[18-05] Le retour du fils de la vengeance de...

Salon (via sa chambre)

C'était un Brieuc ayant retrouvé quelques couleurs qui se tenait devant le bureau d'Esther Kofman. Effectivement le passage par la chambre n'avait pas été un luxe pour le jeune garçon qui avait bien besoin de se remettre de ses émotions.
La douche n'avait pas seulement redonné une apparence plus avenante à l'adolescent en le débarrassant des traces de sang qui maculaient son visage encore enfantin, elle avait également contribué à le détendre, à lui permettre d'évacuer toute la tension accumulée au cours de la dernière heure.

Il s'était également fait prêter un t-shirt propre dans lequel il flottait un peu, ainsi qu'une paire de chaussures, certes un peu grandes, mais qui lui permettait de ne plus ressembler à un vagabond. Brieuc tenait à soigner son apparence avant de se présenter pour la première fois devant une des responsables de l'Institut.
Cela lui faisait penser qu'il devait aussi rapidement contacter ses parents afin de les rassurer sur son sort et pour leur demander de lui envoyer rapidement des affaires. Ne possédant que ce qu'il portait sur lui lors de sa virée à Merdrignac, il n'allait pas pouvoir tenir longtemps comme ça et cela le gênait de toujours devoir demander à d'autres le minimum vital.

Devant la porte, le jeune Breton, lavé et peigné, rajusta une dernière fois sa tenue en rentrant le bas de son t-shirt dans son short en toile. Il hésitait encore à frapper, commençant à douter du bien-fondé des nouvelles qu'il apportait. Ne s'était-il pas trompé dans ses déductions et n'allait-il pas déranger un professeur pour rien ? Non, après tout, même la Sentinelle de l'Occident avait l'air inquiet de ce retour possible de Cornelius van Damme. Le devoir du jeune mutant était bien d'en informer immédiatement quelqu'un qui saurait certainement quoi faire.

Déterminé, Brieuc se passa la main dans les cheveux pour les ébouriffer un peu, une coiffure d'enfant sage ne collant décidément pas trop avec le loustic, et frappa à la porte d'un air décidé.

L'israélienne avait recommencé à fumer dans son bureau. Entre nervosité et excitation, Mademoiselle Kofman sentait bien que son état mental ne s'améliorait pas. Les événements de la veille avait été plutôt traumatisants en fait...

C'est donc préoccupée par de drôles de pensées morbides que la jeune femme alla ouvrir la porte de son bureau. Elle aperçut un jeune homme qu'elle ne connaissait pas. Il était venu seul. Surement un nouveau.

Feignant un sourire, elle lança :

"Bonjour, je suis le Professeur Esther Kofman. Que puis-je pour vous ?"

Elle désigna un siège au jeune mutant et ajouta, tout en allant s'asseoir derrière son bureau :

"Vous venez d'arriver c'est ça ? On s'occupe bien de vous pour le moment ?"

Intimidé, Brieuc se sentit rougir malgré lui. Un peu perdu dans un endroit encore inconnu, il se raidit pour se reprendre. Allons donc, il n'allait quand même pas se mettre à bafouiller à peine arrivé. Son éducation reprit vite le dessus et c'est l'air plus décidé qu'il sourit en retour à Esther.

"Bonjour madame." Répondit-il poliment. "Je m'appelle Brieuc de Folcoat. Effectivement, je viens juste d'arriver. Enfin, ça fait une demi-heure à peu près… Mais, j'ai voulu prendre une douche avant de venir vous voir…"

Acceptant avec naturel l'invitation, l'adolescent s'assit lentement, gêné par sa tenue un peu négligée.

"Euh… En fait." Poursuivit-il bravement. "C'est la Sentinelle de l'Occident qui a ouvert un passage pour que j'arrive directement ici. Il a dit que nous avons un très gros problème…"

Un peu embrouillé dans ses explications, le Breton essayait d'être le plus précis possible.

"C'est Georgia… Je l'ai rencontré en arrivant. C'est elle qu'à dit que je devais venir vous voir."

Brieuc se pinça les lèvres, essayant de refouler les sanglots qui commençaient à étouffer sa voix.

"Je… Euh… Il faut que je vous prévienne. Cornelius van Damme n'est peut-être pas mort… Y'a un androïde… Il avait l'esprit de van Damme. Il… Il voulait voler la clochette… On l'a empêché. Et… Et, Grand-père est mort…"

Respirant lentement, Brieuc fixait Esther de ses yeux bleus, dans lesquels perlaient déjà des larmes difficilement contenues.

"Calmez-vous" lança Esther d'un ton neutre. En effet, face au discours du jeune homme, elle ne savait trop sur quel pied danser. Même s'il racontait était surprenant, cela semblait tout de même bien familier à ce qu'avait pu vivre l'israélienne la veille.

"Et rassurez-vous, vous n'êtes pas fou. Même si je n'ai jamais entendu parler de cette "Sentinelle de l'Occident", je suis familière du nom de Cornelius van Damme. J'étais présente le jour où il a été tué. Tout comme j'ai appris, hier, qu'il avait réussi à transférer son esprit dans un ou plusieurs androïdes. Quant à la clochette... J'imagine qu'elle doit être similaire à celles que Jolène et Alban - deux membres de mon équipe - ont reçu des mains d'un dignitaire du collège"

Elle soupira, se leva et alla se servir un verre qu'elle vida d'une traite. Si Esther n'avait jamais été une grande buveuse, un remontant s'imposait ! Puis, s'appuyant contre l'armoire de son bureau, elle poursuivit :

"Je suis navrée pour votre grand-père. De son vivant, Van Damme n'a jamais hésité à tuer qui que ce soit. Je doute que la mort l'ait amélioré..."

Baissant la tête, elle reprit :

"Quoi qu'il en soit, hier, nous avons empêché les sbires de van Damme d'obtenir ce qu'ils souhaitaient. A savoir l'accès à un lieu appelé le Saint des Saints. Je me rends compte que vous avez du faire de même... seul"

Elle ajouta tout en souriant légèrement :

"Bien sur, tout cela doit vous sembler tellement... flou et absurde. Peut-être que vous avez une question précise ? Et puis... Vous pourriez peut être me parler de cette Sentinelle ?"

Le ton neutre d'Esther eut l'effet escompté sur Brieuc, apaisant le garçon et l'aidant à retrouver son calme. Essuyant rapidement du dos de sa main ses yeux rougis par les larmes, il secoua la tête, un peu abasourdi quand même.

"Le Saint des Saints…" Murmura-t-il, comme pour lui-même. "Oui, c'est comme ça qu'il a appelé ce qu'il y avait après son jardin. Il l'a décrit comme un endroit merveilleux mais qui pouvait être très dangereux s'il tombait dans de mauvaises mains…"

Relevant la tête pour regarder le professeur dans les yeux, Brieuc poursuivit :

"La clochette… Moi, c'est grâce à celle de Maître Ferraille que je suis passé dans le jardin de la Sentinelle de l'Occident. Maître Ferraille était le prophète du Collège Invisible."

L'adolescent fit une petite grimace.

"Il a été tué aussi par l'androïde, van Caremus qu'il s'appelait cet espèce de robot de la mort. Mais, il a été détruit par Aza Chorn. Euh, c'est le nom de la Sentinelle. Je… Je peux pas vous en dire beaucoup plus sur lui. Mais, il est très puissant et très rapide… Il a la peau toute blanche, avec un gilet rouge et un casque. C'est mon ami… Il habite dans un jardin près de l'océan et… Euh, je sais pas trop quoi dire…"

Hésitant un instant, Brieuc se pinça les lèvres. Puis, se jetant à l'eau, il osa énoncer son souhait.

"Euh, madame." Demanda-t-il d'une petite voix. "Je… Je voudrais tant devenir plus fort. Je veux continuer la lutte et détruire définitivement ce van Damme et tous ses clones… Je le dois à Grand-père. Je… Je veux, euh… Je voudrais faire partie des équipes qui vont le traquer…"

L'air résolu et déterminé, Brieuc se tenait droit dans son fauteuil et regardait fixement Esther, conscient d'être largement présomptueux dans sa requête, mais décidé à aller jusqu'au bout.

"Je n'ai pas eu personnellement accès à cet endroit, le Saint des Saints, étant retenue sur un autre front au même moment. Quoi qu'il en soit, on peut le décrire comme étant le quartier général du Collège Invisible. Visiblement, les dignitaires de cette organisation redoutait que les agents de van Damme puissent avoir accès à la liste de leurs membres. Il semblerait, de même, que cet endroit ait un autre usage mais..."

Esther marqua une pause. Elle frissonna. C'était le signe que la fin était proche. La fin de toutes ses aventures. Vers la paix perpétuelle ou la damnation absolue ? Elle n'en savait trop rien. Mais elle avait besoin de repos. D'une bonne cigarette et de repos. Néanmoins, elle poursuivit ses explications :

"Quoi qu'il en soit, et même si j'ignore tout de ce Maître Ferraille, le Collège a un nouveau prophète. Il s'agit d'Alban, un jeune membre de mon équipe. Visiblement, seul le prophète a le pouvoir d'unifier toutes les factions du Collège. Et son élection répondait à un but bien précis..."

Elle ferma les yeux et pensa à cet objet diabolique qui avait été ramené du Nouveau-Mexique. Bientôt, ils en connaitraient la signification... Bientôt...

"La Main de Gloire. C'est ce que semble chercher Caremus ou van Damme, peu importe comment il préfère se faire appeler. Il s'agit d'un artefact que nous sommes allés voler à une branche secrète de l'armée américaine. Non sans mal, vous imaginez bien. Quoi qu'il en soit, cet objet aurait le potentiel nécessaire pour détruire la planète. Mais pour ce faire, il faut l'activer. Cela nécessite un rituel particulier que l'armée américaine a tenté de réaliser..."

Esther avala sa salive. Ce truc allait être activé de toutes manières. Même si c'était pour le détruire, ça lui fichait la chair de poule... D'autant plus que David, son fils retrouvé, avait son rôle à jouer là dedans.

"De ce que j'ai cru comprendre, la Main de Gloire est un passage vers une autre dimension. Elle appartient à une chose qui est restée à moitié bloquée dans notre espace-temps. Il faut beaucoup d'énergie pour l'activer. L'armée américaine avec son projet Blue Book a tenté de le faire. Les méthodes du Collège sont plus rudimentaires : la Main va être, d'ici quelques temps, mise en contact avec deux grandes sources d'énergie pour accéder à l'entité à laquelle elle appartient. Notre mission sera, je l'imagine, de détruire cette chose d'un autre monde..."

L'israélienne tut sciemment certains détails. Inutile d'affoler le garçon sur la portée de ce que les LeX se proposaient d'accomplir.

"Il est fort à parier que van Damme sera de la partie. Mais vous sentez-vous de taille pour affronter tout cela ? Les risques d'y passer sont très importants, vous savez..."

Pendant la durée des explications, Brieuc avait froncé les sourcils, essayant d'assimiler toutes ces nouvelles informations. Tout n'était pas clair dans la tête de l'adolescent mais il en discernait les grandes lignes. Et ce qu'il croyait comprendre renforçait encore sa détermination à participer au combat.

"Euh, oui… Maître Ferraille était l'ancien guide du Collège Invisible, c'est lui qui avait la clochette. Il m'a dit aussi quelque chose sur la Gardienne de la Lumière… Georgia m'a dit qu'elle est passée aussi par l'Institut… Euh, Alixtide Pitre, oui, c'est comme ça qu'elle s'appelait. Et, euh…J'ai trouvé son cahier à Merdrignac."

Hésitant un peu, l'adolescent sortit le cahier d'écolier de sa poche et se leva pour le montrer.

"Ah oui, tant que j'y pense aussi… C'est l'histoire de la Main de Gloire qui m'y fait penser… Quand Caremus a été détruit… Euh… Il a perdu sa main. Je sais, ça a rien à voir mais… Euh… J'l'ai apporté aussi. Je sais pas, ça peut être vous servir à quelque chose…"

Debout devant le bureau d'Esther, le Breton se tenait un peu gauchement tendant à la fois le cahier d'Alixtide et la main tranchée de l'androïde, enveloppée dans une sorte de journal.

"Ah oui… Aussi, euh… J'veux vous dire que j'ai pas peur…"

La phase de découragement et d'abattement du garçon semblait parfaitement surmontée et son tempérament facétieux reprenait vite le dessus.

"J'me sens parfaitement de taille pour vous aider…"

Une lueur malicieuse apparut dans les yeux clairs de Brieuc. Il se mit à grandir d'une quinzaine de centimètres, puis rapetissa jusqu'à ne mesurer qu'un mètre environ avant de retrouver sa taille normale.

"Faudra juste me dire laquelle vous voulez pour cela…"

Esther eut un petit soupir amusé.

"Alixtide... Oui, je me souviens très distinctement de sa lubie de l'époque. C'était un des membres de mon équipe avant qu'il ne quitte l'Institut. Un mutant dont l'unique pouvoir était de survivre dans la crasse la plus absolue. Bref..."

De la main, l'israélienne remit en place une mèche de cheveux puis jeta un œil rapide au cahier apporté par Brieuc. Elle eut un petit rire sonore avant de de reprendre :

"Alixtide a toujours eu une façon bien à lui de s'exprimer. C'est rafraichissant de voir que certaines choses ne changeront jamais. Quoi qu'il en soit... A l'occasion d'une mission de routine, Alixtide s'est retrouvé dans un endroit appelé la Colonie Pénitentiaire. Une sorte de prison pour tous les adversaires de M. van Damme. Là, il a rencontré la "Gardienne de la Lumière" qui, j'imagine, devait être l'un de ses premiers projets robotiques. L'originale de la Gardienne, Madame Cameron Cromwell avait été - à une époque - l'une de ses fidèles complices. Quelques temps avant qu'Alixtide ne se retrouve dans la Colonie, Cromwell avait décidé commencé à prendre ses distances avec van Damme... Bref, j'imagine que van Damme a essayé de créer une copie robotique qu'il pourrait contrôler. Ce qui ne fut pas le cas, cette copie ayant développé un haut sens moral. Comme quoi, certaines personnes sont ingérables..."

Elle rendit le cahier à Brieuc et termina son histoire :

"La Gardienne de la Lumière a sauvé Alix en lui permettant de s'évader de la Colonie Pénitentiaire. Et avant de mourir, elle a mis dans la tête de ce pauvre Alix que lui aussi devait garder la lumière... Fin de l'histoire. La Colonie a été détruite, la copie robotique de Cromwell désactivée et Cornelius van Damme tué... Mais bon..."

Esther observa la main de l'androïde que Brieuc avait ramené.

"Il semblerait que Cornelius van Damme ait, avant de mourir, décidé qu'une seule copie robotique pour lui même ne suffirait pas. Hier, les membres de mon équipe en ont déjà détruit une. Qui sait combien il y en a encore dans le circuit..."

Elle attrapa la main de Caremus et la rangea dans un tiroir de son bureau. Peut-être qu'un jour elle aurait le cœur à l'exposer en guise de trophée... Mais pour le moment, elle avait d'autres préoccupations. Esther plongea son regard dans celui de Brieuc, constata son étonnante capacité, puis trancha :

"Vous savez... Vous devriez avoir peur. Ces êtres sont prêts à tout. Et nous sommes confrontés à des forces que nous ne comprenons pas. Mais..."

Elle avala sa salive, cogita quelques instants et termina :

"Si tel est votre souhait, j'en tiendrais compte. Après tout, les autres membres de l'équipe ne sont pas bien plus vieux que vous et... Il y a un travail à effectuer de toutes manières. Je réfléchirais et je vous préviendrais quand j'aurai pris ma décision..."

Brieuc fronça un peu les sourcils en se faisant sermonner par Esther. Il ne voulait certes pas passer pour un écervelé en jouant au bravache. La prochaine fois, il tournerait sa langue un peu plus dans sa bouche avant de parler.

"Euh, je sais de quoi ils sont capables." Grimaça-t-il. "J'ai bien vu le résultat dans la boutique de Maître Ferraille"

Le regard de l'adolescent se voila légèrement à ces mots, alors qu'il revoyait le corps sanglant du vieil antiquaire.

"Mais, c'est pas parce qu'ils sont comme ça, qu'il faut baisser les bras et fuir devant eux. Au contraire, il nous faut tous lutter ensemble. On ne peut pas les laisser gagner."

Convaincu par ce qu'il disait, Brieuc devenait plus véhément. Ses pommettes rosirent sous l'effet de l'excitation.

"Grand-père l'aurait pas permit. Le Mal ne peut pas s'imposer, c'est impossible."

Les dernières paroles du professeur rassurèrent un peu le jeune mutant. Toute porte n'était donc pas fermée pour lui. A lui maintenant de jouer et de faire ses preuves.
Le Breton hocha la tête, conscient que la balle était dans son camp. Il devrait montrer de quoi il était capable tant dans l'utilisation de ses pouvoirs que dans son aptitude à s'intégrer dans une équipe.

" Dites moi ce que je dois faire et, je vous le promets, vous aurez pas à le regretter…"

Prenant brusquement conscience de sa tenue, Brieuc se sentit embarrassé. Il avait encore mille choses à faire, tant son arrivée à l'Institut avait été précipitée.

"Euh, faudrait aussi que j'appelle chez moi, pour dire où je suis. Mes parents doivent commencer à paniquer devant ma disparition. Et, je dois aussi trouver des affaires, en attendant qu'on envoie les miennes…"

Aprés s'être changée et avoir fais connaissance de sa nouvelle compagne de chambrée, Anjali avait besoin de savoir ce qu'elle devait faire pour officialiser son entrée dans l'école et se fournir en matériel scolaire.
Elle devait se fondre parmi la masse des élève pour trouver la personne qu'elle recherchait.
En même temps elle avait besoin de contacter son grand père pour le rassurer et lui demander des affaires et un peu d'argent pour s'acheter des fringues.

Elle appréhendait la rencontre avec les professeur car elle n'aimait pas mentir mais elle devait absolument cacher la raison de sa présence à l'institut.
Mal à l'aise, elle se frottait les mains contre son jean pour essuyer la moiteur de ses paumes. Elle inspira un coup et frappa à la porte du bureau d'Esther Koffman, qu'elle avait brièvement croisée lorsqu'elle avait accompagné le jeune Brieuc avec Georgia.

Esther soupira à nouveau. Brieuc avait l'air déterminé. Il avait après tout pas mal perdu déjà dans la lutte contre Nemo et van Damme. Qui était-elle pour juger de sa motivation ?

Jouant négligemment avec un stylo, elle finit par lâcher :

"Le mal triomphe par l'inaction des gens de bien"

Puis lâchant l'objet, elle se passa la main dans les cheveux et conclut :

"Allez vous reposer, Brieuc. Je pense que vous trouverez sans difficulté quelqu'un pour vous prêter des affaires. Pour le reste... Eh bien, pour le reste, nous ne repartons pas tout de suite en mission mais..."

Elle se pinça les lèvres.

"On en reparlera prochainement. Mais vous avez fait valoir des points d'intérêts. Et, quoi qu'il arrive nous ne les laisserons pas gagner... Ça je vous le promets !"

Entendant à nouveau toquer à la porte, elle se leva et ouvrit. Une autre nouvelle. Elle lui fit signe de prendre place dans la pièce puis ajouta à l'intention de Brieuc :

"Nous nous reverrons prochainement, Brieuc. Quant à vous..."

Elle s'adressait à Anjali.

"En quoi puis-je vous être utile ?"

Réconforté par les derniers propos d'Esther, Brieuc se sentit ragaillardi et bomba le torse, heureux d'être enfin pris au sérieux.

"Merci, madame," promit-il avec empressement. "Vous n'aurez pas à le regretter. Ca je vous le jure…"

L'arrivée d'Anjali interrompit le jeune garçon. Tout d'abord, il eut du mal à reconnaître celle qui était arrivée quelques minutes après lui à l'Institut. Habillée à l'occidentale, l'Indienne présentait une apparence différente mais tout aussi charmante.

Réalisant qui elle était, Brieuc eut un sourire amical.

"Je vais vous laisser, madame. Merci de m'avoir reçu et écouté comme vous l'avez fait. Vous pouvez compter sur moi…"

S'inclinant légèrement pour saluer les deux femmes, l'adolescent prit congé et sortit du bureau. Il pensait encore aux dernières affirmations d'Esther – Le mal triomphe par l'inaction des gens de bien. Il serra les poings, l'air résolu et décidé.

*Je ne permettrai jamais ça. Moi, je ne resterai pas inactif…*

Une fois dans le couloir, un étrange gargouillis de son estomac lui rappela qu'il n'avait rien mangé depuis des heures. Bon, donc, Brieuc énuméra pour lui-même ce qu'il devait faire maintenant : dans l'ordre, appeler ses parents, puis trouver de quoi grignoter un peu. Il serait bien temps d'aller se reposer après ça…

cuisine

Anjali entra, hésitante, craignant d'interrompre quelque chose d'important. Elle reconnut Brieuc et lui fit un grand sourire chaleureux.
*Il est poli ce petit, il a la présence d'esprit de nous saluer avant de partir. Il a l'air d'être mieux que tout à l'heure, c'est une bonne chose...* Pensa-t-elle en le regardant sortir du bureau après une courbette faite devant les deux femmes.

Se tournant vers Esther Kaufman, nom qui était indiqué sur la porte du bureau, Anjali la salue à l'indienne, se baissant pour lui toucher les pieds, telle une marque de respect envers ses ainés.

Puis elle se redresse et lui demande:
"Bonjour madame, c'est pour officialiser mon inscription dans l'institut et avoir des informations...."
Elle hésita un court moment, perdue dans ses pensées.
" Euh... enfin, voyez-vous, je suis arrivée sans rien ici, ce n'était pas prévu que je débarque du jour au lendemain en Amérique loin de mon Inde natale."

Anjali ferme les yeux, envahie par les souvenirs des évènements qui l'ont précipitée dans un avion. A la pensée du professeur Ravier qui l'avait utilisée à son insu, sa voix se fait plus ferme: "J'ai besoin d'apprendre à utiliser et développer mes capacités mutantes."

Esther sursauta en découvrant la manière dont Anjali lui témoignait son respect. Étonnée, elle ne put que bafouiller :

"Euh... Ce sont des chaussures italiennes assez chères... Je... Je n'ai pas pour habitude de les offrir aux nouvelles arrivantes"

Puis reprenant ses esprits, elle alla s'asseoir, souriant doucement :

"Un simple bonjour aurait suffi, Mademoiselle... Quoi qu'il en soit, je suis le Docteur Esther Kofman, psychologue à l'Institut, et je suis enchantée de faire votre connaissance"

Elle brancha l'écran de son ordinateur et commença à pianoter sur son clavier.

"Et vous êtes ?" lança-t-elle en levant les yeux vers Anjali.

"Quoi qu'il en soit, vous avez frappé à la bonne porte si vous souhaitez développer vos talents mutants. Il n'y a pas de formalités spécifiques pour l'inscription, il nous faudra juste quelques informations en temps utile... Comme votre date de naissance ou la personne à contacter en cas de besoin..."

Esther se sentait assez peu à l'aise dans ce rôle d'hôtesse d'accueil. Laissant tomber son ordinateur pour le moment, elle ajouta :

"Vous avez déjà une chambre ? Enfin... Ne vous traumatisez pas. Quoi qu'il a pu arriver avant aujourd'hui, vous êtes ici en sécurité. Vous êtes sous la protection de l'Institut et..."

Elle sourit à nouveau à Anjali :

"Je ne sais pas trop quoi vous dire de plus. Peut-être que si vous avez des questions plus précises, pourrais-je tenter d'y répondre ?"

Anjali retient un sourire lorsqu'elle entend le professeur bafouiller sur ses chaussures, elle n'a visiblement pas l'habitude des manières indiennes.

Anjali regardait avec curiosité les livres entassés sur le bureau quand elle s'entend demander qui elle est, elle se reprend aussitôt et se présente.

"Bonjour docteur Koffman, je m'appelle Anjali Devgan, je suis née le 6 Février 2089 à Benarès. J'y ai grandi et la personne à contacter est mon grand père Kamran Devgan. Il est le seul au courant pour mon état de mutante, mes parents ne le savent pas..." Anjali eu un blanc en pensant à eux, surtout à son père, dont la réaction potentielle l'effrayait au plus haut point. "...Il vaudrait mieux qu'ils ne l'apprennent jamais, ainsi que mes frères."

A l'évocation des chambres, Anjali rassura le docteur: "C'est bon, une de vos élèves, Georgia, s'est chargée de m'installer avec Miyabi, une de vos nouvelles élèves je crois. Et le choix me convient pour l'instant." Fit-elle avec un sourire.

Le docteur la rassura sur sa protection à l'institut et sur l'aprentissage de la maitrise de ses capacités. Elle lui demandait si elle avait des questions.

Le visage d'Anjali s'éclaire et elle demande avec empressement: "Je voudrais appeller mon grand-père pour qu'il m'envoie de l'argent! Où est-ce qu'on peut aller faire du shopping ici? vetements, matériels scolaires, ainsi de suite? Ces vêtements ne sont pas à moi et j'ai besoin d'avoir mes affaires à moi." finit-elle en rougissant.
Elle continue sur sa lancée: "J'aurai besoin du planning des cours de l'institut aussi."

*Je ne sais pas quoi lui dire pour la raison de ma venue, mais bon il vaut mieux que je lui serve la même chose qu'à Georgia. Je me demande en quoi elle est docteur, si c'est docteur des cerveaux pour lire les esprits vaut mieux que je sois prudente!*
"Docteur, je suis arrivée ici parce que j'ai besoin d'apprendre à me battre avec mes capacités mutantes, mon professeur en Inde a pensé qu'il était mieux pour moi de venir ici. Il semble que l'institut offre les meilleurs enseignements possibles pour les mutants."Finit-elle en flattant le Docteur via le prestige de l'école.

Notant rapidement sur son ordinateur les renseignements donnés par Anjali, Esther s'arrêta quand la jeune fille évoqua sa famille. Elle soupira et fit à nouveau face à l'indienne :

"Écoutez, je pense qu'il serait mieux pour vous que vous vous fassiez à l'idée que vous ne pourrez pas éternellement cacher cet élément de votre biographie à votre famille. Je ne garantis pas qu'ils l'acceptent tout de go mais... Vous ne pouvez pas vivre cachée. Ce pouvoir fait partie de vous et..."

Elle renifla légèrement avant de terminer sa phrase :

"... d'expérience vous ne vous sentirez bien que quand vous aurez fait votre coming-out mutant. C'est pas évident, ça se passe plus ou moins bien, mais le temps a du bon... Et puis, ils ne sont pas bêtes, non ? Il va bien falloir leur dire que vous êtes à l'Institut Xavier, non ? Alors, préparez-vous à cette idée, Mademoiselle..."

L'israélienne tiqua sur le fait que la punaise blonde s'était rendue pour une fois utile mais n'en pipa mot, se contentant de marquer le coup :

"Ne vous encombrez pas l'esprit avec ces questions purement matérielles. Quand vous serez un peu reposée, je pense que vous trouverez de bonnes âmes pour vous emmener faire du shopping. Et puis, vous pourrez vous arranger avec votre grand-père pour vous faire expédier des effets personnels. Quant au planning..."

Elle sourit légèrement.

"Vous devez être la première élève aussi pressée de travailler en classe ! Enfin... L'Institut assure tous les cours en lien avec votre mutanité. Pour le reste, vous serez inscrite dans l'école la plus proche correspondant à votre niveau d'éducation, tout simplement..."

Esther étendit ses jambes sur son bureau et conclut :

"Je pense que vous vous plairez chez nous. Nous avons eu un paquet de jeunes gens comme vous qui sont passés ici. Oui. Vous serez entraînée et vous pourrez même participer à des missions en conditions réelles... Oui, vous allez vous plaire..."

L'israélienne repensa à sa propre adolescence. Seule. Sans Institut ni guide... Pas la meilleure période de sa vie en somme. Mais un truc dans le discours d'Anjali la fit tiquer.

"Ah bon, un professeur en Inde vous a conseillé de venir ? Quelqu'un que nous connaissons ? En tout cas, il a bien fait... Oui, il a bien fait"

Anjali tiqua lorque le docteur lui conseilla de faire son coming out.
"Etes vous indienne madame? Connaissez vous l'honneur des familles à préserver et les mentalités de mon pays sur les mutants? Si je me dévoile, je suis morte aux yeux de mon père et interdite de retour dans mon pays. Surtout que là bas, ça tue les mutants pour un oui ou pour un non." sa voix trahissait une forte émotion, le léger trémolo l'empêche de bien s'exprimer en anglais.

Rebondissant sur le commentaire du docteur sur sa hâte à commencer à travailler en classe, elle sourit doucement.
"Il est connu que la liberté passe par le savoir. Et c'est encore plus important pour nous les femmes mutantes, n'est-ce pas?"

Mais elle rougit lorsque le docteur évoque son professeur indien.
"J'ignore si vous le connaissez, son école payait pas de mine mais il avait l'air de connaitre pas mal de mutants en inde. Le Professeur..." Anjali hésita un battement de secondes et finit par souffler: "...Ravier."
Elle espère que personne ne le connaissait sinon sa mission allait être bien difficile à accomplir songe-t-elle.

"Je suis née en Israël et toute ma famille y vit. Nous sommes une société moins traditionaliste mais je sais ce que c'est d'être coupée d'une patrie que l'on aime : les mutants n'y sont plus les bienvenus depuis bien une bonne année. Je n'ai aucune chance d'y retourner et..."

Elle marqua une pause, méditant sur son propre déracinement.

"Je comprends ce que vous voulez dire, Anjali. Aussi je vous propose un objectif plus simple : ne vous révélez peut-être pas en tant que mutante, mais déjà en tant que femme indépendante. Une révélation à la fois suffira amplement. Les traditions, comment dire ? Les traditions..."

Esther se redressa sur son siège pour prendre une attitude plus professorale.

"Les traditions sont, parfois, des instruments de pouvoir pour favoriser des catégories de la population au détriment des autres. Ou pour écraser les femmes comme chez vous. Franchement, ce n'est pas votre sexe qui fait de vous ce que vous êtes mais vos actions. Et c'est pour cela que l'éducation est importante..."

Elle s'amusait de ses propres paroles. Renouait avec ses anciens combats féministes du temps où elle était à l'université.

"Une chambre à soi, de l'argent et une bonne éducation, voilà ce qu'était pour Virginia Woolf les conditions sine qua non de la liberté pour une femme. Je ne crache pas sur toutes traditions ou sur tout folklore. Mais si ces derniers ne persistent que pour maintenir en vigueur une relation puante de type maître - esclave, elles doivent se réformer. Et vous êtes particulièrement bien placée, Anjali, tout comme moi, pour le faire..."

Le Professeur Kofman se leva et s'approcha d'Anjali. Elle s'installa derrière sa chaise.

"Dites-moi, comment témoigne-t-on de sa soumission, pardon, de son respect à l'égard d'un "supérieur" en Inde ?"

Elle sourit, tout en attendant la réponse de la jeune femme. Esther répliqua néanmoins :

"Ce Professeur Ravier m'est inconnu. J'imagine qu'avec un nom pareil, il doit s'agir d'un pseudonyme singeant le nom du fondateur historique de notre propre Institut..."

Un bruit déconcentra. Un bruit qui semblait provenir d'une bête ou d'un animal sauvage. L'israélienne alla se positionner à la fenêtre et observa...

Dans le jardin, Mevena et Josh étaient en train de se battre. Josh, visiblement, avait été touché par des ronces sauvages. Et la jeune fille, déjà très légèrement blessée, était sur le point de subir une attaque du lupin. Esther, hésita une seconde, à manifester sa présence mais...

... et si Josh réagissait mal à l'ordre qu'elle voulait lui lancer ? Et qu'il en profitait pour blesser encore plus sérieusement Mevena ? Il valait mieux qu'Esther intervienne directement, oui...

Rassénerée par la proposition du docteur Kofmann, Anjali aquieste:
"C'est déjà pas mal comme première étape, je me sens plus de taille à commencer ainsi. Merci Docteur. virginia Woolf était une femme forte pour oser dire celà à son époque. A nous de l'appliquer en version femmes mutantes!" fit-elle avec un clin d'oeil.

Elle rougit lorsque le professeur lui parle de soumission, se souvenant de sa salutation qu'elle avait faite par réflexe en entrant dans le bureau.

"Comme vous dites, le respect n'est pas pour un être supérieur mais une personne âgée, quel que soit son sexe, on l'appelle oncle, tante, mère, père, grand père ou grand mère. C'est plus affectueux, mais j'avoue avoir peu l'habitude de sortir de la maison familiale et d'avoir tout le temps salué ma famille ainsi que c'est devenu un réflexe. On pourrait le voir comme une soumission, question de culture."

Anjali se frotte le front en regardant par terre puis relève la tête et reprend.
"Je vous ai saluée ainsi car j'ai cru comprendre que vous êtes un peu comme un parent de remplacement dans l'institut en tant que professeur, vous transmettez votre savoir, comme le ferait un parent, aux jeunes générations." Anjali s'arrête de parler pensive, scrutant l'israelienne dans les yeux.
"Vous ne vous voyez pas ainsi?" demande-t-elle finalement.

Elle n'eut pas le temps de chercher une réponse sur la question du professeur Ravier, un grand cri d'animal sauvage la surprend. Elle suit Esther kofmann devant la fenêtre et retient un hoquet de surprise à l'a vue d'une sorte de bête étrange qui se battait face à une jeune fille indienne. Anjali frémit et se retient de l'interpeller, la situation semblait critique.

*Et si c'était l'indienne que je dois retrouver? Mev... Meve... Mevena Raï! Voilà, ça doit être son nom si c'est bien la seule fille indienne de l'école. Je suis mal si cette bête la tue, il faut absolument que je l'en empêche!*
Elle ouvre la fenetre dans l'intention de tenter d'aveugler la bête avec un rayon de lumière dans les yeux.

"Drôle de mère que je fait, j'ai un fils que j'ai jamais vu..." marmonna Esther tout en continuant à observer la scène du jardin.

A ce titre, Anjali eut plutôt un bon réflexe. A vrai dire, l'intervention était sobre et efficace. Si le lupin avait deux sous de jugeote, ça devrait lui suffire...

"Hum... Je n'ai jamais vraiment réfléchi à mon rôle exact. Professeur ? Chef de guerre ? Psychologue ? Les identités, on peut en avoir beaucoup mais... Ce qui compte c'est la relation avec les gens. On verra bien ce que ça donne avec vous..."

Kalalli intervenait. Très bien. Et Mevena... Mevena tombait dans les pommes. Esther se détourna de la fenêtre pour aller chercher le kit de premier secours qu'elle avait dans son bureau.

"Je crois que nous allons devoir poursuivre notre petite conversation au jardin..." lâcha-t-elle avant de s'avancer à nouveau vers la fenêtre.

"Oh, bordel !" lâcha-t-elle avant de filer hors de son bureau. Ils allaient voir de quel bois elle se chauffait...

Jardin

Anjali acquieste aux propos d'Esther et la suit dans le jardin au pas de course.

Jardin