[NeXus 4.2]Pas de repos pour les braves

Saut temporel

C'est avec lassitude que Cassandre était entrée dans la salle de briefing. En partant dans le Vermont, elle avait voulu détendre les élèves en leur offrant une excursion intimiste et leur donner l'opportunité de se connaître. Elle les avait en réalité faits tomber dans un piège placé-là à son insu. Ces agents de la CIA s'étaient probablement réjoui lorsqu'ils avaient compris qu'elle menait l'équipe dans un lieu isolé... leur facilitant ainsi le travail. Ou peut-être savaient-ils déjà où et quand l'équipe serait à leur merci ? Comment savoir ? Elle avait d'ordinaire un coup d'avance sur les autres, mais se retrouvait maintenant dans la position inverse. Comment savoir si leurs actions n'étaient plus dictées que par l'orientation d'une prophétie émise par une autre médium dont ils ne savaient rien et dont les intentions pouvaient très bien être moins honorables que celles de Cassandre ?
V avait-il dit la vérité ? S'agissait-il uniquement de sauver la planète ? Cassandre savait que l'avenir était un peu comme une poupée russe, et qu'un train en cachait généralement un autre. De toute évidence, ils n'avaient aucun moyen de se dérober aux exigences gouvernementales, mais si collaboration il y avait, la psychologue avait l'intention de jouer leur propre jeu sur l'échiquier.

Elle avait donc convié ses cinq élèves à la rejoindre ce matin pour discuter des événements de la veille. Une fois qu'ils furent tous là, elle prit la parole.

"Tout d'abord, je tiens à m'excuser. Tout ceci ne serait sûrement pas arrivé si je n'avais pas eu l'idée de cette excursion. Je comprendrais que vous décidiez de ne pas intégrer les NeXus après ce qu'il s'est passé." dit-elle doucement aux élèves, à qui elle avait promis qu'ils pourraient choisir d'intégrer ou non l'équipe à la suite de leur sortie commune. Le seul point positif qu'elle parvenait à déceler dans cet imbroglio était que les élèves avaient semblé soudés durant l'attaque nocturne.
La non voyante attendit donc la réponse des élèves avant de poursuivre.

C'est mi soulagée, mi terrorisée, mi hystérique et mi anesthésiée que Georgia avait pris le chemin du campement. Il y avait deux Georgia en elle à ce moment là : l'une qui ne souhaitait qu'une chose, à savoir se mettre la tête sous une couette ou se cacher derrière sa main. Et l'autre qui flippait à l'idée d'être mangée par des parasites extraterrestres sous 72 heures...

Bref deux New Yorkaises parfaitement inutiles... Elle avait néanmoins récupéré en toute hâte ses affaires, celles empruntées à Hjördis et celles de dame Cassandre...

Le camp levé, elle avait assumé comme à l'aller la conduite du véhicule. Hésitant par moment à envoyer la troupe contre le premier camion qui passait. Cela aurait au moins eu le mérite de faire voler en éclat les plans des fascistes de la CIA... Mais elle arrêta de caresser cette idée : elle n'était pas lâche à ce point et elle aimait trop la vie et celles de ses camarades pour ça...

Elle se prit à penser que de toutes façons, le médium à la botte du gouvernement avait du également prévoir ça, qu'elle ne se tuerait pas, que les NeXus ne refuseraient pas la proposition, qu'ils seront au rendez-vous pour sauver la planète, etc...

Prenant conscience des ficelles qui l'animaient dans l'ombre, elle prit peur : malgré tout le chaos qu'elle se plaisait à organiser dans sa vie, il y avait des gens pour voir son avenir comme si c'était un passé déjà révolu. Dame Cassandre faisait partie de ces gens là. Mais elle n'en avait jamais abusé, du moins à sa connaissance. Elle se sentit une fois de plus minable...

Après quelques courtes heures d'un sommeil bien léger, elle retrouva l'équipe en salle de briefing. L'enthousiasme de la veille avait disparu. Même Cassandre semblait aux fraises. Georgia tenta de sourire sans grand succès : après tout, la psychologue avait voulu leur faire plaisir, pas les mener dans un traquenard...

Elle prit place et se passa une main dans les cheveux. Jefferson avait raison : le meilleur état c'est celui qui garantit la sphère privée des individus. Les agents de la CIA auraient du attendre leur retour avant de leur faire ce tour de chiens !

Puis réalisant le ridicule de ses pensées, elle écouta la psychologue. Réfléchissant quelques instants, elle prit la parole :

"Vous excusez pas Madame... D'abord parce que c'était un très joli cadeau... On a tous passé une super soirée, non ?"

Du regard, elle prit à partie le reste de l'équipe. Puis elle poursuivit :

"En plus, si leur médium est aussi puissant que SuperJuan le prétend... Ben je doute que ça aurait changé grand chose. C'était presque écrit tout ça, non ? Y a une sorte de fatalité derrière cette situation. Et je déteste ça ! Mais ce n'est pas votre faute... Vous avez été instrumentalisée, tout comme nous tous !"

Elle se leva. Puis regardant Cassandre droit dans les yeux, même si ça ne servait peut être à rien, elle termina :

"Pour ma part, c'est sans hésiter que je veux faire partie des NeXus... Enfin, si vous voulez toujours de moi, Madame..."

Elle bomba le torse, les mains derrière le dos et releva le menton : attitude qu'elle pensait militaire, pour conférer un caractère solennel à ses paroles...

Chambre (Saut temporel)

Jareld entra dans la salle de briefing, et il la découvrit pour la première fois avec appréhension. "La classe!".
Il regarda un peu partout avec curiosité et son regard se posa successivement sur Cassandre et Georgia. Il leur adressa un sourire surtout à Cassandre qui semblait particulièrement abattue.
Jareld s'en approcha et affirma comme s'il s'adressait à une amie:

"Vous inquiétez pas madame, c'était peut-être pas la classe verte qu'on imaginait, mais c'était tout de même...excitant!"

Paroles destinées à réconforter peut-être, mais sincères. Jareld s'assit sur l'un des fauteuils et écouta Cassandre s'excuser, Jareld trouva ça étrange, limite révoltant. Cette idée de classe verte avait été brillante, et partait d'une très bonne intention, et personne ne doutait que Cassandre avait voulu le bien de ses élèves en agissant ainsi.
Georgia répondit en parlant d'une fatalité qui devait arriver, qu'on ai été ou pas en classe verte. Jareld acquiesça alors tandis qu'elle répondait. Puis prenant la parole Jareld ajouta:

"Ne vous excusez pas Madame, Georgia a raison! On a peut-être passer qu'une soirée, mais c'était super, et tant pis pour les fauteurs de troubles tel que V. Vous n'y pouvez rien et ne vous reprochez rien, pour ma part je suis du même avis que Georgia qu'on ne soit aller ou pas en classe verte nous aurions eut le même problème, j'en suis certain. Maintenant inutile de se reprocher quoi que ce soit, on fait avec, c'est tout!"

Jareld savait pertinemment qu'en revanche, Cassandre aurait pu prévoir ce qui était arrivé, mais qu'elle ne l'ai pas fait ne gênait pas Jareld, elle avait ses raisons. Et la bonne âme du mutant se dit que ces dernières étaient forcément bonnes et en aucun cas de nature égoïstes.
Puis Tumos reprit à l'adresse du professeur:

"Maintenant que j'y suis, j'y reste... et de bon cœur! Cette histoire de "sauver le monde" m'a trop intrigué pour que je parte. Et puis, il ne faudrait pas que nous décevions notre...patrie... en lâchant l'équipe!"

Acheva t-il, comme pour détendre l'atmosphère.
Le jeune homme posa machinalement une main sur la table se demandant comment allait se dérouler le briefing... Aurait-on des indications données par la CIA en direct dans la salle? Un représentant serait-il là? Ou avait-on déjà tout dit à Cassandre?
Bah! Ces questions attendraient, elles trouveraient des réponses à coup sur dans peu de temps.
Il balaya la salle du regard et observa ses camarades attendant leurs réponses qu'il espérait positives... Mine de rien, c'est dans le danger qu'on s'attachait à des futurs amis...

Une matinée traditionnelle à l'Institut, un serbe levé trop tôt à son goût, des cheveux en pagaille et un marcel enfilé à la hâte.

Il ne rencontra personne dans les couloirs : son humeur stable était donc préservée pour le petit bilan qui allait avoir lieu. Après tout, il s'agissait simplement de décider le sort du monde tout en étant manipuler par l'Etat le plus puissant de la scène internationale. Il serra les poings en repensant à la façon dont l'immonde commando à la croix l'avait traité : il paierait un jour son mépris et sa haine non constructive dans des conditions peu aimables.

Motivé à présent par l'image d'un superjuan battu et à l'agonie lui baisant les pieds, il entra finalement dans la salle de briefing.

Le beau visage de la psychologue qui restait une fois de plus grisâtre lui fit l'effet d'un lendemain de rave party. Il la salua de la tête, sourit vicieusement à Georgia mais se contenta de fixer Jareld : il n'avait pas encore assez fait ses preuves à son goût et attendait un moment dans lequel il serait repoussé dans ses derniers retranchements pour l'observer.

Il soupira, écouta la confession de Cassandre puis les adhésions successives des membres de l'équipe.

"J'ai toujours pensé que la paranoïa était un élément consubstantiel à l'existence de chaque membre de l'Institut : possibilité d'être insulté, lynché et même tué à n'importe quel moment. Vous ne vous ferez pas la peau de cette enflure de V sans moi, j'adhère, rock n' roll"


Il balaya une poussière invisible sur la table centrale puis reparla :


"Quant aux choses sérieuses... la situation est particulièrement détestable : nous sommes totalement manipulés de bout en bout par un État américain révélé à la lumière du jour. Je me méfie de ces histoires de sauvetage du monde : ces raclures ont pu vouloir exciter toutes les jeunes âmes de l'établissement. Au delà de ce premier constat de pigeonneau, il y a quelque chose de plus inquiétant : l'existence d'un médium concurrent qui n'agirait pas dans notre sens.

Il n'est absolument pas question que nous continuons la mission dans le vent en nous faisant manipuler à nouveau sans jouer nos propres intérêts. S'ils ont vraiment besoin de nous, autant qu'ils nous le font croire, il ne faut pas se leurrer : nous sommes en position de force et surtout en position de négociation. On va pas se vendre au rabais bordel !

J'aurai aussi voulu vous poser une question Cassandre, n'est-il pas temps pour vous d'arrêter de tâtonner dans le noir et réutiliser vos pouvoirs pour nous permettre de lutter ? "

Aussitôt revenus de leur balade écourtée, Faby prit ses effets et rapidement, sans rien dire, gagna prestement sa chambre, dans laquelle elle balança son bagage sur son lit. Elle fila directement au lavabo nettoyer sa blessure qui semblait vouloir s’infectée. La plaie nettoyée elle appliqua un bandage et rangea son bataclan.

Une bonne nuit de sommeil, une retouche à sa blessure qui ne s’améliorait pas et un saut à la salle de briefing. Elle prit place.

À en croire la mine dépitée de Cassandre et son discours, Spirit ressentait bien sa désolation. Évidemment, elle n’y était pour rien au dénouement et somme toute, la mutante avait apprécié son aventure. Rien de gravement fâcheux n’était arrivé. Une bonne frousse, très mal venue il va sans dire, mais de quoi faire réfléchir l’adolescente. À l’instar de ses collègues, elle rassura leur dirigeante.

À peine l’événement digéré, il fallait passer à une mission. À vrai dire, Fabiola craignait beaucoup de cette éventuelle lancée vers l’univers de l’imprévisible et du danger. Elle était la plus jeune de l’équipe. Elle se demandait si ses coéquipiers étaient mieux armés qu’elle aux aléas pour s’exposer au danger ? Et s'il avaient tout comme elle une appréhension douloureuse sur cet avenir ? À en juger leur réaction, cette hypothèse perdait de sa valeur. Soupesant rapidement les avantages et les inconvénients de s’engager avec eux, elle arriva vite à la conclusion qu’elle avait bénéfice à retirer de cette épopée. L’Argentine comprit qu’il fallait foncer droit devant dans la vie. Rabaissant les épaules, elle répondit avec un enthousiasme retrouvé :

- Vous pouvez compter sur ma présence auprès de vous ! –

Elle prit contact avec le regards de chacun de ses comparses s’assurant qu’ils pouvait former une équipe solide. Bien sûr, les caractères étaient très différents. Certes, la «réunion devant nous isoler pour faire connaissance, mais qui a été chamboulée» n’a pas permis à Faby de soutirer les motivations à participer au sein de l’institut de ces co-équipiers, n’étant pas de nature extravertie, comme certains d’entre eux. Une états-unienne en manque de contacts physiques et un Serbe acerbe qui pourrait avoir obtenue avec mention très bien sans doute un diplôme de péripatéticien. Malgré ces pensées médisantes, elle savait, preuve à l’appui, qu’en situation de survie, ces mêmes personnes savaient mettre leur égo de côté et œuvrer pour le groupe. Et ce qui rattachait la mutante à son sentiment d’appartenance.

- Je ne vais pas manquer l’occasion de passer à l’histoire ! – lança-t-elle sur un ton de plaisanterie.

Bien que chacun semblât dans un état d'esprit différent, les élèves confirmèrent tous leur affiliation à l'équipe, ce qui, si elle tenta de ne pas le montrer, émut profondément Cassandre. Les premiers NeXus s'étaient dispersés aux quatre vents, pourtant ces 5 jeunes tenaient bon malgré une attaque surprise et une prof mutante ne se servant plus de ses pouvoirs...
Et ironie du sort, cette équipe hétéroclite que la plupart considéraient déjà comme les boîteux de l'Institut était destinée à sauver le monde ?

"... En ce cas, je pense que nous devons rassembler les éléments dont nous disposons afin de déterminer notre ligne de conduite." dit-elle alors en posant ses mains sur la table, les doigts entrelacés.

"Par expérience, je sais que ces hommes ne se déplacent pas pour rien. La première mouture des NeXus les a déjà rencontrés l'année dernière. Ils tentaient de récupérer du sang mutant, qui avait été volé à des hôpitaux par Bishop Industries, un important groupe pharmaceutique, dans le but de créer des clones mutants dociles et contrôlés par l'intermédiaire d'une puce électronique implantée dans le cou. La CIA était en compétition avec Bishop Industries pour récupérer ce sang, même si je pense qu'à un stade antérieur, ils ont été amenés à collaborer. Toujours est-il que la CIA recherchait ce sang pour élaborer une liste, aussi exhaustive que possible du potentiel mutant à l'échelle mondiale. Une sorte d'Interpol mutant, si vous préférez." résuma Cassandre le plus clairement possible pour les élèves les moins au fait des événements.

"V prétend que cette liste, et donc la recherche à grande échelle de sang mutant à travers le monde a été mise en oeuvre... pour vous trouver, vous, les NeXus, à un jour donné qui correspondrait à leur besoin." poursuivit la non-voyante, son regard fixe détaillant le vide de sa cécité. Etrangement, elle ne s'était pas incluse dans le groupe.

"Je ne sais trop quoi penser de cette affirmation. Mon instinct me dit qu'il s'agit d'une demi-vérité : si leur médium a bel et bien prédit que vous accompliriez la mission qu'ils veulent vous confier, ils ont dû vouloir vous identifier plus précisément, se rendre compte que vous étiez élèves à l'Institut, et remonter le fil jusqu'à nous dans le Vermont. Mais... cela signifie que la prédiction a été établie bien avant même que nous soyons mêlés à cette histoire de sang volé. Pourquoi nous auraient-ils contactés si tardivement, à peine quelques heures avant la date fatidique ? Je pense que la liste leur servira à autre chose." expliqua-t-elle. Peut-être cherchaient-ils à faire voter une loi d'enregistrement en plaçant le gouvernement officiel devant le fait accompli ? Avec des sénateurs tels que Marshall, tout était possible. Mais ce n'était peut-être pas si simple, et surtout, ils n'avaient aucun moyen d'obtenir un réponse à cette interrogation.
Inévitablement, le problème de son propre pouvoir avait été soulevé. Iacobo avait raison, il aurait été tellement plus simple d'appliquer la politique "oeil pour oeil". Elle resta silencieuse quelques instants, pesant la question douloureuse.

"... le droit de vie ou de mort ne m'appartient pas. Un choix minime que je fais pour orienter le cours de choses peut provoquer une catastrophe à l'autre bout du monde tout en améliorant notre situation. C'est ce qu'on appelle l'effet papillon... Il y a toujours un prix à payer." répondit-elle d'une voix grave.

"Mais il n'est pas dit que je laisserai la CIA nous fouler au pied, d'autant que nous ne connaissons pas leurs intentions réelles. En cela, je pense que Fabiola pourra nous éclairer le moment venu. Ils ne semblent pas avoir de bouclier psy puisque tes attaques ont fonctionné..."

Elle fit une pause :

"De plus... ils ne sont pas censés savoir que je n'utilise plus mes facultés..." ajouta-t-elle, un léger sourire au coin des lèvres. "Et je ne vois aucune raison de changer cet état de faits."

"Je propose de jouer leur jeu tout en jouant notre partie en sous-main. Iacobo est dans le vrai : malgré leur attitude supérieure à notre égard, leur demande d'alliance est la preuve de leur dépendance totale vis-à-vis de nous. De plus... une dette du gouvernement américain envers l'Institut pourrait nous garantir une certaine protection, nous ne pouvons pas négliger ce point, de nombreuses vies en dépendent. Ils ne semblent pas faire confiance à leur médium, et nous voient au même titre comme des moyens pour parvenir à leurs fins. Cette médium m'intrigue... en vérité, c'est plus ses intentions à elles qui sont inquiétantes. Il est très possible qu'elle poursuive son propre objectif en utilisant la CIA comme bon lui semble... Il faudra rester vigilants quant à cette éventualité tant que nous n'en saurons pas plus sur elle."

Beaucoup de paroles pour la jeune femme, paroles qui témoignaient d'une réflexion intense sur la situation.

"Parlez-moi des détails qui vous ont marqué, chaque chose a son importance lorsqu'un précognitif est impliqué..."

Georgia sourit d'une manière complétement stupide : elle était heureuse d'être dans une telle équipe. Tous les NeXus sans exception avaient accepté d'aller sauver le monde en compagnie d'agents de la CIA bêtes comme leurs chaussettes... Elle qui se posait souvent la question de sa santé mentale, elle avait enfin sa réponse : on vivait dans un monde de timbrés. Une personne saine d'esprit n'aurait jamais, ô grand jamais, pensé à elle pour sauver le monde... ou alors il aurait fallu que tous les autres héros disponibles soient morts ou en coma dépassé !

Elle écouta la psychologue avec attention. Les éléments étaient comme autant de pièces de puzzle à emboiter les unes dans les autres... Georgia se sentait devenir légo en cet instant présent. Elle prit la parole, un peu paumée dans ses réflexions qu'elle laissait filer en arrière tâche...

"Bah, ils agissent bizarrement... Quand Fabiola a fait ses trucs de magie vaudou inca sur SuperJuan, ils étaient tous aux fraises... Genre, comme s'ils étaient en réseau ou un truc du genre. Pas normal, quoi... Mais, le plus étrange..."

Elle fixa la petite assemblée.

"Le plus étrange c'est cette histoire de médium, de sang, de clones et autres réjouissances... De plus je vois mal comment quelqu'un de normal, pas quelqu'un qui bave dans sa camisole de force j'veux dire, pourrait penser à quelqu'un comme moi pour sauver le monde ? C'est une vaste farce, j'ai l'impression... Ou alors, ils savent pas réellement à qui ils ont affaire et leur ciblage est loin d'être précis..."

Georgia se gratta la tête. Puis ajouta :

"Ce qui m'amène à penser que leur médium est foireuse... Du moins pas aussi efficace que vous, M'dame... Mais, dites moi, ces échantillons de sang comment étaient ils collectés ? Des restes d'analyse sanguine détournés, du trafic de don du sang, c'est ça ? Et mieux encore : Madame Cassandre, se peut il que quelqu'un ait récupéré votre sang ?"

Regardant l'éventuel réaction de la psychologue, elle termina :

"En établissant le journal, j'ai appris que vous aviez déjà rencontré un clone d'un certain Jon Parker de l'Institut... De Jenifer aussi. Alors pourquoi ne vous auraient ils pas clonée, Madame Cassandre ? Et les imprécisions de leur médium pourraient s'expliquer par l'instabilité du clone ? Auquel cas, ils ne l'ont peut être appris que très récemment..."

Grimaçant à l'idée d'un clone de leur référent exploité par les services secrets, Georgia baissa les yeux.

"Enfin, je souhaite sincèrement, Madame Cassandre, que vous me disiez que je raconte encore n'importe quoi..."

Jareld écouta chacun de ses coéquipiers confirmés leurs présences dans l'équipe. Et Jareld ne put réprimer un sourire à chaque fois que l'un d'eux confirmait leur volonté de faire partit de l'équipe.
Ils formaient tous une grande famille!
Jareld observa la réaction de Cassandre, et crut déceler une certaine satisfaction. Puis Mlle Deneos expliqua de long en large les intentions de la CIA, ce qu'était la liste, ses doutes sur son utilisation. En réponse à Iacobo elle justifia sa conduite à ne pas utiliser son pouvoir. Elle évoqua aussi la médium et son rôle dans tout cette histoire.
Puis la professeur invita les élèves à évoquer les détails qui les avaient marqués et qui seraient susceptibles de les aider.
Jareld se tourna vers Georgia alors qu'elle répondait, parlant de clone avec l'idée que Cassandre ait pu être clonée. Une deuxième Cassandre? Jareld trouvait que l'idée était à creuser:

"Ça parait tellement étrange. Je ne connais pas les modalités du clonage ni son aboutissement. Mais si un possible clone de Cassandre existait, il serait sûrement un néophyte pour le moment en matière de visions, il n'aurait pas l'expérience que Cassandre a. C'est peut-être aussi la raison pour laquelle Georgia, tu évoquais que la médium pouvait être "foireuse"... Mais peut-être ne nous ont ils pas mentit et qu'ils possèdent bien une médium suffisamment puissante pour agir ainsi. "
"Ou alors comme vous le disiez Madame, c'est peut-être un peu gros, mais la médium clone souhaitant se libérer de la CIA la manipule et invente cette histoire énorme de sauver le monde, en affirmant que seul les Nexus sont en mesure de le faire. Et cette clone invente cette histoire dans le seul but de prendre contact avec nous pour qu'on la libère..."

Jareld se rendit compte que ce qu'il venait de dire était vraiment gros, et il se demanda aussitôt où il avait bien pu pêcher cela. Mais il se fierait au jugement de Cassandre... Il poursuivit sur un autre sujet:

"J'ai trouvé que leurs façon d'agir était bizarre. Ils ont parlés de test, mais c'était inutile! Leurs médium avait prévu que nous serions en camping dans le Vermont, et il n'y avait pas trente-six camps de mutants dans le Vermont! Ils ne font peut-être pas confiance à leur médium et voulait nous attaquer pour savoir si les prédictions de la médium serait vraies, par exemple avec le tissus en kevlar... Auquel cas, ils testaient aussi leur médium. Mais là aussi c'est trop étrange... Ils pouvaient la tester autrement...
En tout cas, il y avait bien d'autres moyens de vérifier que nous étions bien ce qu'ils cherchaient..."

Jareld enchaîna aussitôt en reprenant son souffle sur ce qu'avait dit Cassandre:

"Je pense aussi qu'ils faut qu'on accepte ce qu'ils nous proposent. On a pas vraiment le choix j'ai l'impression, et puis si on accepte sans poser de problèmes, nous aurons peut-être des bénéfices à tirer de toute cette histoire, comme vous le disiez Madame..."

Jareld se tut un instant avant de reprendre avec curiosité:

"J'ai juste quelques questions. V a évoqué que notre équipe n'était pas au complet, cela veut-il dire que nous allons accueillir un nouveau membre?
Et puis quand les reverrons-nous, quand nous dirons t-ils ce que nous devons savoir?"

Sur quoi cette histoire de "sauver le monde" allait-elle déboucher? Telle était la question que se posait Jareld depuis son retour du Vermont, parmi toutes celles qu'il venait de poser. C'était si frustrant de ne pas obtenir les réponses tout de suite...

Tout le monde avait répondu de façon positive et guillerette à la proposition de s'embarquer dans une aventure douteuse dont le but supposé était le sauvetage du monde auquel Iacobo ne croyait plus un instant. Le serbe se sentit presque vexé de faire parti de cette unanime oui qui reflétait l'état d'esprit des élèves de l'Institut qui mêlaient à la fois leurs crises d'adolescences, l'excitation avant d'embarquer dans une attraction, une méconnaissance souvent complète de la géopolitique mondiale mais un esprit mu par des idées forcément bonnes et humanistes.

Le prostitué ne put que s'extasier cyniquement et une fois de plus sur la formidable structure que représentait l'Académie. De la chair à canon puissante et malléable dans un monde de plus en plus éduqué... il en ressentit presque de la jalousie à l'égard des fondateurs de l'établissement qui exploitaient un merveilleux filon. Cinq caisses de cocktails fades et non alcoolisés par mois contre des équipes de mutants entrainées et têtes baissées : le monde avait aussi ses bons côtés.


Cassandre exposa la situation à nouveau puis leur fit part de ses constatations qui furent suivies par celles de deux de ses camarades. Il les écouta sans broncher, certaines observations se révélant particulièrement intéressantes même s'il ne le fit pas savoir ouvertement.


"Georgia soulève un point qui est susceptible d'être tout à fait juste, et si c'est le cas, inquiétant.

Si ce n'est pas le cas, c'est un voyant intéressé ou contraint bien que je penche plus pour l'intérêt. Ne leur faisant confiance, n'y aurait-il pas moyen d'essayer de la court-circuiter et proposer vos faux services au gouvernement américain ? Ce sera aussi l'occasion d'en savoir un peu plus sur leur oracle.


Pour en revenir à ce qui s'est passé dans le Vermont... je n'ai pas pu avoir de réponses à plusieurs de mes questions. D'une part, comment cela se faisait-il que l'homme dont j'ai tenté de percer la cuisse avait plus de rembourrage à l'endroit où je l'ai frappé ? Ou son matériel est technologiquement surprenant, où c'est un mutant au pouvoir improbable, ou alors il a bénéficié d'une anticipation dans le temps, ce qui est une fois de plus inquiétant puisque nous serions totalement soumis en l'absence de l'utilisation de vos pouvoirs.

Ensuite j'ai du mal à comprendre comment il est possible que nous soyons, nous NeXus, parfaitement l'équipe qui satisfait leur demande. Il faudrait alors questionner la formation de notre équipe, et vos choix Cassandre. Oui, nous sombrons dans une certaine paranoïa mais n'est ce pas la conséquence logique de ce jeu d'anticipation pervers ?


Pour finir, je me pose des questions sur le choix de leur matériel de combat. Pourquoi avoir emmener un cryogénisateur ? C'est tellement peu commun qu'on ne peut expliquer sa présence que par la nécessité de neutraliser un pyrotechnicien. Pourtant il n'y en a pas chez les NeXus.

Dernière chose... la femme qui semblait coordonner les opérations et sur laquelle nous n'avons pu obtenir d'avantage d'informations ne serait pas ce fameux voyant qui aurait anticipé nos actions en temps réel ?"

Cassandre, je vois que vous ne vous expliquez pas plus sur votre pouvoir et votre bluff me convient, toutefois vous jouez un jeu dangereux... j'espère qu'il vous desservira correctement... quoique je n'en ai personnellement pas grand chose à faire.

L’heure était à emboîter fait des évènements et en faire un récit cohérant. Fabiola considéra les points apportés par ses collègues. La mutante accrocha sur un détail. Le vol de sang dans les hôpitaux pour compléter une liste de mutants. Cette idée la ramena à sa rencontre avec le médecin aux derniers moments avant de quitter son Argentine natale. Coïncidence … ou événement fortuit ?

Elle réfléchit un moment aux commentaires de Georgia et les deux garçons avant d’exprimer son opinion.

Peut-être que la médium a plus compétence qu’on pourrait le penser. Je pense que le cryogénisateur a du être prévu pour éteindre le feu que tu as allumé Iacobo. Et ça tomberait sous le sens qu’il ait été prévu que celui qui t’ait maîtrisé soit protégé davantage sur une suisse que sur l’autre. Clonée ou originale, je ne saurais le dire.

S’adressant à Jareld elle poursuivit.

Je suis d’accord avec toi Tumos, le test évoqué semble inutile. Ils recherchaient notre groupe précisément. Je ne crois pas à un coup de chance d’investiguer par hasard, au milieu de nulle part, et en plus, nous y trouvé. Ce qui me rattache davantage à l’idée que la médium est compétente.

En revanche, je ne m’explique pas ses intentions. Ni celles de la CIA. Encore moins si la voyante collabore de son plein gré ou non. Je tenterai d’en savoir plus pendant la mission.

Elle regarda ses acolytes d’un air décidé à prendre part activement à l’affaire. Aussi, décida-t-elle d’informer l’équipe de son histoire de don de sang à son école.

Je ne sais pas s’il y a un lien, mais avant d’intégrer l’institut, j’ai vécu une histoire avec des «récolteurs de sang», sous prétexte qu’il allait servir pour remettre un peuple en état, quelque part en Sibérie, si ma mémoire est bonne.
Spirit se tâta le front, douteuse des détails entourant les motivations de la collecte de sang.

Peut-être, n’était-ce qu’un prétexte et qu’au fond, le sang récolté servait davantage à compléter cette fameuse liste dont vous parlez, dame Cassandre.
Elle conclue en regardant chacun franchement dans les yeux tour à tour.

Je tiens à préciser que je n’ai pas fait don de mon sang. Par contre, c’est ce médecin qui m’a fait connaître l’Institut.
Elle se tut, continuant à réfléchir. Un éclair se fit en son cerveau et spontanément et elle lança naïvement :

Une question Madame Cassandre, il faut une quantité importante de sang pour parvenir cloner un être humain ?

Tête baissée, Cassandre écouta avec attention les éléments et réflexions apportés par l'équipe. Toutes ces informations se mêlaient dans un noeud spéculatif inextricable en l'absence de ses pouvoirs. Seul le raisonnement pourrait les aider dans ces circonstances.

"A mon souvenir, je n'ai pas été placée dans une situation qui aurait pu leur permettre de prélever mon sang, mais ils ont pu tout aussi bien le voler dans n'importe quel hôpital, fût-il en Grèce... Une seule goutte de notre sang peut permettre de décrypter notre séquençage ADN. Visiblement, ils ont même poussé jusqu'en Argentine d'après Fabiola, ce qui est plutôt préoccupant, surtout sous couvert d'une opération humanitaire. Mais quelque chose me dit que l'affaire de clonage n'est pas en cause ici. Les clones de Bishop Industries étaient certes hautement instables mais la lobotomie les avait privés des centres de la parole, comment auraient-ils pu récupérer des prédictions ? Quant à cette femme du commando... elle m'a semblé en pleine possession de ses facultés et de son libre arbitre, et ses propos haineux m'ont paru trop poussés pour qu'elle soit mutante. Qualifions pour l'instant sa conduite d'excès de zèle." expliqua la non-voyante.

C'était sans compter que Bishop Industries était aux dernières nouvelles plutôt en froid avec la CIA, malgré leur collaboration soupçonnée à un stade antérieur, étant donné que la firme avait doublé l'agence d'espionnage sur l'affaire du sang.

"Pour commencer, je crois que nous pouvons partir du postulat qu'ils n'ont pas menti sur le fait qu'ils ont une médium : ils ont su où et quand nous trouver, et semblaient préparés à certaines éventualités. Je pense que Fabiola est dans le vrai : cette histoire de cryogénisateur... Ils doivent connaître la composition finale de l'équipe au moment de la mission qu'ils veulent lui assigner, ils ont su dès le début qu'il manquait quelqu'un au groupe... mais tous les pyrokinésistes de l'Institut sont déjà dans une équipe, en ce moment. Ils ont dû vouloir tuer dans l'oeuf la tentative de Iacobo avec cet équipement. De même, les lance-filets... étaient particulièrement utiles contre Mina puisqu'ils l'empêchaient de voler. Idem pour la protection du commando qui a attaqué Iacobo."

Elle fit une pause, puis leva l'index, comme pour énoncer une objection, qu'elle formula de sa voix douce quelques secondes plus tard.

"... mais V a parlé d'informations fractionnaires. En vérité, c'est la première fois que j'entends parler d'un autre précognitif, je ne sais pas sous quelle forme peut se présenter ses visions, son fonctionnement peut être totalement différent du mien. Pour ma part, ce que je sais relève du factuel, tout ce qui a une existence potentielle dans les possibles passés et présents, ce qui se produit, ce qui se dit de vive voix, bref, ce qui a une existence temporelle dans l'arbre des possibles. Cela signifie que décrypter une action télépathe peut se révéler ardu, à moins de savoir déceler les symptômes qu'ils provoquent, un peu comme prédire les ondes d'un ricochet. La puissance est une chose, la maîtrise en est une autre."

Cassandre releva le visage, les yeux perdus dans le vague, et hocha pensivement la tête comme si ses raisonnements s'emboîtaient dans une configuration plausible à ses yeux seuls.

"... donc il y a des chances que les actions psy lui aient échappé sur cette prédiction... ou qu'elles n'aient pas été divulguées." conclut-elle. "Cela expliquerait le trouble que Fabiola a semé dans les rangs du commando en ciblant V, qui a l'air de mener tout ce petit monde sur le terrain."

Sur le moment, la psychologue eut l'impression d'être la consultante temporelle de l'équipe, mais elle fut rassurée de noter que les élèves ne semblaient pas si perdus dans ses explications, et que certaines réflexions se tenaient tout à fait. Dire qu'Olivier, lui, avait en bon scientifique toujours eu du mal à comprendre ses facultés.

"Nous en sommes réduits à des suppositions, mais visiblement, chaque partie n'a aucune confiance en l'autre, qu'il s'agisse de la médium, de la CIA ou de l'Institut. La médium peut avoir prédit que le commando nous testerait, et le commando s'est exécuté, mais le commando peut très bien lui avoir demandé de cerner un possible où il nous testerait, et elle s'est exécutée. Le lien de cause à effet est toujours flou dans ces cas-là, donc nous devons garder l'assertion de Jareld en tête : la médium joue peut-être sa partie, auquel cas elle a un coup d'avance sur tout le monde... et comme le souligne Iacobo, la formation de l'équipe est peut-être la réponse à une équation à plusieurs inconnues. Toujours est-il... que nous devons identifier le dernier NeXus dans la journée pour avancer jusqu'au prochain embranchement, vous avez des idées ? J'imagine qu'on aura de leurs nouvelles aujourd'hui..."

Dérouler la prédiction jusqu'au prochain carrefour, ils n'avaient que ce choix, à défaut d'informations plus précises sur leur mission. Ils ne seraient sûrement pas de trop de 7 pour "sauver le monde".

"Quant à moi... Je mesure le risque encouru, Iacobo. J'espère que vous n'aurez pas à pâtir de ce non-choix... comme vous avez pu pâtir de certains de mes choix." répondit-elle en détournant son regard brumeux sans préciser sa pensée. Une chose était sûre, le sort de Iacobo lui-même lui importait. Quelque part, la médium avait prédit leur réussite dans son schéma temporel... Mais la déduction sur les pouvoirs psy s'appliquaient également à ses propres facultés. La médium avait-elle inclus dans sa prédiction que Cassandre n'utiliserait pas ses pouvoirs ? La CIA ne semblait pas le savoir... Avait-elle dissimulé ces informations ?

"Ta proposition comporte également sa part de risques. D'une part, V semble m'accorder encore moins de crédits qu'à sa médium attitrée... mais surtout, s'ils comptent sur moi pour les guider à l'aveugle, les conséquences pourraient tout aussi bien nous desservir. Mais... j'y réfléchirai."

Georgia s'affala sur la table, plutôt décontenancée... Elle se sentait on ne peut plus nulle et on ne peut plus inutile... Un peu comme une petite Kitty à qui on aurait cassé son violon !

Elle releva le museau pour regarder Dame Cassandre : les paroles de cette dernière avaient quelque chose de rassurants. Peut être était ce le ton de sa voix ? Ou le fait que la psychologue avait toujours été là pour eux... Pas comme ce chien de Vayne qui avait sabordé sa belle équipe en se tirant pour Dieu sait quelle raison de clochard !

Se redressant quelque peu et se passant la main dans les cheveux, elle tenta de prendre exemple sur la grecque, d'envisager tous les possibles, de parcourir mentalement tous les méandres du labyrinthe de leurs destinées... Sans grand succès : plus elle pensait, plus l'avenir lui semblait bouché de toutes parts. Le grand cul-de-sac à viande les guettait de partout ! Pessimiste comme jamais, elle tenta de trouver un coin de ciel bleu pour échapper au fatalisme : après tout, sa vie dissolue n'avait jamais été aussi en phase que face à ce complot gouvernemental mâtinée de menace mondiale (extraterrestre ?). Le rêve de tout paranoïaque s'accomplissait. Et c'était pour elle...

Elle se ressaisit et prit la parole :

"DarkCassandre ou pas, ouais on a un medium... Contrôlée ou jouant double jeu, on a une proposition qu'on peut pas refuser de la part des milichiens du gouvernement... J'imagine qu'on en saura plus quand ils prendront attache à nouveau avec nous"

Une lueur de passion pétillait dans son regard.

"Après reste à savoir qui va enfumer qui suite à cette alliance de circonstance. Mais si la menace est réelle... Et à mon sens, elle l'est, ils doivent vraiment être au bout du rouleau pour recourir à nos services. Je me plais à supposer que la menace planétaire doit être la résultante de l'une de leurs expériences foireuses ou autres... Bref, le truc pour lequel on a besoin d'une équipe restreinte, sans lien avec le gouvernement, facilement liquidable si besoin est et, surtout, dont la parole ne vaut absolument rien devant une caméra ou un reporter..."

Elle passa à nouveau, frénétique, comme jamais, une main dans ses cheveux :

"Mais moi, je veux savoir ce qu'il en est. Parce que si des vies sont en jeu, j'ai envie d'être de la partie. Et aussi, j'ai envie qu'on puisse se balader en classe verte, sans tomber sur des imbéciles de la CIA. Bref, pour qu'ils nous lâchent, faudra en passer par cette alliance contre nature qui ne les enchante à mon avis pas plus eux, que nous..."

Se calmant quelque peu, elle regarda le reste de l'équipe.

"Pour un sixième, faut une force de frappe, je pense... Sans vouloir être méchante, on n'est pas réellement taillés pour la baston. Moi la première. Faudrait voir dans les nouveaux, si il y en a un qui pourrait coller..."

Tout était confus, tandis que les théories filaient... Chacun donna judicieusement ses impressions sur la classe verte cauchemar et Jareld écouta avec attention.
Cassandre les avaient tous écoutés, tête baissée. Puis elle répondit à tous. Elle paraissait sereine malgré les évènements, Jareld trouvait cette façade plutôt rassurante. Bien qu'il sache qu'il devait en être tout autrement pour Cassandre....
Jareld réfléchissait aux menaces dont avaient parlés V, suffisamment importante pour mettre en danger la Terre. Qu'est ce que cela pouvait bien être?
Des Aliens? Une arme nouvelle? Un virus? Une menace mutante?
Autant de réponses qui semblaient plus extravagante les unes que les autres. Mais Jareld ne pouvait concevoir une menace impliquant directement des vies. C'est à dire une armée envahissant la Terre par exemple. Auquel cas, les Nexus seraient bien impuissants...
Ça devait être une menace tel qu'on ne pouvait pas l'imaginer, et non un stéréotype tel que les Aliens débarquent sur Terre... Pourquoi V ne leur avait-il pas précisé cette menace?
Puis Georgia qui répondait termina en proposant que le sixième membre soit une force de frappe, ce dont l'équipe manquait pour le moment.
Jareld réagit derechef à cette proposition:

"Je rejoins Georgia sur ce point. Il nous faut quelqu'un capable de pouvoir agir un peu plus physiquement sur nos ennemis. C'est ce qui nous a manqué contre le commando de V."
Puis sur un ton plus sec il ajouta:"Personnellement, j'aimerais qu'on ai plus à être à leur merci..."

Jareld fit une pause et enchaîna:

"Je pense que les réponses à nos questions nous seront apportés par V. On en apprendra plus sur cette "médium" avec lui. Il faudra qu'il nous fournisse des preuves tangibles qui prouve que la menace est réelle, et que cette médium ne ment pas..."
"Si cette médium joue un double-jeu, elle doit être super intelligente: tromper la CIA n'est pas à la portée du premier venu, même pour une médium...
La CIA doit avoir une raison pour lui faire confiance, c'est certain. Ils n'agiraient pas aveuglément. Ce qui pourrait nous aider à en apprendre plus sur cette médium serait de savoir quelle est la nature de cette confiance... Savoir comment celle-ci s'est établie, entre elle et la CIA..."

Jareld se tut. Tout cette histoire avait beau être extraordinaire et pour le moment légèrement effrayante, elle était sans conteste très excitante. Et malgré cette peur, sa soif de réponses était plus forte. Et il était prêt à tout pour les obtenir.

Iacobo écouta avec un véritable intérêt le speach de Cassandre dont il se prenait à admirer à sa capacité à ne jamais parler pour rien dire. En tant que professeur et psychologue, elle visait l'efficacité et l'optimal avec un certain réalisme. Il se dit aussi avec amusement qu'à l'inverse, dans les relations de tous les jours, la belle grecque devait se trouver handicapée par son économie de parole et son air détaché de grande prêtresse née. Ça n'était pas son problème, il l'écouta poursuivre.

Toujours silencieux lorsque deux de ses camarades prirent la parole, il traçait mentalement des schémas pour se représenter les divers parties en présence, les enjeux et les risques. Une discussion avec SuperJuan semblait à présent absolument nécessaire pour en savoir un peu plus sur leurs objectifs et la façon dont ils tireraient leur épingle du jeu.


"Intéressant" se contenta-t-il de dire : la mission prenait une dimension internationale et de plus en plus risquée. Elle avait pour conséquence naturelle d'attiser la curiosité du serbe à propos de l'avenir de la planète (même s'il ne croyait pas trop à son sauvetage à sept) et l'envie de relever le défi de Cassandre en le nommant responsable.

Il fit une moue blasée lorsque Cassandre lui répondit au sujet des risques qu'elle prenait suite à son bluff : quelque part elle était la seule à qui Iacobo attribuait un tant soi peu de confiance de par son pouvoir exceptionnel et sa personnalité marquée.

Elle en vint au sujet du 6ème membre.


"En terme offensif, la harpie et moi-même représentons la seule force frontale au corps à corps. Il serait utile d'avoir un individu au pouvoir offensif et à distance, discret et peu bavard, dénué de conscience personnelle quant à ses chances de survie. Un homme si possible : si nous échouons dans le sauvetage présumé de la planète et que nous nous retrouvons dans un monde post-apocalyptique, nous aurions une organisation optimale pour nous reproduire".

La jeune femme écouta tour à tour les élèves s'exprimer, tout en spéculant intérieurement sur la part figée de la prédiction : le choix du sixième élève était-il déjà écrit ? Si l'autre médium était si puissante, avait-elle prévu plusieurs lignes de possibles, leur permettant ainsi une marge de manoeuvre plus importante, et surtout, la question essentielle pour Cassandre, était-elle acteur ou observateur du futur ?

"Effectivement, il va nous falloir déterminer un maximum d'informations sur cette médium, mais quelque chose me dit que V et ses hommes ne seront pas des plus coopératifs." approuva-t-elle aux paroles de Jareld.

"Georgia soulève un autre point important : ne sachant rien ou presque de la prédiction de base, méfions-nous du dénouement que la CIA pourrait tenter de lui donner... Comme vous avez pu le constater, ils ne nous portent aucune sympathie."

Elle fit une pause.

"Ce ne sera pas une partie de plaisir... Mais n'oubliez pas, ils ont besoin de nous, et dans une certaine mesure, ont peur de nous. Autant que possible, essayons de nous concentrer sur nos propres objectifs, plutôt que sur leur hostilité patente."

Des éléments avaient été apportés pour assembler quelques morceaux du puzzle, mais de nombreuses pièces restaient voilées pour le moment, ce qui dans sa situation, n'était pas pour la rassurer. La non-voyante se leva lentement.

"Bien. Je vais étudier les possibilités qui s'offrent à nous quant au dernier NeXus, je suis de votre avis. J'imagine que nous serons rapidement fixés sur le bienfondé de notre choix." dit-elle avec une touche d'humour noir involontaire. Si la prédiction était majoritaire, ils feraient forcément le bon choix... Si l'identité du sixième NeXus était entièrement laissée à leur appréciation, les possibles défavorables risquaient de se multiplier de façon alarmante.

"Allez vous reposer et vous changer les idées ; à ce stade, s'inquiéter nous est même refusé." conclut-elle, tentant avec une note de fataliste de soulager l'angoisse de la situation. L'effet n'était peut-être pas très réussi.

Bureau de Cassandre