas être suivie, puis accéléra.

Un peu.

Du moins, elle l'espérait. Ce n'était pas naturel. Et même le quartier bourgeois qu'elle traversait lui semblait d'un coup moins sûr que les immeubles du Nord d'où elle venait, et que le type avec son bonnet.

Le type avec son bonnet...
Il ne l'avait pas donnée, tout de même ? Il avait paru bien pressé de prendre la tangente...

Camille s'arrêta, se plaqua contre une clôture. Elle n'entendait pas de sirènes de police. En général, les bleus étaient assez peu fins pour avertir longtemps à l'avance de leur arrivée. Mais si ce n'était pas le cas cette fois ?

Sa marche reprit. Elle ne pensait plus, elle ne faisait que prier, pour que ses pas la mènent très vite à cet Institut.
Pour qu'enfin, définitivement, elle puisse être rassurée.

Camille continua sa route sur Greymalkin Lane, arrivé au milieu de la rue, l'atmosphère changea un peu, des voix, des cris, des rires venaient de l'un des domaines à la l'immense grille noir en fer forgé.

Puis quelques pas plus tard, elle retrouva la même atmosphère pesante qu'avant. Camille marcha encore longtemps pour arriver à Templar Church où elle eut la surprise de ne rien trouver mis à part une Eglise en ruine dan un quartier encien de plusieurs siècles.

Les visiteurs était peu nombreux pour voir cette curiosité. A l'acceuil, un employé somnolait à force d'attendre le travail.

La jeune fille ne s'attardait pas sur le paysage, se concentrant sur sa marche. Ce n'était pas, mais vraiment pas le moment de jouer à la fusée humaine, pas si près du but. Les pavillons se succédaient, tous aussi mornes et révélateurs du peu de goût de l'Américain riche pour l'originalité. Elle imaginait parfaitement les hommes rentrant du travail dans leur trois-pièces cravate et leur Cadillac, leur femme les attendant, empestant le parfum chic.

Des moutons. Des moutons aisés, mais des moutons quand même. Qui suivent le berger de la Bourse.

Elle passa devant une énorme grille noire. Pas d'inscription, rien que des bruits et des rires. Camille ne reconnut pas s'il s'agissait d'enfants, mais à priori non. Mais il lui fallait être sûre. Elle ne voulait pas se retrouver à sonner au portail d'une secte. Par principe.

Elle continua sa marche, tout en essayant de penser, malgré le tumulte qui se jouait derrière ses sourcils. Hier, elle aurait sonné sans hésitation. Mais avec les deux...incidents, sa confiance en elle venait de prendre un grand coup.

Elle poursuivit, déterminée à être absolument certaine que l'endroit qu'elle cherchait était bien celui-là.

Retour dans la peau d'Angélique Harris. Pour un petit reportage sur les lieux emblématiques de Salem. Un tirage monstre en perspective...

Non, pourquoi un journal du New Jersey s'intéresserait à Salem ? Ou alors, mieux : ce qu'est devenu le lieu où les Sorcières ont été jugées. Oui, accrocheur, "les Sorcières de Salem, presque quatre cents ans après".

Restait à trouver un nouvel interlocuteur qui ferait un bon informateur.

Comme le type qui dort à l'accueil de l'Eglise.

Camille se revêtit de son plus beau sourire commercial qui dévoilait toutes ses dents - droites, heureusement - et s'approcha.

Bonjour ! Angélique Harris, Independent Tribune, je suis pigiste dans cette feuille de chou. Je fais un reportage sur Salem, parce que sous peu, cela fera quatre cents ans que les Sorcières y ont été jugées. Alors j'étudie votre quartier et ce qu'il est devenu.

Petite pause. Camille sortit son agenda, un stylo, et une page blanche. Prête à prendre des notes.

Alors. Cette Eglise ? A-t-elle une histoire ? Et cette rue, a-t-elle été le théâtre d'évènements, de crimes, d'actes héroïques ? Cette grille noire, là-bas, qu'est-ce qu'elle cache ? Y'a-t-il des personnages célèbres qui vivent ou ont vécu à Salem ?

Le stylo dans la bouche, la jeune fille semblait attendre avec impatience les réponses à ses questions. Alors qu'en réalité, une seule l'intéressait. Mais il faut savoir jouer son rôle.

Le guichettier écouta Camille avec attention, excité, il commença à chercher toutes sortes de prospectus sur l'Eglise jusqu'au moment où il entendit la mot "sorcières". Il continua néanmoins à écouter calmement la fausse journaliste. Un second mot le fit définitivement sortir de ses gonds, ce fut cette fameuse 'grille noire', il jeta tous les prospectus qu'il avait à la main au visage de Camille.

"Les mutants, toujours cet institut de malheur, il n'y en a plus que pour eux! hurla-t-il Oui, vous pouvez y aller, c'est là, soit les gens ont peur d'eux et ne veulent plsu visiter soit on me sort des excuses bidons pour savoir où c'est. Les Sorcières de Salem, mais revisez un peu vos classiques, votre journal doit vraiment être un torchon pour engager des journalistes comme vous qui ne vérifie rien et ne cherchent même pas à être discret."

Camille reculait et commençait à rebrousser chemin tandis que le guide continuait à lui hurler dessus.

"Sachez, que pour votre culture personnelle, que les Sorcières de Salem, c'est Salem dans le Massachusetts et certainement pas dans l'état de New-York, on est juste une petite ville de banlieue créé avec l'extecion de la mégalopole!!"

Woups...

La tuile. La vieille était vraiment dérangée, alors. Bon, c'était un mal pour un bien, mais la réaction de ce type était tout de même drôlement disproportionnée.

Elle ne se retourna pas alors que le guide hurlait, mais lança quelques mots par-dessus son épaule.

Au moins, c'est pas votre sympathie qui vous étouffera ! Merci quand même !

Vieille bique, et vieux bouc. J'ai de la veine dans mes contacts, moi. Heureusement que je ne suis pas effectivement journaliste...

Elle serait capable, au hasard, de tomber sur le roi des menteurs au milieu de cent personnes.

Elle rangea son agenda, après avoir noté, à la date d'aujourd'hui, que la plupart des habitants de Salem étaient des abrutis, et marcha vers la grille.

Camille était fière d'elle. Elle avait réussi à trouver son chemin, et plus que tout, à ne pas insulter trop méchamment le type qui l'incendiait. Gros progrès en orientation et en self-control. Habituellement, elle était capable de sortir des tirades de cinq minutes pour répondre à de tels propos. Là, non. Enjoy.

Un signe ironique de la main au crétin qui l'avait plus ou moins à son insu guidée, et elle sonna au portail.

Et ne sut pas quoi dire. Alors, elle bafouilla.

Bonjour ! Il...il y'a quelqu'un ? Je m'appelle Camille, on m'a dit que c'était un Institut qui pourrait m'aider...enfin je veux dire...sur les mutants. Oui, je dois me rendre à l'Institut sur les mutants, c'est ça.

La grille s'ouvrit doucement devant Camille pour laisser apparaitre un grand parc et une chemin avec en ligne de mire, un manoir.

"Vous êtes à l'institut Xavier pour mutants, je suis Cerebra, l'IA des lieux, votre signature mutante a été détéctée, entrez, vous croiserez bien quelqu'un pour vous acceuillir."

[La suite ici, ravi de t'avoir dirigé.]