Amphithéatre improvisé

[ Salle de Classe]

Rachel avait littéralement pensé pendant tout le cours à ce qu'elle pourrait faire une fois qu'elle en était sortie. Elle pourrait aller prendre une marche? Le footing du matin résonnait malheureusement encore dans ses genoux et si jamais elle tombait sur l'ahuri qu'elle avait rencontré! Elle se dit qu'elle pourrait jouer de la guitare...mais elle n'avait pas envie de tomber sur sa nouvelle collocataire, aussi gentille soit-elle. La jeune femme se dit qu'elle pourrait toujours aller jouer dans le salon...toujours bondé. La cuisine? Ca sent étrange...Le foyer? Avec tous les jeux, il risque aussi d'y avoir trop de monde. Et elle ne voulait pas déranger. Il fallait qu'elle trouve un endroit où l'accoustique sonnait bien et où généralement il n'y a pas beaucoup de personnes.

Le Hangar!

La jeune guitariste monta les marches de l'institut deux à deux pour aller dans sa chambre et attrapper sa guitare à la vitesse de la lumière. Elle se dirigea aussi rapidement vers les portes du hangar où elle passa la tête et demanda, écoutant sa voix faire de l'écho un petit peu:

"Youhou...Ya quelqu'un?"

Rachel sourit et bondit dans le hangar en n'entendant aucune réponse. Elle se dirigea vers une pile de boites et s'y installa. Elle placa sa guitare sur ses cuisses et, un sourire radieux sur le visage, se mit à l'accorder. Dès sa première note juste, elle sentit des petits frissons parcourir son corps. Le son était parfait ici! Rachel soupira et entreprit de jouer une vieille chanson. Bien que la chanson soit chantée par deux hommes, elle commenca à chanter les paroles avec brio. Elle n'était pas chanteuse, mais sa voix juste et douce suivit les paroles comme si elle les avait écrites elle même.

"Saying I love you
Is not the words I want to hear from you
Its not that I want you
Not to say, but if you only knew
How easy it would be to show me how you feel
More than words is all you have to do to make it real
Then you wouldnt have to say that you love me
Cos Id already know"

Ses doigts se promenaient avec une telle facilité sur le manche que Rachel ne devait meme plus regarder le manche de sa guitare. La chanson était très facile à jouer, mais la jeune femme aimait la sonorité des accords simples et des voix.

"What would you do if my heart was torn in two
More than words to show you feel
That your love for me is real
What would you say if I took those words away
Then you couldnt make things new
Just by saying I love you

More than words"

Salle de cours.

Après le cours, Ken avait eu envie de marcher un peu dans l'Institut. Il n'avait pas de nouvelles de Roscart ou des autres membres de son équipe, et n'avait sensiblement rien à faire. Mieux valait donc s'occuper en essayant de mieux connaître cet endroit où il vivait désormais, mais qu'il n'avait pas vraiment visité.

*En plus, ça pourra m'apprendre des choses et me permettre de peut-être revoir certaines personnes. Ca fait un bout de temps que je n'ai pas croisé Juliette ou Noémie, par exemple...*

Il n'était pas très ami avec elles, mais elles faisaient partie de l'équipe des JustiX et il avait vécu une aventure difficile avec elles. Ils étaient donc liés, et il aurait aimé plus les connaître et en apprendre sur leurs vies et leurs personnalités. Ils étaient dans le même groupe, maintenant, et il valait mieux faire des efforts pour que tout se passe bien entre eux.

*Et puis, je suis le leader de l'équipe, finalement...c'est aussi de ma responsabilité de faire en sorte que le moral soit au beau fixe entre nous. Ca serait bien si on se revoyait tous : Juliette, Noémie, Pablo, Roscart, Wood et moi. Les JustiX tous ensemble. Ouaip. Ca serait bien.*

Mais alors qu'il marchait dans l'Institut, le jeune homme entendit une douce voix et des notes de guitare provenant du hangar. Il s'approcha lentement et discrètement, entra et se rendit compte qu'il s'agissait de Rachel, son amie, qui était en train de jouer magnifiquement.
Il restait sans voix devant la douceur des notes sortant de son instrument, mais aussi devant la sensualité de sa voix et la beauté de son visage. Oui. Elle était très belle, ainsi.

Jusqu'à la fin du morceau, il resta ainsi, dans le noir, à l'observer. Même si il n'osait se l'avouer, il trouvait son amie terriblement attirante, et il ne savait où cette pensée pouvait l'emmener. O'Connell appréciait beaucoup Rachel, mais il connaissait aussi les risques de songer à...autre chose. Il savait que ça risquait de briser leur amitié, surtout qu'il n'était encore sûr de rien et que c'étaient peut-être juste ses hormones qui parlaient à ce moment-là.
Il n'en savait encore rien, c'était vrai. Mais il était sûr d'une chose : elle était superbe, et il aimait la regarder.

Néanmoins, quand la musique prit fin, il tapa dans ses mains pour montrer sa présence et pour éviter que Rachel le remarque elle en premier. Il sortit de l'ombre et lui sourit. Toujours habillé de son jeans classique et de son pull beige avec un X dessus, ses yeux étaient plantés sur son amie.

"C'était...c'était superbe. Bravo."

Il ne savait pas dire autre chose. Il était encore sous le choc de la beauté du morceau et de celle qui l'avait interprété, et préférait se taire que dire des choses qu'il risquait de regretter.

Rachel avait chanté la chanson avec un telle amour de la musique, elle avait fermé les yeux et se balancait de droite à gauche doucement, comme si elle était emportée par les notes qu'émettait sa guitare. À chaque fois qu'elle jouait de la guitare, elle avait l'impression de se faire aspirer par l'instrument et ne faire qu'un avec. Chaques petits coups donné sur son instrument pour donner les temps lui donnait une bouffée d'énergie. Comme une brise qui souleve nos cheveux, elle prit une grande respiration, se sentant remplie d'une énergie indispensable.

Lorsqu'elle entendit applaudire, la jeune femme bondit sur les pieds, prête à se sauver. Elle était persuadée que c'était l'ahuri qui l'avait suivit et qui l'espionnait...était-il prêt à aller jusqu'à cela? Rachel sourit et éclata de rire lorsqu'elle reconnut son ami. Elle reprit sa place sur les boites et croisa les jambes. Elle lui fit signe doucement de venir la rejoindre.

"Tu dois penser que je suis parano! J'ai faillit me sauver comme un lapin."

La jeune femme éclata encore une fois de rire et s'essuya les yeux. Quelques larmes avaient coulé sur ses joues avec l'émotion de la chanson et la peur qu'elle avait eu de tomber face à face avec le drogué. Ce qu'il lui faisait peur! Elle fit plusieurs accords sur sa guitare et dit:

"Ca va? Tu as l'air étrange..."

En effet, Rachel trouvait que son ami avait l'air un peu perturbé ou distrait. Elle supposa que le cours de Philo de Cassandre avait fait son effet sur l'esprit de son ami. Elle fit aller ses doigts rapidement sur la guitare dans quelques rifts de jazz très complexes pour ensuite s'exclamer:

"Ne trouves-tu pas que l'accoustique est incroyable dans cette pièce?!"

Elle sourit, son visage illuminé par sa découverte, ma foi, brillante!

"Oui. C'est vrai que c'est impressionnant."

Ken avait un peu de mal à se remettre de l'émotion qui était arrivée en entendant la chanson de Rachel, mais il savait qu'il devait vite se reprendre. Sans ça, elle allait se rendre compte de son trouble, et ce n'était pas quelque chose dont il avait vraiment envie.

*Allez, mec, reprends-toi. Ok, elle sait très bien jouer et elle est très jolie, mais c'est Rachel...ton amie ! Pas la peine de te mettre dans des états pareils aussi rapidement. Reprends-toi. Souris. Sois cool. Et essaye de ne pas attirer la curiosité. Essaye d'être normal. Essaye, ouais.*

Il suivit donc ses conseils et fit un sourire à son amie. Celle-ci continuait de jouer un peu avec sa guitare, et c'était vrai que l'accoustique dans le hangar était très bonne. Ils pourraient peut-être en profiter pour faire quelque chose avec la musique, si ils trouvaient d'autres musiciens dans l'Institut.

"Faudrait que ma mère m'envoie ma guitare...on pourrait peut-être jouer ensemble ici, si ça ne te dérange pas. Je pense que ça peut donner quelque chose d'assez intéressant."

Le jeune homme fit un autre petit sourire avant de s'approcher d'elle. Il avait été amusé qu'elle soit si surprise de sa présence, mais il la connaissait : il avait dû se passer quelque chose pour qu'elle soit aussi troublée par la présence de quelqu'un. Son amie n'avait normalement pas peur des inconnus dans le bâtiment, et il n'aimait pas trop ça.

*Ouais...mais si il y a un problème, Rachel m'en parlera. Elle sait qu'elle peut compter sur moi. Mieux vaut qu'elle vienne d'elle-même si elle a un souci. Je ne veux pas la forcer à dire quelque chose si elle ne le veut pas. En plus, je peux me faire des films...m'enfin, on verra bien.*

Il s'assit à ses côtés et reprit calmement la parole.

"Et ne t'en fais pas, ça va. Je suis juste un peu fatigué par le cours et mes blessures n'ont pas encore toutes cicatrisées...ça me fait parfois un peu souffrir, mais je survivrai. Je suis un coriace, faut croire."

O'Connell montra son pansement et soupira légèrement. Ca allait encore prendre du temps avant qu'il ne puisse à nouveau faire ce qu'il voulait.

"Et toi ? Ca va bien ?"

"Non, elle ne se branche pas. C'est une bonne vieille guitare classique, mais elle en a dans le ventre et elle est résistante. C'est celle que j'ai depuis mes débuts. J'y tiens beaucoup : c'est pour ça que je ne l'ai pas emmenée avec moi. Je ne voulais pas la casser en cas de souci."

Ken sourit légèrement. Il n'avait jamais parlé de son instrument à personne, pas même à sa mère. Rachel était la première à avoir droit à de tels secrets, et il était assez content de pouvoir livrer ce qu'il avait sur le coeur et ce à quoi il tenait à quelqu'un qui pouvait le comprendre.

"Ne t'en fais pas : ça ira. Mon pouvoir n'est pas pratique : il faut qu'on me frappe énormément pour que je puisse y accéder. Donc il faut que je subisse la douleur, encore et encore, pour pouvoir être utile. Je m'y ferai, je pense. Enfin...j'espère."

Il avait un peu peur de devenir taré avec cet aspect de ses capacités, de devenir une sorte de sado masochiste. Il comptait sur ses amis, dont surtout Rachel, pour l'aider si il commençait à devenir ainsi, mais il n'osait pas encore lui parler de ça. Il était encore un peu troublé par le moment magique auquel il avait assisté, et ne pouvait demander de l'aide maintenant...ça lui était impossible.
Et surtout, ses pensées s'envolèrent dès que son amie se confia sur un nouvel élève qui lui avait fait peur et qui lui avait mal parlé. Il avait donc d'autres choses à songer que ses petits soucis.

"Hum."

Ses poings se serrèrent au fil du récit de sa camarade et du trouble qui grandissait en elle. Il sentait qu'elle était peinée et encore sous le choc, et il ne supportait pas ça. Le jeune homme n'avait pas beaucoup d'amis, il n'en avait jamais eu, mais il y avait une chose de sûre sur eux : jamais il ne laisserait quelqu'un leur faire du mal. Ses proches comptaient plus que tout pour lui, et il était prêt à donner sa vie pour eux.
Apprendre que quelqu'un avait donc mal traité une de ses amies l'énervait. Surtout si c'était Rachel.

Néanmoins, il prit une grande inspiration pour se calmer et répondre de la manière la plus calme possible à la jeune femme, qui avait besoin de son ami et pas d'un type bêtement énervé.

"Je ne connais pas ce type, mais je ne l'aime pas à ce que tu me racontes. Je suppose qu'il a fait ça parce qu'il trouve ça drôle et marrant, mais j'avoue que je suis comme toi : je trouve ça stupide. J'aurais voulu être là pour lui fermer sa grande gueule et le remettre à sa place."

*...et quelque chose me dit que ça ne va pas tarder. Un type comme ça ne restera pas longtemps sans s'en prendre une. Il suffit qu'il croise Juliette ou bien...ou bien Robin pour qu'il prenne une bonne trempe. Et pour une fois, ça ne me dérangerait pas trop...ça a l'air d'être un c****** fini, ce mec.*

Il posa doucement sa main sur l'avant-bras de Rachel, voulant ainsi lui apporter un peu de réconfort.

"Si tu veux, je peux aller lui parler et lui rabattre son caquet. Ca ne me dérangerait pas, et j'ai envie de t'aider."

"Mais de rien. Les amis sont là pour ça, non ?"

Ken enlaça aussi la jeune femme dans ses bras, même si il fut encore un peu troublé par une telle proximité entre leurs deux corps. Il appréciait énormément Rachel, elle était sa grande amie, mais il sentait aussi qu'il y avait parfois...quelque chose d'autre. Il ne parvenait pas à le définir, mais ça le mettait dans un état étrange, et il n'aimait pas trop être ainsi. Il appréciait de tout contrôler, pas d'être contrôlé.
Il l'enlaça donc pendant quelques secondes avant de la libérer, lui souriant légèrement.

"Oui, je me doute bien que Rob' pourra t'aider. Il est mon colocataire. On n'est pas encore très proches, mais je sens qu'on va bien s'entendre. C'est un mec bien. Je suis sûr de pouvoir compter en cas de problème."

Il pensait ce qu'il disait. Même si il ne connaissait pas encore parfaitement Hoster, il l'appréciait déjà et espérait vraiment pouvoir devenir ami avec lui. Evidemment, ça ne serait pas comme avec Rachel, mais le jeune homme voulait de plus en plus s'ouvrir aux autres et avoir des proches. Ca lui avait manqué pendant des années, et il était bien décidé à changer ça.

"Que je ne te dis pas tout ?"

Son sourire s'effaça lorsqu'il entendit ça. Bien sûr, il ne se livrait pas totalement à la jeune femme, mais il ne s'était pas attendu à ce qu'elle le découvre. Il avait encore du mal à ouvrir totalement son coeur, et il bloquait souvent pour ce genre de choses. Néanmoins, en voyant le visage de Rachel et sa mine un peu inquiète, il décida de se faire violence et ouvrit lentement la bouche pour lui répondre.

"Hum...je ne sais pas. Mon pouvoir...ce n'est pas quelque chose de simple, tu sais. Je dois accepter d'être frappé presque à mort pour être vraiment utile, et je dois donc accepter la douleur comme une sorte...d'amis. Ce n'est pas simple, surtout que je ne sais pas si je peux être vraiment utile à l'équipe avec ça.
Et puis...et puis, je suis régulièrement fatigué ces temps-ci. Ca doit venir de mes blessures, mais...mais je pense aussi beaucoup à mon père. Et ça ne m'aide pas au moral..."

O'Connell n'avait encore jamais parlé de la disparition de son père à Rachel, et ne savait donc pas vraiment comment faire. Néanmoins, l'émotion qui se dégageait de sa voix et son air triste suffiraient à faire comprendre à son amie qu'il s'était passé un drame, et qu'il était loin d'en être sorti indemne.

Sans le faire exprès, Rachel avait appuyé sur un point sensible chez Ken : il n'avait jamais vraiment pu dire à son père qu'il l'aimait. Mort rapidement d'un cancer incurable même à ce siècle avancé, il était resté durant toute sa maladie à l'hôpital, et son fils n'avait jamais pu le voir. Monsieur O'Connell ne voulait pas que son enfant le voit faible et diminué pour qu'il n'ait pas une mauvaise opinion de lui. Mais malheureusement, il avait plus plongé son fils dans une douleur énorme, vu qu'il n'avait jamais pu faire le deuil de son père et lui dire au revoir.

"Je..."

Il déglutit difficilement. Sa tristesse était visible sur son visage, et ses mains s'étaient mises à trembler sous le coup de l'émotion qui montait en lui.

"Je ne peux appeler mon père...ou lui écrire..."

Il baissa les yeux et soupira lourdement. Ca lui faisait apparemment très mal de parler de ça, même à quelqu'un d'aussi proche que Rachel.

"Il...il est mort..."

Le jeune homme renifla avec force, et c'était assez peu attirant et ça faisait assez négligé, mais il s'en fichait. Toute la douleur d'avoir perdu son père lui revenait en pleine face maintenant, et il devait se concentrer pour ne pas éclater en sanglots. Ca faisait vraiment mal.

"Ca...ça fait déjà quatre ans..."

Rapidement, il passa la manche de son pull sur ses yeux humides pour en chasser les larmes naissantes. Le mutant semblait vraiment très faible et détruit à ce moment-là, et ça voulait dire qu'il laissait sortir toute cette souffrance qu'il avait au fond de lui. Il tentait encore de la cacher dans son coeur, mais ça avait fait son temps : il devait maintenant pleurer son père. Quoique ça lui coûte.

Rachel fut très rapidement mal à l'aise. Elle ne savait pas du tout...Elle ne pensait pas qu'il réagirait comme il venait de le faire. Elle n'était pas au courant que le papa de Ken était décédé...Comment aurait pu? Mais, maintenant qu'elle le savait, cela changeait-il ce qu'elle venait de lui dire? Il peut toujours lui parler en prière. Son père est toujours à quelque part. Mais ce n'était pas le moment de parler. C'était le moment d'écouter. La jeune femme posa sa main sur celle de Ken et la serra doucement, pour le consoler graduellement. Si il ne voulait pas qu'elle le touche, il pourrait se défaire rapidement et elle comprendrait. Elle avala difficilement sa salive et murmura:

"Je suis désolée, Ken..."

La guitariste déposa rapidement sa guitare sur le sol et se rapprocha de Ken pour lui offrir un épaule s'il le désirait. Ayant eu un grand frère, Rachel savait à peu près ce qu'il fallait faire quand un homme avait de la peine. Lorsque ses grands-parents étaient décédés, Andrew avait eu beaucoup plus de peine qu'elle. Il les avait connu plus longtemps. Elle ne pouvait imaginer la douleur qu'était la perte d'un père.

Sa main toujours sur celle de son ami, elle posa très légèrement sa tempe sur l'épaule de Ken pour lui montrer son support. Elle se douta que Ken ne pleurait pas parce qu'il ne voulait pas lui montrer ses larmes. Elle comprenait, mais puisqu'ils étaient juste tout les deux, elle voulait aussi lui montrer qu'il n'y avait rien de mal à pleurer de temps en temps. Elle lui chuchota:

"Pleurer n'est pas un signe de faiblesse...au contraire. Si jamais tu en sens le besoin, je serai là!"

Rachel serra un peu plus fort la main de Ken.

"Non."

La voix de Ken fut étonnamment froide lorsqu'il parla. Il releva des yeux rougis par les larmes vers son amie, inspira lourdement et reprit lentement la parole, mais l'émotion n'y était plus. Elle semblait être refoulée à l'intérieur de lui.

"C'est gentil de proposer, mais ce n'est pas encore l'heure pour pleurer et faire mon deuil."

Il renifla encore une fois et passa sa manche sur ses yeux pour en faire partir les dernières larmes. Il disait vrai. Il n'était pas encore prêt pour parler de cette tragédie et de ce qu'il vivait. Grâce à son arrivée à l'Institut et grâce à Rachel, le jeune homme était parvenu à plus s'ouvrir et à accepter ses sentiments, ses émotions. Mais il n'arrivait pas encore à aller aussi loin. Ca faisait trop mal.

Evidemment, ce n'était pas une bonne attitude car il fallait plutôt essayer de se libérer de tout ça pour continuer à vivre, mais comment le blâmer ? Il avait mal, il avait perdu son père et cet événement l'avait conduit à se refermer totalement sur lui-même. Ca semblait normal qu'il ne veuille pas rouvrir cette porte où il était sûr d'être à nouveau triste et désespéré.
Même si il faisait confiance à Rachel, il ne pouvait pas encore se laisser aller autant. Il faudrait encore du temps pour ça. Du temps, et de la souffrance.

"Mais merci quand même. Ca me touche."

Le mutant fit un petit sourire triste avant de se relever et de mettre ses cheveux qui commençaient vraiment à pousser en arrière. Il ne savait pas quoi dire ou quoi faire. Il n'avait pas l'habitude de se laisser aller ainsi devant des gens, et n'avait donc aucune idée de la conduite à adopter maintenant. Ca donnait alors une situation étrange, où on sentait qu'il avait envie de changer de sujet mais qu'en même temps il était heureux d'avoir pu légèrement aborder le sujet avec quelqu'un.

"Euh...je ne sais pas quoi dire..."

Il se passa la main dans les cheveux, espérant une réaction et une parole de Rachel pour relancer une discussion et stopper le silence pesant qui était apparu depuis que lui avait parlé pour couper court à ses secrets.

Ken fut content de voir que son amie ne lui tenait pas rigueur de ne pas vouloir parler, et fut assez heureux qu'elle se mette à jouer. Ca permettait de changer de sujet et donc d'éviter de remettre sur le tapis l'histoire de son père décédé...il préférait ne pas y penser et garder sa douleur au fond de lui pour le moment.

"Oui, je connais."

Il avait recueillit plusieurs vieux albums de son grand-père dans le grenier familial, et avait ainsi pu s'exercer sur de telles chansons, même si c'était parfois difficile vu que tout n'était pas toujours en bon état. Mais il avait quand même en mémoire les paroles de cette chanson, et sourit légèrement quand Rachel commença à jouer.

"Ouais, je vais t'aider."

Le jeune homme lui fit un petit clin d'oeil avant de prendre une grande insipiration. Ca ne faisait que la deuxième fois qu'il allait chanter devant quelqu'un, et encore une fois c'était devant son amie. Même si il stressait un peu moins, son coeur se mit quand même à battre un peu plus qu'auparavant.

"This thing called love I just can't handle it
this thing called love I must get round to it
I ain't ready
Crazy little thing called love
This (This Thing) called love
(Called Love)
It cries (Like a baby)
In a cradle all night
It swings (Woo Woo)
It jives (Woo Woo)
It shakes all over like a jelly fish,
I kinda like it
Crazy little thing called love

There goes my baby
She knows how to Rock n' roll
She drives me crazy
She gives me hot and cold fever
Then she leaves me in a cool cool sweat

I gotta be cool relax, get hip
Get on my track's
Take a back seat, hitch-hike
And take a long ride on my motor bike
Until I'm ready
Crazy little thing called love

I gotta be cool relax, get hip
Get on my track's
Take a back seat, hitch-hike
And take a long ride on my motor bike
Until I'm ready (Ready Freddie)
Crazy little thing called love

This thing called love I just can't handle it
this thing called love I must get round to it
I ain't ready
Crazy little thing called love
Crazy little thing called love
Crazy little thing called love
Crazy little thing called love
Crazy little thing called love
Crazy little thing called love
Crazy little thing called love
Crazy little thing called love"

Après ça, il reprit lentement sa respiration. Suivre Freddie Mercury n'était pas simple, et il n'avait pas été étincellant. Mais, en tout cas, il avait réussi à tenir le rythme, et c'était déjà pas mal. Il se tourna vers Rachel et lui sourit légèrement. A ce moment-là, ses soucis s'étaient envolés, et ça lui faisait du bien.

Puisque les notes étaient souvent beaucoup trop graves pour elle, elle se contenta de faire les choeurs tout en jouant. Rachel connaissait la chanson par coeur et aurait pu la jouer en dormant. Elle regardait son ami alors qu'il chantait les paroles...beaucoup mieux que son frère! Elle se mit à rire et, dans un sourire montrant ses dents éclatantes, entama sa partie favorite de la chanson: Le solo. Sur sa petite guitare jazz accoustique, il semblait plutôt fade, mais elle ne s'en faisait pas. Dans la dernière partie, juste après le solo, elle se mit à taper des mains comme dans l'original. Jusqu'à ce qu'elle reprenne ses accords familiers et que la chanson se termine. La jeune femme applaudit vivement et se leva avec tout autant d'énergie:

"Bravo! Quel brio! Mesdames et Messieurs c'était l'extraordinaire, le sublime, Kenneth O'Connel dans son interprétation de A Crazy Little Thing Called Love! On dit de vous que vous êtes la réincarnation même de Freddie Mercury! Quel effet cela vous fait-il?""

Rachel applaudit de plus en plus fort et se mit à sauter sur place avec énergie. Elle revenait en arrière de quelques années lorsque son frère et elle était très proche et s'amusaient sans cesse après leurs spectacles improvisés. Si Ken embarquait dans son jeu, la jeune guitariste savait qu'elle ne serait que plus proche de son ami. Elle ajouta:

"Accompagné de la géniale Mary-Rachael McCallum. Qui mérite une bonne main d'applaudissement!"

Elle déposa sa guitare où elle était assise et se placa devant son ami. Elle éclata de rire et chanta:

"There goes your baby
She knows how to Rock n' roll
She drives you crazy
She gives you hot and cold fever
Then leaves you in a cool cool sweat"

Moqueusement, Rachel entreprit une danse ingénieuse, mimant les paroles de la chanson qu'ils venaient tout juste de jouer. À la facon des fans des années 80, elle s'exclama, espèrant sincèrement que Ken jouerait dans son jeu avec elle:

"Épouses moi Freddie!"

"Quel effet ça me fait d'être sa réincarnation ?"

Ken sourit. Comme Rachel, il s'était levé et appréciait l'ambiance qui commençait à se mettre en place. Il avait bien aimé chanter avec elle, et ça l'avait un peu déstressé. Il parvenait un peu à s'évader avec la musique, et il était heureux de pouvoir partager ça avec son amie.

"J'espère juste avoir de meilleures dents, voyez-vous. Le reste...le reste, je le vis assez bien."

Il rit de sa petite blague avant d'applaudir quand Rachel parla de ses propres prouesses. Il était vrai qu'elle s'en était très bien sortie, et il tapa beaucoup dans ses mains pour qu'elle sache qu'il appréciait tout ce qu'elle venait de faire.

"Tu es très douée à la guitare, tu sais ? Sûrement plus que moi. Je devrais plus m'entraîner, je pense, mais bon...c'était parfois dur, à la maison. Personne savait que je jouais. Faudra peut-être que tu m'aides quand ma mère m'aura envoyé mon propre instrument !"

Le jeune homme sourit et l'applaudit encore quand elle commença à danser et à chanter. Il aimait la joie de vivre de son amie, il aimait sa folie si sympathique et si joyeuse. Être auprès d'elle lui faisait du bien et l'apaisait. Il n'avait que trop peu ressenti ce genre de choses pour pouvoir y goûter avec avidité.

"T'épouser ?"

Il récupéra une longue tige dans le hangar et commença à tourner autour d'elle, jouant avec sa canne improvisée comme Freddie Mercury le faisait avec son immense micro. Il sourit légèrement. Il aimait faire ça.

"Hum...ça risque d'être dur."

Son sourire s'agrandit.

"Je suis la réincarnation de Freddie, et je dois donc m'en tenir à l'original. Et, vois-tu..."

Il était aux bords du rire quand il prononça les paroles suivantes.

"Vois-tu, je crois que tu avais un peu trop de volume à la poitrine et pas assez à l'entrejambe pour lui...donc ça ne va pas être possible. Je ne peux pas faire ça à Freddie. Il m'en voudrait trop."

O'Connell explosa alors à rire, n'y pouvant plus du tout.

"Je le trouvais tellement mignon avec ses dents"

Rachel pouffa de rire et s'avanca vers son ami.

"Ca vient avec la pratique et la passion. Quand tu es passionné pour quelque chose, c'est tellement mieux pour l'apprendre! J'adore la guitare! Si je n'étais pas ici, je serais dans un groupe de rock n' roll et je serais la meilleure guitariste au monde!"

Elle fit un tour sur elle-même lorsqu'elle dit sa dernière phrase. Elle écouta Ken avec un sourire. Elle essaya d'être sérieuse un moment, essayant de reprendre son calme. Mais en vain...Rachel éclata de rire à son tour lorsqu'il fit son dernier petit commentaire. Elle n'était pas assez poilu! Trop de poitrine...Elle baissa la tête et observa ses seins qu'elle trouvait pourtant assez petits. Elle secoua vivement la tête et dit:

"Ah! Mais tu te trompes!"

La jeune femme arrêta de rire et le visage étrangement sérieux, elle avanca lentement vers Ken. Dans une démarche de félin, un regard provocateur, elle s'approcha de son ami. À un certain moment, elle retint un sourire et continua son manège. Une fois juste devant Ken, à quelques centimètres de lui, elle fit glisser sa main droit derrière la nuque de son ami. Rachel fit la meme chose de sa main gauche et approcha ses lèvres des oreilles de Ken où elle murmura:

"Apprends ton histoire...Freddie était bisexuel."

Rachel retint un rire cette fois et recula doucement sa tête. Elle plongea son regard dans celui de Ken et sourit avec amusement. Elle ouvrit la bouche pour parler, mais n'eut pas le temps avant d'être interrompue par un message de Olivier:

Olivier Fleury a écrit:"New-GenèsiX, je veux ue tout le monde vienne dans mon bureau maintenant, Robin a besoin de vous."

Rachel fronca les sourcils.

"Rob a besoin d'aide?..."

La jeune femme haussa les épaules et, toujours dans la meme position, embrassa Ken sur la joue. Elle lui sourit et murmura "Ça pique!" avant de courir prendre sa guitare.

"Ce n'est surement rien! On se voit plus tard!"

[ Direction le bureau de Olivier]

"Bisexuel ? J'en savais rien."

Ken était totalement sous le charme de la petite démonstration de son amie. Jamais il ne l'avait trouvée aussi attirante et aussi fun, et il ne savait pas du tout comment réagir. D'un côté, il aurait voulu rire avec elle de ce qu'elle faisait, mais, en même temps, il appréciait son comportement et ça le troublait quelque peu. Il n'avait aucune idée de quoi faire maintenant.

"On peut au moins être sûr qu'il testait tout. Ca a toujours été un homme d'exception."

Il tentait de meubler pour cacher son trouble et le fait qu'il déglutissait assez difficilement. La jeune femme à ses côtés était superbe, et ses mains commençaient légèrement à troubler face à elle. Son ressenti prenait lentement possession de lui, et il ne savait pas du tout ce qu'il allait se passer maintenant.

Heureusement, ou malheureusement pour certains, le communicateur de son amie se mit à parler, et c'était Olivier Fleury qui ordonnait aux membres de l'équipe des New GenesiX de le rejoindre dans son bureau. Apparemment, Robin, son colocataire, avait un souci.

A cette nouvelle, le trouble du jeune homme se changea en inquiétude pour son nouvel ami, et il leva des yeux interrogateurs vers sa camarade qui lui annonçait qu'elle devait partir rejoindre ses collègues.

"J'espère que Robin n'a pas de problème. Si vous avez un gros souci, appelez-moi, je réunirai les JustiX. Rob' est mon coloc'. Il sait qu'il peut compter sur moi, rappelle-le lui."

Il lui fit un petit sourire avant de la voir approcher. Il retint son souffle quand elle l'embrassa sur la joue, et reprit la parole d'une voix très douce après cela.

"Freddie avait de sales dents, j'ai la sale manie de ne pas aimer me raser. Les stars ne sont jamais parfaites !"

O'Connell lui fit un petit signe de main en la regardant partir, et soupira lourdement après. Il avait à deux doigts de perdre le contrôle, et il ne savait pas où ça aurait pu le mener. Et il n'aimait pas ça. Il détestait même.

"Allez...ressaisis-toi, mec."

S'en voulant d'avoir ressenti une telle attraction pour Rachel, il se passa la main dans les cheveux et se dirigea vers la porte, voulant se ballader dans l'Institut et essayer d'oublier ces quelques instants où il aurait pu faire une très grosse bêtise.

Ailleurs.