Le périple du garçon à la peau grise.

L’être à la peau grisâtre se retrouvait une fois de plus assis au beau milieu de la gigantesque plaine entrain de pleurer. Il détestait son reflet, et qui pourrait l’en blâmer, il n’avait rien d’humain. Diego était complètement perdu. Certes les villageois l’acceptaient tel quel, sans jamais avoir montré une once de dégoût à son égard, mais l’idée de passer le restant de sa vie ici le dérangeait. Il voulait comprendre, découvrir pourquoi sa peau était devenu ainsi.

Il se releva, le cœur gonflé de courage et se décida à rebrousser chemin. Il alla discrètement dans sa masure, prenant l’apparence de l’un des membres du village pour éviter qu’on le reconnaisse. Il prit le strict minimum, quelques vêtements, des vivres et un peu d’eau. Il s’enveloppa dans une sorte de couverture pour masquer son apparence. Principalement son visage particulièrement difforme. Le plus dur à cacher restait ses mains. Trois doigts grisâtre qui formait une sorte de pince. Ses pieds étaient formés de la même manière, mais de simple chaussure suffisait à les dissimuler.

Il passa discrétement par la porte de derrière et parvint à se mettre en route sans que personne ne l’en dissuade. Il emprunta un petit chemin peu fréquenté, laissant juste un mot expliquant les raisons de son départ derrière lui. Se destination lui était inconnu, mais peut-être trouverait-il des réponses au sein de la civilisation.

En guise de chemin peu fréquenté, Diego se retrouva sur une très vieille route passablement abîmée. Elle était faite en goudron, et portait de vieilles traces de peinture au milieu pour délimiter les voies à la façon du XXe siècle. La plupart des nids de poule avaient été comblés récemment par des graviers, ou remblayés tant bien que mal.
La route filait tout droit à travers la campagne et les prairies désertées sauf les jours où il y avait des opérations agricoles à mener, et encore, c'était plutôt des robots qui s'y collaient.

Un bruit sourd et lointain se fit alors entendre.

Un bruit semblable à celui que produisait sa vieille voisine édentée de 89 ans quand elle avait mangé trop de haricots, mais même un champ de flageolets complet n'aurait pas produit pareilles flatulences. Et le bruit se rapprochait à grande vitesse.

Jusqu'à ce qu'un objet qui n'avait plus été vu dans ce coin du monde depuis longtemps apparaisse : une moto. Un engin à deux roues particulièrement rutilant, tout chromé de partout, avec un aigle à l'avant, et un guidon démesuré, chevauché par, visiblement, une femme, cheveux blonds dans le vent, en train de chanter "Born to be wild" à tue-tête.

L'engin dépassa Diego, puis des feux rouges s'allumèrent, et la moto stoppa. D'un coup de botte, la béquille toucha le sol, et la fille en descendit dans un grincemement souple de cuir avant de s'approcher de Diego et de dire d'une voix un peu traînante, tout en enlevant ses lunettes de soleil.

"Ben merde alors... Si je m'attendais à voir quelqu'un sur cte route."

Lorsque la moto approchait, créant une pétarade démoniaque, Diego eut pour seul réflexe de se retourner. Il avait déjà entendu parler de ce genre d’engin, et peut-être même qu’il en avait vu une fonctionner lorsqu’il n’était qu’un enfant. Il regardait avec un ébahissement certain la curiosité technique qui défilait à une vitesse, pour lui, fulgurante. La moto s’arrêta un peu plus haut, et il s’aperçut enfin, qu’une femme en était la conductrice.

Son visage était masqué, mais si on y prêtait une trop grosse attention, il serait facile de discerner ses difformités. Ayant peur d’échouer dans une transformation trop hâtive, le jeune homme garda ses distances, et recula même de quelques pas pour éviter qu’elle ne puisse se rendre compte de l’aberration qu’il incarnait. Il hésita même à la contourner, en passant sur « l’autre rive » du chemin mais une telle attitude aurait éveillée des suspicions.

Dans un élan d’effort sociale, et pour éviter toute question trop indiscrète, le jeune homme décida de mentir. Mais lorsqu’on vient d’un village très ouvert, ou chaque problème engage un investissement complet de la communauté, le mensonge est très souvent un art peu maîtrisé.

"Je…Je…J’vais juste chercher des graines pour les oies de mon village afin d’encourager la ponte, je ne fuis pas !"

S’il pouvait prendre l’apparence de n’importe qui, ce n’est certainement pas aujourd’hui qu’il serait un acteur. Un handicap certain pour son don qu’il ferait bon d’y remédier.

La fille fronça les sourcils et retira ses lunettes, montrant ainsi une belle paire de mitaines, toujours en cuir. Puis elle fit claquer sa langue, et en deux pas, elle avait pris Diego sous son épaule protectrice, et sa plantureuse poitrine, pour l'emmener sur le côté de la route.

"Je m'appelle Maureen. Tu comptes la vendre à qui ton histoire d'oie ? J'ai déjà fait 2000 bornes sur cette route déglinguée, et j'ai pas vu un champ de maïs ici... Que de la prairie verdoyante, et quelques vaches boulimiques. Faut pas raconter de salades à Maureen..."

Elle se remit face à lui, puis pencha la tête sur le côté.

"T'es en cavale ? T'es pas obligé de me dire ce que t'as fait. T'as besoin que je te dépose en ville ?"

Même si à vingt ans les hormones de Diego n’étaient plus aussi cruels qu’ils avaient pu l’être durant sa puberté, avoir les protubérants obus de Maureen sous les yeux ne le laissaient pas indifférents. S’il n’avait pas eu la peau grise, le mutant aurait certainement rougit. Diego perdit le sens de la phrase de la motarde, sous l’émotion, il ne retint que « champs de maïs, vache boulimique et salade ». Il eut de sérieux doute sur les qualités culinaires de la demoiselle. Ayant regagné ses esprits, Diego entendit la seconde déclaration sans… interférence. Il fronça d’ailleurs les sourcils, se sentant presque insulté.

'' Je ne suis pas en cavale ! Je ne suis pas un criminel ! J’ai juste une tronche bizarre et je veux aller me faire opérer. Et oui, si vous pouviez me déposer en ville ça m’enlèverait une bonne épine du pied, merci. Je m’appelle Diego au fait ! ''

Le garçon se concentra, tentant de prendre un visage difforme, mais néanmoins humain. Le manque de réaction de la motarde ne pouvait que supposer qu’elle ne s’était pas encore aperçu de sa peau grisâtre et de son apparence étrange.

Maureen replaça ses lunettes alors qu'un sourire barra son visage.

"Allez Diego, je t'embarque. Je suis sûr que tu n'as jamais eu le plaisir de sentir tous ces chevaux entre tes jambes."

Ils enfourchèrent la moto, et Maureen retira la béquille.

"Accroche toi à ma taille. Et pas à mes nichons, sinon tu sautes pardessus bord."

Il y eut une sorte d'explosion, les échappements crachèrent des flammes, et la moto démarra en trombe et en pétarade. Le vent fouetta bientôt le visage du mutant, retirant sa capuche de fortune. Maureen ne s'en préoccupait pas trop, elle était trop occupée à chanter sa chanton fétiche.

Chanson que Diego ne manqua pas de connaître par coeur à son arrivée en ville, un peu plus de deux heures plus tard.

"Je te dépose où chéri ?"

demanda-t-elle, en jetant un coup d'oeil pardessus son épaule

Non, il n’avait pas eut le plaisir de monter sur une moto auparavant. Mais il ne voyait pas le rapport avec les chevaux, certes ça s’enfourchait pareil… Mais l’animal allait bien moins vite. Où peut-être étais-ce l’unité de mesure de la puissance du véhicule. Ce fut sa meilleur trouvaille. Elle parlait de la puissance ! Décidément, les citadins avaient une drôle de manière de parler. Il s’accrocha à la taille de Maureen, comme elle l’avait recommandé.

Lors du trajet, sa capuche s’envola. Le stress envahit le jeune garçon qui n’osa pas relâcher sa prise pour la remettre en place. Il avait peur de s’envoler, de finir en dos d’âne vivant ! Heureusement qu’elle chantonnait un air, même si en boucle, ça devenait légèrement irritant, c’était suffisant pour lui faire oublier sa crainte.

** Où est ce qu’elle pourrait me déposer ? À vrai dire, je n’en ai aucune idée… Le mieux serait de trouver un docteur pour qu’il puisse m’expliquer pourquoi j’ai l’air d’un véritable martien. **

"À l’hôpital s’il te plaît Maureen… Où, si ça t’arrange tu peux me déposer ici, je trouverais bien mon chemin. Autre chose, Maureen, pourquoi tu ne me fais aucun commentaire sur mon physique ? Je préfèrerai qu'on crève l'absect plutôt qu'une sorte de pitié silencieuse. "

La jeune fille tourna l'accélérateur, grillant quelques feux en poussant quelques jurons bien sentis pour répondre aux rares automobilistes qui se disaient que même avec aussi peu de monde sur la route, il fallait encore qu'il y ait des emmerdeuses.

"A l'hosto, ça roule mon poulet. Il a quoi ton physique ?"

Elle ajusta son rétro pour mieux voir, puis poussa un juron de surprise.

"Oh merde !"

Elle perdit alors le contrôle de sa moto. Diego fut projeté directement dans une benne à ordures alors que Maureen roulait sur le sol, avant de se réceptionner sur un mur.

Sans même s’en être rendu compte, Diego venait d’atterrir lourdement dans une poubelle. Le choc l’avait certainement blessé, même si ce n’était que légèrement, mais il rentrait dans un état de choc. Il mit plusieurs longues secondes avant de pouvoir se redresser. Il pensait qu’elle ignorait volontairement de le regarder, mais qu’au moins, elle l’avait aperçu. Il ne pouvait pas s’être trompé plus lourdement.

Il ne parvenait pas à retrouver ses esprits, du moins pas complètement. Ces jambes flageolaient tandis qu’il luttait pour sortir de la benne. Il enjamba maladroitement le rebords pour se laisser tomber sur le trottoir. Il ne pensait même plus à changer son apparence, il faut dire que pendant une seconde, il a bien cru qu’il allait y passer. Il ne cessait de penser à Maureen, la pauvre n’avait peut-être pas eu autant de chance que lui. Les accidents de motos peuvent s’avérer très dangereux. Il ne l’envisageait pas par expérience, mais simplement par pur logique.

Il vacilla du mieux qu’il pu jusqu’à elle. Priant intérieurement que les dommages ne soient pas trop grave, il ne pouvait s’imaginer responsable de la mort de Maureen. Il alla prés d’elle, se penchant par dessus elle pour essayer de la rassurer. Malgré les vertiges et le corps tremblotant, il trouva la force de parler d’une voix à peu prés normal.

"Tout va bien ?"

Maureen bougonna et râla. Visiblement, elle s'en sortirait avec quelques bleus et courbatures, grace à sa combinaison rembourrée. Elle râla encore quelque chose à propos de ses lunettes qu'elle remit sur son nez, puis regarda Diego un bref instant.

"Ah mais putain, c'est pas vrai ! Fallait vraiment que je me mange encore ça sur la gueule."

Elle bouscula Diego sur le côté. "Pousse toi de là toi..."

Elle fondit alors en claudiquant un peu sur sa moto qu'elle redressa avant de la poser sur sa béquille, et de se mettre à l'inspecter sous toutes ses coutures. Enfin... Soulagée, elle invectiva le mutant.

"Non mais ça va pas de me foutre les boules comme ça toi, avec ta tronche d'Alien de Roswell ? Si c'est ton problème, va te faire opérer, mais ne fais pas faire un arrêt cardiaque aux honnêtes motardes en leur faisant tomber leur bécane..."

Soulagé de la voir toujours aussi dynamique, Diego afficha un sourire tandis que les propos injurieux fusés à son égard. Il percuta vers le milieu de la phrase, et s’il avait des sourcils, il les auraient froncés. Il demeura silencieux pendant un temps, s’imaginant lui crier dessus en la traitant de tous les noms d’oiseaux mais s’abstint.

" Ce n’est pas ma faute, j’y peux rien si tu mets des lunettes de soleils à la place de lunettes de vues. Je te remercie pour tout, mais je crois que je vais me débrouiller seul dorénavant. Bonne route Maureen, et bon vent. "

Il tourna les talons, les poings serrés et remis sa capuche. Il fit un pas avant de se retourner une fois de plus.

"J’ai pas arrêté de te dire que j’avais une apparence difforme, t’aurais pu t’attendre à pire. Et tu n’as rien d’honnêtes Maureen, t’es qu’une hypocrite… S’il faut ressembler à un humain pour obtenir une aide sincère, je me passe bien volontiers de la tienne. Si tu pouvais juste éviter de me faire repérer, je t’en serais reconnaissant."

Se retournant, Diego put faire quelques pas tranquilles, avant qu'un objet dur et contondant ne vienne le frapper à l'arrière de la tête, et retombe sur le sol d'un bruit métallique. Il vit trente six chandelles, et tomba sur le sol.

Combien de temps s'était-il passé avant qu'il ne se réveille ? Difficile à dire. En tout cas, il n'était probablement pas en ville. Il était dans une cabane en bois, dont le sol était en terre battue. De la lumière filtrait à travers les planches mal jointes de la cabane.

Diego n'était pas entravé, mais il était quand même sévèrement courbaturé. Il aurait été traîné à l'arrière d'une moto que ça serait pas étonnant.

D'ailleurs, en parlant de moto, ça sentait un peu l'essence, et le produit lustrant pour chrome...

Le mal de crâne lui donnait un tournis digne des plus extravagantes attractions de foires. Si seulement il s’agissait de la seule douleur. Son corps était tout courbaturé, comme s’il avait épousé le bitume et que la lune de miel s’était mal passé. Apparemment, Maureen n’avait pas pour habitude de se montrer fort sympathique envers les gens comme lui. L’odeur d’essence laissait supposer que la jeune femme était derrière ce kidnapping.

Tant bien que mal, il tenta de se redresser. Il pouvait changer d’apparence, mais rien de bien utile dans la situation présente. Ses os lui faisaient un mal de chien, il parvint difficilement à se relever. S’appuyant sur les murs délabrés de la cabane pour prendre appuie, il avança lentement et douloureusement vers la porte d’entrée.

Il entrouvrit la porte et regarda ce qu’il y avait à l’extérieur, si l’endroit venait à être désert, il tenterait de s’enfuir.

[ Je n’ai pas su déterminer s'il était attaché, j’ai supposé que non. S’il faut que j’edit pas de problème.]

(Note : il est écrit en toutes lettres dans mon post que tu n'es pas entravé, ça veut dire que tu n'es pas attaché. Techniquement, tu es également censé vérifier que la porte est ouverte avant de l'ouvrir)

L'endroit semblait désert, mais 'était malheureusement un mauvais présage pour envisager une fuite : la nuit tombait, et il se trouvait au milieu de nulle part, sans aucune idée de la direction dans laquelle il fallait qu'il aille pour s'enfuir.

A proximité de la porte, Maureen était en train de bichonner sa moto, remettant du lustrant sur les chromes, et bricolant tout un tas de choses en chantant Bad to the bone. Elle leva les yeux.

"Ah, t'es là. T'as vraiment le don de t'attirer les emmerdements, c'est écrit sur ta tête, c'est pas possible."

[ HRP : Désolé, je ferais plus attention]

Le garçon posa une main sur son crâne qu’il frotta doucement, tentant ainsi de faire passer les terribles migraines qui l’accablaient. Diego regarda Maureen perplexe. L’attitude de cette dernière dépassait tout logique jamais établis par les psychologues. Il y a peu, elle l’assommait, et voilà maintenant qu’elle se montrait attentionné à son égard. Enfin, il ne l’avait pas vu prendre le tuyau en fer et lui balancer sur la tête, mais il était en droit de supposer.

Silencieux, il décida de s’asseoir sur le sol, préférant regarder Maureen nettoyer sa moto. Apparemment, Diego n’était pas en danger immédiat. Dommage pour l’hôpital, mais il peut bien encore passer une nuit sous cette apparence difforme. Il posa sa tête dans le creux de sa main, l’inclina et dit :

« C’est un peu écrit sur ma tête, c’est vraie. Mais regarde le bon côté des choses, si on me met en cage et qu’on me paie un centime par cacahouète jeté, je ferai vite fortune ! »

Il éclata d’un rire nerveux, l’idée même de se retrouver enfermé pour le reste de ses jours comme un animal, l’effrayait au plus haut point. Il prit une grosse inspiration avant de continuer :

« Est-ce-que tu m’as kidnappé ? »

Maureen leva les yeux au ciel. Le comportement égocentrique de Diego était on ne peut plus exaspérant pour elle, qui était éprise de liberté et de non-prise de tête.

"Mais elle te sert vraiment qu'à poser ton chapeau ta tête, c'est pas possible. Arrête de te concentrer sur ton nombril, et respire un peu le monde qui t'entoure, ça sera pas du luxe.

Franchement, j'ai pas que ça à faire de mettre un boulet sur mon porte bagages, mais un gogo Roswell qui fait du scandale en pleine rue dans un quartier biker, c'est le meilleur moyen de s'attirer du grabuge. Et le pire, c'est que tu l'as même pas vu. Je t'ai assomé et traîné ici. Pour ta vllle, c'est même pas la peine de rêver si tu n'arrives pas à percuter que les gens sont assez grands pour voir ta tronche sans que tu le gueules à qui veut l'entendre."

Elle se remit alors à bricoler dans sa moto.

Diego l’écouta sans broncher. Il estimait plus judicieux de ne pas jeter de l’huile sur le feu, avoir le dernier mot n’était pas une priorité pour lui. Surtout que les arguments de la motarde étaient pour la plupart judicieux. Il se fit doucement craquer les articulations, pour essayer d’atténuer la douleur des courbatures. Il la regarda faire, l’approche de la nuit ne lui laissait guère d’autre choix que de rester avec elle pour la nuit. Il ne pouvait pas se repérer dans une forêt qui lui était inconnu.

Ses yeux noires globuleux ne quittait pas l’engin mécanique. Le petit tour lui avait plus et il envisagea même de s’en procurer une dès qu’il aurait l’occasion. Il inclina la tête pour mieux observer comment on entretenait une telle prouesse de technologie. Il ne cessait de se demander pourquoi elle lui venait en aide, surtout qu’il semblait l’agacer, mais poser cette question risquerait de déclencher un nouveau flux de sarcasme et d’injures à son égard.

" Je peux peut-être t’aider à faire quelques choses, j’y connais rien en moto mais je veux bien apprendre. "

Immédiatement, Maureen brandit une grosse clé d'acier d'apparence bien pesante.

"Ne t'avise pas à toucher à ma moto sans que je t'y invite expressément, sans quoi celle là, tu te la prendras d'abord dans la face, et je te la carrerai ailleurs. Compris ?"

Elle soupira, et rangea ses outils.

"Il fait trop sombre pour continuer à bricoler. Retourne à l'intérieur, et roupille. Y'a du chemin jusqu'au prochain patelin."

Elle ouvrit une des multiples sacoches de la moto, et en sortit un sac de couchage d'apparence fort moelleux qu'elle étendit à côté de sa bécane, puis elle gueula encore sur Diego.

"Allez ! Ouste ! Tu veux quand même pas que je me déssape devant toi tant que tu y es !"

Diego soupira, le garçon savait se montrer patient mais cette Maureen possède un véritable don pour agacer les gens. Il rentra à l’intérieur, et alla s’installer sur ce qui servait de lit. Il ne regarda pas ce qui se passez à l’extérieur par le trou de la serrure, même si ça lui traversa l’esprit pendant un moment. Il n’avait pas grand chose à faire, mis à part s’allonger sur le lit en marmonnant une imitation de Maureen en colère.

Il ferma les yeux et essaya de s’endormir.

La journée du lendemain était grise et un peu triste, et fut consacrée quasi exclusivement à la route, mis à part quelques pauses pour assouvir des besoins naturels.

Et elle fut consacrée quasi exclusivement à la chanson. Maureen n'avait sans doute pas envie de parler, ou bien ne prêtait-elle pas vraiment attention à son passager...

Ils arrivèrent en fin d'après-midi dans une autre ville. Ils étaient bien loin de là où Diego se trouvait seulement un jour avant.

La ville était calme. Peut-être trop. Une petite ville d'étape pour les randonneurs routiers, le peu qu'il restait, bien que la forme profilée d'une voie monorail était nettement visible, de même qu'une gare de construction assez récente. Une ville en restructuration.

"Je sais pas s'ils pourront quelque chose pour toi dans ce bouiboui, mais t'as l'air d'y tenir, alors je t'y dépose. Pour le reste, tu devrais pouvoir te démerder avec le monorail, ça va plus vite que ma bécane, et t'as plus de choix de destinations. Je suis pas taxi. Et si t'as besoin de blé..."

Elle fouilla dans une de ses sacoches, et lui jeta un sac de cacahuètes.

"Tiens... ça devrait faire l'affaire à ce que tu dis."

Il était devant un hôpital de proximité. Du genre qui savait faire l'essentiel.

Lorsque Maureen lui jeta un paquet de cacahuètes, il éclata d’un petit rire sincère. Il se baissa pour le ramasser et le fit sauter légèrement dans sa main droite. Il leva son visage vers la motarde, un énorme sourire se dessinant sur cette peau grise tacheté de beige. Même si elle s’était montré quelque peu rude et parfois impolie, elle avait fait beaucoup pour lui.

" Je t’avais dit, un centime par cacahuète et je deviendrais rapidement riche. Maureen… Merci, t’étais pas obligé d’en faire autant pour moi. Je sais que j’ai causé quelques rayures sur ta bécane, mais si un jour tu me retrouve et que j’ai fais fortune, n’hésite pas. Je te dois une fier chandelle. Encore merci pour tout. "

Il tourna les talons et se dirigea vers l’hôpital. En quelques jours, il avait fait ses adieux à son village. Ce qui comprenait ses parents, sa famille et ses amis. Puis il rencontra c’te donzelle pleine de fougue et de gentillesse, malgré un manque de tact évident. Il s’était attaché, quoiqu’il en ait dit, et ne plus l’avoir à ses côtés devrait lui faire bizarre. Mais la chance allait peut-être lui sourire de nouveau. Il essaya de prendre l’apparence d’un des garçons de son village, quelque chose de classique, et entra dans l’hôpital pour demander de voir un docteur à la/le réceptionniste.

Le réceptionniste pianota sur sa tablette, puis lui demanda les essentielles cartes d'identités, et autres informations en tous genres que les réceptionnistes d'hôpital demandent, puis il lui demanda benoîtement.

"Vous savez, on a 150 médecins ici... il va falloir être un petit peu plus précis que ça..."

" Un médecin spécialisé dans les problèmes de peaux. Concernant mes papiers, j’étais encore jeune sur la photo, et bien plus mignon. Honnêtement, c’est la première fois que je viens dans un hôpital en tant que patient. Voyez-vous, je viens d’un petit village assez éloigné et on se rend en ville qu’en cas d’extrême urgence, heureusement aucun membre de ma famille n’est jamais tombé assez malade pour que la guérisseuse ne puisse rien y faire. "

Diego parlait d’un ton poli et respectueux. Il avait bel et bien ses papiers, bien que sa tête actuel sois légèrement différente que celle qu’il avait présenté. Il voulait rechanger de visage, et s’y risqua. Il prit son ancienne tête. Chose qu’il évitait en temps normal car de voir son reflet si éphémère lui rappelait d’autant plus la monstruosité de son physique. Pour se cacher, durant la métamorphose, il enfila sa capuche et baissa la tête. Puis, il essaya de faire apparaître d’horribles pustules sur sa main. Certes le réceptionniste verrait la différence, mais Diego espérait qu’il penserait que la fatigue altèrait sa vision. Il croisa les doigts !!!

Le réceptionniste tilta en voyant Diego. Avait-il réalisé ce qui venait de se passer ? Difficile à dire. Il pianota à nouveau sur ses tablettes en marmonnant.

"Je vais voir qui peut vous recevoir."

Quelques temps après, il releva le nez

"Le Dr. Jimenez va vous recevoir. Colonne D, 4e étage."

Arrivé sur place, face à une autre secrétaire qui tenait un dossier à son nom, il n'eut pas besoin de trop d'attente avant de se retrouver dans une salle d'examen face à une jeune fille qui était loin d'avoir le type classique de la sud américaine. Diego, entre temps, avait perdu son camouflage.

"Eh bien... Je constate qu'on ne m'avait pas menti. Vous êtes donc bien un mutant. On m'a donc fait savoir que vous aviez des soucis d'origine dermatologique ?"

Elle ne semblait pas affectée par la nouvelle.

Voilà qui était pour le moins étonnant. Le docteur était une doctoresse… Plutôt mignonne. Elle ne semblait pas venir d’ici, voilà qui complétait le mystère de la personne. Elle ne semblait pas étonné de l’apparence pour le moins particulier de Diego. Le jeune homme sourit de nouveau, étirant ses petits yeux noires presque globuleux. Il se gratta le crâne avec son deuxième doigts, sachant qu’il n’en possédait que trois à chaque mains. Il s’assit là où il pu et dit :

" Je ne sais pas si je suis un mutant, ni même ce que c’est exactement. La seule chose qui est sûr c’est que je ressemble à un raton laveur tacheté, et j’aimerais bien que redevenir normal. Aussi, vous êtes drôlement mignonne ! D’où est ce que vous venez ? "

Comme la plupart des mauvais dragueurs, Diego n’avait peur de rien. Dans son village, et avant sa métamorphose, il avait une petite réputation de Don Juan. Sans être un appolon, le garçon savait user de ses charmes pour séduire. Son plus grand atout était ses yeux, mais vu que maintenant ils ressemblaient à des billes de caviar, ils n’arriveraient à inviter que des veuves riches à dîner… Et il serait probablement que l’entrée.

Il regarda la doctoresse dans les yeux, usant d’un plissement de sourcils qui aurait pu séduire autrefois. Mais le courage l’envahissait tandis qu’elle ne montrait aucun étonnement devant son apparence. Le genre d’attitude qui pousse le mutant à se montrer maladroitement entreprenant. ** Andale ! Back in business ! **