Courant comme un dératé, le cœur prêt à se rompre, car plus il approchait de l’endroit ou il allait revoir son bien aimé, plus il savait que ça signifierait la fin… Il avait envie de pleurer, mais il tenait bon, il voulait que ce soit comme à leur premier rendez vous.. tant pis si c’était sans suite, tant pis si il allait souffrir d’un amour perdu pour la deuxième fois de sa vie. Sa consolation, si maigre soit elle, était que Luther n’allait pas mourir sous ses yeux d’un attentat terroriste, lui.
Il arriva enfin, ou, il ya une éternité, il avait laissé derrière lui des étudiants en train de danser. Il entendait, comme un écho, la musique assourdie, et se rappelait avec un frisson empathique qu’il était en t shirt, car sa veste était squattée par camille. Il revoyait Luther, le regard tourné vers le ciel nocturne. Il revoyait les reflets dans sa chevelure blonde, et il se rappelait avoir attendu quelques moments qu’il se retourne, trop timide pour oser l’aborder directement. Il se remémora le strip tease, numéro qui avait valu à son canadien de nombreux sifflements admiratifs… Il eut presque envie de rire à ce souvenir… presque.
A l’époque, il avait laissé un baladeur continuer à jouer sa musique dans l’herbe humide, car Luther n’avait pas voulu l’écouter avec lui. Aujourd’hui, il aurait aimé avoir eut le temps de préparer un discours à lui faire écouter. Parcequ’il était à peu près sur que dès qu’il se mettrait à parler, ce serait le début des moissons lacrymales…
Alors il s’approcha doucement de lui, qui était toujours de dos, et vint l’enlacer, si tendrement et si fortement qu’il pensait pouvoir fusionner avec lui. Son souffle sur la nuque de Luther, ses cheveux noirs se mêlant aux cheveux blonds de son amant, il mit une main sur le cœur du canadien, et dit simplement.
« je t’aime. Je t’aime plus que tout… te retourne pas, j’ai trop de choses à te dire et j’en aurai pas le courage si tu me regardes »…
Il profita du contact de la peau contre la peau, de son nez contre la nuque de luther, de son odeur, pour ne jamais jamais jamais l’oublier.
Puis il puisa dans son pouvoir comme jamais il ne l’avait fait jusqu’alors. Il s’épuiserait au bord de l’évanouissement s’il le fallait, mais il voulait lui faire ce cadeau. Doucement, particule après particule, fil après fil, ne gardant que les filaments lumineux, reconstruisant si le noir était trop présent, ne le gardant que pour les clairs obscurs, il « peignit » des scènes en 3 dimenssions, autour d’eux, prenant de plus en plus de place.
Eux deux se rencontrant, peu de temps après l’arrivée de Jason à l’institut. La nuit où ils se firent des confidences. Leurs escapades, leur fou rire, la tombe de Joshua, devant laquelle il présentait Luther à son amour perdu. Les chatouilles et les pleurs, les petites disputes, pour mieux se réconcilier. Le manque total de pudeur, dans la jungle. Les jours passés auprès de l’un ou de l’autre, quand, au retour d’une mission, ils étaient blessés. Et les nuits, interminables, magiques, ou le seul leitmotiv était l’amour. Faire l’amour, donner de l’amour, reconstruire l’amour… Si il pouvait se vêtir de ce sentiment, il n’aurait pas assez de place dans ses sacs pour emporter toute sa garde robe. Même son cœur, débordant, saignant abondamment pour ce qui se passait en ce moment, semblait ne pas être assez grand, et sur le point d’exploser…
Quand il n’y eut plus de place autour d’eux, il ne s’arrêta pas. Il créa une platteforme sous eux, et, les surélevant, continua à remplir l’espace autour d’eux, au dessus, en dessous, d’images de leur vie à deux, si courte, et si intense. Il « peignit » luther dans chaque détail, pour lui faire comprendre qu’il ne pouvait pas l’oublier… Tout prenait de l'ampleur, pour que, partout ou se portait le regard de Luther, il puisse voir son amour matérialisé. Il pensait, tout de même, que les militaires verraient cela, et sans doutes les gens dans la zone autour du perron, mais ce n'était que des images, même si elles devaient se voir depuis les fenêtre des chambres, car il ne se ménageait pas dans l'energie qu'il dépensait, ses matérialisations dépassant l'étage, à présent. C'était totalement impudique, dans le sens ou il se livrait complètement, c'était destiné à luther, mais il voulait aussi faire comprendre à quiconque en doutait l'intensité de ce qu'il ressentait, et la perte que représentait l'isolement auquel était destiné chaque pensionnaire de l'institut. Eux, des terroristes ? Il espérait répondre à l'accusation par un acte purement créatif et empathique.
« je braverai les interdits. Je te retrouverai, d’une façon ou d’une autre, même si je dois en crever… Je vai crever loin de toi, de toutes façons…. J’en emporterai le maximum avec moi… tous ceux qui se mettront entre toi et moi.. c’est comme ça… chui irlandais, faut pas me faire chier… pas pour toi… »… il le serra un peu plus, au bord de l’évanouissement, car il avait puisé dans toutes ses reserves pour être aussi précis dans ses matérialisations..