[Detroit] I'm going to "fac" !

Université de Détroit - Journée mi-ange mi-démon.

Billy se réveille en fanfare, à l'heure, s'étirant joyeusement un sourire rivé sur ses lèvres. Aujourd'hui c'est à la fois la pire matinée de la semaine mais aussi le meilleur après-midi de la semaine. C'était à la fois excitant et barbant, mais pour Billy, l'excitation primait sur l'envie de retourner se coucher.

D'entrée de jeu, sociologie et histoire. De quoi finir sa nuit ou prendre son petit-déj qu'on a pas eu le temps de prendre puisqu'on s'est forcément levé en retard et qu'on a dû enfiler ses vêtements en quatrième vitesse, une chaussette différente à chaque pied. Si les profs étaient un tant soit peu intéressant cela pourrait changer la donne, mais ils étaient définitivement barbant au possible et semblaient réciter une berceuse en lieu et place de leur cours. D'ailleurs les rangs étaient souvent désert ou plutôt se désertifiaient au fil de l'année.

Venait l'après-midi, et là c'était une toute autre chose ! Pour commencer, technologie avec un jeune prof passionné de sa matière, expliquant des machines et autres mécanismes toujours plus déments et perfectionnés, faisant des démonstrations régulièrement. Cette matière était un vrai ravissement pour quelqu'un de curieux comme Billy. Il roulait des yeux ronds devant les merveilles de technologie qu'on lui présentait, suivait et notait chaque information distillée par le professeur et faisait même des recherches en plus à la bibliothèque pendant son temps libre. C'était surement la matière où Billy excellait le plus tant il y mettait du coeur. Dans la foulée, l'apothéose de la journée avec l'art plastique. Déjà que Billy adorait bricoler, manipuler et créer avec ses mains, mais en plus, ce qui ne retirait rien à l'intérêt du cours si ce n'est l'inverse, le professeur était une charmante jeune femme, Jenny Williams. Des cheuveux d'or, des yeux azurs et un sourire à faire fondre la banquise, bref il n'y avait que la matière qui empêchait le cours d'être rempli de garçons bavant sur leur paillasse.

En général, Billy finissait cette journée sur son petit nuage, des petits coeurs roses virevoltant devant ses yeux, un sourire béat gravé sur son visage et des idées plein la tête.

Prêt à partir en cours après une collation de début de journée, Billy chaussa ses rollers et se lança en direction de l'amphi. Il fallait traverser le campus et Billy aimait faire quelques figures acrobatiques en chemin pour ne pas perdre la main et pour s'échauffer un peu pour cette journée spéciale.

Billy s'amusait, slalomait. Il adorait ça et en un rien de temps il serait arrivé, d'ailleurs il approchait de sa destination, juste le temps d'une dernière figure pour terminer en beauté. Mais, depuis quand les buissons ont des chapeaux ?!

Il eut tout juste le temps de se rendre compte avec effroi que quelqu'un était sur sa trajectoire et qu'il allait lui rentrer dedans à pleine vitesse. Et s'il ne voulait pas s'arrêter en se mangeant la plate-bande, il n'avait qu'une solution.

- Baisse-toi !

Billy sauta à plat ventre dans l'espoir de passer au-dessus du gars sans le toucher. Pourvu qu'il ne le touche pas, c'était le principal, tant pis, Billy tenterait un atterrissage comme il pourrait, peut-être par un saut périlleux avant. Il ne pouvait que serrer les dents, croiser les doigts et espérer que le gars aurait un peu de réflexes et baisserait la tête.

C'était la dernière chance. Pas d'autre solution que de sauter par-dessus aussi Billy prit son élan, crut un instant que le gars avait deux de tension et qu'il allait lui dévisser la tête quand il finit par la baisser et se protéger de ses bras. L'envolée magistrale, l'atterrissage... moins.

- Mpfff ! fut le grognement qu'il poussa alors qu'il retombait sur son bras.

Heureusement, plus de peur que de mal. Lorsque le gars se pointa et lui demanda s'il était encore vivant, Billy répondit :

- Possible... avec un petit sourire sur les lèvres.

Il accepta la main tendue volontiers et se redressa. L'air sympathique du gars et ses mots le rassurèrent quant à une possible engueulade et il sourit au gars en retour en ajoutant :

- Le karma ché pas mais on a eu du bol ! M'enfin ça me servira de leçon... ouah le flipe que j'ai eu ! J'ai bien cru que j'allais te décapiter ou un truc du genre ! Sinon... moi c'est Billy ! dit-il en tendant la main pour une poignée de main.

Il avait l'air un peu baba cool mais sympa ce type. Et puis une journée comme ça faut pousser pour la pourrir. Et puis un gars sympa c'est n'est jamais de trop.

"Me décapiter? Ça aurait été fâcheux. Je pourrais plus mettre mon chapeau!"

Malgré la note d'humour dans sa voix, le jeune homme avait un visage on ne peut plus sérieux. Il porta une main à son chapeau, dont il caressa le bord doucement. Finalement, il redirigea son attention sur Billy et lui envoya un sourire qui montrait une série de dents blanches éclatantes. Il se tourna vers l'endroit où il avait quasiment laissé sa tête. Il se frotta la tête et soupira profondément.

"Hey Mec...T'aurais pas vu une veste? Merde. Je me suis encore fait voler mon veston."

Finalement, en se retournant vers Billy, le jeune homme afficha une moue triste. Il finit par reprendre un sourire éclatant lorsque Billy se présenta:

"Billy? Waw comme le gars qui...Ah non, lui c'est Paul. Ou bien Peter. Bah salut Bill, moi c'est Eric."

Eric baissa les yeux vers le bras que lui tendait Billy et finit par lui tendre le bras pour lui serrer la main. En serrant la pince, le regard du jeune homme se dirigea lentement vers son propre bras. Eric leva la tête rapidement et lâcha la main de Billy. Ses deux mains se dirigèrent vers le col du veston qu'il avait sur le dos et il s'écria:

"Je l'ai trouvé, arrêtez les recherches. C'est mon veston chanceux! T'étudies en quoi, mon pote Billy?"

Billy sourit machinalement lorsque le gars lui répondit, puis il eut un doute alors qu'il voyait son air sérieux en parlant de son chapeau. Ca devait être son trésor en quelque sorte... Ce qui l'intrigua plus fut lorsqu'il chercha son veston. Par réflexe, Billy regarda le même endroit que le gars puis regarda la veste qu'il portait sur lui.

* Bizarre... c'est pas déjà une veste qu'il a sur le dos ? Il en aurait une autre ? J'ai rien vu mais bon... possible... *

- Bah j'ai rien vu de spécial... dit-il d'un air désolé.

Lorsqu'il se présenta à son tour, Billy fronça les sourcils à l'énumération des autres prénoms. Est-ce qu'il le confondait avec autant de monde que ça ?! Puis il reprit son sourire et répondit d'un air chaleureux :

- Enchanté Eric !

C'est alors qu'Eric retrouva son veston... sur son dos. Ouvrant de grands yeux d'étonnement, Billy resta bouche bée un instant devant ce spectacle hallucinant, un vrai moment de délire qu'il pourrait raconter pendant des années dans des réunions entre potes.

* J'y crois pas !... Comme les vieux sauf que eux c'est les lunettes... C'est un extraterrestre ce type ?! Pas possible !... *

Retrouvant son sourire, Billy répondit tout en regardant sa montre :

- Bah j'ai pris un peu de socio et d'histoire mais mon truc c'est plutôt la technique. J'aime bien bricoler des trucs pi le prof est super bien. J'allais en cours d'ailleurs mais si tu veux on peut se retrouver ici à midi pour continuer à discuter, ça te dit ?! proposa-t-il avec un grand sourire.

Fallait jamais refuser une rencontre avec un type sympa, enfin lui était un peu "space" mais il n'avait pas l'air méchant et ils risquaient de s'en payer une bonne tranche tous les deux, il le sentait. Et au cas où, Billy pourrait toujours l'aider à retrouver son veston !...

"Waw...Socio, Histo, Techno. T'es un homme à tout faire. Mais ça pousse à réflexion sur ce que tu voudrais faire plus tard..."

Eric sembla réfléchir à la proposition de Billy quant à se retrouver ici et discuter. Il réfléchit quelques secondes...Puis quelques autres. Finalement, il leva son bras droit et regarda son poignet. Il fronça les sourcils et leva l'autre bras pour en regarder le poignet. Il jeta un coup d'oeil à la montre qu'il portait et finalement hocha la tête:

"J'ai quelque chose qui commence dans 8 minutes jusqu'à 12h23. Viens me rejoindre à l'amphithéâtre 3B du Pavillon de Physique. Je serai là."

Puis sans plus de paroles, le jeune homme tourna les talons et se mit à marcher. Billy se rendit rapidement compte que, malgré qu'Eric avait parlé du Pavillon de Physique, il se dirigeait dans une direction complètement différente. De toute facon, le jeune mutant n'avait pas vraiment le temps de penser à tout cela, car, il réalisa, que son cours commençait dans exactement...8 minutes. Il se dirigea alors jusqu'à son Pavillon, roulant prudemment cette fois.

Quand Eric lui dit qu'il était un homme à tout faire, Billy sembla gêné et se frotta la tête, un sourire timide sur les lèvres. C'était loin d'être faux à tout bien y réfléchir. Il faisait de tout et ça lui plaisait ainsi.

Lorsque son interlocuteur sembla chercher à quel poignet il avait mis sa montre, Billy se dit qu'il était vraiment tombé sur un alien. Puis il lui donna rendez-vous dans un amphi... bizarre mais pourquoi pas après tout.

- Ok ! A tout' alors ! dit-il avant de quitter Eric.

Alors qu'il prit un peu plus son temps pour la fin du trajet, Billy repensa un peu à l'étrange rencontre u'il venait de faire. Un drôle de zozo que voilà. Le lieu de rendez-vous semblait pas vraiment habituel, en général quand on voulait se retrouver c'était plutôt dehors ou dans le parc ou à la bibliothèque, mais un amphi de physique... mais vu le gars on pouvait se demander ce qu'il y avait "d'habituel" chez lui tant il semblait venir de Mars ou Jupiter.

Billy se dirigea vers son cours. Il aurait de toute manière surement un peu de temps pour repenser à cela entre deux ronflement de son voisin de classe...

Le voisin de Billy qui s'était déjà mis à ronfler lorsque l'heure sonna pour le commencement de la classe, montrait clairement à quel point le cours était interessants. Malheureusement pour Billy et contrairement à ses attentes, le cours n'avait pas été aussi palpitant que les autres semaines. En effet, il semblerait que le professeur ait un peu trop discuter dans les cours prédécent et maintenant ils étaient plein de matière à rattrapper. Ce qui expliquait la prise de notes, les diaporamas et la lecture constance du professeur. Toutefois, la classe se termina plus rapidement que ce que l'enseignant avait prévu justement du au manque de discussion et de participation en classe.

Billy put sortir de sa classe à 12h10. Il avait maintenant 13 minutes pour se rendre jusqu'à l'Amphithéâtre où Eric lui avait donné rendez-vous. Et cela ne lui prit que 3 minutes, puisqu'il était déjà tout près. Lorsqu'il arriva à l'amphithéâtre 3B, il passa sa tête dans la porte pour essayer de voir où se trouvait Billy. Rapidement, il entendit une voix familière...Il leva les yeux et remarqua son nouvel ami debout devant la classe, un micro accroché devant sa bouche. Tout en parlant, il écrivait un un petit écran qui se refletait sur un gros tableau derrière lui:

"Considérons par exemple la position et l'impulsion d'une particule. En utilisant les règles de la quantification canonique, il est facile de vérifier que les opérateurs de position et d'impulsion vérifient :"



"La relation d'incertitude est définie à partir des écarts quadratiques moyens de grandeurs conjuguées. Dans le cas de la position et de l'impulsion d'une particule, elle s'écrit par exemple :"



" Plus l'état possède une distribution resserrée sur la position, plus sa distribution sur les valeurs de l'impulsion qui lui est associée est large. Cette propriété rappelle le cas des ondes, via un résultat de la transformée de Fourier, et exprime ici la dualité onde-corpuscule. Il est clair que ceci mène à une remise en cause de la notion classique de trajectoire comme chemin continu différentiable."

"Des questions?"

Une femme dans l'assemblée sembla sortir de sa torpeur et leva la main. Eric la pointa distraitement.

"Monsieur Banner, vous avez écrit un article la semaine dernière dans un magasine scientifique qui explique votre théorie selon laquelle le gêne mutant serait apparut dans un passage spatio-temporel provenant du futur visant à faire développer l'espèce humaine plus rapidement, n'est-ce qu'une supposition ou avez-vous des preuves sur..."

"À en juger comment vous n'avez absolument pas poser de questions sur le contenu du cours présent, Mademoiselle, et aussi compte tenu que depuis le début de l'année scolaire j'ai toujours eu une moyenne d'environ 165 élèves par contre et qu'aujourd'hui nous en avons... 184... me pousse à supposer que vous et les autres indésirables de mon cours sont des journalistes qui ne comprenent rien en physique ni en science, proprement parlant. Je ne répondrai à aucune question qui n'ont pas rapport avec l'inégalité position-impulsion."

Les élèves pouffèrent de rire et on put distinguer facilement les 19 personnes de trop dans le cours qui se redressèrent dans leur siège et ne réagirent pas. Finalement Eric, le visage toujours impassible, quasiment un peu dans le vague, ajouta:

"Au prochain cours, nous verrons l'inégalité temps-énergie. Faites les lectures inscrites dans votre plan de cours et les exercices 3 à 10 dans votre cahier."

Billy regarda sa montre: 12h23 pile.

Bon sang, comment pouvait-on rendre une matière aussi navrante ! Billy enrageait un peu de voir comment un cours qui pourrait être intéressant se changeait en... un truc. Mais heureusement c'était la pause déjeuner et il était l'heure de rejoindre son extraterrestre.

Lorsque Billy arriva devant l'amphi, il roula des yeux à les faire tomber par terre en voyant Eric donner un cours de physique pas piqué des hannetons ! Et dire qu'il le prenait pour un gars à l'Ouest genre deux de tension alors qu'il était prof de physique à l'université. Et en plus il avait un auditoire plutôt nombreux et même... des journalistes ?!

Billy resta dubitatif lorsque la journaliste parla de ses déclarations sur les mutants.

Les mutants... cela faisait peu de temps qu'il avait entendu ce terme mais Billy savait qu'il ne s'agissait ni plus ni moins que de parler des gens comme lui, avec un quelque chose en plus que les autres.

Alors qu'Eric envoyait bouler la journaliste avec brio, la fin de son cours sonnait. Billy s'écarta un peu et laissa sortir tout le monde avant de pointer le bout de son nez, un sourire amusé sur les lèvres, il descendit à la rencontre du prof en disant :

- Mince alors ! Désolé m'sieur je savais pas ! Du coup j'me dis que j'aurais eu trop de remords de cabosser une tête bien pleine comme la votre !

Billy continua toujours sur un ton de plaisanterie :

- J'en suis pas là en physique et je dois dire que c'est tendu comme sujet, mais ça a l'air sympa ! Par contre je vous tire mon chapeau pour les journalistes, vous les avez bien mouché pour le coup ! En tout cas rassurez-vous je sais même pas de quoi ils parlent donc je risque pas de vous demander !

Par contre ça s'était pas tout à fait logique, mais Billy semblait simplement vouloir dire qu'il ne comptait pas polémiquer sur le sujet. D'ailleurs il ne valait peut-être mieux pas trop parler de mutant...

Alors qu'Eric lui disait qu'il n'y avait pas de "monsieur" qui tienne, Billy haussa les épaules en répondant :

- J'ai failli te tuer alors je suppose que j'ai pas l'choix ! J'te dois bien ça ! dit-il avec un sourire.

Il suivit son nouveau "pote" dehors et se pausa en face de lui. Il l'écouta parler des mutants et des journalistes avant d'ajouter son point de vue tout en occupant ses mains avec le gazon :

- Bah je crois que les gens sont soit jaloux de ne pas pouvoir faire de choses extraordinaires soit ont peur de ce qu'il ne connaissent pas. C'est pas tout neuf comme problème, j'ai vu ça en histoire. Et puis par exemple, ma mère est aveugle de naissance, ça la mine pas plus que ça mais les gens la prennent en pitié parce qu'ils ne voudraient pas être comme elle. A l'inverse les gens envient les mutants à pourvoir voler ou d'autre trucs du genre et donc finissent par les détester pour ça. L'autre choix ça me rappelle l'esclavage, on considérait que mes ancêtres n'avaient pas d'âme parce qu'ils étaient différents. Et bien là c'est pareil, les mutants c'est le mal parce qu'on y connait rien et que les gens ont peur de l'inconnu !

Détournant un instant le regard, Billy ajouta nonchalamment :

- Mais bon... c'est comme ça, faut vivre avec, moi je vie ma vie peinard au milieu de ça...

Parole un peu mystérieuses et potentiellement à double sens, mais Billy avait lancé ça sans penser à mal. Et même si un instant il pensa à sa propre condition de "mutant" comme le terme commençait à se répandre, il pensait plus généralement à la vie dans un monde d'envieux et de xénophobes. Ainsi donc le monde ne changeait vraiment pas, tout se répétait inlassablement...

Eric hocha longuement la tête avec le visage d'un philosophe. Assis sous un arbre, on aurait pu croire qu'il était Newton et qu'il venait de réaliser qu'il y avait de la gravité sur la terre. (En passant c'est pour ca que la pomme était tombée). Il se tourna vers Billy qu'il dévisagea quelques secondes. Finalement ajouta:

"Tout le monde a peur de ce qu'ils trouvent différent...Heck. Ils ont peur de moi souvent. Comme si j'étais un genre de weirdo. Je vois pas pourquoi..."

Eric gratta sa barde de quelques jours, son regard se perdit au loin et il sembla se mettre à réfléchir encore. Et il répondit d'une voix distraite:

"C'est pas toi qui doit d'adapter. C'est les autres. Et s'ils sont pas capable, c'est leur perte. Ils perdent du bon monde!"

Billy ne sut dire si Eric faisait référence à sa mère, aux mutants en général ou au mutant - lui. Mais le jeune homme ne semblait pas vraiment dérangé par tout ce qu'ils avaient dit. Il semblait réfléchir à quelque chose de beaucoup plus profond...beaucoup plus sérieux. Comme si le monde chamboulerait avec ce qu'il pensait et...

"J'ai faim. Je t'offre un sandwich sous-marin."

Billy écoutait son ami parler, l'esprit un peu ailleurs. Néanmoins les dernières paroles d'Eric furent tellement énigmatiques ou plutôt ambigües que Billy resta dubitatif quant à sa compréhension du sens de la phrase. Est-ce que Eric venait de lui avouer qu'il était un mutant ? Est-ce qu'il avait juste parlé de la mère de Billy ?

Eric serait lui aussi un mutant ?!

La question tournant dans la tête du jeune garçon, son attention glissa hors de la conversation. C'était peut-être la première fois qu'il rencontrait quelqu'un avec un don particulier, tout comme lui. Même si des histoires de mutants foisonnaient ces derniers temps, c'était un peu comme le monstre du Loch Ness, tant qu'on en voit pas un de ses yeux c'est difficile de croire en l'existence. Même si Billy était convaincu à 99.9% d'être un mutant, il avait une part de lui-même qui pensait que ça n'existait pas et qu'il était seul à être "unique".

Billy, perdu dans ses pensées, fut réveillé par la proposition du sandwich.

- Un sandwich quoi ?! poussa-t-il.

Bon ok, il avait été réveillé mais réveillé ne signifiait pas qu'il avait tout compris. Et puis d'abord, qui peut dire qu'il est pleinement opérationnel juste après avoir été tiré d'une rêverie !?

Le doute subsistait aussi, en toute franchise, Billy demanda :

- Euh... j'ai pas très bien compris un truc... t'es un mutant ou pas ? Non pas que ça change grand chose entre nous mais c'est juste que je suis pas sûr d'avoir bien compris ton allusion, enfin si c'était une allusion bien entendu... dit-il d'un air un peu gêné.

En même temps il ne connaissait Eric que depuis le matin même aussi il était délicat de dire s'il risquait de se piquer au vif sur une question pareille.

Lorsqu'Eric répondit à sa question sur le sandwich, Billy sembla gêné et, un sourire un peu forcé sur les lèvres, il ajouta en riant jaune :

- Oui, bien sûr ! Hahaha ! Désolé j'étais plongé dans mes pensées et du coup j'ai pas réussi à faire le lien entre sandwich et sous-marin...

Alors qu'il suivait Eric, il écouta son explication quant à sa non-mutanité. Billy se sentit un peu bête d'avoir cru qu'il était lui aussi un mutant et surtout en voyant qu'Eric aurait bien aimé en être un. Bah c'était vrai que ça pouvait être sympa mais en général le début était franchement traumatisant (et encore on ne pouvait pas dire que le don de Billy était si impressionnant que ça !) et surement que certains mutants en bavait encore longtemps avait de commencer à maîtriser quelque chose, voire même certains n'y arrivait peut-être pas du tout ! L'idée d'un pouvoir destructeur incontrôlé avait de quoi faire froid dans le dos, mais à la limite il y avait bien des fous à la tête de pays avec la bombe atomique ou d'autres armes de cauchemar...

Les mains dans les poches, Billy parla d'un ton neutre alors qu'il répliquait :

- Bah tu sais... chui sûr que t'es déjà quelqu'un de spécial alors avoir un pouvoir mutant en plus ça changerait quoi ? En plus imagine que ton pouvoir ça revienne à changer le pétrole en chocolat tu serais bien avancé maintenant qu'il n'y en a presque plus ! J'adore prendre ma mère en exemple, bon faut dire aussi que c'est ma maman et qu'elle est géniale, mais la voir se déplacer dans la maison naturellement alors qu'elle ne voit rien, qu'elle puisse dire quand je mets mes coudes sur la table ou qu'elle devine à distance quand j'ai oublié de me brosser les dents, ça c'est du pouvoir extraordinaire et pourtant que je peux t'assurer qu'elle n'est pas mutante !

Il laissa un bref silence avant de reprendre soudain :

- J'en reviens pas que t'aies trouvé un truc pareil avec le coup des battement du coeur et tout pour détecter les mutants, c'est dingue ! Mais t'es sûr que ça puisse pas arriver à quelqu'un juste parce qu'il a peur des mutants avec toutes les salades que les média nous servent à longueur de temps ? Genre il stresse rien que d'y penser quand tu dis le mot magique.

Mettant ses mains derrière sa tête et souriant à pleines dents, Billy ajouta sur le ton de la plaisanterie :

- Alors... malgré le fait que j'ai failli te tuer, est-ce que j'ai transpiré de manière anormale ? Chui un mutant ou pas ?!

[Je m'excuse du retard!]

Eric regarda Billy avec une mine décue, comme un enfant qui se fait dire qu'il n'y aurait pas de cadeau dans son repas pour enfant. Le scientifique (fou?) haussa les épaules à la question de son nouvel ami. Ce n'était pas necessairement incroyable...Il y avait plein de trous dans sa façon de découvrir les mutants. Billy avait raison, bien sur, il était possible que ce soit quelqu'un qui soit nerveux face aux mutants ou quelqu'un qui le croyait lui-même mutant. Mais bon, il avait généralisé.

"Je ne suis pas un expert, mais...Je ne vois pas de signes que tu ais un battement de coeur, tout court, mon pote. Des fois c'est moins apparent. J'imagine que cela veut dire que tu n'as pas de pression artérielle trop élevée - pas de problèmes de stress apparent, pas de nervosité que j'ai associé aux "mutants" que je rencontre. Pour les battements de coeur c'est pas vraiment compliqué. Les veines sont visibles chez la plupart des hommes caucassiens qui ont une pression un peu élevée. Étant en bonne santé, sans pression que je puisse décelé et aussi parce que tu as la peau foncée, je ne peux voir si tu as un battement de coeur. Toutefois, je suppose que tu en as un sinon ce ne serait pas normal.

Quant à la transpiration, encore une fois, ça change d'une personne à l'autre. Depuis que nous sommes à l'extérieur, ta transpiration a augmenté légèrement, mais la mienne aussi. On peut voir d'abord quelques signes d'humidités sur tes tempes, mais il se pourrait simplement que tu réagisses au changement de température de l'intérieur vers l'extérieur, ce qui serait normal. Lorsque j'ai remarqué une transpiration accrue sur les élèves que je soupconne être des homo superior, je pensais plutôt à des goutes sur le front et des cernes disgracieuses sous les bras."

Eric regarda sa montre, puis en direction de la rue où se trouvait le restaurant. Il posa une dernière fois ses yeux intelligents sur Billy.

"Mais sérieusement, mec., je sais pas si tu veux ou non que je te dise vraiment si je crois que tu es un mutant. C'est normalement le but d'un questionnement de la sorte. Ça ne change rien du tout ce que je pense. Mais si tu y tiens, je pourrais confirmer que je n'ai pas de conclusion à faire à ton sujet. On va en disctuer en mangeant, tu veux bien. Je pourrais établir un plan de tests pour établir si oui ou non tu as des facultés extra-ordinaires, mais pas le ventre vide. Je manque de carburant.

Le jeune chargé de cours entama sa marche en direction du restaurant. Il se mit à siffler une chanson que Billy avait déjà entendu quelque part. Une chanson classique avec juste des instruments...Comme les sonneries de téléphone pour les vieux.

"Tu viens, j'espère! Aujourd'hui c'est le spécial deux pour un. Et je peux pas en prendre deux, c'est trop. C'est moi qui offre. De toute facon, tu me rends un service en ne gaspillant pas le deuxième sous-marin, n'est-ce pas?"

Un petit restaurant se dessina au loin. "La Sandwicherie" qu'il s'appellait. Eric se mit à marcher plus vite sur ses grandes jambes minces. Visiblement, il avait faim.

Lorsqu'Eric lui dit qu'il ne voyait pas de signe qu'il ait de battement de coeur, Billy eut une sueur froide qui lui descendit le long du dos. Avait-il remarqué un signe d corps hors norme de Billy ? Soudain il se prit à regretter d'avoir posé cette question et craignit que son nouvel ami ne soit trop perspicace. Mais la suite le rassura, il ne s'agissait que de la couleur de sa peau, heureusement ! Mais quand Eric lui proposa de l'étudier, Billy prit un air exagérément deçu en disant :

- Euh, Eric... c'était une blague hein ! Juste pour rire quoi... je comptais pas vraiment que tu m'étudies d'ailleurs je posais la question mais j'ai déjà la réponse, ou plutôt je m'en fiche un peu tu vois, j'aime bien ma vie comme elle est et puis faire le sujet d'étude je pense pas que ça me plairait, par contre un sandwich gratuit ça me plait plus comme idée !

Sautillant d'allégresse et en toute légèreté, Billy suivit son bienfaiteur pour un repas à l'oeil.

- Au fait c'est quoi le truc que tu siffles ? C'est vieux comme le monde ça non ?! demanda-t-il.

Billy haussa les épaules à la remarque d'Eric concernant les questions dont on ne cherchait pas la réponse. Mettant ses mains dans ses poches il dit avec un grand sourire :

- Rhoo ok, je tacherais de m'en souvenir, mais toi aussi faudrait que tu apprennes le second degré hein !

Arrivant au restaurant, son copain lui demanda d'éviter un groupe de gars. Billy connaissait ce genre de mecs dont le nombre faisait proportionnellement diminuer l'intelligence. En gros plus ils sont nombreux et plus ils sont stupides. Le classique quoi. Un nouveau haussement d'épaules s'en suivit alors qu'il ajoutait :

- Flute alors ! Moi qui comptait aller leur faire un gros bisou baveux sur la joue, je devoir retenir mes pulsions calines alors... héhé !

C'est alors que la patronne arriva. Et quelle patronne ! Plutôt jolie ce qui n'enlevait rien à l'intérêt du sandwich gratuit. Un grand sourire sur les lèvres, Billy répondit :

- Enchanté moi c'est Billy ! En fait j'ai failli décapiter Eric ce matin donc forcément ça crée des liens... dit-il en mettant une tape amicale dans le dos de son grand nouveau pote.

Lorsqu'elle leur dit de s'installer, Billy ajouta un simple "Volontiers !" avant de suivre son compère jusqu'à une table. Il regarda alors la carte en disant :

- Tu me conseilles quoi pour un appétit disons... moyen plus ? J'ai un métabolisme un peu supérieur à la moyenne avec le roller.

"T'as qu'à prendre comme moi, mon pote! C'est le spécial du chef! Sous-marins 12 pouces avec du steak, du fromage, une sauce...et tellement de légumes que le pain explose!"

Eric secoua la tête comme si manger un sandwich de ce genre était un péché. Ce que c'était probablement. Il jeta un coup d'oeil vers les machos et pouffa de rire.

"Darwin doit se retourner dans sa tombe. L'évolution en marche arrière. La Désévolution. Hum...Ce ferait un bon sujet de recherche cela."

La jeune femme revint avec un petit carnet sur lequel "Sub du Chef 12 po" était déjà écrit. Elle se pencha vers Billy et demanda:

"Raconte moi donc comment tu as fait pour quasiment décapiter Eric? C'est incroyable quand même...Oh mais avant! Tu vas prendre quoi? La même chose que Eric?"

Eric leva les yeux et fronça les sourcils:

"Et comment sais-tu ce que je vais prendre?"

Judy soupira et répondit avec tact:

"Tu viens ici toutes les semaines depuis 3 ans et tu prends toujours la même chose. Pourquoi est-ce qu'aujourd'hui tu changerais?"

Le jeune physicien haussa les épaules et approuva de la tête:

"En effet, une formule gagnante ne change normalement aussi radicalement rapidement."

Billy sourit lorsque Eric lui proposait son super sandwich. Néanmoins une petite lueur s'alluma lorsqu'il lança une nouvelle remarque vers la bande. Il mit une remarque de côté pour plus tard alors que la jeune femme venait prendre les commandes, il répondit poliment :

- Je vais prendre le spécial Eric. En fait j'étais en roller et au détour d'un saut par-dessus un terre-plein je me suis retrouvé avec la tête d'un Eric se réveillant juste en plein sur ma trajectoire. Un cri de désespoir et un vol plané plus tard on a évité par miracle la collision et voilà... un vrai conte de fée n'est-il pas ?! dit-il en riant.

Il se tourna vers Eric l'air un peu gêné et dit :

- Sans vouloir te vexer, ça te dirait pas de les oublier ces gars ? Pour le moment ils existent juste dans un espace proche du notre mais ya pas mort d'homme. Le destin se chargera bien de leur botter les fesses tôt ou tard et continuer de parler d'eux risque de faire tourner la merveilleuse sauce de nos non moins merveilleux sandwich. expliqua Billy avec un sourire malicieux et un regard rieur.

Même s'il n'aimait pas les machos stupides, il préférait les ignorer que de monopoliser inutilement ses neurones à ruminer contre eux. Mais ça c'était une habitude forgée par la nécessité. Néanmoins entendre Eric gaspiller son oxygène à leur prêter de l'attention rendait Billy un peu mal à l'aise. Est-ce que ces gars lui avait déjà fait du tort ou quoi ? Il semblait leur en vouloir particulièrement...

Billy fut gêné de voir la réaction d'Eric il lança après qu'il soit parti :

- Zut ! J'ai dit un truc qu'il fallait pas chui sûr...

A l'explication de Judy, Billy acquiesça avant d'ajouter :

- C'est ce que je craignais... mince j'aurais dû tourner ma langue sept fois dans ma bouche avant de parler ! Je savais pas...

Quand Eric revint, Billy tenta de faire comme si de rien n'était et répondit simplement :

- Effectivement, j'ai pris des cours divers mais je préfère les cours de technologie, mécanique et physique même si je prends aussi des matières plus littéraires, en fait ma maman m'a toujours dit de garder un esprit ouvert sur le monde alors j'ai trouvé que par exemple Histoire et Sociologie ça pouvait être enrichissant. J'aimerais bien viser un poste d'ingénieur ou quelque chose du genre. Et toi tu te destines à la physique en tant que prof d'université ?

Et dire que Billy pouvait le comprendre lui qui avait été malmené aussi par des bandes de gars sans cervelles. Peut-être avait-il même eut plus de chance qu'Eric qui ne semblait pas avoir autant d'amis que ça là où Billy avait bénéficié de sa propre bande. Il devrait surement lui reparler mais pas tout de suite, c'était bien trop frais et puis reparler de ça alors qu'il venait de lui demander d'oublier l'affaire le temps du déjeuner...

- Au fait mon pote, faudrait qu'on se fasse des virées de temps en temps... t'as des idées de sorties ?

Lui changer les idées et lui montrer qu'il avait un pote, ça c'était un bon plan pour l'aider !