[XRS&LTX 6.1]Dans un accès de flemme

Lucas n’eut pas vraiment le temps de se rendre compte de quoi que ce soit : Il avait reçu une claque tonitruante avant de se retourner, dos à Annaelle, et ne s’attendait tellement pas à celle-ci qu’il mit un court moment avant de se rendre compte de ce qui s’était passé : sa joue était non seulement en feu à cause de la gêne qui le brulait intérieurement, mais également à cause de la main assassine de la demoiselle qui laisserait certainement une marque rouge sur la joue du suédois. Elle s’était emparée du pull qu’il lui tendait et s’en était couverte, redevenant un peu plus décente, devant tout ce monde…

Mais le mutant aux yeux gris n’eut pas vraiment le temps de voir le résultat de son don. En se retournant, il n’aperçut seulement qu’une paire de fesse qui s’enfuyait en courant dans les escaliers, à la suite d’une Géorgia soudaine morose qui avait quitté la pièce. Il inspira un bon coup pendant qu’Adam se réjouissait de s’être recomposé grâce à l’intervention de Nan, et sans doute aussi à celle de Rachel, et dans une moindre mesure, de Lucas.

Mais l’heure du repos n’était pas encore arrivée. À peine eut-il fini d’expirer qu’un BOUM retentissant parvint des escaliers, suivi d’un cri dont la provenance ne faisait aucun doute : Annaelle n’était décidément pas dans son jour de chance.

Lucas crispa un peu le visage dans un rictus douloureux, et décida de s’enquérir de l’état de la demoiselle, qui déjà poursuivait sa course jusqu’à sa chambre. Il se tourna donc vers le reste de la pièce, et l’air embêté, affirma d’un ton peu assuré :

« Heu… Je crois que je vais aller voir ce qui se passe… »

Puis, à l’attention de Rachel, et éventuellement Ken, qui avait été présent également lors de l’épisode fantomesque, il ajouta avec un sourire complice :

« Bon boulot, les X-terminateurs ! »

Et en un clin d’œil, il quitta la pièce pour s’engouffrer dans une course menant aux escaliers… et à l’antre d’Annaelle.

Chambre d'Annaelle.

Jardin

Leurré par la majesté de la façade, Milan avait tenter d'imaginer à quoi ressemblait le salon d'une telle bâtisse. Sans doute des meubles anciens, regroupés autour d'une cheminée couverte de dorures, avec une décoration noble et recherchée, réalisée par un maître ébéniste. Il s'était donc trompé du tout au tout, puisque le mot qui lui vint le premier à l'esprit en voyant la pièce était : confortable. Ou chaleureuse. Agréable, dans tous les cas.

Cassandre l'avait laissé une fois devant la porte, déjà ouverte, avant de partir vaquer à ses occupations. Son premier coup d'oeil, réflexe professionnel, fut pour le plafond, mais pas de poutres apparentes. Le second avait pour but de détailler les gens présents. La seule personne qu'il connaissait était debout accoudée au canapé. Il posa ses valises près de l'entrée, suffisamment sur le côté pour qu'un jeune pressé ne se prenne pas les pieds dedans, mais conserva son sac en bandoulière.

- Bonjour à tous !

Puis il s'avança vers Adam en tendant la main, toujours souriant. Ce n'était pas une démarche publicitaire élaborée du fait de l'importance du premier regard dans l'établissement d'une relation : Milan n'avait que rarement besoin de faire des efforts pour paraître de bonne humeur. C'était assez naturel. D'autant plus qu'en cet instant, il était passablement excité, même s'il faisait tout pour ne pas trop le montrer.

- Monsieur Zachary ? Je suis Milan Ivanovic, je ne sais pas si Cassandre vous a parlé de moi. J'arrive de Seattle, je suis un peu en retard, je suis désolé.

Il hésita alors quelques secondes sur la manière de poursuivre. Devait-il demander un entretien en tête à tête ? Après tout, les éléments dont il voulait parler n'étaient pas exactement publics, et peut-être fallait-il faire preuve d'un excès de prudence ? Il se ravisa finalement, car après tout, les jeunes gens présents autour d'eux étaient également des mutants. Et c'était aussi pour eux qu'il était venu. Tout juste baissa-t-il légèrement la voix, mais c'était justifiable par la diminution de la distance entre lui et son interlocuteur privilégié.

- J'ai découvert des documents dont on m'a dit que vous pourriez comprendre le sens. Pour moi, c'est du charabia ! Enfin, je comprends les mots, mais mis ensemble, ça me dépasse. Alors comme vous êtes calé en technologie mutante, j'imagine que ça pourrait vous intéresser.

Milan s'arrêta, hésitant à évoquer l'interview à laquelle il avait assisté l'heure précédente, mais préféra éviter. Dans un premier temps, du moins. Il était certain que l'histoire ferait très rapidement le tour de l'Institut, comme à chaque fois qu'il était question de passage à la télé, et ce quelle que soit la communauté. Pas besoin d'être le coupable de la première couche.

D'autant que ladite interview n'avait donné que peu d'informations sur le sens de l'humour de Mr Zachary. Inutile de tenter le diable.

Viconia flottait actuellement entre trois camaïeux de couleur, leur interprétation en pastel et leur mise en situation dans un rendu qui rockerait et lui assurerait un passage dans l’année supérieure avec les holas de professeurs. Il s’avérait qu’entre temps, Adam avait eut une réaction anaphylactique, et que cela avait été l’apocalypse.

Lorsque la finnoise émergea, elle se frictionna le nez afin que les vapeurs de térébenthine la réveillent et fit le point sur la situation environnante. La seule conclusion qui lui vint à l’esprit fut que c’était confus… Rudement confus.

De manière concomitante, Jeremiah sauta sur Georgia de manière particulièrement agressive et celle-ci fut à deux doigts de faire un malaise.
Viconia n’eut que le temps de se décaler en sautillant (car elle se trouvait sur le chemin de la frénésie spongieforme de Rachel), avant que la mitalienne ne sorte en trombe du salon.

Dans une tirade finnoise invoquant les dieux nordiques dans des positions peu catholiques, la rouquine se sentit soudain investie d’un sentiment abrupto-maternaliste.
Après tout, on ne laissait pas la cousine envahissante vaciller seule lors d’un malaise vagal. On ne la laissait pas perdre un rein sans rien faire, ou au moins sans aller vérifier si le cousin Franck était compatible.

Sur l’entrée d’un newbie inconnu dans le salon, Viconia eut un hochement de tête de salut envers le nouveau venu, avala une chips odorante, frappa Jeremiah sur la tête avec le magasine une fois de plus « Contre-représailles ! », et sortit dans un torrent de cheveux roux en vrac.

Cuisine

Rachel tourna la tête vers Ken à qui elle envoya un regard suspect. La première chose qu'il avait dit en entrant dans le salon ET en voyant Annaelle nue c'était Wow. Elle arqua les sourcils.

"Je peux savoir ce que tu qualifiais de "Wow", Kenneth O'Connell!?"

N'attendant pas une réponse, car il aurait à s'expliquer la dessus, Rachel continua sa besogne, ne prêtant pas trop attention à ce qui se passait entre Jeremiah et Georgia, ni Lucas et Annaelle. Dans le fond, Annaelle avait quitté le salon et c'était pour le meilleur! La jeune femme envoya un sourire amusée à Lucas lorsque ce dernier, avant de quitter à son tour, mentionna le petit nom qu'ils s'étaient donné lors de la chasse aux fantômes dans sa chambre. Continuant à éponger, elle ne releva la tête que lorsqu'Adam prit la parole et annonça que tout allait bien. Rachel continuait à frotter le sol, toutefois, pour être certaine que tout était bien sec. Elle leva les yeux vers Nan à qui elle renvoya le regard héroique suivit d'un sourire éclatant.

"On a bien réagit, du coup, tout le monde est parti!"

Viconia quittait le salon à son tour. Il ne restait plus que les hommes: Ken "Wow" O'Connell, Nan', Jeremiah et Adam lui même. Mais ce n'était pas pour déplaire à Rachel! Nan' demanda à Adam ce qui le tracassait et Rachel ne put s'empêcher de soupirer et rouler les yeux. Elle se laissa tomber sur les fesses, toujours sur le sol et arqua les sourcils en direction de son ami Algonquin.

"Tout ne va pas bien, Nan'. M'sieur Adam vient de se faire asperger! À moins que...Est-ce que quelque chose d'autre ne va pas?"

Puis, pour inverser la tendance des gens qui quittaient le salon, un nouvel arrivant fit son entrée dans le salon. Rachel, assise sur le plancher, veste trempée en main, cheveux décoiffés par l'action, le regarda d'un air surpris. Elle le suivit des yeux et essaya de trouver dans sa petite mémoire si elle l'avait déjà vu à quelque part. Non. Rien. Pas de cloche, donc elle ne pouvait tourner la page. Elle se leva, les pantalons et le t-shirt un peu mouillé et se plaça un peu à l'écart pour regarder l'homme qui venait d'entrer. Elle s'approcha de Ken lentement ne quittant pas le nouveau venu des yeux et murmura, à l'intention de son copain:

"Hum. Wow..."

Elle n'ajouta rien, laissant la parole et le silence à Milan. Ce dernier se présenta avec bonne humeur, ce qui ne fit qu'accentuer la bonne humeur de Rachel. Son visage s'illumina et elle envoya un sourire radieux à l'homme. Elle écouta sans gêne ce que Milan disait au professeur Zachary, mais ne put s'empêcher de lancer:

"Oh! De quoi s'agit-il? C'est top secret?!"

Grimaçant tout en se frottant le crâne là où le magazine l'avait heurté, Jeremiah suivit des yeux la rouquine qui emboîtait le pas à Georgia. Aurait-il réussi à vaincre la terrible serial kisseuse de l'Institut ? Il faut dire qu'il avait déjà augmenté ses compétences en la matière : le boss de sa première quête était elle aussi du type succube disjonctée. De toute façon, un peu d'xp, c'était toujours bon à prendre ! Maintenant que le terrain était un peu plus calme, le geek put se tourner vers la scène principale de la pièce : le professeur avait semble-t-il retrouvé ses jambes et le jeune homme fut à la fois content de ne pas avoir à revoir cet espèce d'amalgame dégueulasse et déçu d'avoir raté un bout du film. Non, pas un film, se corrigea-t-il mentalement. La ré-a-li-té.

Le salon s'était un vidé, on respirait mieux, mais comme s'ils avaient deviné que de l'espace vital était de nouveau à vendre, deux nouveaux venus firent leur entrée à quelques instants d'intervalle. L'un n'avait rien de mystérieux pour le geek (SuperKen était dans la place, la cavalerie arrivait toujours en retard, c'était bien connu), l'autre par contre attisa sa curiosité. Visiblement, ce n'était pas un élève, il était trop âgé pour ça. Roulant pour se positionner à genou par terre, le jeune homme s'appuya sur l'accoudoir le plus éloigné des deux adultes, les observant sans faire preuve d'une quelconque discrétion. Enfin quelque chose d'intéressant, décida-t-il sur le champs en oubliant instantanément que Georgia avait failli l'embrasser, qu'il avait vu Annaëlle nue que le directeur s'était retrouvé suspendu au plafond, les jambes désagrégées.

"Technologie mutante ?? Cool..."

Ravi, il sourit à Rachel qui s'était aussi immiscé dans la conversation.

Ken subit les foudres de sa petite-amie et comprit de suite que se faire pardonner allait être très, très difficile et digne des plus grandes fresques épiques. Il la fixa quelques secondes, calculant dans ses pensées les probabilités pour que les mots "habituels" d'excuse fonctionnent, et sut rapidement que cette fois-ci, ça ne serait pas comme d'habitude. Il lui fit un léger sourire crispé et commença à se défendre.

"Mais...euh...ce n'est pas du tout ce que tu crois. J'ai été impress...non, stupéfait par ce qui arrivait et j'ai pas su quoi dire d'autre. Surtout, je pensais pas que son pouvoir pouvait faire ça, ou la rendre comme ça, ou plutôt...enfin, qu'elle soit comme ça, en fait. Pas comme ça dans le sens de son corps, hein, mais plutôt qu'elle soit ici, comme ça. Je euh...j'ai dis ça juste parce que je savais pas quoi dire d'autre, et euh disons que ça a semblé à mon inconscient la seule chose à dire. Non pas que ça voulait dire quelque chose sur mon inconscient, mais...enfin, je sais pas ce que dit mon inconscient, c'est toujours quelque chose de spécial et de mystérieux, mais je sais ce qu'il voulait pas dire. Et ici, il voulait pas dire "wow" pour Annaelle, mais plutôt...pour Annaelle. Enfin, la situation d'Annaelle. Comment elle était là...enfin, pas "comment" pour son statut mais "pourquoi elle était arrivé". C'est...enfin, c'est pour ça que j'ai dis ça, ça m'a choqué. Dans le sens surpris. Pas dans le sens impressionné. Même si ça impressionne. Mais ça surprend plus et ça fait rien d'autre."

Et dans la catégorie excuse la plus minable et la moins compréhensible, Kenneth O'Connell obtint sans mal la médaille d'or, l'oscar, le césar et la coupe du monde. Il fixa pendant quelques secondes encore Rachel, soupira, leva ses yeux de cocker vers elle et haussa un peu les épaules.

"J'suis nul. J'ai été surpris, c'est tout. Rien d'autre, promis."

Il espérait que ça suffirait pour arranger son cas, mais en doutait un peu, surtout suite à l'entrée d'un nouveau - sûrement un professeur.

*Paolo est parti...ça faisait un fantasme masculin en moins. Et voilà qu'un autre arrive ! Il faudrait en parler aux autres garçons et faire une pétition pour assurer le respect de l'égalité entre tous et de la concurrence loyale. Avec des types comme ça, c'est pas possible de bien s'en sortir avec les filles et de pas avoir de complexe ! Bon, ok, y a Vadim...mais bon, y a aussi lui, maintenant ! C'est pas juste pour nous !*

Gardant néanmoins ses pensées révolutionnaires pour lui, Fury se rapprocha du nouveau et lui sourit poliment, le saluant avec une sympathie qu'il espérait crédible - et qui l'était, au fond.

"Bonjour."

Beaucoup d'autres avaient commencé à partir de la pièce, laissant à une poignée à peine la charge de ranger et de "survivre" à l'événement. Il salua d'un geste Jeremiah qu'il commençait à apprécier et s'intéressa aux paroles de ce Milan Ivanovic, soudainement intéressé par quelque chose d'essentiel chez lui.

"C'est en lien avec Genosha ou bien avec ce que les humains ont fait faire aux mutants ? Ou bien est-ce une technologie créée par des mutants pour les mutants ? Je pense qu'on pourrait facilement révolutionner pas mal de secteurs rien qu'en analysant les capacités de certains d'entre nous pour les reproduire de façon artificielle. Certains parlent aux ordinateurs, d'autres les contrôlent...des logiciels et systèmes dérivés pourraient changer véritablement la face du monde mais feraient surgir pas mal de menaces."

Ken se rendit alors compte qu'il parlait trop et tout seul, mais au lieu de rougir et de se cacher décida de s'assumer. Il se tourna alors vers Adam.

"Monsieur Zachary, je m'excuse de m'immiscer ainsi, mais je pense qu'il faudrait peut-être étudier ce genre de choses...et de dérives. Genosha devient peu à peu quelque chose qui compte dans le monde, et on vous a même proposé d'être une sorte d'ambassadeur là-bas, pour les Etats-Unis. Ne serait-il pas possible de lancer une sorte de "communauté scientifique" basée à Genosha et travaillant à la fois pour le pays et pour le monde ? Ca prouverait que les mutants ont une influence bénéfique et productive. Après, ça n'est qu'une idée, mais peut-être pourrions-nous la creuser...ou faire en sorte que ça n'aille jamais plus loin."

O'Connell avait encore en tête les agissements de Hippias à Genosha et surtout ses monstres mécaniques et robotiques, mêlant la chair humaine au métal. Il en frissonnait encore ; pour lui, la science était quelque chose de bon, de beau et d'évolution bénéfique. Il savait que son idée pouvait mener à beaucoup de bonnes choses, mais il était bien conscient des dérives possibles. C'était pour ça qu'il en parlait ainsi à Adam : il avait confiance en son jugement et ses connaissances du monde. Même s'il avait d'autres choses à penser - entre autres accueillir Milan - le professeur pourrait maintenant le rassurer ou le stopper dans ses entreprises.

Annaëlle avait été évacuée, avec toute la grâce qui la caractérisait... Suivie de Lucas. Suivi de Viconia, et Georgia... Est-ce qu'il avait à ce point fait peur aux élèves ? Ou bien est-ce que la vision d'un homme sans jambes était à ce point peu ragoûtante ?

Adam s'apprêtait à répondre à Nan, quand un homme fit irruption dans la pièce, et lui sortit une histoire de but en blanc absolument incompréhensible qui ne manqua pas de lui faire apparaître un haussement de sourcils d'étonnement, une ride de perplexité, et un énorme point d'interrogation au dessus de la tête.

"Euh... Bonjour... Je... Je ne crois pas que vous soyez en retard, enfin... Nous n'avions pas rendez-vous. Enfin. Pas que je sache. Même si Cassandre a toujours la manie d'organiser les choses les plus impromptues. Enfin... Bienvenue à l'institut."

Et voilà le grand retour de la théorie du complot, et rien de tel pour ferrer quelques élèves. Pour le coup, la discrétion n'était pas assurée. Et planquer le nouveau venu sous le tapis serait contre-productif. D'autant que le tapis était probablement humide, ce qui ne manquait pas de provoquer la révulsion d'Adam.

Tout en restant soigneusement loin du tapis, Adam indiqua à Milan un fauteuil

"Eh bien installez-vous alors... De quel genre de technologie mutante parlons-nous exactement ? Parce que ces choses là n'existent habituellement que dans les fantasme de la sentinelle... Qu'est-ce qui vous a mis dans tous vos états ?"

Il ajouta ensuite.

"Oh, et ne vous en faites pas pour les élèves... Ils en ont déjà vu de toutes les couleurs."

Et d'ailleurs en parlant de couleur, voilà Ken qui y allait de sa diatribe, ce qui lui valut à lui aussi, un haussement de sourcil interrogateur. L'esprit de Ken avait accès à des méandres et à des volutes qu'un artiste abstrait n'aurait pas renié.

"Allons Ken... Laissons-le parler, et voyons voir ce qu'il a à dire."

-Kwé? répondit machinalement l'Algonquin à l'Israélien qui arrivait ainsi, tel un cheveu loquace sur une soupe déshydratée. Il n'avait même pas eu le temps de répondre à Rachel ou quoi que ce soit que l'homme s'empressait de parler de technologies mutantes. Comme Lyu ou comme ses affreux casques de l'overmind? Dans les deux cas, leur sort glaça l'échine de Nan'. En ce point, l'amérindien était bien loin de partager l'opinion de Jeremiah. Cool n'était pas le terme qu'il aurait employé : "Pas cool" lui aurait certainement paru plus approprié.

Lorsque Ken surmena les récepteurs auditifs et les neurones associés de Nan' -qui préférait toujours le calme et la limitation des paroles-, sa première réaction fut de répéter lentement le mot que Ken avait lancé, comme une épée de Damoclès scalpant Zachary, balayant son regard entre les 3 protagonistes principaux, le regard interrogatif.

-Am-ba-ssa-deur? Pas cool. Pas du tout.

Les derniers ambassadeurs ou trucs du genre qu'il avait connus avaient essuyer une tentative de meurtre de Carrie, mentalement contrôlée. Nanikana ne souhaitait pas du tout qu'une telle chose arrive à leur directeur bien-aimé. La réponse d'Adam à Milan laissa Nan' perplexe. Il ne put s'empêcher de rectifier :

-Ils existent aussi quand Hope et Derek sont dans les parages...

La réaction des jeunes du salon fut à la fois déconcertante et rassurante pour Milan. Il pensait les voir vaquer ostensiblement à leurs occupations histoire de pouvoir faire parfaitement semblant de ne pas écouter, or non, ils ne feintaient pas, ils participaient à la conversation et se sentaient concernés. Prendre un air conspirateur n'aurait donc rien changé. Mais là où deux d'entre eux montraient simplement leur surprise et leur intérêt, un troisième avait décidé de lui asséner une série de questions dignes d'un procureur chargé d'enquêter sur son compte. Pourtant, il lui semblait bien avoir dit qu'il n'avait pas compris ce dont il était question dans les documents, ce qui impliquait qu'il n'avait pas la moindre idée des conséquences géopolitiques et stratégomilitaires de tout ce qu'il savait. Du coup, il haussa les épaules en regardant le garçon, et secoua la tête, espérant secrètement que Mister Zachary ne serait pas aussi inquisiteur dans ses méthodes.

Or ce fut plutôt l'inverse qui survint, et sa perplexité fut communicative, même si Milan se remit rapidement à sourire. C'est vrai qu'il arrivait un peu comme un cheveu sur la soupe. Et c'est vrai aussi que tout le monde n'était pas Cassandre.

- Ah ! Excusez-moi, alors. Je dois vous dire que moi aussi ça me tombe un peu dessus. Il y'a deux jours, l'Institut Xavier, pour moi, c'était juste un nom dans les journaux. Comme la Maison Blanche ou l'université d'Harvard.

Suivant l'invitation directoriale, il s'installa dans un fauteuil après avoir fait glisser le sac sur son ventre. Puis il commença, cherchant un moyen de faire plutôt court. Parce que sur la durée, son histoire n'était pas très longue - du moins la partie qui concernait l'instant présent - mais plutôt condensée. Il aurait volontiers donné la version extensive, mais à coup sûr il passerait pour un raseur. Et il n'avait pas encore posé ses valises.

- Et cette histoire de technologie c'est du tout récent aussi. Alors...

Il opta finalement pour aller directement au point important, sans entrer dans les détails du "comment" et du "pourquoi" il avait les documents en sa possession. Il avait déjà chaussé ses gros sabots pour son arrivée, il devait montrer qu'il savait aussi être un minimum subtil. Tout ça serait précisé si nécessaire, de toute façon. Il ouvrit la fermeture de son sac, en sortit d'abord une bouteille d'eau et une paire de chaussures de sport montantes noires et bleues, puis une pochette cartonnée rouge qui avait vu des jours meilleurs, sur laquelle était inscrit "Santé Sasha". Il l'ouvrit, et feuilleta les quelques pages qui s'y trouvaient.

- ...voilà, c'est ça. J'ai mis la main sur des documents concernant des opérations que j'imagine être assez confidentielles.

Il lut quelques lignes dans sa tête en suivant le texte avec son doigt.

- Je suis un garçon assez terre-à-terre, donc certains points ne m'ont pas posé de problèmes à comprendre. Ils posent des questions, bien sûr, mais sont plutôt limpides. Par contre, y'a un passage qui me fait penser à de la science-fiction. Ou de l'anticipation, je sais pas trop. Ca détonne au milieu des détails administratifs. Attendez, je retrouve les mots, j'ai surligné.

Quelques secondes de silence supplémentaires.

- Mmmh...c'est ça. "Technologie mutante"..."Siècle dernier"...et, attendez..."Détection des mutants".

Il leva les yeux avec un demi-sourire.

- Avouez qu'au beau milieu d'une liste de considérations d'armement et de logistique, ça détonne.

Il regarda les autres élèves, afin de voir quelle serait leur réaction à une telle annonce. Il avait déjà été surpris une fois pour leur relation aux affaires secrètes, peut-être qu'ils doubleraient la mise sur une question aussi tordue.

Chambre d’Annaelle.

Lorsque Lucas revint au salon, il eut l’impression de se retrouver dans une autre pièce que celle qu’il avait côtoyée juste avant de se rendre à la poursuite d’Annaelle. Il avait été littéralement déserté par la faune locale, et seuls persistaient l’éternelle Rachel, sa moitié mâle, Spy et le directeur. Lucas nota également l’apparition d’un nouveau venu totalement inconnu qui semblait trop âgé pour faire partie des élèves. À son entrée dans la pièce, il dévisagea donc l’individu avec suspicion, avant de murmurer à l’attention de Rachel :

« Psst, c’est qui celui-là ? Qu’est-ce qu’il vient faire là ? »

Il ne s’était bien entendu pas exprimé tout haut, de peur de froisser l’arrivant, chose qu’il voulait éviter à tout prix. Il regarda encore un instant l’individu, puis en détourna le regard et s’avança un peu vers le directeur pour clamer d’une voix plus élevée, bien que toujours réservée, face à la tête de l’Institut :

« Heu… Annaelle est calmée… Et sèche ! Je crois qu’elle espère que vous pardonniez son geste… »

Oui, elle savait s’excuser elle-même, mais vu comment Adam avait l’air de lui en vouloir lorsque Lucas avait quitté le salon, il valait mieux le prévenir de son retour imminent, et de sa bonne volonté, non belliqueuse. Ceci dit, il se tourna vers l’arrivant et le gratifia d’un sourire un peu gêné.

« B…Bonjour ! Heu… Moi c’est Lucas… »

Petit sourire un peu crispé pour l’occasion… Il allait sans doute vite être mis au courant de ce revirement de situation du salon.

Pour paraître plus naturel, il alla ramasser le magazine sur Génosha qui gisait à terre, un peu chiffonné, et retourna près de Rachel sans l’ouvrir ni le parcourir… Bien qu’il comptait le faire sous peu.

Rachel garda les yeux plissés lors de l'explication de son copain. Elle n'était pas du genre rancunière de toute façon et elle comprenait que la situation n'avait été qu'un mal entendu. Toutefois, c'était vraiment drôle de voir Ken patiner de la sorte. Quand il n'avait pas les pieds bien encrés, ce qu'elle pouvait avoir du plaisir à faire des blagues à son chéri. Mais bon...Elle voulait une réponse quand même. Une fille ne prend certainement pas plaisir à entendre son copain insinuer qu'une autre fille est "wow". Enfin bon, c'était passé. C'était fini. Et elle l'adorait. Elle se saisit de la mâchoire de Ken d'une main et elle le secoua doucement avant de plaquer un baiser sonore sur ses lèvres.

Elle retourna son attention vers Milan et remarqua avec un sourire radieux et Jeremiah s'interessait aussi à ce que le nouveau venu avait à raconter. Elle fit un petit signe à Miah, les pouces vers le plafond et elle lui envoya un clin d'oeil complice. Ils arriveraient à lui faire cracher le morceau! Just wait and see! Puis Lucas fit son apparition, à nouveau, dans le salon. Visiblement, il s'était occupé d'Annaelle. Elle se pencha vers lui pour lui répondre à voix basse, mais pas autant qu'elle le pensait:

"C'est Milan I -euh-acobo-euh-sevic...Il arrive de Seattle. C'est pas si loin que ça de mon chez moi Seattle! C'est presque vis-à-vis Vancouver, vous savez! Et Vancouver est juste à côté de l'Alberta, où je suis née!"

Rachel oublia de mentionner la raison pour laquelle Milan était là. Mais c'était surtout que ses pensées étaient dirigées vers son chez-soi. Ah...Home Sweet Home. Puis les paroles de Milan prirent une ampleur plus importante dans la tête de Rachel. Son visage perdit son sourire et elle était soudainement très concentrée, très sérieuse. Elle fronça les sourcils et dévisagea l'homme pendant quelques secondes avant de demander:

"Une technologie pour détecter les mutants? Ils pouvaient faire cela il y a 100 ans?...Incroyable quand même. Mais si on y pense bien...cela pourrait expliquer comment tous les mutants avaient été exterminés. On pouvait les trouver et...bah...les exterminés. Search and Destroy."

Elle tourna vivement la tête vers Adam et lança:

"M'sieur Adam! Quelle genre de machine peut détecter les mutants?...Je sais que Cérébra le fait, mais...Nous avons le seul prototype, non?"

Elle tourna ensuite la tête vers Milan, sans vraiment laissé le temps à Adam de parler. Comme une girouette, elle se morda la joue et fit glisser sa main dans celle de Ken, pour se rassurer:

"M'sieur Milan... à qui appartient la liste? Des gentils? Ou des politiciens?"

Ken acquiesça aux paroles d'Adam : encore une fois, il avait trop parlé et trop rapidement. Il resta silencieux quelques secondes, subissant les assauts plaisants de Rachel avant de lui serrer la main et de faire un geste de salut à Lucas, qui venait de revenir dans la pièce ; il fronçait néanmoins les sourcils. Il n'aimait pas du tout ce qu'il entendait.

"Tous les politiciens ne sont pas tous méchants. Mais il y en a peu."

Il s'était tourné vers Rachel pour dire ça, et fixa par la suite Milan et Adam.

"Je ne connais pas vraiment les mutants qui existaient il y a un siècle, autant par le peu d'informations qu'il nous en reste que par difficulté d'en trouver. Ca ne m'étonnerait pas qu'il y ait eu quelques génies mutants qui aient permis des avancées fulgurantes dans la science, comme ceux que nous-mêmes pourrions créer. Si nos ancêtres ont tous été assassinés et ont disparu en une nuit, ça m'étonnerait que leurs découvertes et leurs inventions aient suivi le même chemin. Je suis prêt à parier que le Gouvernement et ceux qui ont orchestré le massacre ont gardé les avancées scientifiques de nos prédécesseurs ici...et qu'ils ont aussi conservé les dispositifs de traçage."

O'Connell n'aimait pas quand la science était détournée de son but initial bienfaiteur et bénéfique. Il ne supportait pas qu'on enlaidisse quelque chose qui avait tant d'importance à ses yeux, mais demeurait calme ; il désirait prouver à tous qu'il savait construire des discours construits, stables et calmes, et qu'il n'était pas un monstrueux nerd incompréhensible. Enfin, pas trop.

"Le tout est de savoir maintenant qui a vraiment accès à ce genre d'informations et quelles sont-elles vraiment : si des schémas de machines à tracer les mutants existent et si des personnes peuvent y accéder, ça ne sent pas très bon. Genosha vient de se déclarer île souveraine et terre d'accueil aux mutants...on pourrait se retrouver avec des chasses dans les autres pays pour "renvoyer les mutants chez eux" ou même les assassiner. On pourrait craindre que Genosha devienne une sorte d'île-prison où les mutants seraient cantonnés."

Il fit une grimace à cela, répugné qu'il était face à une telle idée. Il se tourna alors vers Milan, attendant plus d'informations sur l'origine de telles informations pour continuer ou non de telles hypothèses.

Confortablement installé, une fois Lucas salué, Milan avait l'impression de donner une fausse idée de lui-même, avec son air sérieux et ses papiers dans les mains. Mais le discours du professeur Zachary l'intéressait au plus haut point. Il révélait les zones d'ombres autour de ce document, d'autant que la passion et l'intérêt du directeur de l'Institut pour le sujet était communicative. Et le Croate était désormais en possession d'un dossier dont il saisissait dans leur globalité les tenants et les aboutissants.

- Alors c'était ça, l'hologramme...

Une nouvelle fois, penser à Cérébra fit immédiatement bifurquer ses pensées sur sa soeur. Si elle passait par ici, il faudrait l'enfermer pour qu'elle n'aille pas disséquer l'unité centrale d'un chef d'oeuvre pareil. Déjà qu'il avait le plus grand mal à l'empêcher de bricoler leur matériel hi-fi...Il craignait d'ailleurs sincèrement que son départ sonne le glas de l'existence terrestre de la chaîne stéréo ambiance-ciné qu'il s'était offerte quelques mois auparavant, qui se verrait disséquée à grands coups rageurs de tournevis. A son grand regret, les baffles ne tenaient pas dans ses bagages, et il doutait que la proposition de Cassandre inclue la possibilité de transformer un bureau en ciné-club à son usage.

- Et bien, M. Zachary, je suis venu pour cela en premier lieu, parler.

Il feuilleta de nouveau ses fiches, sans toutefois prendre garde à arborer un air absorbé. Il les avait lues et relues, il reconnaissait les signets à vue d'oeil. Il n'y en avait de toute façon pas des centaines. Il sortit un papier particulier qu'il sortit sur le devant de la pile.

- Pour tout vous dire, ce...Cérébro, c'était un peu le hors d'oeuvre du dossier. Ou le café qui suit le dessert.

Il se tourna vers les élèves, histoire de répondre aux quelques questions entendues, maintenant qu'il était en position de le faire. Il s'entraînait au fractionnement des pensées. Rachel, d'abord. Il appréciait sa façon de diviser le monde, même s'il aurait volontiers adjoint aux politiciens les militaires.

- Cette liste appartenait à M. Josh Harryman. Un politicien dont je ne connais pas l'affectation exacte, mais tout porte à croire qu'il était un haut responsable de la Sécurité Intérieure.

S'apercevant de la méprise possible due à son appui sur la temporalité du verbe "être", il ajouta rapidement.

- Je vous rassure, il est décédé dans un accident. Et je n'avais rien à avoir avec la cause, seulement avec les conséquences.

Puis il regarda Ken.

- Donc ce dossier de politicien - sourire pour Rachel - semble parler d'un projet d'armement ultra-sophistiqué, dont le Cérébro ne serait qu'un des aspects secondaires. A priori, des armes de nouvelle génération seraient développées. Pour créer des super-soldats, si j'ai bien compris.

Il fit une pause et reporta son attention sur le directeur.

- Ca n'aurait rien de grave dans l'absolu, mais j'ai l'impression que les armes en question ont des visées...particulières. Parce que les partenariats internationaux qui sont évoqués pour les tests et les utilisations ultérieures sont assez évocateurs.

Il commença à lire la feuille.

- Corée...Chine, Russie...Israël...et quelques autres. Rien que des états hostiles aux mutants. Par contre, pas de Canada, pas de Suède, pas de Norvège. Et pas de Genosha, cela va sans dire.

Il finit par reposer les feuilles, après les avoir brièvement tassées, ce qui était totalement superflu : le voyage n'avait pas été tendre avec elles, elles étaient aussi plates que des capsules de bière.

- Je considère donc ça au mieux comme intriguant, et au pire comme franchement inquiétant.

Même s'il avait tenté de tourner sa dernière phrase de manière humoristique, son ton trahissait une décision quasi-prise. Il irait enquêter.

Chambre d'Annaelle

La jeune femme descendit les marches et alla au salon. Malheureusement pour elle, la porte était fermée et même bloqué. Voulant savoir ce qui se passait, elle créa un vortex, à contre coeur, et entra dans le salon.

"Ah professeur, je voulais m'excuser pour tantôt, vous savez je n'ai vraiment pas...."

Le regard d'Annaelle se tourna vers Milan. Elle resta quelques secondes la bouche ouverte à le regarder se questionnant sur qui était ce nouvel arrivant inconnu.

"Euh.....ok! Je crois qu'on ne se connait pas! Moi c'est Annaelle!", puis son regard se porta vers la mallette de l'homme puis vers les autres."Ahhhhh! Je comprend! Vous étiez en réunion! C'est pour ca....la porte!"

Les joues de la Québécoise virèrent encore au rouge.

"Oups! Ben je vous laisse alors hein?! Je ne voulais pas déranger votre petite guérilla! Si jamais vous avez besoin de moi! Pour n'importe quoi, mon pouvoir, même si j'aime mieux ne plus trop l'utiliser vu ce qui m'arrive....ou encore pour un massage, ou encore un verre d'eau!", regardant Adam elle ajouta,"Ou pas de verre d'eau....."

Milan Machinsevic, tel était donc le nom, approximativement, du nouvel arrivant mystérieux de l’institut, pour lequel Adam entrait visiblement dans tous ses états, puisqu’il était presque aussi nerveux qu’après s’être fait disloquer les jambes, tout en semblant avoir oublié cet incident fâcheux qui s’était pourtant déroulé à peine quelques minutes. Ce changement de situation était assez paranormal, et les tronches des personnes présentes dans le salon confirmaient au suédois cette croyance : Cet inconnu venant du grand nord – qui l’eut cru – venait d’abattre une chape de mystère sur une assemblée déjà tourmentée. Ainsi, Rachel donna quelques informations erratiques, mais précieuses, à Lucas sur cet étrange personnage qui répondit brièvement aux salutations de Lucas, comme s’il avait mieux à faire… Enfin… non pas qu’il n’avait pas mieux à faire, mais la politesse était quand même la moindre des choses ! Enfin, au moins l’avait-il salué à son tour. Tout le monde ne pouvait pas se gausser de posséder un sourire aussi gracieux et engageant que celui de Rachel McCallum.

Quoi qu’il en soit, la conversation muta vite au débat d’idée et aux hypothèses gravissimes sur des technologies mutantes suspicieuses, et tout le monde se joignit à l’engouement global pour cette affaire visiblement apportée par Milan Ivanovic, dont le nom venait d’être révélé par sieur Adam Zachary, boosté par une poussée d’adrénaline due au sujet ambigu que le visiteur abordait là. Ainsi, ils se firent tout bonnement enfermer dans le salon par le directeur, qui évoqua une machinerie jumelle à celle de Cérébra, qui aux mains d’humains anti-mutants, (ou de mutants antihumains) pouvait créer de gros soucis… Ce cher Milan confirmant les craintes d’Adam en citant une liste de pays belliqueux à la nation mutante et en reprécisant la nature secondaire de cette arme dévastatrice qu’était le Cérébro : c’était une armée de guerriers redoutables que le nouveau prophète bien renseigné de l’institut avançait sur un plateau d’argent, dans l’intimité presque hermétique des murs du salon.

Presque hermétiques, en effet, puisque l’humide Annaelle parvint une fois de plus à se faufiler via portail interposé jusqu’à eux pour présenter les attendues excuses au directeur… Maladroites excuses, s’il en était. Pour un peu, Lucas se serait presque retrouvé dans la maladresse gênée de la demoiselle tant il avait connu ça il y avait quelques temps. Même si elle était plus bavarde, et donc plus maladroite que lui…

La joue encore rouge sous l’effet de l’argument frappant d’Annaelle, Lucas baissa les yeux sur le magasine concernant Génosha, l’air de rien, tout en suivant la conversation qui se faisait dans le salon. Il se permit tout de même un commentaire pour Milan, concernant son affaire :

« Dites… Ca fait pas mal de suspects sur votre liste… Où comptez-vous commencer vos recherches ? J’imagine que si Monsieur Zachary sait plus ou moins où se situe le Cérébro, ça pourrait faire un bon premier point d’ancrage, non ? Enfin… j’imagine que s’il est au courant de qui est au courant, il se pourrait qu’il le soit aussi… »

Pas très clair tout ça, mais pour Lucas, c’était indéniable : l’Institut Xavier ne pouvait pas laisser se fabriquer une armée de guerriers ayant pour but presque clair l’annihilation de Génosha.

« Au pire, Cérébra pourrait le retrouver, non ? Enfin, si on dispose d’un télépathe assez puissant à l’institut… Mademoiselle Cassandre ? Kitty ? Nora ? »

Entre les pouvoirs mentaux, il ne s’y retrouvait pas bien… Lui avait un pouvoir beaucoup plus ‘terre à terre’, c’était le moins qu’on pouvait dire. Soulevant ses yeux gris d’un des premiers articles du magasine, il fixa Milan avec intensité :

« Vous insinuez bien que ces soldats pourraient être construits pour attaquer Génosha, n’est-ce pas ? »

Jusqu’ici, il n’avait jamais vraiment mis les pieds dans le plat, sauf durant les briefings Ceresix. Avec ce remoulage des équipes, ce statut-quo étrange, il ne savait plus s’il devait différencier briefings et vie quotidienne à l’institut… Vu l’ambiance, ça n’avait rien d’un passage de vie quotidienne…

Il faut croire que derrière son air innocent de gentil indien dans la lune, Nanikana avait plutôt bien compris le fonctionnement du Jeremiah moyen : toute cette conversation autour de technologie qui paraissait, comme en avait plaisanté Ivanovic, quasi de science-fiction, du moins lorsqu’on ne connaissait pas Cerebra, ça le laissait rêveur. Bouche entrouverte, yeux écarquillés, il était pendu aux lèvres des deux adultes, snobant les interventions de Ken pour se concentrer sur les faits et hypothèses qui lui semblaient les plus crédibles au vu des personnes qui les émettaient. Evidemment, comme à chaque fois qu’un truc semblait fun, il fallait qu’on reparle des sujets qui fâchent. Comme de l’annihilation des mutants par exemple, avec tous un tas d’armes sur lequel il n’aurait pas craché en jeu vidéo, ou comme d’une certaine commission qui commençait à sérieusement lui courir sur le haricot.

Le visage soudain plus grave, Spy referma la bouche : ces révélations étaient plus inquiétantes que réjouissantes. Lucas était revenu, suivi de près par Annaëlle égale à elle-même tandis que l’homme caillou sautait les pieds dans le plat. Genosha risquait encore d’y perdre des plumes mais si le Cerebro était utilisé, même des mutants moins en vus pouvaint y passer. Personnellement, ce qui l’embêtait plus, c’était qu’un politicien haut placé au gouvernement travaille sur un projet pour tous les détruire quand officiellement, on leur assignait une observatrice. Tout était peut-être tellement cloisonné là-haut qu’elle n’en savait rien, mais ça ne poussait pas franchement à lui faire confiance. Quand en plus un des aspects du dossier était fortement lié à Eden, ça commençait à franchement puer. Se tournant vers le directeur, il l’observa un instant avant de lui poser la question qui l’inquiétait :

"Vous croyez que c’est un projet sérieusement étudié par le gouvernement ? J’veux dire… D’un côté ils nous envoient Mme Shenzie, et de l’autre ça…"

-Kwé à Annaelle, qui avait fait sursauter l'algonquin par son apparition imprévue à cette réunion en huis clos hautement confidentielle, avant de lancer un regard en coin à Rachel lorsque Milan nomma le Canada sur sa liste. Ensuite de quoi, il répondit à Lucas, sur un ton plus ou moins songeur.

-Cassandre ne peut pas utiliser Cerebra. N'est-ce pas? demanda-t-il ensuite en direction de Adam.

Miah apportait également une hypothèse intéressante, relia Shenzie à cette intriguante affaire de Cerebro, et Rachel désirait localiser un télépathe politicien pour voir si il utilisait Cerebro contre les enfants, encore une fois.

-Josh Harryman est du pentagone aussi? sous-entendant : comme Roberta?