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Hôpital psychiatrique d'Alger
Dim 6 Sep 2009 - 17:45
Cela faisait 3 mois maintenant que Yanis s'était fait interner dans l'hôpital psychiatrique d'Alger. Il n'avait rien d'un palace 4 étoiles, mais il avait droit à ses trois repas par jour, à un toit plus ou moins salubre sur la tête, et à un certain nombre de comodités non négligeables telles que la télévision et de quoi dessiner.
Ces fameux Syndrome X, c'était son billet d'entrée. En réalité, l'Algérien avait tenté sa chance comme à n'importe quel entretien d'embauche : sans se faire trop d'illusions. Mais l'intérêt du corps médical pour cette fraction relativement nouvelle des malades mentaux semblait plus vif qu'il ne l'aurait cru. Il n'avait eu qu'à inventer par écrit une histoire selon laquelle il pouvait influencer autrui par la parole pour être admis, une histoire qui légitimait, aux yeux des praticiens, le mutisme dans lequel il se plongeait pour ne pas faire entendre le timbre électronique de sa voix.
Maintenant, Yanis se sentait plus en sécurité dans ces murs, cernés de fous se croyant mutants, que dans les rues d'Alger, où son pouvoir lui aurait certainement valu des ennuis. L'équation était simple, le choix limpide. Il avait plus intérêt à rester tranquillement planqué ici et ouvrir ses oreilles. Le comble, c'était que le personnel ne se gênait pas pour parler de mutants ouvertement devant leurs "pensionnaires". Ils étaient fous, non ? Quelle importance, alors ?
Apparemment, ses "congénères" faisaient pas mal parler d'eux dans les médias, ce qui n'était pas vraiment pour arranger ses affaires. Plus ils feraient de vagues, plus les populations leur seraient hostiles... comme ses parents.
Paradoxalement, c'est en cotoyant exclusivement des humains que Yanis en apprenait sur les mutants, leurs facultés, leurs perspectives. Les autres résidents de son étage, strictement réservé aux Syndromes X, s'affublaient de pouvoirs très variés : il y avait bien sûr la panoplie des pouvoirs évidents, comme le vol, l'invulnérabilité, la maîtrise de différents éléments, la télépathie... mais également des pouvoirs plus loufoque comme la faculté de communiquer avec les extraterrestres, le chant divin, le sex appeal irresistible...
Yanis avait rapidement fait la connaissance de ses nouveaux camarades de vie, et avait recherché avec espoir un faux-mutant qui se serait affublé de son étrange capacité, en vain. A croire que son pouvoir n'avait aucun intérêt. Pas assez clinquant peut-être.
Ce jour-là, après la routine de la douche et du déjeuner dans la salle commune, Yanis s'était installé dans la cour intérieure de l'hôpital, baignée de soleil, pour croquer patiemment Farid et Samira en plein étalage de leur prétendue puissance mutante. Ces deux adolescents attachants jouaient généralement comme des gosses, et se livraient des combats dantesques dans leur esprit, dans des mises en scènes enfantines. Farid se croyait capable de contrôler la météo, et Samira se pensait dotée d'une agilité surhumaine. Autant dire que les infirmiers passaient leur temps à soigner les innombrables bobos qu'elle se faisait à longueur de journée. Yanis disposait d'un bloc complet de dessins de faux mutants exerçant leurs prétendus pouvoirs. Dire que ces gens désiraient à se rendre malade devenir comme lui... Ils ignoraient certainement ce qui arrivait aux vrais mutants, le rejet familial, social, la solitude, l'appréhension constante, le regard des autres... sans parler de la peur de soi.
Ces fameux Syndrome X, c'était son billet d'entrée. En réalité, l'Algérien avait tenté sa chance comme à n'importe quel entretien d'embauche : sans se faire trop d'illusions. Mais l'intérêt du corps médical pour cette fraction relativement nouvelle des malades mentaux semblait plus vif qu'il ne l'aurait cru. Il n'avait eu qu'à inventer par écrit une histoire selon laquelle il pouvait influencer autrui par la parole pour être admis, une histoire qui légitimait, aux yeux des praticiens, le mutisme dans lequel il se plongeait pour ne pas faire entendre le timbre électronique de sa voix.
Maintenant, Yanis se sentait plus en sécurité dans ces murs, cernés de fous se croyant mutants, que dans les rues d'Alger, où son pouvoir lui aurait certainement valu des ennuis. L'équation était simple, le choix limpide. Il avait plus intérêt à rester tranquillement planqué ici et ouvrir ses oreilles. Le comble, c'était que le personnel ne se gênait pas pour parler de mutants ouvertement devant leurs "pensionnaires". Ils étaient fous, non ? Quelle importance, alors ?
Apparemment, ses "congénères" faisaient pas mal parler d'eux dans les médias, ce qui n'était pas vraiment pour arranger ses affaires. Plus ils feraient de vagues, plus les populations leur seraient hostiles... comme ses parents.
Paradoxalement, c'est en cotoyant exclusivement des humains que Yanis en apprenait sur les mutants, leurs facultés, leurs perspectives. Les autres résidents de son étage, strictement réservé aux Syndromes X, s'affublaient de pouvoirs très variés : il y avait bien sûr la panoplie des pouvoirs évidents, comme le vol, l'invulnérabilité, la maîtrise de différents éléments, la télépathie... mais également des pouvoirs plus loufoque comme la faculté de communiquer avec les extraterrestres, le chant divin, le sex appeal irresistible...
Yanis avait rapidement fait la connaissance de ses nouveaux camarades de vie, et avait recherché avec espoir un faux-mutant qui se serait affublé de son étrange capacité, en vain. A croire que son pouvoir n'avait aucun intérêt. Pas assez clinquant peut-être.
Ce jour-là, après la routine de la douche et du déjeuner dans la salle commune, Yanis s'était installé dans la cour intérieure de l'hôpital, baignée de soleil, pour croquer patiemment Farid et Samira en plein étalage de leur prétendue puissance mutante. Ces deux adolescents attachants jouaient généralement comme des gosses, et se livraient des combats dantesques dans leur esprit, dans des mises en scènes enfantines. Farid se croyait capable de contrôler la météo, et Samira se pensait dotée d'une agilité surhumaine. Autant dire que les infirmiers passaient leur temps à soigner les innombrables bobos qu'elle se faisait à longueur de journée. Yanis disposait d'un bloc complet de dessins de faux mutants exerçant leurs prétendus pouvoirs. Dire que ces gens désiraient à se rendre malade devenir comme lui... Ils ignoraient certainement ce qui arrivait aux vrais mutants, le rejet familial, social, la solitude, l'appréhension constante, le regard des autres... sans parler de la peur de soi.
- Le courtier temporelConscience collective
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Dim 6 Sep 2009 - 19:34
[Bonjour et bienvenue sur AX... Pense à lier ta fiche avec ta signature ]
Les dessins allaient bon train, tout comme les exploits imaginaires des deux adolescents.
De ce que pouvait suivre Yanis, Farid agitait les bras pour faire se lever le vent impérial, comme il l'appelait, et promettait de même à la jeune fille, un millier de djinns aériens pour tonner et déchainer la colère des cieux. Farid avait une bonne bouille de gamin un peu paumé. Comme beaucoup de gens ici... 3 repas chaud. Un lit. Et un peu d'écoute et d'assistance... C'était inespéré pour un gamin des rues comme Farid.
Samira, quant à elle, faisait des sauts de lapins, pour montrer au jeune garçon comment elle savait bien esquiver l'éclair, la foudre, le tonnerre et le vent du désert. Yanis avait cru comprendre qu'elle avait commencer à se prendre pour une autre quand ses parents avaient insisté pour la marier à un étranger... Un vague cousin qui était parti de l'autre côté de la Méditerranée pour ne plus jamais revenir. Exit le monde de l'enfance, Samira s'était prise à d'autres rêves... Des rêves où elle n'était plus ce qu'elle était : une gamine écrasée par le poids des traditions, une gamine qui aurait voulu rester gamine.
Ils étaient tous les deux comme des enfants. A jouer gaiement dans le soleil.
Suite à un entrechat raté, la jeune fille tomba sur Yanis, lui envoyant valdinguer son carnet à spirales.
"Excuse... Je contrôle pas la puissance" lança avec candeur Samira en relevant sa tête des genoux du jeune homme.
Mais comme le calme qui précède la tempête, ce jeu sans enjeu n'était que le prélude de toute autre chose... Les portes de l'Hôpital venaient de s'ouvrir sur 3 individus. De nouveaux pensionnaires ?
Le premier portait la blouse blanche typique du personnel de santé de l'établissement. Quant aux deux autres... Yanis ne les avait jamais vu. D'un geste de la main, le soignant indiqua aux nouveaux arrivants, une direction quelconque dans le bâtiment.
Yanis put mieux les observer alors qu'ils s'avançaient dans la cour.
La première était une femme d'une trentaine d'année, plutôt souriante, qui marchait les mains dans les poches en échangeant quelques mots avec son collègue.
"Alors c'est là qu'il y a les toqués que tu veux voir Karim ? Franchement, tu penses qu'on va trouver ce qu'on cherche ? T'es vraiment un goy bizarre, je te jures..."
L'autre un peu plus âgé, s'avançait en portant une lourde sacoche. Il ne regardait pas la femme. Mais n'en disait pas moins !
"Écoutez, Agent Haza, déjà vous ne jurez pas... Ce n'est pas correct. Ensuite, nous sommes en mission. Alors plus vite vous la bouclerez, plus vite on sera de retour à l'hôtel... Tenez on va parler à ces deux là..."
Il désignait Samira et Yanis.
S'approchant d'eux, l'homme sortit une carte de sa poche et déclina son identité :
"Agent Spécial Benkacem. Voilà l'Agent Spéciale Haza. Nous sommes en mission pour le conseil de l'Europe et nous souhaiterions obtenir quelques réponses. Pouvez-vous nous renseigner ?"
Les dessins allaient bon train, tout comme les exploits imaginaires des deux adolescents.
De ce que pouvait suivre Yanis, Farid agitait les bras pour faire se lever le vent impérial, comme il l'appelait, et promettait de même à la jeune fille, un millier de djinns aériens pour tonner et déchainer la colère des cieux. Farid avait une bonne bouille de gamin un peu paumé. Comme beaucoup de gens ici... 3 repas chaud. Un lit. Et un peu d'écoute et d'assistance... C'était inespéré pour un gamin des rues comme Farid.
Samira, quant à elle, faisait des sauts de lapins, pour montrer au jeune garçon comment elle savait bien esquiver l'éclair, la foudre, le tonnerre et le vent du désert. Yanis avait cru comprendre qu'elle avait commencer à se prendre pour une autre quand ses parents avaient insisté pour la marier à un étranger... Un vague cousin qui était parti de l'autre côté de la Méditerranée pour ne plus jamais revenir. Exit le monde de l'enfance, Samira s'était prise à d'autres rêves... Des rêves où elle n'était plus ce qu'elle était : une gamine écrasée par le poids des traditions, une gamine qui aurait voulu rester gamine.
Ils étaient tous les deux comme des enfants. A jouer gaiement dans le soleil.
Suite à un entrechat raté, la jeune fille tomba sur Yanis, lui envoyant valdinguer son carnet à spirales.
"Excuse... Je contrôle pas la puissance" lança avec candeur Samira en relevant sa tête des genoux du jeune homme.
Mais comme le calme qui précède la tempête, ce jeu sans enjeu n'était que le prélude de toute autre chose... Les portes de l'Hôpital venaient de s'ouvrir sur 3 individus. De nouveaux pensionnaires ?
Le premier portait la blouse blanche typique du personnel de santé de l'établissement. Quant aux deux autres... Yanis ne les avait jamais vu. D'un geste de la main, le soignant indiqua aux nouveaux arrivants, une direction quelconque dans le bâtiment.
Yanis put mieux les observer alors qu'ils s'avançaient dans la cour.
La première était une femme d'une trentaine d'année, plutôt souriante, qui marchait les mains dans les poches en échangeant quelques mots avec son collègue.
"Alors c'est là qu'il y a les toqués que tu veux voir Karim ? Franchement, tu penses qu'on va trouver ce qu'on cherche ? T'es vraiment un goy bizarre, je te jures..."
L'autre un peu plus âgé, s'avançait en portant une lourde sacoche. Il ne regardait pas la femme. Mais n'en disait pas moins !
"Écoutez, Agent Haza, déjà vous ne jurez pas... Ce n'est pas correct. Ensuite, nous sommes en mission. Alors plus vite vous la bouclerez, plus vite on sera de retour à l'hôtel... Tenez on va parler à ces deux là..."
Il désignait Samira et Yanis.
S'approchant d'eux, l'homme sortit une carte de sa poche et déclina son identité :
"Agent Spécial Benkacem. Voilà l'Agent Spéciale Haza. Nous sommes en mission pour le conseil de l'Europe et nous souhaiterions obtenir quelques réponses. Pouvez-vous nous renseigner ?"
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Dim 6 Sep 2009 - 22:03
Yanis releva la tête pour contempler ses deux modèles, et esquissa un sourire aux tribulations des deux fous. C'est alors que Samira lui tomba littéralement dans les bras, ou plus, au niveau des genoux, faisant voltiger son sketchbook. Il savait qu'il aurait dû être gêné de leur position, mais accusa simplement réception de l'information, et de Samira elle-même, en aidant la jeune fille à se relever. Il haussa ensuite les épaules, pour signifier qu'il n'avait rien, et ramassa son carnet : la puissance de Samira lui valait une belle rature qu'il serait sûrement difficile de masquer... Mais après tout, ce n'était pas vraiment s'il avait quelque chose d'autre à faire de sa journée.
Il remarqua alors l'entrée des deux inconnus, escortés par un médecin. La femme était jolie, mais dégageait une drôle de décontraction face au milieu quelque peu déroutant dans lequel elle s'aventurait. Son compagnon semblait plus sérieux. Il l'a rabroua d'ailleurs assez rapidement, d'après ce que le jeune mutant put constater.
Le phrasé de la jeune femme l'identifiait comme juïve, quant à l'homme, c'était encore difficile à dire. Toujours est-il que les deux saints d'esprit s'avancèrent vers les deux fous. Yanis les détailla instantanément avec plus d'attention, analysant chacune de ses observations pour en tirer des conclusions. Le Conseil de l'Europe ? En tout cas, ces deux fruits avaient mûri au soleil, à n'en point douter.
Ils étaient en tout cas plutôt optimistes de s'adresser ainsi aux premiers internés qu'ils croisaient. N'étant pas dans l'aile des Syndromes X, ils auraient pu tomber sur n'importe quel aliéné sérieux du bloc. Le genre de pensionnaire qu'il valait mieux éviter de brusquer avec des questions et des cartes d'accréditation officielles.
Yanis se pencha avec méfiance vers la carte pour lire ce qui y était inscrit, puis jeta un regard interrogateur vers Samira. Ils n'étaient pas si proches que cela, mais Yanis l'aimait bien, tout comme Farid, et s'il ne connaissait pas exactement son âge, il se considérait comme l'aîné des trois, l'homme de la famille de circonstances qu'ils composaient.
Le mutant tourna la page de son sketchbook, et inscrivit en arabe au crayon de papier :
Il montra ces quelques mots aux deux agents. D'emblée, ils ne lui inspiraient pas confiance. Que pouvaient bien faire des agents officiels européens dans un hôpital psychiatrique algérien, à "chercher des réponses" auprès des premiers pensionnaires venus ?
Il remarqua alors l'entrée des deux inconnus, escortés par un médecin. La femme était jolie, mais dégageait une drôle de décontraction face au milieu quelque peu déroutant dans lequel elle s'aventurait. Son compagnon semblait plus sérieux. Il l'a rabroua d'ailleurs assez rapidement, d'après ce que le jeune mutant put constater.
Le phrasé de la jeune femme l'identifiait comme juïve, quant à l'homme, c'était encore difficile à dire. Toujours est-il que les deux saints d'esprit s'avancèrent vers les deux fous. Yanis les détailla instantanément avec plus d'attention, analysant chacune de ses observations pour en tirer des conclusions. Le Conseil de l'Europe ? En tout cas, ces deux fruits avaient mûri au soleil, à n'en point douter.
Ils étaient en tout cas plutôt optimistes de s'adresser ainsi aux premiers internés qu'ils croisaient. N'étant pas dans l'aile des Syndromes X, ils auraient pu tomber sur n'importe quel aliéné sérieux du bloc. Le genre de pensionnaire qu'il valait mieux éviter de brusquer avec des questions et des cartes d'accréditation officielles.
Yanis se pencha avec méfiance vers la carte pour lire ce qui y était inscrit, puis jeta un regard interrogateur vers Samira. Ils n'étaient pas si proches que cela, mais Yanis l'aimait bien, tout comme Farid, et s'il ne connaissait pas exactement son âge, il se considérait comme l'aîné des trois, l'homme de la famille de circonstances qu'ils composaient.
Le mutant tourna la page de son sketchbook, et inscrivit en arabe au crayon de papier :
Je ne peux pas parler. Des réponses à quoi ?
Il montra ces quelques mots aux deux agents. D'emblée, ils ne lui inspiraient pas confiance. Que pouvaient bien faire des agents officiels européens dans un hôpital psychiatrique algérien, à "chercher des réponses" auprès des premiers pensionnaires venus ?
- Le courtier temporelConscience collective
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Dim 6 Sep 2009 - 22:44
L'homme observa les quelques mots en arabe, puis fronça du sourcil.
"Haza, il est écrit que ce jeune homme ne peut parler. Mais que nous pouvons l'interroger..."
La femme secoua la tête, une mine ravie sur les lèvres.
"Bravo, Karim...On tombe sur le muet de service. Un fou muet, c'est vraiment tordant !" s'exclama-t-elle tout en extirpant une cigarette d'un paquet souple qu'elle porta à sa bouche.
Karim la regarda à nouveau, un air franchement désapprobateur sur le visage. Visiblement, le fait que sa collègue clope dans l'enceinte de cet établissement l'importunait au plus haut point.
Cette dernière, sans se troubler, poursuivit :
"Bon... Les p'tits nous sommes des superflics chargés des questions mutantes. En gros : vous vous prenez toutes et tous pour des héros alors que vous n'êtes que de pauvres toqués... Ça c'est plus un boulot pour ma pauvre cousine, mais bon comme on est là..."
Karim lui mit la main sur l'épaule en découvrant les mines effrayées de Farid et Samira.
"Laissez je vais continuer..."
La jeune femme fit quelques pas de côté, l'air absolument indifférente à tout ce qui pouvait suivre...
"Jeunes gens, nous sommes chargés d'inspecter cet établissement. Pour savoir si tout se passe bien. Si vous êtes bien traités. Ce genre de choses..."
Il se passa la main dans les cheveux et décocha un beau sourire aux trois internés.
"Nous ne sommes pas le genre de policiers qui arrête des gens. Notre boulot, c'est tout ce qui a un rapport avec les mutants. Bref, vous pouvez parler - ou écrire - librement, nous sommes venus comme ça..."
La petite Samira, planquée derrière le dos de Yanis, s'exclama d'une petite voix :
"Faites attention ! Hein ! Si vous êtes méchants Yanis va parler... Et quand Yanis parle, ben... Il parle jamais en fait. Mais il vaut mieux pas. Et moi, je suis super agile. Et Farid qui bouge des bras prépare la tempête du siècle"
L'homme sourit à nouveau et s'adressa à Yanis :
"A ton avis, jeune homme, quelle est la meilleure cachette pour un drôle de livre, un peu farfelu, extraordinaire comme tout ? Hum ?"
Haza revenant à la charge brailla à l'attention de tout le monde :
"On s'en fiche de tes devinettes Karim ! Les crétins, tout ce qu'on veut savoir c'est si on vous torture pas et si y a des mutants planqués ici ? Des vrais ! Pas des comme vous !"
Nouveau soupir de Karim...
"Haza, il est écrit que ce jeune homme ne peut parler. Mais que nous pouvons l'interroger..."
La femme secoua la tête, une mine ravie sur les lèvres.
"Bravo, Karim...On tombe sur le muet de service. Un fou muet, c'est vraiment tordant !" s'exclama-t-elle tout en extirpant une cigarette d'un paquet souple qu'elle porta à sa bouche.
Karim la regarda à nouveau, un air franchement désapprobateur sur le visage. Visiblement, le fait que sa collègue clope dans l'enceinte de cet établissement l'importunait au plus haut point.
Cette dernière, sans se troubler, poursuivit :
"Bon... Les p'tits nous sommes des superflics chargés des questions mutantes. En gros : vous vous prenez toutes et tous pour des héros alors que vous n'êtes que de pauvres toqués... Ça c'est plus un boulot pour ma pauvre cousine, mais bon comme on est là..."
Karim lui mit la main sur l'épaule en découvrant les mines effrayées de Farid et Samira.
"Laissez je vais continuer..."
La jeune femme fit quelques pas de côté, l'air absolument indifférente à tout ce qui pouvait suivre...
"Jeunes gens, nous sommes chargés d'inspecter cet établissement. Pour savoir si tout se passe bien. Si vous êtes bien traités. Ce genre de choses..."
Il se passa la main dans les cheveux et décocha un beau sourire aux trois internés.
"Nous ne sommes pas le genre de policiers qui arrête des gens. Notre boulot, c'est tout ce qui a un rapport avec les mutants. Bref, vous pouvez parler - ou écrire - librement, nous sommes venus comme ça..."
La petite Samira, planquée derrière le dos de Yanis, s'exclama d'une petite voix :
"Faites attention ! Hein ! Si vous êtes méchants Yanis va parler... Et quand Yanis parle, ben... Il parle jamais en fait. Mais il vaut mieux pas. Et moi, je suis super agile. Et Farid qui bouge des bras prépare la tempête du siècle"
L'homme sourit à nouveau et s'adressa à Yanis :
"A ton avis, jeune homme, quelle est la meilleure cachette pour un drôle de livre, un peu farfelu, extraordinaire comme tout ? Hum ?"
Haza revenant à la charge brailla à l'attention de tout le monde :
"On s'en fiche de tes devinettes Karim ! Les crétins, tout ce qu'on veut savoir c'est si on vous torture pas et si y a des mutants planqués ici ? Des vrais ! Pas des comme vous !"
Nouveau soupir de Karim...
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Lun 7 Sep 2009 - 18:34
Indifférent, le regard de Yanis survola à nouveau Haza. Elle fumait dans les locaux de l'hôpital : pour un agent officiel, ça dénotait un irrespect cordial de la loi et des personnes présentes. D'un. Ses jugements à l'emporte-pièce et ses manières peu discrètes mettaient son collègue passablement mal à l'aise. De deux. Son comportement n'avait rien de professionnel. De trois. Benkacem quant à lui, souriait trop au goût de Yanis, comme on tend un os à un chien sauvage pour l'amadouer. De quatre.
Le duo commençait à la fois à intriguer et inquiéter Yanis. Il faillit faire remarquer qu'ils étaient malades mais pas stupides, mais avisa qu'il serait probablement plus instructif de laisser Haza déballer d'elle-même son sac plutôt que de défendre une cause perdue. Comme le personnel soignant, elle avait oublié qu'un cerveau atteint n'en était pas moins doté d'oreilles tout à fait fonctionnelles. Et s'ils le croyaient muet, les propos de la jeune femme n'étaient pas tombés dans l'oreille d'un sourd.
Alignée au commentaire final de Haza, la devinette de Benkacem faisait sens assez facilement, et une petite sonnette d'alarme clignota dans l'esprit du mutant. Si ces pseudos agents cherchaient précisément des borgnes au pays des aveugles, comme lui, ça ne pouvait pas être bon signe. Yanis n'était peut-être pas le seul à avoir eu l'idée de se cacher ainsi là où l'on ne penserait pas à le chercher.
Le jeune homme réfléchit quelques secondes tout en observant Karim, puis se remit à écrire.
Il était cocasse de voir que feindre la stupidité était plus difficile qu'il n'y paraissait. Après un bref examen de la situation, il apparaissait de la relation des deux agents que l'homme menait la danse. Yanis avait donc prudemment décidé d'entrer dans le jeu de ce dernier plutôt que de risquer de se brûler les ailes avec Haza. Il était également clair qu'il paraîtrait lui-même inoffensif et sans intérêt s'il semblait benêt et s'en tenait au rôle de Syndrôme X qu'il s'était fixé. Samira et sa puissance dans les chaussettes donneraient une touche d'authenticité à ce tableau digne d'Edvard Munch.
Le duo commençait à la fois à intriguer et inquiéter Yanis. Il faillit faire remarquer qu'ils étaient malades mais pas stupides, mais avisa qu'il serait probablement plus instructif de laisser Haza déballer d'elle-même son sac plutôt que de défendre une cause perdue. Comme le personnel soignant, elle avait oublié qu'un cerveau atteint n'en était pas moins doté d'oreilles tout à fait fonctionnelles. Et s'ils le croyaient muet, les propos de la jeune femme n'étaient pas tombés dans l'oreille d'un sourd.
Alignée au commentaire final de Haza, la devinette de Benkacem faisait sens assez facilement, et une petite sonnette d'alarme clignota dans l'esprit du mutant. Si ces pseudos agents cherchaient précisément des borgnes au pays des aveugles, comme lui, ça ne pouvait pas être bon signe. Yanis n'était peut-être pas le seul à avoir eu l'idée de se cacher ainsi là où l'on ne penserait pas à le chercher.
Le jeune homme réfléchit quelques secondes tout en observant Karim, puis se remit à écrire.
Certainement pas un hôpital psychiatrique. Vous avez perdu un livre ?
Il était cocasse de voir que feindre la stupidité était plus difficile qu'il n'y paraissait. Après un bref examen de la situation, il apparaissait de la relation des deux agents que l'homme menait la danse. Yanis avait donc prudemment décidé d'entrer dans le jeu de ce dernier plutôt que de risquer de se brûler les ailes avec Haza. Il était également clair qu'il paraîtrait lui-même inoffensif et sans intérêt s'il semblait benêt et s'en tenait au rôle de Syndrôme X qu'il s'était fixé. Samira et sa puissance dans les chaussettes donneraient une touche d'authenticité à ce tableau digne d'Edvard Munch.
- Le courtier temporelConscience collective
- Age : 113
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Mar 8 Sep 2009 - 0:34
"Super" marmonna Haza après que Benkacem lui ait traduit les mots de Yanis. "Super, Karim, on est vraiment avancé là. Bah... Au moins, il sait où il est lui"
Elle donna un coup de talon au sol, histoire d'illustrer son agacement. Karim, sans y prêter la moindre attention répondit d'une voix douce à Yanis :
"En quelque sorte, oui... Ou plutôt un livre se cache dans cet hôpital. J'aimerai le retrouver avant... que d'autres personnes ne mettent la main dessus. Voilà tout. C'est très important. Et notre tâche est difficile. Nous n'avons pas d'autres ressources que la parole, là où les autres ont un télépathe."
Alors qu'Haza avait l'air une fois de plus effondrée des méthodes de son drôle de collègue, elle fit volte face et s'approcha rapidement de Samira. L'attrapant par le bras violemment, la faisant pousser un cri de douleur à cette occasion, elle ordonna à la jeune fille en larmes de la conduire à leur directeur.
Benkacem serra les poings, comme prêt à bondir sur sa coéquipière...
Elle donna un coup de talon au sol, histoire d'illustrer son agacement. Karim, sans y prêter la moindre attention répondit d'une voix douce à Yanis :
"En quelque sorte, oui... Ou plutôt un livre se cache dans cet hôpital. J'aimerai le retrouver avant... que d'autres personnes ne mettent la main dessus. Voilà tout. C'est très important. Et notre tâche est difficile. Nous n'avons pas d'autres ressources que la parole, là où les autres ont un télépathe."
Alors qu'Haza avait l'air une fois de plus effondrée des méthodes de son drôle de collègue, elle fit volte face et s'approcha rapidement de Samira. L'attrapant par le bras violemment, la faisant pousser un cri de douleur à cette occasion, elle ordonna à la jeune fille en larmes de la conduire à leur directeur.
Benkacem serra les poings, comme prêt à bondir sur sa coéquipière...
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Mar 8 Sep 2009 - 13:52
Derrière le masque impassible de son visage, l'esprit de Yanis s'emballait, sautant d'hypothèses en assertions. En toute logique, il avait plusieurs possibilités : d'un côté, ces types pouvaient rechercher un tout autre mutant que lui, qui se serait également caché en ces murs. Cette hypothèse était plutôt rassurante et étayée. C'est vrai, après tout, comment auraient-ils eu vent, en Europe ou d'où qu'ils viennent, de son existence. A sa connaissance, seule sa famille était au courant, et ils avaient dû s'empresser de le rayer de leur vie. Et même s'ils avaient parlé, retrouver plusieurs années plus tard un jeune vagabond dans alger relevait du miracle, et aux dires de Benkacem, ils ne disposaient pas d'autres moyens que leurs questions et méthodes quelque peu discutables.
D'un autre côté, c'était bien lui qu'ils cherchaient. Ce n'était pas parce que le lien logique lui échappait qu'il n'existait pas, et il ne devait pas sous-estimer cette option. Sa sécurité était peut-être en jeu, et il ne pouvait pas se permettre de caresser sa crainte dans le sens du poil ; il devait envisager la pire des possibilités pour sauver sa peau, même si cela signifiait quitter la sécurité de l'hôpital. Si d'autres personnes étaient à sa recherche, il serait trop dangereux d'attendre ici que ça se passe. Il devait brouiller les pistes.
Mais il y avait une troisième possibilité, certes plus sournoise, mais pas forcément incroyable. Benkacem pouvait tenter de provoquer une réaction chez lui, pour déterminer s'il était réellement mutant. Pour cela, invoquer un télépathe était plus rusé. Qui n'avait pas peur de voir ses pensées violées et examinées à la loupe ? Plus d'artifices ni de faux semblants, il se retrouverait nu comme un ver, et la vérité éclaterait.
Ces raisonnements fusèrent dans son esprit aux paroles de l'agent. Il écarta d'emblée la première hypothèse, car trop tenir les choses pour acquises étaient le meilleurs moyen de se faire prendre, et parce qu'en trois mois de vie et d'observation dans l'aile psychiatrique, il n'avait soupçonné personne de susceptible d'être un mutant réel. Alors que Haza empoignait Samira, il écarta la troisième hypothèse en arrière-plan de son esprit, tandis qu'il s'interposait instinctivement entre les deux filles, gardant Samira dans son dos. Les deux agents s'étaient dirigés vers eux par hasard, ils ne semblaient pas le connaître ni le viser spécifiquement. Le visage fermé, il secoua simplement la tête deux fois pour signifier à l'agent hystérique de ne pas s'aviser de toucher un cheveu de la jeune fille.
La pire des hypothèses donc. Une fois qu'il serait débarrassé de ces deux agents, il faudrait qu'il fasse son baluchon et prenne la poudre d'escampette. Dès cette nuit. Non. Trop suspect. Le plus logique serait de partir d'ici naturellement : une guérison inopinée de son mal imaginaire ! Il ne devait néanmoins pas négliger cette histoire de télépathe... Il devait en apprendre plus, d'une façon ou d'une autre.
Toujours était-il que la première menace pour lui à cet instant, c'était l'agent Haza. Ils avaient beau être dans un asyle, personne n'était en droit de les malmener. Tout en restant fermement devant Samira, le jeune homme chercha un membre du personnel des yeux. Si Haza voulait voir le directeur, ils seraient de toute façon plus à même de l'y aider.
D'un autre côté, c'était bien lui qu'ils cherchaient. Ce n'était pas parce que le lien logique lui échappait qu'il n'existait pas, et il ne devait pas sous-estimer cette option. Sa sécurité était peut-être en jeu, et il ne pouvait pas se permettre de caresser sa crainte dans le sens du poil ; il devait envisager la pire des possibilités pour sauver sa peau, même si cela signifiait quitter la sécurité de l'hôpital. Si d'autres personnes étaient à sa recherche, il serait trop dangereux d'attendre ici que ça se passe. Il devait brouiller les pistes.
Mais il y avait une troisième possibilité, certes plus sournoise, mais pas forcément incroyable. Benkacem pouvait tenter de provoquer une réaction chez lui, pour déterminer s'il était réellement mutant. Pour cela, invoquer un télépathe était plus rusé. Qui n'avait pas peur de voir ses pensées violées et examinées à la loupe ? Plus d'artifices ni de faux semblants, il se retrouverait nu comme un ver, et la vérité éclaterait.
Ces raisonnements fusèrent dans son esprit aux paroles de l'agent. Il écarta d'emblée la première hypothèse, car trop tenir les choses pour acquises étaient le meilleurs moyen de se faire prendre, et parce qu'en trois mois de vie et d'observation dans l'aile psychiatrique, il n'avait soupçonné personne de susceptible d'être un mutant réel. Alors que Haza empoignait Samira, il écarta la troisième hypothèse en arrière-plan de son esprit, tandis qu'il s'interposait instinctivement entre les deux filles, gardant Samira dans son dos. Les deux agents s'étaient dirigés vers eux par hasard, ils ne semblaient pas le connaître ni le viser spécifiquement. Le visage fermé, il secoua simplement la tête deux fois pour signifier à l'agent hystérique de ne pas s'aviser de toucher un cheveu de la jeune fille.
La pire des hypothèses donc. Une fois qu'il serait débarrassé de ces deux agents, il faudrait qu'il fasse son baluchon et prenne la poudre d'escampette. Dès cette nuit. Non. Trop suspect. Le plus logique serait de partir d'ici naturellement : une guérison inopinée de son mal imaginaire ! Il ne devait néanmoins pas négliger cette histoire de télépathe... Il devait en apprendre plus, d'une façon ou d'une autre.
Toujours était-il que la première menace pour lui à cet instant, c'était l'agent Haza. Ils avaient beau être dans un asyle, personne n'était en droit de les malmener. Tout en restant fermement devant Samira, le jeune homme chercha un membre du personnel des yeux. Si Haza voulait voir le directeur, ils seraient de toute façon plus à même de l'y aider.
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Ven 11 Sep 2009 - 1:22
Yanis fut plus rapide que Benkacem et offrit un dos protecteur à la petite Samira qui ne manqua pas de s'y agripper avec la force du désespoir. Regard furibond de l'agent Haza. Le jeune mutant crut ressentir en cet instant précis comme une vague de chaleur. Qui disparut presque aussitôt.
Benkacem saisit sa coéquipière par le bras, en ponctuant son geste par quelques paroles vives exprimées dans une langue que Yanis ne comprenait pas. La femme maugréa quelques mots dans le même dialecte puis s'écarta des autres protagonistes.
L'incident était terminé pour le moment, mais le regard de Haza ne présageait rien de bon.
La porte du bâtiment principal s'ouvrit sur deux individus que Yanis identifia avec satisfaction comme étant le Directeur de l'établissement et l'un de ses adjoints, tous deux psychiatres. Leur pas était rapide. Et leur mine peu réjouies.
Benkacem les avait également vu et se permit un juron en arabe. Avant d'ajouter à voix basse à l'attention de Yanis :
"Il y a un mathémagicien en danger ici, jeune homme..."
Les deux nouveaux arrivants étaient maintenant à côté d'eux. Le Directeur furieux s'exclama :
"Je croyais que nous avions un accord ? On vous donne un accès à nos installations et vous, vous ne parlez pas aux malades ! N'oubliez pas que votre présence ici ne tient qu'a un fil. D'autant plus qu'il n'y a rien que nous ne pouvons justifier au regard des conventions relatives aux droits de l'homme. L'établissement est respectable ! Et les accusations qui vous amènent ici pures calomnies !"
Benkacem répliqua d'un ton très diplomate :
"Nous ne faisions que demander notre chemin, Monsieur le Directeur. Et il ne s'agit que d'un contrôle de routine. Rien de plus"
Le Directeur sans lui accorder plus d'attention s'adressa une dernière fois à lui, comme on s'adresserait à un chien :
"Suivez moi. Et vous verrez bien que la personne qui vous a été signalée n'est pas ici. Nous n'abritons aucun criminel de quelque sorte que ce soit !"
Rapidement, Yanis et ses amis furent débarrassés des deux agents qui avaient rejoint le Directeur à l'intérieur de l'établissement. Demeurait seulement l'autre psychiatre sur place, l'air un peu embêté...
Benkacem saisit sa coéquipière par le bras, en ponctuant son geste par quelques paroles vives exprimées dans une langue que Yanis ne comprenait pas. La femme maugréa quelques mots dans le même dialecte puis s'écarta des autres protagonistes.
L'incident était terminé pour le moment, mais le regard de Haza ne présageait rien de bon.
La porte du bâtiment principal s'ouvrit sur deux individus que Yanis identifia avec satisfaction comme étant le Directeur de l'établissement et l'un de ses adjoints, tous deux psychiatres. Leur pas était rapide. Et leur mine peu réjouies.
Benkacem les avait également vu et se permit un juron en arabe. Avant d'ajouter à voix basse à l'attention de Yanis :
"Il y a un mathémagicien en danger ici, jeune homme..."
Les deux nouveaux arrivants étaient maintenant à côté d'eux. Le Directeur furieux s'exclama :
"Je croyais que nous avions un accord ? On vous donne un accès à nos installations et vous, vous ne parlez pas aux malades ! N'oubliez pas que votre présence ici ne tient qu'a un fil. D'autant plus qu'il n'y a rien que nous ne pouvons justifier au regard des conventions relatives aux droits de l'homme. L'établissement est respectable ! Et les accusations qui vous amènent ici pures calomnies !"
Benkacem répliqua d'un ton très diplomate :
"Nous ne faisions que demander notre chemin, Monsieur le Directeur. Et il ne s'agit que d'un contrôle de routine. Rien de plus"
Le Directeur sans lui accorder plus d'attention s'adressa une dernière fois à lui, comme on s'adresserait à un chien :
"Suivez moi. Et vous verrez bien que la personne qui vous a été signalée n'est pas ici. Nous n'abritons aucun criminel de quelque sorte que ce soit !"
Rapidement, Yanis et ses amis furent débarrassés des deux agents qui avaient rejoint le Directeur à l'intérieur de l'établissement. Demeurait seulement l'autre psychiatre sur place, l'air un peu embêté...
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Ven 11 Sep 2009 - 15:26
Yanis soutint le regard de Haza. Quelque chose ne tournait pas rond avec cette femme, et pour avoir vécu avec des fous, il en savait quelque chose. Mais ça ne s'arrêtait pas à son comportement étrange. Quelle était cette chaleur qu'il avait cru sentir autour de lui ? C'était comme si la rage visible de la femme s'était matérialisée. Mais quelles chances y avait-il que cela soit possible ? Une sur cent, une sur mille ?
Contre toute attente, la supposition qu'il venait d'effleurer, lui rendit presque Haza plus sympathique. Il aurait peut-être pu en apprendre plus si elle avait été mutante.
Elle se détourna en maugréant, puis le directeur en personne les rejoignit. Les deux agents se prirent un méchant savon. Ainsi donc ils recherchaient un criminel ? Ou n'était-ce qu'une couverture pour mettre la main sur ce fameux "livre" ?
Pourtant l'avertissement de Benkacem résonnait dans l'esprit du mutant, qui se retourna pour rasséréner Samira d'une accolade protectrice. Comme le voleur que l'on surprend la main dans le sac, Yanis ne pouvait s'empêcher de se sentir visé par la phrase de Karim, aveu de sa culpabilité génétique, et ce même s'il savait que Karim pouvait tout aussi bien rechercher un autre mutant que lui.
Yanis avait besoin de réfléchir à tout cela à tête reposée, mais il savait qu'en loupant les deux agents à leur sortie, il n'aurait probablement plus aucune chance d'en apprendre plus. Mais les attendre, c'était également se révéler à eux... Il n'avait aucune certitude sur les intentions de ces deux personnes. Se mettre en danger pour mieux sauver sa peau, c'était un pari risqué. Mais ne rien faire alors qu'on se savait menacé revenait à se suicider.
Le jeune homme fit signe aux deux adolescents qu'il les rejoindrait plus tard, et alla s'asseoir à l'écart, à l'ombre d'un pilier, non loin de la porte de sortie. Préoccupé, il laissa son crayon dessiner au hasard tout en surveillant les allées et venues. Ce n'est qu'au bout d'un moment qu'il s'aperçut qu'il représentait l'agent Haza entourée de flammes. Son vœux de silence commençait à lui peser ; il aurait tant voulu pouvoir se confier, et sa sœur Rhizlane aurait été toute désignée pour cela.
Contre toute attente, la supposition qu'il venait d'effleurer, lui rendit presque Haza plus sympathique. Il aurait peut-être pu en apprendre plus si elle avait été mutante.
Elle se détourna en maugréant, puis le directeur en personne les rejoignit. Les deux agents se prirent un méchant savon. Ainsi donc ils recherchaient un criminel ? Ou n'était-ce qu'une couverture pour mettre la main sur ce fameux "livre" ?
Pourtant l'avertissement de Benkacem résonnait dans l'esprit du mutant, qui se retourna pour rasséréner Samira d'une accolade protectrice. Comme le voleur que l'on surprend la main dans le sac, Yanis ne pouvait s'empêcher de se sentir visé par la phrase de Karim, aveu de sa culpabilité génétique, et ce même s'il savait que Karim pouvait tout aussi bien rechercher un autre mutant que lui.
Yanis avait besoin de réfléchir à tout cela à tête reposée, mais il savait qu'en loupant les deux agents à leur sortie, il n'aurait probablement plus aucune chance d'en apprendre plus. Mais les attendre, c'était également se révéler à eux... Il n'avait aucune certitude sur les intentions de ces deux personnes. Se mettre en danger pour mieux sauver sa peau, c'était un pari risqué. Mais ne rien faire alors qu'on se savait menacé revenait à se suicider.
Le jeune homme fit signe aux deux adolescents qu'il les rejoindrait plus tard, et alla s'asseoir à l'écart, à l'ombre d'un pilier, non loin de la porte de sortie. Préoccupé, il laissa son crayon dessiner au hasard tout en surveillant les allées et venues. Ce n'est qu'au bout d'un moment qu'il s'aperçut qu'il représentait l'agent Haza entourée de flammes. Son vœux de silence commençait à lui peser ; il aurait tant voulu pouvoir se confier, et sa sœur Rhizlane aurait été toute désignée pour cela.
- Le courtier temporelConscience collective
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Ven 11 Sep 2009 - 22:00
"De toutes façons, la tempête est passée" lâcha Farid, l'air un peu déçu...
La jeune fille, toujours sous le choc de l'accès de violence de l'agent Haza, haussa les épaules avant de conclure :
"Tu crois ? A moins qu'on soit dans l'oeil du cyclone. Ou dans celui du cyclope. J'aime pas ce calme, Monsieur le Docteur, ce calme dans une maison qui hurle et hurle et hurle encore et encore ça ne peut signifier que quelque chose croule. Quelque chose va lâcher..."
Le Psychiatre fronça du sourcil avant de retourner à l'intérieur du bâtiment. Suivi peu après des deux adolescents.
Un long moment se passa... Quelques allées et venues d'aliénés ou de soignants... Rien de plus. Rien de moins.
Ce n'est qu'au bout de ce long moment que les portes du bâtiment s'ouvrirent enfin sur Haza et Benkacem. Si la jeune femme s'engagea dans la cour à grands pas, Benkacem, quant à lui, semblait moins pressé. Il jetait des regards de ci, de là, comme si quelque chose ne collait pas. Comme si un truc le perturbait...
La jeune fille, toujours sous le choc de l'accès de violence de l'agent Haza, haussa les épaules avant de conclure :
"Tu crois ? A moins qu'on soit dans l'oeil du cyclone. Ou dans celui du cyclope. J'aime pas ce calme, Monsieur le Docteur, ce calme dans une maison qui hurle et hurle et hurle encore et encore ça ne peut signifier que quelque chose croule. Quelque chose va lâcher..."
Le Psychiatre fronça du sourcil avant de retourner à l'intérieur du bâtiment. Suivi peu après des deux adolescents.
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Un long moment se passa... Quelques allées et venues d'aliénés ou de soignants... Rien de plus. Rien de moins.
Ce n'est qu'au bout de ce long moment que les portes du bâtiment s'ouvrirent enfin sur Haza et Benkacem. Si la jeune femme s'engagea dans la cour à grands pas, Benkacem, quant à lui, semblait moins pressé. Il jetait des regards de ci, de là, comme si quelque chose ne collait pas. Comme si un truc le perturbait...
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Ven 11 Sep 2009 - 23:53
Samira n'était peut-être pas douée des pouvoirs qu'elle prétendait, mais Yanis ne pouvait qu'approuver ses dernières paroles. Une intuition féminine peut-être ? Quelque chose couvait, comme une maladie dont les deux agents auraient été les symptômes. Et pour la première fois depuis son arrivée dans ce lieu plutôt effrayant, Yanis se sentait menacé.
Il continua de ruminer ainsi ses idées noires et d'estimer ses possibilités, tout en terminant son portrait de Haza la sheitane. Il s'apprêtait à lui rajouter une moustache pointue lorsque son modèle réapparut dans la cour. Elle semblait plus que pressée de déguerpir de l'hôpital. Le mutant suspendit son geste et observa Haza. C'était maintenant ou jamais.
Yanis inscrivit quelques mots sur son sketchbook et alla à la rencontre de Benkacem, qui s'attardait, l'air au moins aussi préoccupé que lui.
Il continua de ruminer ainsi ses idées noires et d'estimer ses possibilités, tout en terminant son portrait de Haza la sheitane. Il s'apprêtait à lui rajouter une moustache pointue lorsque son modèle réapparut dans la cour. Elle semblait plus que pressée de déguerpir de l'hôpital. Le mutant suspendit son geste et observa Haza. C'était maintenant ou jamais.
Yanis inscrivit quelques mots sur son sketchbook et alla à la rencontre de Benkacem, qui s'attardait, l'air au moins aussi préoccupé que lui.
Alors ? Vous avez trouvé votre livre ? D'après le directeur, il serait l'arme d'un crime.
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Sam 12 Sep 2009 - 0:51
Benkacem loucha sur le papier. Puis leva les yeux vers Haza qui s'impatientait. Il lui fit un léger geste de la main, pour lui signifier de tracer sa route. Ce que la jeune femme fit d'un air contrarié.
L'homme se gratta la tête.
"On peut dire ça comme ça... Oui, on peut dire ça comme ça. Il y a bien eu un crime. Et une arme, mais c'est presque à se demander s'il s'agissait d'un meurtrier"
Karim planta son regard dans celui de Yanis.
"Mais si nous ne faisons rien et que je ne me suis pas trompé, petit... Il y aura à nouveau un meurtre. Ici même"
Tapant légèrement du pied, comme si le temps lui était compté, il ajouta en lui prenant le bras :
"Vous n'avez aucune raison de nous faire confiance. Vraiment aucune. Mais... Si la justice peut paraître parfois rude, elle n'est jamais aussi impitoyable que l'arbitraire, même sous des atours souriants"
Relâchant le jeune homme, il repartit en direction de Haza. Non sans se retourner et lancer :
"Le Mathémagicien. Je ne l'ai pas trouvé. Mais, n'oubliez pas : le mathémagicien"
Et sans ajouter la moindre parole, il se dépêcha vers l'extérieur... laissant Yanis à nouveau seul.
L'homme se gratta la tête.
"On peut dire ça comme ça... Oui, on peut dire ça comme ça. Il y a bien eu un crime. Et une arme, mais c'est presque à se demander s'il s'agissait d'un meurtrier"
Karim planta son regard dans celui de Yanis.
"Mais si nous ne faisons rien et que je ne me suis pas trompé, petit... Il y aura à nouveau un meurtre. Ici même"
Tapant légèrement du pied, comme si le temps lui était compté, il ajouta en lui prenant le bras :
"Vous n'avez aucune raison de nous faire confiance. Vraiment aucune. Mais... Si la justice peut paraître parfois rude, elle n'est jamais aussi impitoyable que l'arbitraire, même sous des atours souriants"
Relâchant le jeune homme, il repartit en direction de Haza. Non sans se retourner et lancer :
"Le Mathémagicien. Je ne l'ai pas trouvé. Mais, n'oubliez pas : le mathémagicien"
Et sans ajouter la moindre parole, il se dépêcha vers l'extérieur... laissant Yanis à nouveau seul.
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Sam 12 Sep 2009 - 12:12
Les réponses évasives de Benkacem ne firent qu'accroître la perplexité de Yanis. Cette affaire semblait bien mystérieuse. Cependant, le jeune Algérien eut au moins le soulagement de penser qu'il n'était pas l'objet de la chasse à l'homme. Un vagabond, certes, mais pas un criminel, à moins qu'exister soit devenu un crime lorsqu'il s'agissait de mutants. Cette idée n'était pas totalement sotte à l'heure actuelle, mais après réflexion, Yanis conclut qu'il venait de se faire un brin d'humour caustique.
Arpentant les couloirs de l'hôpital, Yanis poursuivait son cheminement mental. Il y avait eu un crime, quelque chose de suffisamment gros pour attirer l'attention de l'Europe, si tant est que ces deux agents en viennent réellement. Il avait peut-être été commis en Europe. Benkacem semblait croire que l'auteur du crime était comme lui un mutant qui se serait caché là où on ne l'attendrait pas. Vraisemblablement, ce devait être un mutant d'origine algérienne, Alger même probablement ; Yanis ne connaissait personne d'assez stupide pour choisir l'Algérie au hasard pour se cacher.
Mais l'agent Benkacem restait mitigé quant à la culpabilité du mutant... Qu'est-ce qui pouvait bien lui faire croire cela ?
Le plus inquiétant, c'était de savoir que ce meurtrier s'était planqué ici, chez les fous. Il serait encore plus difficile à identifier, et ses actions seraient soumises à une logique propre qui échapperait à quiconque sauf lui-même. Imprévisibles en somme.
Yanis s'étira tout en passant devant le foyer. En tout cas, Benkacem semblait croire qu'il s'agissait d'un homme. A aucun moment il n'avait suggéré que le mutant puisse être une femme. Mais pourquoi le surnommer le "mathémagicien" ? Cela avait-il un rapport avec son pouvoir présumé ? Une mutant pouvait-il faire de la magie avec des chiffres et surtout, pouvait-il tuer de cette façon ? Yanis se corrigea sur cette dernière réflexion : Karim n'avait jamais dit que le crime avait été perpétré via un pouvoir.
Le mutant s'arrêta devant le foyer, et finit par y entrer. Il n'avait aucune idée de quand les événements avaient pu arriver, mais après tout, s'il ne cherchait pas, il ne risquait pas de le découvrir. Si le crime était récent et suffisamment important, ils en parleraient peut-être à la télévision. Dans le cas contraire, le foyer regorgeait de vieilles coupures de journaux, que certains pensionnaires lisaient juste comme ça.
Yanis se mit donc à survoler les journaux de la pièces, tout en gardant un oeil sur le petite poste de télévision du foyer, dans l'espoir d'attraper les informations.
Arpentant les couloirs de l'hôpital, Yanis poursuivait son cheminement mental. Il y avait eu un crime, quelque chose de suffisamment gros pour attirer l'attention de l'Europe, si tant est que ces deux agents en viennent réellement. Il avait peut-être été commis en Europe. Benkacem semblait croire que l'auteur du crime était comme lui un mutant qui se serait caché là où on ne l'attendrait pas. Vraisemblablement, ce devait être un mutant d'origine algérienne, Alger même probablement ; Yanis ne connaissait personne d'assez stupide pour choisir l'Algérie au hasard pour se cacher.
Mais l'agent Benkacem restait mitigé quant à la culpabilité du mutant... Qu'est-ce qui pouvait bien lui faire croire cela ?
Le plus inquiétant, c'était de savoir que ce meurtrier s'était planqué ici, chez les fous. Il serait encore plus difficile à identifier, et ses actions seraient soumises à une logique propre qui échapperait à quiconque sauf lui-même. Imprévisibles en somme.
Yanis s'étira tout en passant devant le foyer. En tout cas, Benkacem semblait croire qu'il s'agissait d'un homme. A aucun moment il n'avait suggéré que le mutant puisse être une femme. Mais pourquoi le surnommer le "mathémagicien" ? Cela avait-il un rapport avec son pouvoir présumé ? Une mutant pouvait-il faire de la magie avec des chiffres et surtout, pouvait-il tuer de cette façon ? Yanis se corrigea sur cette dernière réflexion : Karim n'avait jamais dit que le crime avait été perpétré via un pouvoir.
Le mutant s'arrêta devant le foyer, et finit par y entrer. Il n'avait aucune idée de quand les événements avaient pu arriver, mais après tout, s'il ne cherchait pas, il ne risquait pas de le découvrir. Si le crime était récent et suffisamment important, ils en parleraient peut-être à la télévision. Dans le cas contraire, le foyer regorgeait de vieilles coupures de journaux, que certains pensionnaires lisaient juste comme ça.
Yanis se mit donc à survoler les journaux de la pièces, tout en gardant un oeil sur le petite poste de télévision du foyer, dans l'espoir d'attraper les informations.
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Sam 12 Sep 2009 - 13:58
Le foyer était encore un monde à part dans l'univers de l'hôpital psychiatrique... Encore une partie commune, mélangeant de manière hétéroclite personnels soignants et aliénés, syndromes X et internés de "droit commun"... La politique de l'établissement étant de laisser les malades s'exprimer pleinement. Avec ce qu'ils avaient à portée de main : la télévision, les journaux et revues, quelques jeux de société, des coloriages, ce genre de choses...
Il en résultait une pièce sordide. Dans un état de délabrement avancé. Il manquait des pièces aux jeux. Les pages des journaux étaient le plus souvent arrachées ou couvertes de signes incompréhensibles, ne faisant sens que dans l'esprit de celui ou de celle qui les avait noircies... La télécommande de la télévision fichée dans le mur avait disparu depuis belle lurette et les murs étaient gribouillés au-delà de tout espoir de nettoyage.
Quand Yanis entra dans la pièce, il recueillit les habituels regards noirs des occupants. Paranoïaques, borderlines ou en proie à des états de dégénérescence mentale. Il n'était pas beau de mal raisonner.
Un infirmier regardait le sport à la télévision, tenant sans grande conviction un gobelet de café entre les mains.
Et un autre homme faisait une partie d'échec avec lui même. Rejouant sans cesse les mêmes coups. Déplaçant frénétiquement les pièces du jeu. Poussant des jurons.
Yanis ne se souvenait pas de l'avoir déjà vu. Ce ne devait pas être un syndrome X.
Quelques autres pensionnaires, également mais tous amorphes...
Personne ne faisait plus attention au jeune mutant alors qu'il passait en revue les journaux... Essentiellement des publications locales... Quelques éditions nationales.
Il put lire dans ces pages malmenées par les aliénés les choses suivantes relatives aux mutants :
Il en résultait une pièce sordide. Dans un état de délabrement avancé. Il manquait des pièces aux jeux. Les pages des journaux étaient le plus souvent arrachées ou couvertes de signes incompréhensibles, ne faisant sens que dans l'esprit de celui ou de celle qui les avait noircies... La télécommande de la télévision fichée dans le mur avait disparu depuis belle lurette et les murs étaient gribouillés au-delà de tout espoir de nettoyage.
Quand Yanis entra dans la pièce, il recueillit les habituels regards noirs des occupants. Paranoïaques, borderlines ou en proie à des états de dégénérescence mentale. Il n'était pas beau de mal raisonner.
Un infirmier regardait le sport à la télévision, tenant sans grande conviction un gobelet de café entre les mains.
Et un autre homme faisait une partie d'échec avec lui même. Rejouant sans cesse les mêmes coups. Déplaçant frénétiquement les pièces du jeu. Poussant des jurons.
Yanis ne se souvenait pas de l'avoir déjà vu. Ce ne devait pas être un syndrome X.
Quelques autres pensionnaires, également mais tous amorphes...
Personne ne faisait plus attention au jeune mutant alors qu'il passait en revue les journaux... Essentiellement des publications locales... Quelques éditions nationales.
Il put lire dans ces pages malmenées par les aliénés les choses suivantes relatives aux mutants :
MEURTRE A ALGER : Ce matin, le corps mutilé d'une jeune femme a été retrouvé dans une ruelle. Lardée de coups de couteau, décapitée à la hache, cette jeune étudiante en arts appliqués était pourtant sans histoire. Interrogé par les services de police, son époux a précisé néanmoins qu'elle avait rencontré via internet un mutant. "Surement un sadique. Sinon comment expliquer la sauvagerie avec laquelle elle a été tué ?" nous déclare le jeune veuf. Interrogé sur la question le Directeur de l'hôpital Psychiatrique d'Alger, spécialiste du Syndrome X, le Docteur Ali Ben Tarhaoui nous précise "Les mutants sont souvent des gens incapables d'accéder au désir de l'autre. Ils sont à un stade préobjectal de la conscience. Bref, ils ont du mal à comprendre la différence entre eux même et les autres, leur environnement, qu'ils perçoivent comme des extensions personnelles. Du coup, le mot "NON", qui est très exactement la Loi-du-Père, ne fait pas partie de leur vocabulaire. Frustration sexuelle, délire de puissance, ce cocktail explosif fait de ces êtres des individus dangereux. Nous sommes en face d'adolescents présentant un profil sociopathologique". Les enquêteurs, quant à eux, déclarent ne négliger aucune piste.
LES MEURTRIERS DU 13 AVRIL - IMPASSE INTERNATIONALE ? : Le bras de fer entre l'État Mutant de Génosha et la communauté internationale se poursuit. Pour le moment, nul accord n'est intervenu, les parties en présence ayant seulement échangé des déclarations d'intention s'agissant du sort à réserver aux initiateurs et exécutants du génocide mutant. le Gouvernement Algérien, dans un communiqué officiel, a déclaré, avec sagesse, qu'elle n'accorderait l'asile à aucun des participants présumés au massacre et qu'il mettrait tout en œuvre pour interpeller tout génocidaire qui se trouverait sur le territoire algérien. Cette position, largement partagée dans le cadre des Nations-Unies, n'a pas semblé satisfaire l'Etat Mutant qui, par le biais de la voix de sa plus haute magistrate, Mademoiselle Lucy Adams, a déclaré : "Les crimes commis à Hammer Bay seront jugés à Hammer Bay. Avec ou sans l'aide des instances internationales". Rappelons par ailleurs, que le statut des tribunaux spéciaux de Génosha reconnait la peine de mort.
ESPIONNAGE INTERNATIONAL : La juridiction arbitrale devrait rendre dans les prochains jours sa sentence dans l'affaire Australie / Sky Engineering. L'Institut Bogdanov, rappelons le, centre de recherche d'État, s'était vu dérober un système de guidage révolutionnaire, destiné à l'origine à des opérations de micro-chirurgie assistées par ordinateur. Fait troublant : le vol a été commis au moment même où se tenait une réunion contradictoire entre les représentants du laboratoire et les industriels souhaitant acquérir une licence sur ce matériel. De même, le voleur a été identifié comme étant Monsieur Cameron O'Sean, fils de l'avocat du laboratoire et mutant. Interrogé par les services de police, Monsieur Cameron O'Sean a indiqué avoir agi à la demande de l'avocat de la Société Sky Engineering, Maître Jesse James du Cabinet Lange & Manners. Version démentie par le cabinet texan. De même la Société Sky Engineering argue que sans la clé pour décrypter le code de cette technologie de pointe, le système de guidage est inefficace. Les enjeux commerciaux sont importants. Si la juridiction arbitrale devait donner raison à la Société Américaine, l'Australie a déjà annoncé qu'elle poursuivrait la famille O'Sean en justice.
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Dim 13 Sep 2009 - 22:34
C'est non sans une expression blasée que l'Algérien farfouillait dans les vieilles coupures de journaux, sous l'oeil hostile de certains internés. Nul doute que la plupart des gens ici, contrairement à lui, avaient une vraie raison de s'y trouver.
Les quelques articles qu'il trouva ne le renseignèrent pas réellement sur l'objet de ses recherches. Le meurtre perpétré à Alger à la rigueur, pouvait être une piste, mais on ne lardait rarement quelqu'un de coups de couteau sans être réellement coupables, surtout lorsque cet acte était suivi d'une décapitation à la hache. Or Benkacem semblait perplexe quant à la responsabilité réel du criminel mutant...
Un accident peut-être ? Une perte de contrôle qui aurait résulté en une mort ? Pour avoir découvert ses pouvoirs sans bien savoir comment, Yanis était bien placé pour émettre ce genre de supposition. C'est principalement le deuxième article qu'il trouva qui attira son attention. Yanis ignorait qu'une nation mutante avait vu le jour depuis qu'il s'était fait interner. Voilà ce que c'était de vivre claquemuré dans un asile, surtout quand la télécommande de la télé avait disparu... C'était une sorte de microcosme, un monde hors du monde doté d'une vie propre. Cette édition semblait dater de deux semaines. Apparemment, une sorte de massacre généralisé avait eu lieu dans ce fameux "Génosha". Quel pays pouvait bien avoir offert une terre d'accueil aux mutants ? Une terre d'accueil, un asile en somme, un asile d'une tout autre sorte. Il y serait sûrement plus à sa place.
Le jeune homme plia la coupure de presse et la glissa dans la poche arrière de son jean. Il n'était pas plus avancé sur cette histoire de criminel mutant, mais il avait déjà quelques idées d'abri où attendre que la tempête se calme, si tant est que ce lieu soit facile d'accès. Là encore, Yanis manquait cruellement d'informations.
Il s'apprêtait à retourner cogiter dans sa chambre, lorsqu'il remarqua le joueur d'échecs inconnu. A son apparence, il ne devait pas être d'origine algérienne, ce qui piqua la curiosité du mutant au vif. Pour avoir quelques mauvaises surprises avec la faune locale à son arrivée, il savait par expérience qu'il était préférable de laisser les vrais aliénés seuls, mais les manies répétitives de l'énergumène, alliées au fait que Yanis ne savait pas de quoi il était atteint, le convainquirent d'observer l'homme de plus près.
Le mutant s'approcha de la table et s'assit sur la chaise faisant face au joueur, tout en observant l'état d'avancement de la partie en cours, et les pièces que l'homme déplaçait à répétition. Il tenta de capter le regard du joueur.
Les quelques articles qu'il trouva ne le renseignèrent pas réellement sur l'objet de ses recherches. Le meurtre perpétré à Alger à la rigueur, pouvait être une piste, mais on ne lardait rarement quelqu'un de coups de couteau sans être réellement coupables, surtout lorsque cet acte était suivi d'une décapitation à la hache. Or Benkacem semblait perplexe quant à la responsabilité réel du criminel mutant...
Un accident peut-être ? Une perte de contrôle qui aurait résulté en une mort ? Pour avoir découvert ses pouvoirs sans bien savoir comment, Yanis était bien placé pour émettre ce genre de supposition. C'est principalement le deuxième article qu'il trouva qui attira son attention. Yanis ignorait qu'une nation mutante avait vu le jour depuis qu'il s'était fait interner. Voilà ce que c'était de vivre claquemuré dans un asile, surtout quand la télécommande de la télé avait disparu... C'était une sorte de microcosme, un monde hors du monde doté d'une vie propre. Cette édition semblait dater de deux semaines. Apparemment, une sorte de massacre généralisé avait eu lieu dans ce fameux "Génosha". Quel pays pouvait bien avoir offert une terre d'accueil aux mutants ? Une terre d'accueil, un asile en somme, un asile d'une tout autre sorte. Il y serait sûrement plus à sa place.
Le jeune homme plia la coupure de presse et la glissa dans la poche arrière de son jean. Il n'était pas plus avancé sur cette histoire de criminel mutant, mais il avait déjà quelques idées d'abri où attendre que la tempête se calme, si tant est que ce lieu soit facile d'accès. Là encore, Yanis manquait cruellement d'informations.
Il s'apprêtait à retourner cogiter dans sa chambre, lorsqu'il remarqua le joueur d'échecs inconnu. A son apparence, il ne devait pas être d'origine algérienne, ce qui piqua la curiosité du mutant au vif. Pour avoir quelques mauvaises surprises avec la faune locale à son arrivée, il savait par expérience qu'il était préférable de laisser les vrais aliénés seuls, mais les manies répétitives de l'énergumène, alliées au fait que Yanis ne savait pas de quoi il était atteint, le convainquirent d'observer l'homme de plus près.
Le mutant s'approcha de la table et s'assit sur la chaise faisant face au joueur, tout en observant l'état d'avancement de la partie en cours, et les pièces que l'homme déplaçait à répétition. Il tenta de capter le regard du joueur.
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Lun 14 Sep 2009 - 1:53
L'homme regarda Yanis avec un regard fou.
"Tu regardes quoi morveux ?" commença-t-il d'un ton cassant.
Puis continuant à déplacer ses pièces à toute vitesse, selon une logique que lui seul semblait comprendre, l'homme poursuivit, sans même attendre la réponse du jeune homme :
"Un jour pour distraire mon prince de l'ennui qui le prenait, j'ai inventé ce jeu... Transporté par la joie et la gratitude, mon prince a voulu me récompenser en me proposant monts et merveilles. Ma réponse fut la suivante : donne moi un grain de riz et je le placerai sur la première case de mon jeu. Puis donne moi deux grains de riz et je les placerai sur la deuxième case. Et à chaque nouvelle case de mon jeu, tu me donneras le double de ce que tu as donné pour la précédente. Ma magie est puissante mais ce n'est pas la mienne. J'ai de puissants conseils, moi qui suis Hassan Ben Sabbah. Le vieux de la montagne. L'évêque de mon prince..."
Il délirait. C'était certain. Néanmoins après qu'il eut déplacé son fou une dernière fois, il se frotta les mains et observa à nouveau Yanis.
"La vie, c'est ce plateau. Les pièces, des combinaisons logiques. Celui qui a la clé est le maître. Mon Prince a toutes les clés qui existent en sa possession. Ton monde est fonctionnel, le mien formel. Tout est interdit, rien n'est impossible"
"Tu regardes quoi morveux ?" commença-t-il d'un ton cassant.
Puis continuant à déplacer ses pièces à toute vitesse, selon une logique que lui seul semblait comprendre, l'homme poursuivit, sans même attendre la réponse du jeune homme :
"Un jour pour distraire mon prince de l'ennui qui le prenait, j'ai inventé ce jeu... Transporté par la joie et la gratitude, mon prince a voulu me récompenser en me proposant monts et merveilles. Ma réponse fut la suivante : donne moi un grain de riz et je le placerai sur la première case de mon jeu. Puis donne moi deux grains de riz et je les placerai sur la deuxième case. Et à chaque nouvelle case de mon jeu, tu me donneras le double de ce que tu as donné pour la précédente. Ma magie est puissante mais ce n'est pas la mienne. J'ai de puissants conseils, moi qui suis Hassan Ben Sabbah. Le vieux de la montagne. L'évêque de mon prince..."
Il délirait. C'était certain. Néanmoins après qu'il eut déplacé son fou une dernière fois, il se frotta les mains et observa à nouveau Yanis.
"La vie, c'est ce plateau. Les pièces, des combinaisons logiques. Celui qui a la clé est le maître. Mon Prince a toutes les clés qui existent en sa possession. Ton monde est fonctionnel, le mien formel. Tout est interdit, rien n'est impossible"
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Lun 14 Sep 2009 - 17:21
Le drôle de type ne tarda pas à réagir à la présence de Yanis, et de façon plutôt agressive. Mieux valait ne pas le brusquer. En ce sens, c'était plutôt avantageux qu'il ne parlât jamais en présence des autres. La plupart du temps, cela avait des vertus apaisantes, comme lorsqu'un animal fait le mort. Ca, c'était avec la plupart des malades. Certains trouvait à l'inverse cela irritant.
Le gaillard semblait plutôt faire partie de la première catégorie, puisqu'il poursuivit de lui-même un petit monologue. Le fait qu'il jouait d'ailleurs tout seul tendait à prouver que l'échange avec autrui n'était pas sa tasse de thé. Indécis, Yanis farfouilla dans la poche de son jean à la recherche d'un mouchoir, puis s'essuya le nez, juste au cas où.
Le discours ressemblait à un conte. Et si le jeune homme comprit les mots en eux-même, il ne parvenait pas à saisir leur sens caché, le sens unique qu'ils devaient revêtir dans l'esprit tourmenté de son interlocuteur, comme si le langage dissimulait un métalangage.
Yanis trouvait le prince plutôt dépendant de son évêque, qui par son génie avait chassé l'ennui. Finalement, est-ce que ce n'était pas lui qui détenait les clés de cette histoire ?
Il se souvint alors que la pièce du fou, que l'homme avait déplacée plusieurs fois, était appelée "bishop", l'évêque en anglais. Le hasard n'était pas sans un certain sens de l'humour. Cette histoire pouvait tout aussi bien ne rien vouloir dire, mais Yanis n'aimait pas rester sur une impression d'incompréhension. Benkacem n'avait pas tort de comparer son forcené à un livre. Les malades étaient des livres dont on aurait perdu l'alphabet. Certaines choses les faisaient réagir, ils les comprenaient car elles résonnaient dans une langue qui leur était familière.
Le mutant saisit le fou de son côté du plateau, et prit la première pièce qu'il trouva sur son chemin en diagonale droite, étudiant la réaction de son adversaire. Cette manie des chiffres n'était pas sans rappeler étrangement l'allusion au mathémagicien de Benkacem. D'ailleurs, l'homme n'avait-il pas parlé de magie ? Deux coïncidences troublantes en l'espace de quelques secondes, c'était un peu trop gros pour que Yanis, en quête d'informations, ne s'attarde pas deux minutes à cette table pour tenter de déchiffrer ce nouveau livre...
Le gaillard semblait plutôt faire partie de la première catégorie, puisqu'il poursuivit de lui-même un petit monologue. Le fait qu'il jouait d'ailleurs tout seul tendait à prouver que l'échange avec autrui n'était pas sa tasse de thé. Indécis, Yanis farfouilla dans la poche de son jean à la recherche d'un mouchoir, puis s'essuya le nez, juste au cas où.
Le discours ressemblait à un conte. Et si le jeune homme comprit les mots en eux-même, il ne parvenait pas à saisir leur sens caché, le sens unique qu'ils devaient revêtir dans l'esprit tourmenté de son interlocuteur, comme si le langage dissimulait un métalangage.
Yanis trouvait le prince plutôt dépendant de son évêque, qui par son génie avait chassé l'ennui. Finalement, est-ce que ce n'était pas lui qui détenait les clés de cette histoire ?
Il se souvint alors que la pièce du fou, que l'homme avait déplacée plusieurs fois, était appelée "bishop", l'évêque en anglais. Le hasard n'était pas sans un certain sens de l'humour. Cette histoire pouvait tout aussi bien ne rien vouloir dire, mais Yanis n'aimait pas rester sur une impression d'incompréhension. Benkacem n'avait pas tort de comparer son forcené à un livre. Les malades étaient des livres dont on aurait perdu l'alphabet. Certaines choses les faisaient réagir, ils les comprenaient car elles résonnaient dans une langue qui leur était familière.
Le mutant saisit le fou de son côté du plateau, et prit la première pièce qu'il trouva sur son chemin en diagonale droite, étudiant la réaction de son adversaire. Cette manie des chiffres n'était pas sans rappeler étrangement l'allusion au mathémagicien de Benkacem. D'ailleurs, l'homme n'avait-il pas parlé de magie ? Deux coïncidences troublantes en l'espace de quelques secondes, c'était un peu trop gros pour que Yanis, en quête d'informations, ne s'attarde pas deux minutes à cette table pour tenter de déchiffrer ce nouveau livre...
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Lun 14 Sep 2009 - 23:24
"Hassan Ben Sabbah" fronça du sourcil et se pencha en avant, comme pour mieux voir le plateau, quand Yanis prit l'un de ses pions à l'aide du fou blanc.
Une expression de colère traversa son visage et le jeune homme ne manqua pas de remarquer que le corps du "vieux de la montagne" était parcouru de tics gestuels. Un instant, il crut que l'homme allait exploser et renverser l'échiquier d'un revers de manche mais...
En lieu et place de l'éclat de fureur attendu, il marmonna un truc incompréhensible et avança l'un de ses propres pions en case f6.
Du même ton peu aimable qu'il avait utilisé jusqu'à présent, le fou lança à Yanis :
"Tu as pris un pion. Sauras tu prendre mon Prince ? A toi de jouer, morveux, fais moi voir ta magie..."
[Le Roi noir est en h8 et la Reine noire en d8]
Une expression de colère traversa son visage et le jeune homme ne manqua pas de remarquer que le corps du "vieux de la montagne" était parcouru de tics gestuels. Un instant, il crut que l'homme allait exploser et renverser l'échiquier d'un revers de manche mais...
En lieu et place de l'éclat de fureur attendu, il marmonna un truc incompréhensible et avança l'un de ses propres pions en case f6.
Du même ton peu aimable qu'il avait utilisé jusqu'à présent, le fou lança à Yanis :
"Tu as pris un pion. Sauras tu prendre mon Prince ? A toi de jouer, morveux, fais moi voir ta magie..."
[Le Roi noir est en h8 et la Reine noire en d8]
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Mar 15 Sep 2009 - 13:15
L'espace d'un instant, Yanis fut persuadé que l'homme allait lui en coller une. Et finalement, il ne l'aurait pas volée ; provoquer ainsi un malade mental, ce n'était pas vraiment recommandé. Puis la fureur contenue de l'homme se fondit en une phrase incompréhensible. Le mutant, qui avait retenu son souffle, poussa un soupir de soulagement. Il avait au moins vu juste sur un point : ce type était complètement imprévisible. Son corps lui-même présentait des signes d'agitation. Il ne jouait pas avec un simple malade, Yanis jouait avec le feu.
En tout cas, bonne ou mauvaise, le jeune homme avait provoqué une réaction chez Hassan Ben Sabbah, dont l'esprit de compétition semblait encore vif malgré l'aliénation. Encore une allusion à la magie. Les obsessions de cet homme transparaissaient sans mal. Yanis étudia l'échiquier. Son dernier coup démontrait que les échecs n'étaient pas sa spécialité. Il venait bêtement d'ouvrir sa garde. Un coup d'amateur, mais Yanis préférait rester sur ses gardes et ne pas le sous-estimer. Peut-être que Hassan tentait de le tester.
Le mutant saisit avec assurance le cavalier blanc et le plaça en G6, puis d'une pichenette de l'index, fit tomber le roi "prince" de son adversaire, pour signifier qu'il était échec et mat. Yanis se redressa en arrière sur sa chaise, s'éloignant ainsi un peu de la table, au cas où l'évêque déchu piquait une colère aussi noire que ses pions.
En tout cas, bonne ou mauvaise, le jeune homme avait provoqué une réaction chez Hassan Ben Sabbah, dont l'esprit de compétition semblait encore vif malgré l'aliénation. Encore une allusion à la magie. Les obsessions de cet homme transparaissaient sans mal. Yanis étudia l'échiquier. Son dernier coup démontrait que les échecs n'étaient pas sa spécialité. Il venait bêtement d'ouvrir sa garde. Un coup d'amateur, mais Yanis préférait rester sur ses gardes et ne pas le sous-estimer. Peut-être que Hassan tentait de le tester.
Le mutant saisit avec assurance le cavalier blanc et le plaça en G6, puis d'une pichenette de l'index, fit tomber le roi "prince" de son adversaire, pour signifier qu'il était échec et mat. Yanis se redressa en arrière sur sa chaise, s'éloignant ainsi un peu de la table, au cas où l'évêque déchu piquait une colère aussi noire que ses pions.
- Le courtier temporelConscience collective
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Mer 16 Sep 2009 - 22:38
Quand Yanis fit basculer le Roi Noir, la mine du "Vieux de la Montagne" changea. Loin de l'agressivité dont l'homme avait pu faire preuve jusqu'à présent, celui-ci esquissa un sourire pervers. Il lança un drôle de regard au mutant.
"Tu as raison, morveux... Le Prince ne tombe pas de lui même. Il faut l'aider"
Il se gratta la tête un instant, comme pour s'épouiller. Et se parla à lui même.
"Un seul pion peut faire choir le Seigneur de ces lieux dans le monde formel. La Cour est aveugle : seul l'enfant voit que le Roi est nu"
Hassan se leva et, contournant la petite table, fit quelques pas rapides en direction de Yanis.
"Viens... Viens..." lui intima-t-il l'air excité. "La Cour des Miracles a besoin de magie... Un nouvel ordre se profile. Et les tenants de l'ancien régime se doivent de trembler !"
Regardant le plafond, les poings serrés, il brailla, à nouveau pour lui même, dans la salle :
"Révolution ! Ma magie, la sienne ! Moïse contre Pharaon ! Mektoub, eurêka !"
Enfin, regardant à nouveau Yanis, l'air calme, tout en désignant du doigt la sortie vers le bâtiment des "droits communs" :
"Nous allons marcher sur Rome"
"Tu as raison, morveux... Le Prince ne tombe pas de lui même. Il faut l'aider"
Il se gratta la tête un instant, comme pour s'épouiller. Et se parla à lui même.
"Un seul pion peut faire choir le Seigneur de ces lieux dans le monde formel. La Cour est aveugle : seul l'enfant voit que le Roi est nu"
Hassan se leva et, contournant la petite table, fit quelques pas rapides en direction de Yanis.
"Viens... Viens..." lui intima-t-il l'air excité. "La Cour des Miracles a besoin de magie... Un nouvel ordre se profile. Et les tenants de l'ancien régime se doivent de trembler !"
Regardant le plafond, les poings serrés, il brailla, à nouveau pour lui même, dans la salle :
"Révolution ! Ma magie, la sienne ! Moïse contre Pharaon ! Mektoub, eurêka !"
Enfin, regardant à nouveau Yanis, l'air calme, tout en désignant du doigt la sortie vers le bâtiment des "droits communs" :
"Nous allons marcher sur Rome"
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Jeu 17 Sep 2009 - 12:26
Son adversaire eut une réaction moins virulente que prévue, cette fois. Il s'adressait toujours à lui en le traitant de morveux, ce que le jeune homme aurait bien aimé démentir une bonne fois pour toute, mais Hassan était déjà plus amical qu'auparavant. C'était comme si sa victoire l'avait fait remonter dans l'estime de son vis-à-vis. Yanis était-il entré dans le club des mathémagiciens ? Vu l'enquête de Benkacem, ce n'était pas forcément une bonne chose... mais refuser d'écouter Hassan pourrait de nouveau provoquer chez lui une réaction imprévisible. Et Yanis devait bien avouer que si le charabia de son interlocuteur ne lui parlait pas énormément, il piquait sa curiosité.
Ce n'était pas très clair, mais le mutant pensait comprendre l'idée générale : un soulèvement dans le bâtiment des aliénés classiques. Qui pouvait bien être le prince à déchoir, en l'occurrence ? Benkacem et Haza avaient dû prétendre enquêter sur des mauvais traitements pour entrer dans l'hôpital, mais ce prétexte n'en était peut-être pas un. Et si Yanis vivait à deux pas d'une maltraitance patentée ? Ayant potentiellement résulté en un crime ?
Tout cela était envisageable, mais pas attesté. Et son guide autoproclamé lui proposait d'aller le vérifier par lui-même. Cela n'aurait certainement rien d'une promenade de santé. Et il espérait que Hassan ne compte pas trop sur lui pour jouer le fer de lance de sa mutinerie ! D'autant que s'il se fiait uniquement à un coup aux échecs pour juger de sa valeur, le personnel médical et ses piqûres tranquillisantes étaient plus difficiles à mettre en échec.
C'est donc avec circonspection que Yanis se leva, son bloc sous le bras, pour suivre le lapin blanc dans son mystérieux terrier. Il était clair qu'il verrait sûrement des choses dans il se serait bien passé, tout rationalisé qu'était devenu son esprit. Yanis se prépara donc psychologiquement à entrer au pays des merveilles.
Ce n'était pas très clair, mais le mutant pensait comprendre l'idée générale : un soulèvement dans le bâtiment des aliénés classiques. Qui pouvait bien être le prince à déchoir, en l'occurrence ? Benkacem et Haza avaient dû prétendre enquêter sur des mauvais traitements pour entrer dans l'hôpital, mais ce prétexte n'en était peut-être pas un. Et si Yanis vivait à deux pas d'une maltraitance patentée ? Ayant potentiellement résulté en un crime ?
Tout cela était envisageable, mais pas attesté. Et son guide autoproclamé lui proposait d'aller le vérifier par lui-même. Cela n'aurait certainement rien d'une promenade de santé. Et il espérait que Hassan ne compte pas trop sur lui pour jouer le fer de lance de sa mutinerie ! D'autant que s'il se fiait uniquement à un coup aux échecs pour juger de sa valeur, le personnel médical et ses piqûres tranquillisantes étaient plus difficiles à mettre en échec.
C'est donc avec circonspection que Yanis se leva, son bloc sous le bras, pour suivre le lapin blanc dans son mystérieux terrier. Il était clair qu'il verrait sûrement des choses dans il se serait bien passé, tout rationalisé qu'était devenu son esprit. Yanis se prépara donc psychologiquement à entrer au pays des merveilles.
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Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Ven 18 Sep 2009 - 2:17
Engagé en compagnie de Hassan dans le couloir menant à la section des droits communs, Yanis put voir le changement d'ambiance : là où les Syndromes X étaient pour l'immense majorité des gamins un peu paumés, souvent victimes de traumatismes en tout genre, réfugiés dans un monde imaginaire et idéalisé, les "droits communs" étaient des cas autrement plus déprimants !
Là où les accès menant aux quartiers de Yanis étaient pour la plupart constellés de dessins de super héros et voyaient les mêmes scènes de combats imaginaires mimées à l'infini par les pensionnaires, le couloir qu'il empruntait en compagnie du Vieux de la Montagne était gris. Sale. Et personne ne riait.
Les pathologies étaient plus lourdes. Les patients plus âgés. L'aliénation dans sa plus triste expression. Des démences séniles. Des vieux schizophrènes. Des délires productifs. Des conduites autistiques. Entre la violence et le retrait du monde, il n'y avait que peu de place pour la communication et la chaleur humaine.
Un grand gaillard bien bâti portant la blouse blanche des infirmiers fit signe au jeune mutant de s'arrêter, laissant, en revanche, passer Hassan.
"Tu t'es paumé, p'tit gars ? Crois moi, t'as rien à faire ici. Retourne avec tes potes. Et laisse les malades dangereux avec les malades dangereux"
L'expression du type laissait entendre qu'il était inutile de négocier. D'ailleurs Hassan se contenta de hausser les épaules avant de lancer à Yanis :
"Morveux, faudrait être un vrai magicien pour rentrer ici. Reviens quand t'auras ta baguette magique ou ton sésame-ouvre-toi !"
L'infirmier, un air courroucé sur le visage, répliqua sèchement au drôle de joueur d'échec :
"Toi, c'est pas de sitôt que t'auras droit à retourner en salle commune. Mon rapport fait, tu resteras avec les légumes et les barrés. Plutôt que de pouvoir aller importuner les petites et les petits."
Et sans plus prêter d'attention à l'infirmier, Hassan disparut derrière la porte à double battant.
Un léger coup d'œil à l'infirmier en poste permit à Yanis de caractériser l'homme : bien portant, suffisant, fier de son corps d'athlète, bien porté sur les femmes comme en témoignaient les regards intéressés qu'il jetait aux infirmières déambulant dans le couloir... Mais en revanche, bien décidé à ne pas le laisser passer !
D'ailleurs, il demanda à deux collègues de ramener le mutant dans sa chambre...
Le reste de la journée fila sans événement notable et ce n'est que le lendemain que les galères recommencèrent. Réveillé au petit matin par d'autres infirmiers, on notifia à Yanis que son médecin psychiatre souhaitait le voir... Pourtant ce n'était pas le jour de sa consultation hebdomadaire.
Il eut à peine le temps de s'habiller et se retrouva quelques minutes plus tard dans le bureau où d'habitude se tenaient les consultations.
La petite pièce avait toujours la même ambiance : l'éternel divan, le fauteuil du psy, la table de travail où le praticien rédigeait ses ordonnances à la va vite pour la pharmacie de l'établissement, l'armoire métallique où étaient rangés les dossiers des pensionnaires, la belle bibliothèque...
Le Docteur Aounit était bien installé dans son fauteuil quand Yanis fut introduit dans son bureau.
"Bonjour, Yanis... J'espère que vous allez bien et que vous avez eu le temps de prendre votre carnet. J'ai entendu de drôles de choses à votre sujet et dans quelques instants un Monsieur viendra vous voir. Mais en attendant, n'avez vous pas quelque chose à me dire ?"
Yanis remarqua que le praticien avait son dossier sur les genoux.
Là où les accès menant aux quartiers de Yanis étaient pour la plupart constellés de dessins de super héros et voyaient les mêmes scènes de combats imaginaires mimées à l'infini par les pensionnaires, le couloir qu'il empruntait en compagnie du Vieux de la Montagne était gris. Sale. Et personne ne riait.
Les pathologies étaient plus lourdes. Les patients plus âgés. L'aliénation dans sa plus triste expression. Des démences séniles. Des vieux schizophrènes. Des délires productifs. Des conduites autistiques. Entre la violence et le retrait du monde, il n'y avait que peu de place pour la communication et la chaleur humaine.
Un grand gaillard bien bâti portant la blouse blanche des infirmiers fit signe au jeune mutant de s'arrêter, laissant, en revanche, passer Hassan.
"Tu t'es paumé, p'tit gars ? Crois moi, t'as rien à faire ici. Retourne avec tes potes. Et laisse les malades dangereux avec les malades dangereux"
L'expression du type laissait entendre qu'il était inutile de négocier. D'ailleurs Hassan se contenta de hausser les épaules avant de lancer à Yanis :
"Morveux, faudrait être un vrai magicien pour rentrer ici. Reviens quand t'auras ta baguette magique ou ton sésame-ouvre-toi !"
L'infirmier, un air courroucé sur le visage, répliqua sèchement au drôle de joueur d'échec :
"Toi, c'est pas de sitôt que t'auras droit à retourner en salle commune. Mon rapport fait, tu resteras avec les légumes et les barrés. Plutôt que de pouvoir aller importuner les petites et les petits."
Et sans plus prêter d'attention à l'infirmier, Hassan disparut derrière la porte à double battant.
Un léger coup d'œil à l'infirmier en poste permit à Yanis de caractériser l'homme : bien portant, suffisant, fier de son corps d'athlète, bien porté sur les femmes comme en témoignaient les regards intéressés qu'il jetait aux infirmières déambulant dans le couloir... Mais en revanche, bien décidé à ne pas le laisser passer !
D'ailleurs, il demanda à deux collègues de ramener le mutant dans sa chambre...
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Le reste de la journée fila sans événement notable et ce n'est que le lendemain que les galères recommencèrent. Réveillé au petit matin par d'autres infirmiers, on notifia à Yanis que son médecin psychiatre souhaitait le voir... Pourtant ce n'était pas le jour de sa consultation hebdomadaire.
Il eut à peine le temps de s'habiller et se retrouva quelques minutes plus tard dans le bureau où d'habitude se tenaient les consultations.
La petite pièce avait toujours la même ambiance : l'éternel divan, le fauteuil du psy, la table de travail où le praticien rédigeait ses ordonnances à la va vite pour la pharmacie de l'établissement, l'armoire métallique où étaient rangés les dossiers des pensionnaires, la belle bibliothèque...
Le Docteur Aounit était bien installé dans son fauteuil quand Yanis fut introduit dans son bureau.
"Bonjour, Yanis... J'espère que vous allez bien et que vous avez eu le temps de prendre votre carnet. J'ai entendu de drôles de choses à votre sujet et dans quelques instants un Monsieur viendra vous voir. Mais en attendant, n'avez vous pas quelque chose à me dire ?"
Yanis remarqua que le praticien avait son dossier sur les genoux.
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Ven 18 Sep 2009 - 13:27
Yanis ne chercha pas plus que cela à entrer dans le bloc de Hassan. En un sens, c'était plutôt même un soulagement que l'infirmier lui ferme l'accès : ainsi, Hassan ne pourrait le prendre en grippe car il n'était pas responsable, mais il n'aurait pas à baigner dans la dégénérescence mentale plus qu'il ne l'avait déjà fait en s'avançant de ce côté de l'hôpital. Cela dit, il était toujours curieux de voir ce que l'ermite de la montagne avait bien pu vouloir lui montrer.
Le jeune homme fut pris d'une sombre lassitude alors que son escorte le ramenait à sa chambre. Malgré les événements, qui sortaient relativement de l'ordinaire dans la vie de l'asile, il n'était pas plus avancé sur le mystère qui planait ici. Et les mises en garde de Benkacem n'étaient pas pour le rassurer. Si un crime avait lieu ici, mieux valait qu'il soit loin quand cela se produirait. Malgré ses calculs, Yanis était incapable de déterminer qui avait raison et tort dans cette histoire.
Il sortit pensivement l'article de journal de sa poche, et le relut une nouvelle fois pour s'en imprégner. Oui, il devait se tirer de ce panier de crabes. Plus il examinait la situation, plus il était convaincu qu'au final, filer en douce serait le moyen le plus rapide et le moins risqué. S'il prétendait être guéri, le personnel lui demanderait sûrement de parler, et sa couverture serait fichue.
Il décida donc d'organiser sa fuite le lendemain.
En ce sens, la visite chez le docteur Aounit tomba comme un cheveu sur la soupe. Une perte de temps précieux alors qu'il devait étudier le meilleur moyen de se faire la belle, préparer ses affaires. Il n'avait pas prévu de voir les pensionnaires qu'il connaissait avant son départ, pour plusieurs raisons. La première étant que cela paraîtrait suspect, et qu'on ne pouvait jamais faire confiance à un malade pour garder un secret. La deuxième, c'était que Yanis n'en éprouvait tout simplement pas le besoin. Depuis l'apparition de sa mutation, il éprouvait de plus en plus de mal à s'attacher aux choses et aux gens. Il appréciait certains internés, comme Samira et Farid, mais de là à se perdre en effusions... Il devait rentabiliser le temps à sa disposition, et le choix des priorités était vite fait.
Il était donc assez contrarié de voir ses plans chamboulés par un entretien impromptu. Il passa à la hâte un t-shirt, son vieux jean et ses tatanes, et prit le chemin du bureau, armé de son bloc et d'un crayon. Bizarrement, il resta debout. En réalité, il n'avait aucune envie de s'asseoir. Il espérait que ça soit bref, mais le dossier ouvert sur les jambes du docteur lui fit comprendre qu'il y avait un problème. Une question anodine aurait pu attendre leur entretien hebdomadaire. Pourquoi l'avoir convoqué ainsi ?
La suite plongea encore plus le jeune homme dans la perplexité. A son souvenir, il n'avait rien fait de mal, et s'était toujours évertué de se faire le plus petit possible pour éviter d'attirer l'attention sur lui. Qu'avait-on bien pu lui rapporter ?
L'attitude paternaliste d'Aounit avait toujours exaspéré Yanis. L'archétype de la blouse blanche. La formulation même du docteur tentait insidieusement de réduire Yanis à un gosse qui aurait commis une grosse bêtise... et ainsi de stimuler un sentiment de culpabilité, qui n'avait en l'occurrence aucune raison d'être.
Yanis haussa les sourcils en même temps que les épaules, ne voyant pas à quoi le docteur faisait allusion. Il écrivit néanmoins à tout hasard, sur son bloc :
Les gens pouvaient être tellement à cheval sur les principes, parfois.
Le jeune homme fut pris d'une sombre lassitude alors que son escorte le ramenait à sa chambre. Malgré les événements, qui sortaient relativement de l'ordinaire dans la vie de l'asile, il n'était pas plus avancé sur le mystère qui planait ici. Et les mises en garde de Benkacem n'étaient pas pour le rassurer. Si un crime avait lieu ici, mieux valait qu'il soit loin quand cela se produirait. Malgré ses calculs, Yanis était incapable de déterminer qui avait raison et tort dans cette histoire.
Il sortit pensivement l'article de journal de sa poche, et le relut une nouvelle fois pour s'en imprégner. Oui, il devait se tirer de ce panier de crabes. Plus il examinait la situation, plus il était convaincu qu'au final, filer en douce serait le moyen le plus rapide et le moins risqué. S'il prétendait être guéri, le personnel lui demanderait sûrement de parler, et sa couverture serait fichue.
Il décida donc d'organiser sa fuite le lendemain.
En ce sens, la visite chez le docteur Aounit tomba comme un cheveu sur la soupe. Une perte de temps précieux alors qu'il devait étudier le meilleur moyen de se faire la belle, préparer ses affaires. Il n'avait pas prévu de voir les pensionnaires qu'il connaissait avant son départ, pour plusieurs raisons. La première étant que cela paraîtrait suspect, et qu'on ne pouvait jamais faire confiance à un malade pour garder un secret. La deuxième, c'était que Yanis n'en éprouvait tout simplement pas le besoin. Depuis l'apparition de sa mutation, il éprouvait de plus en plus de mal à s'attacher aux choses et aux gens. Il appréciait certains internés, comme Samira et Farid, mais de là à se perdre en effusions... Il devait rentabiliser le temps à sa disposition, et le choix des priorités était vite fait.
Il était donc assez contrarié de voir ses plans chamboulés par un entretien impromptu. Il passa à la hâte un t-shirt, son vieux jean et ses tatanes, et prit le chemin du bureau, armé de son bloc et d'un crayon. Bizarrement, il resta debout. En réalité, il n'avait aucune envie de s'asseoir. Il espérait que ça soit bref, mais le dossier ouvert sur les jambes du docteur lui fit comprendre qu'il y avait un problème. Une question anodine aurait pu attendre leur entretien hebdomadaire. Pourquoi l'avoir convoqué ainsi ?
La suite plongea encore plus le jeune homme dans la perplexité. A son souvenir, il n'avait rien fait de mal, et s'était toujours évertué de se faire le plus petit possible pour éviter d'attirer l'attention sur lui. Qu'avait-on bien pu lui rapporter ?
L'attitude paternaliste d'Aounit avait toujours exaspéré Yanis. L'archétype de la blouse blanche. La formulation même du docteur tentait insidieusement de réduire Yanis à un gosse qui aurait commis une grosse bêtise... et ainsi de stimuler un sentiment de culpabilité, qui n'avait en l'occurrence aucune raison d'être.
Yanis haussa les sourcils en même temps que les épaules, ne voyant pas à quoi le docteur faisait allusion. Il écrivit néanmoins à tout hasard, sur son bloc :
Bonjour ?
Les gens pouvaient être tellement à cheval sur les principes, parfois.
- Le courtier temporelConscience collective
- Age : 113
Date d'inscription : 23/01/2006
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Sam 19 Sep 2009 - 2:19
Après avoir pris connaissance du papier, le praticien porta son stylo à sa bouche et poussa un long soupir mi-dubitatif, mi-exaspéré.
"Oui, bonjour... Je vais être franc avec vous, Yanis. Depuis que vous venez me voir quelque chose me perturbe chez vous. Nous communiquons en bonne intelligence, vous êtes un patient agréable et calme. Je ne peux pas dire que j'ai beaucoup de problèmes avec vous mais..."
Aounit regarda une dernière fois le dossier du jeune homme puis le referma, et le déposa sur la petite table.
"Au bout de toutes ces séances, je me rends bien compte que nous n'avons guère progressé. La thérapie analytique, ce n'est pas une chose qui va de soit. Mon métier est même, dixit Freud en personne, un métier impossible... Mais..."
Croisant les mains et se penchant légèrement en avant comme pour mieux se confier à Yanis, le psychiatre lâcha :
"J'ai l'impression que vous n'y mettez guère du votre. Il y a toujours cette réserve chez vous ou le fait que vous semblez parfaitement normal à l'exception de cette absence de parole et de cette histoire de pouvoirs... Au début, j'ai pris ça pour des résistances classiques à la thérapie... Mais au regard des derniers éléments, je pense..."
Nouvelle pause pour mieux jauger le jeune homme.
"Je pense que vous cachez quelque chose. Et je pense que ce que m'a dit Monsieur BenKacem peut être vrai. Oui, je pense que vous faites plus que jouer à être un mutant. Vous êtes un mutant pour de vrai, n'est ce pas Yanis ?"
Léger rire d'Aounit... Avant de terminer pour de bon :
"Mais ça c'est un piège logique... Syndrome X vous me direz que vous êtes mutant... Mutant, vous me direz que non, ou que oui... Le mieux à faire serait d'assister à une démonstration de vos pouvoirs, Yanis"
"Oui, bonjour... Je vais être franc avec vous, Yanis. Depuis que vous venez me voir quelque chose me perturbe chez vous. Nous communiquons en bonne intelligence, vous êtes un patient agréable et calme. Je ne peux pas dire que j'ai beaucoup de problèmes avec vous mais..."
Aounit regarda une dernière fois le dossier du jeune homme puis le referma, et le déposa sur la petite table.
"Au bout de toutes ces séances, je me rends bien compte que nous n'avons guère progressé. La thérapie analytique, ce n'est pas une chose qui va de soit. Mon métier est même, dixit Freud en personne, un métier impossible... Mais..."
Croisant les mains et se penchant légèrement en avant comme pour mieux se confier à Yanis, le psychiatre lâcha :
"J'ai l'impression que vous n'y mettez guère du votre. Il y a toujours cette réserve chez vous ou le fait que vous semblez parfaitement normal à l'exception de cette absence de parole et de cette histoire de pouvoirs... Au début, j'ai pris ça pour des résistances classiques à la thérapie... Mais au regard des derniers éléments, je pense..."
Nouvelle pause pour mieux jauger le jeune homme.
"Je pense que vous cachez quelque chose. Et je pense que ce que m'a dit Monsieur BenKacem peut être vrai. Oui, je pense que vous faites plus que jouer à être un mutant. Vous êtes un mutant pour de vrai, n'est ce pas Yanis ?"
Léger rire d'Aounit... Avant de terminer pour de bon :
"Mais ça c'est un piège logique... Syndrome X vous me direz que vous êtes mutant... Mutant, vous me direz que non, ou que oui... Le mieux à faire serait d'assister à une démonstration de vos pouvoirs, Yanis"
- InvitéInvité
Re: Hôpital psychiatrique d'Alger
Dim 20 Sep 2009 - 13:55
Alors qu'Aounit le plaçait devant un problème plus que vital pour sa sécurité, Yanis ne put s'empêcher de remarquer son agacement. Comme aurait pu le dire Hassan, Aounit était mat, pour la simple raison que son échec à "soigner" le faux mutant mutant mettait en doute sa propre compétence de thérapeute. Dès lors, il avait dû accueillir avec soulagement l'assertion de Benkacem. C'était la seule façon que le jeune homme avait d'expliquer ce soudain crédit donné à l'agent, qui avait pourtant été publiquement traité comme un malpropre par le directeur lui-même dans l'enceinte du bâtiment.
Cette pensée en amenait une autre, plus inquiétante : Yanis n'avait en rien trahi sa condition durant son entretien avec les agents, pourtant ils l'auraient dénoncé juste après durant le reste de leur visite à l'hôpital... et directement au médecin traitant de Yanis.
Cela ne pouvait signifier que trois choses : les agents étaient eux-mêmes mutants et capables d'identifier leurs congénères. Ils n'avaient eu ensuite qu'à s'enquérir de son médecin attitré.
Les agents pouvaient également n'être venus que pour débusquer Yanis en personne, mais d'où auraient-ils tiré leurs informations ? De plus, ils n'avaient eu aucune réaction quand Samira l'avait présenté. Cette hypothèse posait également le problème du mathémagicien. A moins que Benkacem ne soit un comédien professionnel, ce qui après tout, n'était pas aussi inenvisageable que cela en avait l'air, il avait paru réellement préoccupé par son histoire de criminel mutant... Prenait-il Yanis pour le meurtrier ? Si c'était le cas, le personnel de l'hôpital serait sûrement ravi d'avoir participé à un coup de filet spectaculaire et le livrerait sans chercher à savoir s'il était bien coupable.
Aounit pouvait aussi bluffer, et invoquer le nom de Benkacem pour appuyer son propos.
Quoi qu'il en soit, la demande du docteur ne l'enchantait guère. Mutant ou non, il n'était pas une mule dont on vérifierait la dentition. Si Aounit avait douté de son sexe, l'aurait-il déshabillé de force pour étudier ses parties ?
Le jeune homme caressa un instant l'idée de prendre Aounit en otage pour sortir de l'hôpital, mais il se rappela de la coupure de presse sur le tueur à la hache. Il se savait capable de créer toute sorte d'armes blanches, d'autant plus meurtrières qu'il s'agissait d'extensions réelles de son corps. Il était hors de question d'offrir une occasion en or aux autorités de lui faire porter le chapeau, du moins pas tant qu'il ne saurait pas de quand datait ces crimes et s'il avait un alibi valable.
Yanis opta pour gagner du temps et protéger ses arrières. Il saisit son écritoire et y rédigea un message.
Si Aounit était aussi persuadé que ça qu'il était bien un mutant, vu le pouvoir de suggestion mentale que Yanis avait présenté dans son dossier, il devrait être légèrement moins enthousiaste à l'idée de le voir faire une démonstration, pouvant facilement donner lieu à un suicide, au meurtre d'un tiers, ou à une mutinerie par exemple, mutinerie qui d'après Hassan, couvait déjà dans le bloc des patients sérieux. C'était une carte que le mutant gardait dans sa manche. Il lui fallait déjà voir la réaction de son interlocuteur. Dans tous les cas, il aurait au moins pourvu à un point essentiel.
Cette pensée en amenait une autre, plus inquiétante : Yanis n'avait en rien trahi sa condition durant son entretien avec les agents, pourtant ils l'auraient dénoncé juste après durant le reste de leur visite à l'hôpital... et directement au médecin traitant de Yanis.
Cela ne pouvait signifier que trois choses : les agents étaient eux-mêmes mutants et capables d'identifier leurs congénères. Ils n'avaient eu ensuite qu'à s'enquérir de son médecin attitré.
Les agents pouvaient également n'être venus que pour débusquer Yanis en personne, mais d'où auraient-ils tiré leurs informations ? De plus, ils n'avaient eu aucune réaction quand Samira l'avait présenté. Cette hypothèse posait également le problème du mathémagicien. A moins que Benkacem ne soit un comédien professionnel, ce qui après tout, n'était pas aussi inenvisageable que cela en avait l'air, il avait paru réellement préoccupé par son histoire de criminel mutant... Prenait-il Yanis pour le meurtrier ? Si c'était le cas, le personnel de l'hôpital serait sûrement ravi d'avoir participé à un coup de filet spectaculaire et le livrerait sans chercher à savoir s'il était bien coupable.
Aounit pouvait aussi bluffer, et invoquer le nom de Benkacem pour appuyer son propos.
Quoi qu'il en soit, la demande du docteur ne l'enchantait guère. Mutant ou non, il n'était pas une mule dont on vérifierait la dentition. Si Aounit avait douté de son sexe, l'aurait-il déshabillé de force pour étudier ses parties ?
Le jeune homme caressa un instant l'idée de prendre Aounit en otage pour sortir de l'hôpital, mais il se rappela de la coupure de presse sur le tueur à la hache. Il se savait capable de créer toute sorte d'armes blanches, d'autant plus meurtrières qu'il s'agissait d'extensions réelles de son corps. Il était hors de question d'offrir une occasion en or aux autorités de lui faire porter le chapeau, du moins pas tant qu'il ne saurait pas de quand datait ces crimes et s'il avait un alibi valable.
Yanis opta pour gagner du temps et protéger ses arrières. Il saisit son écritoire et y rédigea un message.
Comme vous le savez, mon pouvoir présente un danger auquel je ne saurais vous exposer. Si vous insistez, je n'y consentirais que si vous rédigez un papier officiel en double exemplaire stipulant clairement que je ne serai pas tenu pour responsable des dommages, humains ou matériels, résultant de cette utilisation contrainte de mes pouvoirs.
Si Aounit était aussi persuadé que ça qu'il était bien un mutant, vu le pouvoir de suggestion mentale que Yanis avait présenté dans son dossier, il devrait être légèrement moins enthousiaste à l'idée de le voir faire une démonstration, pouvant facilement donner lieu à un suicide, au meurtre d'un tiers, ou à une mutinerie par exemple, mutinerie qui d'après Hassan, couvait déjà dans le bloc des patients sérieux. C'était une carte que le mutant gardait dans sa manche. Il lui fallait déjà voir la réaction de son interlocuteur. Dans tous les cas, il aurait au moins pourvu à un point essentiel.
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