Réunion de rentrée

Trois mois de pure folie venaient de s'écouler...
Déjà, l'institut s'était effondré, courtesy of Chloé, de ce qu'il avait appris. Mais au delà de cela, c'était aussi sa réputation qui en avait pris un sale coup, à en juger par les journaux qu'Adam avait récupéré ce matin. Il allait y avoir du pain sur la planche !

Adam avait choisi une salle de cours. Après tout, c'était ce qu'il y avait de plus familier pour lui, en une période de pré-rentrée. Pas de bureau formel, pas de salle de réunion avec des tables rondes, juste une salle de classe avec un bureau, et les chaises et tables des élèves. Ce genre de salle avait toujours un côté bucolique quand il n'y avait pas la marmaille pour la remplir et l'animer.

Un coup dans la poche de droite, un coup dans la poche de gauche, et naturellement, il n'avait pas ses clés. Un doigt dans la serrure, l'affaire était reglée. Il choisit une chaise au hasard --le bureau aurait fait trop formel-- et alla se vautrer dedans. Bon, déjà, l'institut était reconstruit, c'était un début. Mais il allait y avoir du sport pour la suite des opérations, et l'entrée des professeurs dans la pièce ne faisait que marquer le début d'hostilités qui allaient débuter incessemment sous peu. Hostilités... Un mot qui, espérait Adam, ne serait pas prémonitoire.

"Bonjour, bonjour, installez-vous. Il faut qu'on discute un peu avant de se jeter dans la fosse aux lions. J'ai convoqué les élèves dans l'amphi dans une petite heure."

Il laissa le soin aux profs le temps d'essayer de mettre de l'ordre dans ses idées. D'habitude, il avait ses notes pour un exposé, mais pour le coup, il les avait sans doute laissées quelque part. Et d'habitude, c'était lui qui était tranquillement en train de compter les dalles du plafond pendant qu'un directeur quelconque le bassinait avec des discours budgétaires sans fin.

"J'ai quand même un certain nombre d'informations à vous communiquer avant de nous rendre à l'amphi.

Comme vous le savez tous, nous avons essuyé des dégâts assez sévères en janvier. Ca a fait un gros choc aux bâtiments, au moral, à la réputation, et malheureusement aussi à quelques habitants..."

Il fit la moue. Le souvenir des morts était encore assez vivace.

"De ce que nous avons pu analyser jusque là, la Comission Eden semble plus ou moins reparti. C'est difficile à dire. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que d'avoir éliminé mon... son chef ne l'a pas arrêté. Nous devons être conscients qu'il existe un risque important que ses anciens membres entreprennent des actions autonomes. À plus forte raison avec le climat de défiance contre les mutants qui est en train de s'instaurer."

Mauvaise nouvelle n°1. Autant commencer par les mauvaises nouvelles.

"Il y a également cette organisation mutante, Ganymède, qui au vu des plans qu'on m'a communiqué, sait ce qu'elle fait. Même si elle s'est faite mener en bateau par Terry Hunter... Ils ne sont pas trop regardants pour l'éthique, mais il va falloir qu'on soit vigilants de signes de leur activité. Ce ne sont pas vraiment des rigolos.

Quoi qu'il en soit, tout ce bazar a à nouveau attiré les projecteurs sur les mutants, et cela ne nous met pas en valeur. La sentinelle est encore une fois furieuse, et même l'eastern news s'y met. Cela a incité Olivier à prendre une part plus active contre la campagne de désinformation, et il a décidé d'aller faire un cycle de conférences internationales pour parler de tout ça, des mutants, de chez nous, etc. C'est moi qui vais assurer la direction effective, par interim.

Trois élèves ont également décidé que leur place n'était plus ici. Fabrisio et Kirsten ont décidé de retourner chez eux, et Sven... a décidé de mettre en application l'un de ses projets farfelus pour la paix dans le monde.

Nous accueillons aussi trois nouveaux professeurs : Paolo, Esther, et Vadim, qui nous viennent d'horizons assez divers, et à qui je vais laisser le soin de se présenter. Nous allons avoir besoin de ces bras supplémentaires, pour faire face non-seulement aux menaces qui pèsent sur nous, mais surtout à nos effectifs en hausse, et à de probables nouvelles arrivées. Je leur laisse la parole."

Paolo avait commencé à apporter des affaires dans ce qui allait être son bureau pendant… le temps qu’il faudrait pour sa nouvelle affectation. Lui qui n’avait pas donné de cours depuis la fin de la fac, ou plutôt il avait bien dirigé des TD mais pas encore donné de cours et encore moins participé à des activités comme celle de cette Institut Xavier. Il avait déjà bien avancé et son bureau commençait à ressembler à… un vrai capharnaüm mais c’était comme cela qu’il se sentait bien. Des roches récupérées à droit à gauche, des ouvrages certains assez anciens, des cartes, et tout de même un ordinateur car bien qu’il préférait le toucher du papier, les informations les plus récentes n’échappait pas à la numérisation, seules de vieux vestiges avaient résisté au tout informatique. Prenant une dernière fois le pouls de son refuge pour une durée encore incertaine, Paolo se mit en route de la salle de classe où devait se tenir la réunion, il avait pris un carnet pour prendre des notes au cas où…

La tension monta alors qu’il croisait des élèves, peut-être ses élèves plus tard, il n’avait pas retenu tous les visages. Il prit une profonde respiration pour se calmer alors qu’il commençait à sentir une « odeur de chaud » en provenance du carnet.

* Du calme voyons… c’est pas un peloton d’exécution, juste une petite réunion d’information avant… oui bon avant d’être jeté devant tous les élèves et leurs yeux fixés sur toi en se demandant qui tu peux bien être… enfin ça ils ont dû déjà se poser la question en te croisant… *

Il avait tellement ruminé cette journée qu’il en avait oublié de se raser, enfin ça ce n’était pas vraiment en révolution en soi mais pour une première impression ce n’était pas idéal. Passant sa main nerveusement dans ses cheveux, il arriva devant la salle et gratifia les autres professeurs d’un timide « bonjour ». On ne s’improvise pas collègue du jour au lendemain et plus de familiarités n’était guère de mise surtout vu la raison première qui l’avait conduit jusqu’à l’Institut Charles Xavier.

L’entrée en matière fut assez perturbante. Paolo avait bien eu l’occasion de se renseigner sur ce qu’avait vécu les élèves et professeurs depuis l’ouverture ainsi que l’histoire incroyable de la première génération de mutants, mais le fait d’entendre ce à quoi il fallait s’attendre n’était pas pour le rassurer avant de prendre ses fonctions. La presque détente dont faisait preuve Adam Zachary tranchait avec la gravité de ses prédictions. Puis vint des informations plus légères, du moins si l’on omettait la mention des menaces qui pèseraient sur tous, et le moment de se présenter.

Après le mot du professeur Zachary, apparemment promu directeur par intérim, Paolo regarda toutes les personnes présentes et avec un certain empressement, il prit la parole :

- Je prie Mme Kofman de bien vouloir m’excuser pour mon manque de courtoisie à m’exprimer en premier. Je me présente, Docteur Paolo Santero, je suis géologue à l’Institut Géologique du Globe de Houston et j’ai été en premier missionné par la ville de Salem pour suivre l’étude sismologique de la région suite au tremblement de terre survenu il y a quelques mois. Du moins c’était avant que je ne découvre qu’il s’agissait là de l’œuvre d’un élève de l’Institut Xavier. Il est bien évident que ni la ville de Salem ni ma direction ne sait que je vais rester ici pour rejoindre l’équipe enseignante, je vais donc poursuivre mes investigations pendant… aussi longtemps que cela restera crédible. Jusqu’à récemment j’étais le seul à savoir que j’avais un don spécial aussi pardonnez ma discrétion le concernant.

Il avait accentué le mot « investigations » pour bien faire comprendre qu’il ne s’agissait là que d’un prétexte, puis poursuivit :

- Si les dangers qui pèsent sur ces élèves et sur les mutants en général sont bien aussi graves que le laissent à penser vos mots, monsieur le directeur, j’espère pourvoir être d’une aide efficace en tout cas je vous apporterai tout mon soutient.

Voilà… tout était dit en principe… ou pas ?

Lorsque les professeurs s'étaient fait convoqués par leur nouveau et très cher directeur, Carrie n'avait put cacher une vive envie de se trouver une excuse et de s'enterrer quelque part dans le jardin. Elle détestait les réunions de professeurs. Encore une excuse pour raconter ce qui ne va pas, manger des beignes et parler des élèves. Choses qu'elle détestait pour mourir...À l'exception d'une seule. Depuis son retour de la France, Carrie apparut de temps en temps un peu partout dans l'Institut, mais semblait disparaitre aussitôt. L'aisance qu'elle avait graduellement dévelloppée à être professeur et à vivre dans une école c'était envolée d'un coup lorsqu'on lui avait appris qu'elle avait été contrôlée...comme tous ses collègues aussi.

"Bonjour, Adam. Bonjour, chers collègues" lanca-t-elle poliment, mais froidement.

Elle se tira une chaise vers le fond du bureau et regarda quelques secondes autour. Sans Olivier, cette pièce semblait très...L'institut en entier semblait très...vide...Encore heureuse! La jeune avocate étouffait dans cet environnement trop plein! Un petit vide pouvait pas faire de mal...Du moins, c'est ce qu'elle pensait. Peut-être...Sincèrement, elle détestait l'idée de rester ici alors que elle aussi aurait pu faire une tournée!

"Pas encore des mauvaises nouvelles, j'espère..."

Puis, Adam annonca qu'il allait y avoir de nouveaux professeurs. Voila! C'était la mauvaise nouvelle qu'elle attendait depuis 3 mois! Les réunions racontant toutes les mauvaises choses qui s'étaient produites, ne lui faisaient ni chaud, ni froid...Elle avait toutefois, le préssentiment qu'une VRAIE mauvaise nouvelle arriverait sous peu! LA VOILA! Carrie resta bien droite dans sa chaise, ne dirigeant même pas de regard vers les nouveaux professeurs lorsqu'ils furent nommer par Adam. Toutefois, avec une politesse glaciale, elle se tourna vers le premier qui pris la parole. Un géologue...Biensur...un géologue...

"Bienvenue, Monsieur Santero."

Elle dirigea son regard dans celui de l'homme, ne sourit pas et redirigea son regard dur sur Adam. La journée allait être longue...

Vadim Volkov avait mis le pied sur une autre planète en débarquant à l’Institut, aux côtés de la consœur de Bateson, Esther Kofman, qu’il connaissait depuis peu. Tout s’était passé très vite, le menant de surprises en surprises sur les mutants d’Amérique. Il n’avait pas beaucoup dormi, ces temps derniers, et beaucoup cogité. Mais cette fatigue ne transparaissait pas dans son attitude.

Habillé d’un complet bleu de Prusse, d’une cravate jaune canari et de souliers vernis, il entra à son tour dans la salle de classe. Ce jour lui semblait irréel, tout comme les précédents, mais il n’était pas dans la nature de l’Ogre rouge de Sieversk de rêvasser au moment crucial du briefing. Il prit une chaise, croisa ses bras sur sa large poitrine non sans causer quelques souffrances aux coutures de sa veste neuve de professeur. Il remarqua que le directeur adjoint ne prit point place au bureau, comme pouvait l’exiger sa position hiérarchique. Vadim notait avec attention ces comportements sociaux tout à fait étrangers à son milieu militaire d’origine.

Le directeur adjoint rappelait brièvement les informations déjà échangées aux cours de conversations antérieures. Vadim avait dû tout apprendre. Il se sentait comme une pièce d’échec placée au milieu d’une autre partie totalement inconnue. Il fallait être prêt à combattre sans cerner précisément les forces alliées et ennemies. Le discours du directeur intérimaire avait bien exprimé cette confusion.

Le jeune géologue à la mine sympathique prit la parole en premier, avec une fébrilité compréhensible et que Vadim partageait. Il était scientifique et semblait arriver comme par hasard à l’Institut. Vadim afficha un sourire amusé. L’avocate Carrie Marcin salua un peu froidement l’assemblée. L’heure était grave et ce comportement était beaucoup plus compréhensible que l’apparente désinvolture du directeur adjoint, du point de vue de Vadim.

Il passa sa main rouge sur ses cheveux noirs peignés avec soin.

« Je suis Vadim Vladimirovitch Volkov, ancien lieutenant-colonel de l’armée russe. Ma dernière affectation était au service de l’information et de la communication de la Défense, mais auparavant j’ai travaillé au sein du Ministère des Situations d’Urgences. J’ai servi quelques années en missions de commando, mais toujours sur le territoire de la Fédération de Russie. »

Dit-il comme pour excuser sa longue ignorance des autres faces du monde. Il observa tous les participants, les doigts plaqués sur le bord de la table.

« J’ai démissionné parce que mon pays ne s’intéresse pas de la bonne manière aux Mutants. »

Il prononçait ce mot avec une délicatesse de ton particulière. Depuis qu’il avait appris leur existence, et par le même coup résolu le comment de la sienne, Vadim aimait les mutants d’un amour fraternel. Il poursuivit de son anglais caverneux et légèrement roucoulant.

« Me voilà ici en Amérique un peu par surprise, et à ma honte pas très légalement. Mais j’ai laissé des amis fidèles derrière moi qui sauront calmer la petite colère de mes anciens chefs, et nous pourrons un autre jour compter sur les amis, j’espère ! »

Lança-t-il à la cantonade. Il était tout de même content que Paolo Santero soit dans une situation aussi désagréable que lui vis-à-vis de sa hiérarchie. Sinon plus. Vadim nota mentalement de suggérer la démission de son institut au professeur Paolo, pour que la situation soit claire.

Il se tourna vers Adam Zachary.

« Je vous remercie encore, Directeur-adjoint Zachary, pour votre accueil et votre réponse affirmative à mon souhait de vous aider. J’espère assimiler très vite votre fonctionnement pour être le plus efficace. Toutes les forces seront utiles face aux adversaires que votre fraction a déjà rencontrés. Je dois dire que je suis honoré et hâtif de voir tous vos jeunes élèves, déjà si expérimentés et éprouvés. C’est une chance unique pour un homme comme moi. Je la dois au Professeur Bateson et au Capitaine Kofman. »

Et il adressa un hochement de tête reconnaissant à la jeune femme, espérant qu’elle le corrigerait subtilement sur son grade en cas d’erreur. Sentant la nécessité de conclure sa présentation succincte, il ajouta une dernière chose importante sur lui-même.

« Quant à mon application, elle consiste donc par exemple à grandir ou diminuer la carcasse d’écrevisse que je porte depuis quelques années ! Je laisse maintenant la parole. »

Voilà les gens avec qui elle allait bosser maintenant. Plus de GERM, plus de Robert, juste un Institut qu'elle ne connaissait que via les travaux de recherches de son regretté mentor... Une équipe entièrement mutante, plus ou moins scientifique et ouvertement critiquée par la presse grand public...

Esther réfléchit un instant : après tout la trajectoire de son précédent laboratoire de recherches avait été un peu la même. Une équipe montée autour d'un seul homme. Une volonté partisane fondatrice qui les avait motivés à travailler d'arrache pied contre les discriminations anti mutantes. Et un rejet de la communauté universitaire violent et viscéral.

Bien sur tout cela avait tenu à Robert... Maintenant qu'il n'était plus, la NYC University s'était empressée de licencier son équipe... Et c'est armée d'une simple lettre de recommandation, préparée ante mortem, qu'Esther était venue chercher refuge à l'Institut.

Elle avait été étonnée que le Lieutenant Colonel Volkov soit également candidat au professorat à l'Institut. Bateson avait toujours eu beaucoup de respect pour la grande courgette rouge. Esther moins. Mais c'était là toute son ambivalence vis à vis du corps militaire : répulsion pour ce que Tsahal lui avait fait faire mais aussi reconnaissance pour tout ce qu'elle y avait appris.

Les deux nouveaux professeurs garçons lui avaient grillé la priorité... Pas bien grave à vrai dire, en bonne féministe radicale, elle ne demandait pas de traitement spécial...

Aussi, quand ce fut à elle de parler, elle s'éclaircit la voix puis commença :

"Mon nom est Kofman... Esther Kofman. J'exerce... du moins j'exerçais la fonction d'assistante de recherche au sein de l'unité du Professeur Bateson que vous avez du connaître. Suite à son décès et sur les conseils qu'il m'avait prodigué de son vivant, j'ai candidaté ici. Je tiens d'ailleurs à remercier Monsieur Zachary pour son accueil..."

Monsieur Zachary ? Elle était quoi ? Une collégienne ? Elle se pinça les lèvres comme pour se rappeler que pour qui avait servi Tsahal, une petite réunion de professeurs ne devrait avoir rien d'angoissant... Elle reprit :

"Je suis docteur en ethnopsychologie et également chercheuse en sociologie. J'ai travaillé notamment en collaboration avec Robert... Le Professeur Bateson sur sa publication relative à l'Institut."

Publication qui était inachevée, ses notes ayant brûlées dans l'incendie de son véhicule...

"Enfin, je suis mutante. Pour faire très bref, j'ai la capacité de contrôler la température. Je manie le chaud comme le froid en somme".

Quoi d'autre ?

"Pour être parfaitement exhaustive, comme l'a effectivement soulevé Vadim Volkov, j'ai eu le grade de Capitaine... dans l'armée Israélienne que j'ai servi 3 années avant d'émigrer aux États-Unis"

Se détendant quelque peu, une fois son speech achevé, Esther observa à la volée les autres enseignants, mi curieuse mi amusée : ce serait donc eux, ses collègues pour l'année à venir ?

Cassandre avait fait une entrée discrète dans la salle de classe, si l'on exceptait le "tac-tac" sonore de sa canne blanche. Quelques semaines s'étaient écoulées depuis l'attaque de l'Institut, semaines durant lesquelles la psychologue s'était murée dans une profonde introspection suite au décès de River, et à la réaction des élèves.
Ne faisant que de rares apparitions hors de son bureau, elle avait néanmoins laissé sa porte ouverte pour assurer une cellule psychologique post-traumatique, tout en doutant que les élèves aient encore envie de se confier à elle.
C'est avec une certaine réticence qu'elle avait sorti sa vieille canne blanche pliante de sa valise, reliquat d'une adolescence où elle donnait le change de la "normalité" aux yeux de son entourage. Son pouvoir s'était depuis bien longtemps substitué à l'objet stigmatisant quant à ses déplacements, travaillant en permanence en arrière-plan de son esprit.
Mais de la mort de River... La légitimité de ses interventions mutantes était remise en question. Fallait-il vraiment modifier le cours du destin en sachant que toute tentative n'était pas absolue ? Elle avait fait ce choix, depuis la découverte de son pouvoir, son altruisme la poussant à oeuvrer pour les autres dans la mesure du possible. Mais aujourd'hui, le sentiment d'impuissance qui en découlait était trop fort. Qu'elle intervienne ou non, elle ne pourrait jamais garantir une fin parfaite.
Ce constat fataliste l'avait dissuadée d'utiliser son pouvoir. Fermant son esprit à toute incursion temporelle, elle s'était figée dans le présent, un présent où "Sibylle" ne la désignerait plus. C'est ainsi qu'elle avait ressorti ses attributs de non-voyante : lunettes opaques et canne blanche. Etre humaine à défaut d'être utile en tant que mutante.Et puis... Olivier à l'autre bout du monde, et Adam affairé à pallier son absence, personne n'était là pour la conforter dans le bienfondé de ses fonctions à l'Institut.
Bien sûr, sans qu'elle s'en rende compte, son pouvoir avait pris une place énorme dans ses habitudes de vie. Elle allait devoir rappeler toutes ces petites choses qui l'aidaient autrefois à mener une vie normale. Elle sollicitait de nouveau bien plus ses autres sens, d'ordinaire au second plan comparé à son pouvoir. Il n'y avait que la nuit que sa décision devenait un véritable problème, augmentant considérablement la fréquence de ses crises de somnambulisme.

Cassandre alla s'asseoir lentement, et prêta oreille à ce qui se disait, son visage morose et imperméable tourné vers la fenêtre. Les nouvelles récentes n'avaient rien de très positif, mis à part l'aide des trois nouveaux professeurs, qu'elle dut faire un effort pour ne pas sonder... par habitude. La pluri-ethnicité du corps professoral était appréciable, et l'accent de Vadim la faisait se sentir moins seule.
Sans pouvoir, elle ignorait tout du physique de ses interlocuteur. Quelque part, elle se plaisait à redéfinir sa perception du monde sans cette connaissance infuse et quasi permanente de tout ce qui l'entourait. Elle avait deviné sa carrure à sa respiration, au craquement de la chaise sous son poids, au léger couinement de ses vêtements.
Quant à Paolo, elle voyait sa nervosité dans le timbre de sa voix, qui plus légère, lui dessinait une silhouette moins imposante que celle du russe.
Esther semblait avoir l'esprit de synthèse et déclinait ses fonctions avec factualité. On aurait dit une réunion des Mutants Anonymes.

La nouvelle du décès de Robert Bateson tira la psychologue de sa "contemplation" de la fenêtre.

"Le professeur Bateson est... ? Je ne sav..."

Elle s'interrompit. A leur rencontre, elle avait effleuré son passé pour s'assurer de ses bonnes intentions, mais pas son futur. Aurait-elle dû ? Lui aurait-elle évité de mourir ? Tout le monde meurt, pourtant. Autant de questions qui plus que jamais la taraudaient à présent.
Le visage incliné vers sa table, Cassandre resta silencieuse le temps que les professeurs finissent de se présenter.

"J'ai rencontré le professeur lors de sa visite. J'étais vivement intéressée par les recherches qu'il effectuait..." reprit la non-voyante d'une voix douce. Il ne serait pas difficile de consulter mentalement son oeuvre complète dans un possible quelconque, mais la tentation était trop grande pour convaincre la psychologue de rompre son voeu.

"... Je m'appelle Cassandre, je suis psychologue à l'Institut." ajouta-t-elle, se rappelant aux principes élémentaires de la courtoisie qu'elle affectionnait tant. Elle aurait pu ajouter un grand nombre de fonction qu'elle occupait implicitement à l'Institut, mais à quoi bon ?

"Je crois que la nature cosmopolite des lieux devrait vous garantir pas mal de travail, Esther."

Quelque part, la présence de deux ex-militaires l'intimidait.

"Plus qu'une école, pour bien des élèves, l'Institut est une maison. Les dommages, tous les dommages, que nous avons subi il y a quelques semaines ont profondément marqué chacun des résidents. Nous devons certes apprendre à ces jeunes à maîtriser leurs pouvoirs, mais également les protéger des attaques perpétrées contre les mutants. Il faudra composer avec la conjoncture actuelle, qui n'est pas vraiment favorable à leur épanouissement... en particulier à Salem Center." dit-t-elle, avec un léger crispement des mâchoires. Le clivage génétique était palpable ces derniers temps à Salem, et la paranoïa anti-mutante à son paroxysme depuis le tremblement de terre.

"Si l'un d'entre vous a besoin d'aide ou de renseignements pour mieux appréhender la vie à l'Institut, n'hésitez pas à m'en faire part... Je... crois connaître l'Institut et ses résidents mieux que personne."

Sahari était entrée dans la salle de classe en même temps que les autres professeurs et, voyant enfin une occasion de lui glisser un mot, elle s'assit à côté d'elle et lui proposa, avant que le discours d'Adam ne commence et qu'elle ne salue tout le monde d'un hochement de tête.

"Carrie, j'aimerais vous parler bientôt..."

Ce n'était pas pour voler à Cassandre son boulot de psychologue, mais l'africaine avait remarqué la taciturnité de Carrie, depuis quelques semaines, et elle voulait lui en glisser un mot. Elle avait aussi besoin de discuter avec une femme... Un caprice, probablement. Comme sa relation avec la psychologue avait toujours été ambigüe, Sahari s'imaginant que Cassandre avait une pointe d'appréhension à son égard, et comme elle voyait Esther pour la première fois, elle avait préféré en parler à Carrie. Et puis, toutes deux, en raison de leur statut mutant connu ou évident, partageaient un petit quelque chose, comme si leur rejet de la société en était plus important. Ou pas.

Sahari s'efforça tout de même d'écouter le plus attentivement possible ce qui se disait. Outre le joli minois de Paolo, et la carrure impressionnante de Vadim, monsieur triple V, Sahari remarqua qu'elle était bien la seule dans la pièce à ne pas posséder un titre plus long que son prénom. Ça changeait quoi?
Paolo semblait plus stressé, mais son langage était plus familier que le militaire et Esther. Vadim sembler tenter de confondre Sahari, et il le réussissait passablement bien, utilisant des formulations trop élaborées pour elle. Militaire, oui... Esther semblait être à mi-chemin entre les deux, charismatique, mais tout de même très scientifique.

Mais ce qui surprit le plus Sahari, ce fut la déclaration de Cassandre. On finissait souvent par croire que Cassandre savait tout, bien que ce ne fut pas le cas. Ce seul argument expliquait qu'elle ignora le décès de Bateson, mais un doute subsistait en Sahari. Peut-être était-ce en raison de la canne qu'elle avait réadoptée? En fait, même Adam, qu'elle connaissait à peine en raison de sa longue disparition, semblait ne pas avoir le moral. Il faut dire que c'était normal, tout le monde avait été très occupé depuis la destruction de l'overmind, et on pouvait facilement comprendre que plusieurs étaient au bout du rouleau. Tous même, car Sahari devait avouer qu'un brin de solitude lui manquait parfois. Elle faisait ce qu'elle pouvait pour alléger la tache à Adam et Cassandre et avait participer aux réparations et mises à neuf, fournissant une échelle aux volontaires pour la peinture, par exemple. L'arrivée de trois nouveaux professeurs motivés étaient comment dire, une bénédiction.

Prenant la parole suite à Cassandre, Sahari se présenta, et ne put s'empêcher de poser des questions au docteur Zachary, allant droit au but.

"Je suis Sahari Fouba, et n'ai pas poursuivi les études. Enchantée." Elle eut un petit sourire en les saluant du regard. Elle n'était pas pour baisser la tête honteusement, quand même! Elle se pencha sur son bureau, émettant quelques petits crissements contre les barreaux de la chaise.

"Savons-nous où se trouve la nouvelle Commission Eden? Nous n'avons qu'à la détruire encore et... et nous arranger pour qu'ils ne la reconstruisent pas de nouveau! Et cette organisation, Ganymède, on ne pourrait pas leur communiquer? Ça ne serait pas mauvais, d'avoir des alliés... on éviterait d'envoyer les élèves..."

Elle ne termina pas sa phrase, par politesse, mais son coeur se serra tout de même en souvenir de l'enfer de la Défense. À son ton, il était évident que l'Africaine commençait à être ennuyée de rester enfermée, ou presque.

Richard, lui aussi, après avoir salué ses collègues, s’était installé sur une chaise qu’il avait tiré de sous l’une des tables habituellement occupé par les élèves. Autour de lui, qui semblait plutôt calme à l’idée de la réunion, il y en avait pour tous les goûts, des calmes, des stressés, des insensibles, des habitués... Une fois qu’il eut fait le tour de la salle du regard, tentant de ne pas s’attarder trop longtemps sur les nouveaux venus, dont l’un semblait anxieux à prendre la parole, il posa son regard sur Adam, qui débuta son discours de rentrée. Encore des mauvaises nouvelles... La commission Eden repartait ? L’avocat n’avait jamais eu à faire à eux personnellement, mais la nouvelle ne l’enchantait guère. Pas plus que la suivante concernant Ganymède. À quoi bon s’échiner à rendre leur réputation meilleurs, si d’autres se chargeaient de la réduire à néant à la moindre occasion. Enfin c’était ainsi qu’il voyait les choses.

La nouvelle qui l’intrigua le plus, à l’exception de l’arrivé de trois nouveaux professeurs, était l’entreprise d’Olivier. Il n’y avait rien de mieux qu’un mutant pour expliquer leur situation, et Olivier était probablement le plus apte de tous à accomplir ce genre de mission. La situation s’était amélioré, mais se détériorait déjà. Sans doute que son action de plus grande ampleur, et surtout pacifiste, aurait un effet des plus bénéfiques.

Paolo Santero prit ensuite la parole, expliquant comment il était arrivé ici et pourquoi. Un tremblement de terre... d’après ce qu’on lui avait raconté, c’était Chloé qui en était arrivé à faire effondrer l’institut, et tout ça pour le mettre hors d’état de nuire, lui, Factoriel. Autant dire que toute cette histoire lui restait toujours en travers de la gorge. Carrie non plus ne semblait pas l’avoir digérer, ce qui était compréhensible, et Richard avait toujours quelques appréhensions avant de s’adresser à elle de peur de ne se retrouver face à face avec le dragon de Paris. Elle était froide, comme à son habitude, pour accueillir les trois nouveaux venus.

Vadim Volkov semblait également un peu anxieux, mais déjà nettement plus à l’aise dans son discours que ce Santero. La Russie... Richard n’y avait jamais mit les pieds. Il était impressionnant de voir qu’il n’y avait pas que les élèves qui venaient de tout horizon, mais les professeurs également. Esther Kofman confirma sa pensée, elle aussi provenant d’un autre pays, l’Israël. Chacun de ces deux là avaient du vécu militaire, et Richard ne su dire s’il pensait que c’était une bonne chose ou non.

Puis ce fut au tour de Cassandre d’intervenir, et Richard l’écouta avec un léger pincement au coeur. Que lui arrivait-il, à elle qui savait tout ? Leurs échanges avaient certes été très limité, et uniquement professionnel, mais il ne pouvait s’empêcher de penser qu’elle n’avait pas ressortit sa canne sans raison, alors qu’elle n’en avait jamais eu besoin auparavant. Son moral, tout comme le siens et celui de ses collègues, n’étaient pas au plus haut, sans compter que Cassandre avait trois élèves qui était partit suite aux derniers événements. Outre son moral, son assurance aussi semblait en avoir pris un coup.

« Bienvenue à tous les trois. Et ne vous en faites pas pour les élèves. » Dit-il plus à l’intention de Paolo que des deux autres. Puis il se tourna vers Sahari, comme pour lui répondre, avant de tourner son regard vers les autres.

« On pourrait tenter d’établir un contact avec Ganymède, comme le dit Sahari, mais je ne suis pas convaincu qu’on devrait leur laisser le travail, ni même leur fournir quelque information que ce soit. D’après Adam, ils ne sont pas spécialement regardant, et je crains que leurs actions ne soient pas prévues dans un cadre de moindre violence. Comme nous tentons de le faire. »

Adam laissa le soin à ses collègues de se présenter sans rien dire. Cela lui laissait le temps d'envisager sereinement la suite des évènements. Lui-même ne s'était pas présenté... Mais après tout, tout le monde le connaissait.

Une fois les mondanités terminées, Adam décida de tailler dans le vif du sujet. Une mauvaise habitude qu'il avait prise récemment...

"Pour vous résumer où en est la situation, les choses vont être tendues.

Les gens sont contre nous. Surtout à Salem, mais dans le monde aussi, les choses ne vont pas super fort. Il va falloir faire le dos rond, et surtout, être exemplaires. Par là, j'entends qu'il ne faudra pas laisser passer grand chose aux élèves. Et s'ils peuvent au contraire faire un peu les protecteurs de la veuve et de l'orphelin, ce sera toujours ça de gagné.

On a la Comission Eden qu'il va falloir surveiller, ainsi que Ganymède avec lequel je vais tenter d'entrer en contact...

En tout cas, soyez sûrs que vous n'allez pas être que profs... Grand frère, père de substitution, protecteur, éducateur... Tout ça en même temps. Certains sont de vrais gosses."

Son ton était devenu un peu trop sérieux. Où était l'insouciant expert qui ne passait qu'après les catastrophes pour comprendre ce qui leur était arrivé ? Voilà qu'Adam se retrouvait à devoir les prévoir et les prévenir. Si c'était ça la vie de Cassandre, ça devait pas être bien rose.

"Sinon, l'institut fonctionne par équipe, pour les entraînements aux pouvoirs, et les missions à l'extérieur. On a un peu discuté avec Cassandre, et ce serait bien qu'on chamboule un peu les ordres établis. De toutes façons, elles ont été sérieusement amputées... Donc voilà le panel des élèves... Faites votre choix."

Il pianota sur la tablette de son bureau, et fit apparaître des hologrammes des élèves de l'institut, avec quelques infos sur leurs têtes.

La femme aveugle était psychologue... Esther devra surement travailler en binôme avec elle, se dit elle.

Il y aurait nécessairement du boulot : après cette suite de destructions, de décès parmi les membres de l'Institut, le départ du directeur et le reste du monde qui leur voulait du mal, son bureau serait surement un lieu pour trouver des réponses...

... réponses qu'Esther n'était pas sure de pouvoir donner. Elle même ne se sentait pas au meilleur de sa forme : la mort de Robert l'avait pas mal touchée. Elle était un peu perdue. Et la compagnie de visages inconnus n'était pas pour améliorer son moral.

L'israélienne se tourna vers Mademoiselle Deneos. Elle répliqua aussi doucement que son émotion ne lui permettait :

"Oui, le Professeur Bateson est mort. Accident de voiture. Vous connaissez toute l'histoire maintenant. Et oui, sa disparition est une grande perte pour la communauté universitaire..."

... et pour moi, pensa t'elle amèrement.

Se ressaisissant, elle rajouta :

"Le cosmopolitisme c'est mon cœur de métier, Mademoiselle Deneos... Mais comme vous le dites, vous connaissez cet établissement et pas moi... J'espère que nous aurons l'occasion de reparler de notre future collaboration sous peu !"

Une pointe d'enthousiasme pouvait s'entendre à la fin de sa phrase.

Adam Zachary finit par arriver au point du choix. Choix des élèves directement placés sous sa responsabilité. Choix à l'aveugle. Sur de simples visages laissés à son appréciation.

Esther réfléchit quelques instants puis se ravisa : à quoi bon ? Elle se laissa guider par le hasard de ses pensées...

"Je prendrai... Ivy... Hjordis..."

Des étrangères certainement, comme elle...

"Laura... Amarenna, je veux une équipe de filles... Ca sera plus simple".

Puis succombant à la contradiction, elle termina après de longs instants de réflexions.

"Et Math... Et Juan. Voilà, c'est mon choix si ça vous convient".

Et en signe de résolution, elle croisa les bras et les jambes, adoptant une moue pincée. Amen. Mektoub. Esther ne savait pas si elle se mordrait ou non les doigts pour ce choix mais elle s'y tiendrait. Alea jacta est.

Carrie ne jetta qu'un regard leger sur ses nouveaux collègues. Toutefois, son regard se posa un peu plus longtemps sur les deux hommes. Premièrement sur Vadim, énorme et imposant puis sur Paolo, pour voir le contraste entre les deux hommes. Des hommes, de toutes les races, de toutes les formes et...de toutes les couleurs. Elle sentait vraiment que la saison sera longue. Elle souhaitait vivement une participation des nouveaux professeurs dans des cours pour les élèves. Ainsi, elle aurait peut-être le temps de mieux préparer ses classes et de, peut-être, avoir quelques moments libres à elle. Ce ne serait pas de refus pour la dragonne qui aimerait bien rester seule dans sa cave à souffler dans son coin. La jeune avocate fronca les sourcils lorsque Esther annonca la mort de Bateson. Bien sur, Bateson avait été quelque peu lourd et ennuyeux lorsqu'elle l'avait vu, mais elle était toujours un peu attristée d'apprendre la mort de quelqu'un. D'une voix claire et sincère malgré le ton un peu froid, Carrie adressa quelques mots à l'ex-assistante du professeur:

"Je suis désolée pour votre perte, Madame Kofman. Mes plus sincères condoléances."

Carrie adressa un regard qui se voulait un peu plus doux à Esther, regard qui se métamorphosa d'un seul coup lorsqu'elle entendit les paroles suivantes de Zachary. Elle se redressa dans sa chaise lorsque Adam annonca un mélange et une re-sélection des élèves. Elle qui venait juste de s'habituer à sa nouvelle équipe devait recommencer? Les liens qu'elle avait formé avec ses élèves actuels, bientôt anciens élèves, étaient ce qui ressemblait le plus à une relation de confiance et elle devait recommencer à zéro? Dans son état? Chambouler les ordres établis...chambouler ses limites et ses zones de confiance aussi!

"Je vous demande pardon, vous quoi?"

Elle serra les dents et soupira longuement. Il n'y avait rien à faire. La decision était finale. Kofman commencait déjà à faire la sélection de son équipe. Carrie, qui aurait pu accepter sa nouvelle collègue, mettait déjà une croix sur son visage. Lorsque l'ex militaire disjonctée eu finit de faire son choix d'équipe, Carrie annonca d'une voix forte et claire:

"O'Connell, Willington, March , Hwang. Ce sont les seuls que j'accepte en ce moment présent. Je verrai en conséquent avec les arrivées prochaines d'élèves."

Elle se leva et se placa derrière sa chaise, pres de la porte, signifiant clairement qu'elle en avait assez de cette réunion, que son choix était final et qu'elle souhaitait quitter les lieux.

Paolo n'était pas beaucoup plus à l'aise avec tous ces nouveaux visages. Il écouta et remercia timidement l’accueil de ses nouveaux collègues mais esquissa pourtant un sourire presque naturel et tout à fait charmant à l'intervention de Sahari, il commençait déjà à l'apprécier ou, tout du moins, elle ventait de réussir à le détendre un peu. Briser la glace n'était pas facile, encore moins dans les conditions présentes et Carrie semblait à l'aise dans le rôle de l'iceberg. Le mexicain fut touché par les paroles d'Esther mais le réconfort n'était pas vraiment son domaine de prédilection aussi se contenta-t-il d'un hochement de tête et d'un visage grave pour signifier ce que d'autres avant mieux exprimé par des mots.

Il se noyait un peu dans toutes les menaces qui pesaient sur de simples adolescents. C’était incroyable de voir le malheur qui avait pu s’abattre sur ce qui devait être un havre de paix et qui avait, tour à tour, été le théâtre de l’attaque de robots, d’une attaque télépathique et enfin la visite de mutants aux mœurs plus que douteuses…

Il balaya ses collègues d'un regard circulaire et tenta de s'imprégner de leur présence, sans porter le moindre jugement, il chercha à définir l’impression que chacun lui renvoyait et s’arrêta sur la psychologue. Pour une femme avec un tel rôle, elle semblait si fébrile qu’il lui semblait qu’elle pouvait fondre en larme d’un instant à l’autre. L’image qui lui vint était celle d’Atlas portant le monde sur ses épaules.

Mais le professeur Zachary reprit la discussion et exposa d’autres éléments. Il avait bien compris dès le départ qu’il ne s’agissait pas simplement de donner des cours sur comment éviter de faire s’effondrer un manoir ou comment éviter d’être possédé. Il y avait derrière le rôle de professeur un rôle de protecteur mais aussi de guide. Et cela, Paolo le comprenait bien car n’avait-il pas été transformé au contact de son professeur de géologie et presque Pygmalion ? Il accompagna les mots du directeur avec un regard déterminé, son anxiété balayée.

Les informations sur les élèves apparaissaient déjà devant lui. Il lui semblait bien avoir eu une discussion sur ce point lorsqu’on lui avait demandé de rejoindre l’équipe enseignante. Apparemment cette nouvelle recevait un accueil plutôt mitigé, certainement plus pour la partie mélange des équipes déjà formées…

Paolo scruta l’hologramme et regarda les quelques informations. Il repéra la jeune fille à l’origine de son arrivée dans cette institut, mais ne fut pas convaincu du bien fondé de la prendre directement sous son aile. Se fiant à son instinct, le géologue annonça :

- Pour ma part je vais choisir… en commençant par la gente féminine, Rachel, Wind, Noémie, Yrianna, puis Jonas et Chris. Voilà qui devrait compléter une équipe. J’espère ne pas couper l’herbe sous le pied de quelqu’un par ma sélection…

Le professeur Santero ne savait pas encore par quel bout prendre ses nouveaux collègues, certains plus que d’autres d’ailleurs, mais déjà son regard se posa de nouveau sur la psychologue, le plus naturellement du monde. En fait il ne la regardait pas vraiment, il était perdu dans ses pensées, imaginant les élèves qu’il venait de prendre sous sa responsabilité, imaginant la réunion prochaine devant tous les élèves de l’institut, et poser son regard sur Cassandre était un peu comme regarder l’étoile qui lui indiquait le Nord.

Vadim écouta Esther avec sympathie et même empathie. Le professeur Bateson était un humain fragile et c’est à lui que l'Ogre russe devait d’être à l’Institut. Evidemment le mutant voulait faire toute la lumière sur cet accident, mais il devait laisser l’initiative de cette entreprise à Esther, beaucoup plus proche du scientifique. Il se contenta donc de serrer les mâchoires en respectant silencieusement la mémoire de Bateson.

*Il aimait bien les pirojkis aux champignons…*

Se souvint Vadim en repensant au buffet de la conférence à Moscou. Son cœur se serra. Pendant qu’Esther parlait il observait à son tour cette femme aveugle, Cassandre Deneos. Vu ce qu’il savait d’elle, de son pouvoir et des événements passés, Vadim ne pouvait que compatir au destin sans concessions de cette personne. Mais il s’absorba bientôt dans la contemplation de la table pour ne pas qu’elle sente, d’une manière ou d’une autre, son regard sur elle.

Il releva le menton et se tourna à nouveau vers elle comme elle prenait la parole. Bateson, décidément, avait dû mourir avant d’avoir rassasié de ses connaissances les mutants mêmes qu’il étudiait. Vadim poussa un soupir.

Avec cette équipe de professeurs assez abattus, ou tout du moins encore sonnés, la psychologue avait raison de dire que la conjoncture actuelle n’était pas vraiment favorable à l’épanouissement des jeunes. Le Sibérien se demanda si cette morosité ambiante n’était pas aussi due à la manipulation mentale dont ces gens aux pouvoirs immenses avaient fait l’objet. La confiance mutuelle avait du recevoir un choc.

Puis Sahari Fouba se présenta succinctement, prenant le contre-pied des précédents exposés. Vadim apprécia cette fraîcheur enfantine et esquissa un sourire. Les trois femmes de la première équipe, Cassandre Deneos, Carrie Marcin et l’Africaine, semblaient faire le concours de celle qui aurait le caractère le plus opposé aux deux autres. Le trio capta grandement la curiosité de Vadim.

Puis après Carrie Marcin et sa claquante froideur, l’avocat plus taciturne Richard Fish ajouta son point de vue sur la situation, ce qui permit à Volkov de l’observer tout en se frottant le menton. Cet homme semblait sérieux et constructif. Son physique était particulier avec un visage bien découpé et un front haut… Mais Vadim cherchait en vain quelque exotisme mutant sur cet homme multiple.

Adam Zachary mit fin à cette inspection visuelle des professeurs par Vadim qui écouta en rajustant sa cravate. Il prit la parole à la suite de ses collègues après étude de quelques profils intéressants.

Vadim se fia à des critères tout personnels pour son panel.

« Bien je vais tâter la résistance de ces jeunes : Yamina Gham, Niko Merrien, Jay Sirian, Nanikana Adawe, Kalalli Renand. »

Sahari écoutait et écoutait. Quand est-ce qu'ils bougeraient?
Certes, elle était peut-être un peu trop prompte à vouloir se lever, mais au moins ça l'occuperait et lui changerait les idées, non? Heureusement, Adam avait l'esprit de synthèse et il annonça bien rapidement une restructuration majeure des équipes. Bon, depuis que Draena était partie et qu'elle avait viré les quatre cinquièmes de l'équipe qui lui restait, et que Lyu était décédé, on ne pouvait pas réellement affirmer que Abaigh était une équipe... Aussi la nouvelle ne la heurta pas trop. Moins que sa collègue française, manifestement.

À son tour, elle lança un regard appuyé à Adam, l'air de dire qu'elle ne négocierait pas son premier choix.

"Je conserve Abaigh. Je reprend aussi Camille : elle fait de réels efforts depuis deux mois. Jade, aussi..."

Elle observa les autres hologrammes, flottant devant eux et hésita un instant. Elle fixa Esther avec un infime sourire au bout des lèvres, en annonçant son choix.

"Chloé et Jessica, finalement. Je conserverai une place libre, moi aussi." et une équipe entièrement féminine...

Et si Sahari avait songé déjà à se lever et bouger, elle fut étonnamment (ou non, selon le point de vue) devancée par Carrie, qui s'était levée, manifestant son désir de clore cette réunion le plus rapidement possible. Elle lui lança une regard en face, un sourcil arqué autant que son front osseux le lui permettait. Instinctivement, et probablement parce qu'il était lui aussi avocat, Sahari se tourna vers Richard pour voir comment il réagissait à l'attitude de leur collègue.

Esther semblait vouloir changer de sujet, du moins reprit-elle rapidement le ton professionnel qu'elle avait adopté en se présentant. Il y avait dans ses paroles quelque chose d'expéditif, d'incisif qui mettait Cassandre mal à l'aise. Un métier. A ce moment, la non-voyante crut appréhender instinctivement un fossé énorme qui séparait Esther d'elle-même. A première "vue", elle avait tout d'une technicienne de la psycholologie, là où Cassandre versait dans l'humain, dans l'affect, parfois à ses dépends.
Le détachement apparent de sa nouvelle collègue impressionna Cassandre. Peut-être aurait-elle dû plus s'attacher au métier, et non aux personnes qui se cachaient derrière. C'était sûrement s'épargner le souci des états d'âmes. Mais elle savait pourtant qu'elle serait bien incapable d'en faire autant, même si cela pouvait lui apporter un peu de réconfort dans ces moments de doute intense qu'elle traversait.

La Grecque ne sut répondre à l'enthousiasme d'Esther, et se contenta d'un "bien sûr" étouffé, avant de retourner son visage vers la fenêtre.

Après quelques mots de plus sur les dernières nouvelles, Adam enchaîna sur la répartition des équipes. Il semblait remis de ses propres cas de conscience, du moins n'en laissait-il rien paraître, même à Cassandre, qui en l'absence d'Olivier, était celle qui le connaissait le mieux. Elle aurait peut-être dû demander à Renaud de lui effacer la mémoire avant de quitter l'Institut. Savoir mais ne pas se souvenir, c'était peut-être plus facile à gérer.
Carrie quant à elle, semblait contrariée, du moins c'est ce que la psychologue nota à sa brusque variation de timbre. Il faudrait bien qu'elle trouve un moment pour aller lui toucher deux mots pensa-t-elle, alors que ses collègues choisissaient les élèves.
Nul besoin de consulter les dossiers pour elle. Elle connaissait bien tous les occupants de l'institut. C'était là l'une des seules certitudes à laquelle elle s'accrochait encore.
Ce n'est que lorsque Sahari prononça le prénom de Jessica que Cassandre tourna brusquement la tête l'Africaine.
Cesser de prévoir l'avenir avait aussi ses mauvaises surprises. Ce fut un choc. Elle avait protégé Jessica depuis leur rencontre, quelques huit mois auparavant. L'affect, l'éternel problème de Cassandre. Sans qu'elle se l'avoue, elle avait développé un attachement maternel pour l'adolescente. Elles avaient traversé beaucoup d'épreuves ensemble... Les journées portes ouvertes, le Camp Labrador...
Le choix de Sahari lui retirait sa "fille". Cassandre ouvrit la bouche, comme pour parler, puis se ravisa.
En réalité... elle devait bien l'admettre, elle, la maîtresse des conjectures... Sahari était un choix rationnel. Une femme forte, physiquement et intellectuellement, voyante qui plus est. Qui serait plus à même de veiller à son épanouissement tout en la protégeant ? Certainement pas Cassandre. Oui... C'est ce qu'une mère aurait fait : confier sa fille à quelqu'un capable de la protéger. Elle avait certes entrevu des bribes de son passé tortueux lors de leur première rencontre... Mais Cassandre était maintenant mal placée pour jeter la pierre, elle que les élèves tenaient pour responsable directe de la mort de leur camarade.

La psychologue inclina la tête vers le sol, avant de répondre :

"Je proposerai à Iacobo, Georgia et Mina de se joindre aux NeXus." dit-elle d'une voix éteinte en ravalant son choc. Elle suivait de loin l'évolution des deux premiers depuis leur arrivée, et c'était là une chance de pouvoir leur accorder l'attention qu'ils méritaient. Les relations avec Iacobo s'étaient révélées chaotiques avec la plupart des figures de l'autorité, et peut-être le seraient-elles encore plus maintenant avec elle... ou peut-être pas. Quoi qu'il en soit, elle apprendrait sûrement plus d'eux qu'ils n'apprendraient d'elle.

"Je... excusez-moi." dit-elle en se levant maladroitement de sa chaise, une boule dans la gorge. S'aidant de sa canne, elle quitta la pièce sans terminer la composition de son équipe. Maintenant que le moment était venu de recomposer les NeXus, le souvenir de ses anciens élèves l'assaillait, celui de Myou qu'Olivier avait tuée... Frank également... Et toujours Jessica. L'affect... avait quelque chose d'infect.

Ailleurs

Carrie n'avait plus rien à dire. Cassandre s'était levé et avait quitté la pièce, visiblement contrariée aussi de la situation. Elle faisait partie de la direction! Elle n'avait qu'à ne pas échanger les équipes. Carrie savait que Sahari voulait lui parler. Mais elle n'en avait rien à faire. Sa collègue, aussi attachante pouvait-elle être, n'avait rien à voir avec ses problèmes. Elle n'avait pas besoin d'une psychologue! Elle n'avait pas besoin d'une confidente! Elle n'avait pas besoin...Elle ne voulait pas d'amie. Bon...maintenant puisque Cassandre avait quitter la pièce. Rien ne l'empêchait de quitter la pièce maintenant! Elle avait du temps d'aller dans son bureau, relaxer un petit peu avant la réunion et avant les cours. Carrie se tourna vers Adam et les autres.

"Bien..."

Son regard se posa sur Vadim à qui elle put envoyer un regard un peu moins froid que les autres. De la pitié? Peut-être...Il était rouge! Elle n'aurait jamais été capable de survivre à son pouvoir si il s'était manifesté aussi physiquement. Ele jetta un regard rapide sur le sud-américain, Paolo. Elle le détailla rapidement de la tête aux pieds. Elle savait ce qu'était son pouvoir...Le feu, biensur. Son regard ensuite se posa sur Esther qu'elle regarda toujours aussi froidement. Elle arqua un sourcils, et soupira avant de tourner les talons. Son regard se posa sur Richard, évitant clairement Sahari. Elle se souvenait du dernier sourire qu'elle avait envoyé...À Richard. Il y a maintenant 2 mois de cela.

" Je me présenterai devant les élèves avec vous..."

Mais je ne parlerai absolument pas. Elle ne le dit pas. Mais le pensait très fort. Elle tourna les talons rapidement et sortit de la pièce en direction de son bureau.

Bureau

Richard écouta de nouveau Adam sans rien dire, lui qui n’hésita pas une seconde avant d’aller au coeur du problème. Le moins qu’on puisse dire, c’était qu’il ne tournait pas autour du pot, et quelque part Richard préférait cette attitude. Lorsque la question se posa de reconstitué les équipes, Richard ne s’en offusqua pas, en tout cas pas comme sa chère collègue Carrie. Il ne pouvait s’empêcher de l’imaginer en train de plaider... un vrai requin sans aucun doute.

Il releva la tête pour observer les hologrammes, laissant les autres professeurs faire leur choix, ou y aller à l’aveuglette pour certain. Il était certain qu’en ne connaissant pas les élèves, il était difficile de choisir réellement, et quelque part c’était peut-être mieux ainsi. Richard observa Carrie faire son numéro d’impatiente, songeant tout de même qu’il aurait bien gardé Hwang. Mais il n’avait aucune envie de commencer à discuter avec le dragon et, de toute façon, il savait qu’il n’était pas le seul dans cette histoire à devoir faire quelques sacrifices. Richard haussa doucement les épaules et adressa à Sahari un regard qui signifiait que Carrie était comme ça, et pas autrement.

Puis se fut le tour de Cassandre, toujours l’air aussi... morose, triste... Elle fit cependant son choix, bien qu’incomplet, avant de se lever pour quitter la pièce, passant devant Carrie. Richard s’était levé, mais s’était arrêté dans son mouvement. Il ne tenait plus assis non plus, sans doute à cause de l’ambiance actuelle.

« Personnellement je garderais Lucas, puis... » Il jeta un coup d’oeil sur les hologrammes. « Robin, Gabrielle, Alixtide... et... »

Il s’interrompit, cherchant lequel d’entre eux pourrait s’intégrer facilement. Mais déjà ceux qu’il avait choisit, il ne les connaissait pas suffisamment pour savoir si l’entente entre eux serait bonne, bien que ce soit ce qu’il aurait voulu privilégier.

Carrie franchit finalement le seuil de la porte. Sans doute du fait que Cassandre était partie, elle considérait que la réunion était terminée. Richard hésita pour finalement partir à sa suite, avec un regard d’excuse adressé à ses collègues. Pour les élèves qu’il manquait à son équipe... il verrait plus tard.

ailleurs

Sahari nota bien une certaine frustration dans le ton des deux plus anciennes enseignantes, lorsqu'elles quittèrent la salle, bientôt suivi de Richard, qui était manifestement mal à l'aise. Elle lui avait bien rendu son regard qu'elle avait perçu comme un encouragement à laisser tomber d'avoir une discussion avec Carrie : elle répliqua d'un sourire en coin avec un haussement d'un seul sourcil, du genre "on verra bien qui sera la plus tenace". De toute façon, elle ne cherchait pas de conflit et ne voulait de mal à personne, mais Carrie était Carrie.

Cassandre n'était pas Carrie, par contre, et sa nouvelle attitude était bien étrange. Elles n'avaient jamais été très proches, mais Sahari pouvait quand même voir le changement. Ça avait quelque chose d'inquiétant. Elle semblait littéralement bouleversée et Sahari espéra un instant qu'elle n'avait pas eu une terrible vision...

Se retrouvant à cinq, Sahari songea que la réunion n'était autrement que terminée. Elle ne voulait pas partir en donnant une mauvaise impression de scission au sein du corps professoral, par contre. Aussi proposa-t-elle une sorte de compensation, à son sens, aux autres professeurs.

"Je dois me préparer un peu, puis je propose que nous nous rejoignons à l'amphithéâtre pour y discuter entre nous et apprendre à nous connaître, qu'en dites-vous?"

Elle se leva, se cognant les genoux contre le dessous du bureau, puis sortit de la pièce avec une tranquillité qu'elle s'imposait.

Ailleurs

Voilà à présent les 3 nouveaux professeurs seuls avec Adam Zachary. S'il avait voulut se sentir mal il aurait dit que les anciens professeurs les avaient fui, mais pour ne pas en rajouter une couche, Paolo se contenta de mettre cela sur le compte de... autre chose à faire.

A leurs manières, ils semblaient avoir reçu un sacré coup, tous fissurés quelque part, prêts à craquer. Ils avaient subi un contrôle mental et s'étaient attaqué aux élèves sous une influence maléfique... comment imaginer ce qu'on peut ressentir enfermé dans son propre corps qui ne souhaite que faire du mal à ceux que le voulait protéger ? Paolo ne souhaita qu'une chose en cet instant... ne pas "vivre" la réponse. Celle qui semblait la plus bouleversée était sans nul doute la psychologue de l'école. Cassandre Deneos était partie précipitamment et entendre la boule dans sa gorge arracha une grimace au géologue. Cela pouvait sembler misogyne mais il n'en était rien. Paolo n'avait jamais supporté de voir une femme souffrir, un homme non plus mais c'était différent. Mais comment lui, qui n'était pas du tout passé par les épreuves qu'avaient dû traverser les membres de l'institut, pouvait-il chercher à les comprendre ? Il craignait de se prendre en pleine figure un "vous ne pouvez pas comprendre" mais ce n'était pas son genre non plus de se laisser abattre devant l'adversité.

- Je suppose que l'on peut clore la discussion maintenant que plus de la moitié des participants est... partie. La proposition de mademoiselle Fouba est alléchante, une petite réunion moins solennelle ne serait pas pour me déplaire...

Se levant de sa chaise, Paolo commença à se diriger vers la sortie et ajouta :

- Ce fut un plaisir... A tout à l'heure donc...

Il hésita à rechercher Cassandre mais se résigna. Rien ne sert de courir...

Ailleurs

Adam hocha la tête. Ça, au moins, c'était fait... Maintenant, il allait falloir affronter les élèves. Le faible nombre d'élèves partis était sans doute le signe que la confiance n'était pas totalement brisée, mais il n'en restait pas moins que lui et Carrie... Enfin... Qu'il serait difficile d'être crédible dans un nouveau rôle de professeur.

"Bien... Allons-y alors. On se retrouve à l'amphi"

Adam préféra rester dans la salle qui se vidait. Histoire de remettre de l'ordre dans ses idées.