[France] Première sortie depuis un long moment.

Samantha et sa mère purent s'enfuir sans problèmes supplémentaires jusqu'au milieu du chemin qui serpentait pour rejoindre la plage d'un côté, et la civilisation bretonne de l'autre. La, madame Lemoine stoppa sa marche rapide, essoufflée. Elle n'avait pas prévu d'être obligée de courir comme une dératée ce soir en particulier.

- Je...pff...faut prévenir...ton père...les places...de concert.

Elle s'était appuyée contre les massifs rochers bordant le sentier. Elle retira ses chaussures peu fait pour le sport, et qui lui vaudraient sans doute dès le lendemain des pieds pleins d'ampoules - un problème de la vie courante qui ne concernait désormais plus Samantha.

- Qui c'était...Sam ? Qu'est-ce qu'ils...te...nous voulaient ?

Elle n'avait pas complètement oublié les deux brutes qui s'étaient dirigées dans sa direction avec l'air intimidant.

- Il faut...prévenir la police ?

Elle sortit son téléphone, mais resta bloquée au moment de composer le numéro. Elle ne savait pas s'il fallait appeler la maréchaussée, son mari, des amis, Jésus ou les Rois Mages pour mettre un terme à cette extravagante situation.

- Et...je ne sais pas...comment on va te remmener.

Ils avaient prévu de partir par une nuit noire, dans laquelle personne ne remarquerait le corps particulier de la jeune mutante, mais la précipitation des évènements les avait poussées à fuir au beau milieu du crépuscule. Même si le jour faiblissait, un myope aurait compris que la jeune fille bleue à l'air liquide avait quelque chose de pas net.

Madame Lemoine courut donc sans poser de questions, suivie de sa fille qui jetait des coups d'œil en arrière pour vérifier si personne ne les suivaient. La mère de la mutante s'arrêta à mi-chemin environ et lui expliqua en reprenant son souffle qu'il lui faudrait appeler son père pour les places de concert. La jeune fille avait complètement oublié le concert face aux braconniers mais il n'était pas trop tard pour y aller.

Madame Lemoine n'avait pas des chaussures très adaptées à la course à pied et elle était en train de les enlever désormais. Maintenant qu'ils semblaient hors de danger, la mère de Samantha demandait des explications sur l'identité des brutes épaisses qui avaient manqué de les agresser toutes les deux. Elle lui demanda aussi si il fallait prévenir la police mais la mutante pensa que les braconniers étaient loin maintenant et que cela pouvait donc attendre.

Je pense que c'est des braconniers maman mais la police peut attendre, ils ont du partir maintenant.

La mère de la jeune fille avait sorti son téléphone et était bloquée, les doigts sur le clavier numérique comme si elle hésitait. Ceci intrigua Samantha qui regardait encore de temps à autre si il n'y avait pas le reflet d'un treillis qui apparaissait. Madame Lemoine lui déclara d'une voix gênée qu'elle ne savait absolument pas comment la ramener, le jour se couchant mais il ne faisait malheureusement pas assez sombre pour que l'on ne la remarque pas. Samantha réfléchissait à une solution mais elle n'en voyait que trois aussi mauvaises les unes que les autres.

Soit on attend ici jusqu'à la nuit en espérant que les hommes de tout à l'heure sont partis, soit on oublie la discrétion et on court jusqu'à la voiture ou enfin, tu tente de ramener la voiture jusque là, si elle passe.

[Petit détail : comme tu joues Samantha, il serait plus logique que pour désigner Mme Lemoine tu utilises "sa mère" ou quelque chose d' approchant...]

- Des BRACONNIERS ?

Madame Lemoine avait crié sans s'en rendre compte. Elle mit la main devant sa bouche une fois le fait accompli, mais la surprise avait été trop forte. De là où elle était, elle ne pouvait absolument pas deviner ce qui s'était passé : il aurait tout aussi bien pu s'agir d'un groupe de campeurs hostiles car désirant consommer des produits pas nécessairement licites. Ou bien de pseudo-militaires désireux de tester discrètement des techniques de combat en milieu aquatique.

Or elle partageait les points de vue de sa fille sur les pêcheurs, et encore plus sur les pêcheurs vandales.

- Mais il FAUT appeler la police, Sam ! Tu as leurs noms ? Leur signalement ? Tu sais d'où ils viennent ?

Elle regardait sa fille avec insistance, prête à appeler la marechaussée dès que les informations seraient à sa disposition. Se souvenant d'un autre petit souci, elle ajouta, adoucie :

- S'ils arrivent, tu te cacheras, pour qu'il n'y ait pas d'histoires. Je dirai que c'est moi qui les ai rencontrés, ce n'est pas totalement faux, mais il faut que tu me dises tout ce que tu sais.

Samantha avait fait une grimace lorsque sa mère avait crié puis avait soupiré devant son laisser-aller. N'importes quelles choses banales pouvaient déclencher une catastrophe si cela amenaient à la découverte de la jeune fille par une personne extérieure à son entourage immédiat. La surprise de sa mère passée, elle lui posa toute une batterie de questions dont elle ne connaissait que la moitié des réponses. La mutante détestait ses hommes qui n'avaient aucun respect pour la nature et ses habitants et elle espérait les voir punis. Seulement elle ne savait pas grand chose d'eux à part que les acheteurs étaient bretons et que les pêcheurs étaient étrangers.

Sa mère avait retrouvé son sang-froid et lui conseilla d'un air plus adouci de se cacher en cas où les brigands reviendraient. Elle lui demanda aussi de lui dire tout ce qu'elle savait et ce n'était pas grand chose. D'une voix hésitante, elle commença son récit puis elle prit de l'assurance au fur et à mesure.

Il y avait d'abord les six hommes que tu as vus maman, ce sont ceux qui ont acheté les poissons. Ceux là sont des bretons et un se nomme Loïc alors qu'un autre s'appelle Ludo ou Ludovic. Ensuite il y a les marins, quatre étrangers et ce sont eux qui ont pêché les poissons surement. Aucun d'eux n'avaient d'armes plus dangereuses que des couteaux d'après ce que j'ai pu voir. Parmi leurs marchandises il y avait un espadon et d'autres espèces en danger je suppose. Les six bretons avaient apparemment l'intention de revendre à la pièce leurs butins. C'est tout je crois.

Mme Lemoine grimaça quelque peu en entendant sa fille. Les prénoms rapportés désignaient bien quelques milliers de personnes, en Bretagne en particulier, et le problème aurait sans doute été plus simple pour elle si les méchants s'étaient nommés Gontran et Théodule.

- Il faudrait mieux pour les identifier. Et pour les marins étrangers, c'est la même chose, il faudrait savoir d'où ils viennent. Tu te souviens de ce qu'ils ont dit ?

La lutte contre les braconniers occupait visiblement tout son esprit.

- Je peux appeler ton père pour qu'il vienne m'aider. Ensemble, on va retourner sur la plage pour inspecter. Je ne suis pas certaine que les hommes m'aient reconnue, et de toute façon, nous pouvons passer sans soucis pour des promeneurs du soir. Tant qu'ils ne savent pas que nous te connaissons...

Elle regarda sa fille d'un air décidé.

- Est-ce que ce plan te va ? Pendant ce temps, tu pourrais te cacher dans la mer, ou retourner discrètement en direction de la maison...

Visiblement, la mère de Samantha ne se détendrait qu'en sachant que les braconniers avaient été appréhendés - ou en étant sûre qu'elle ne pouvait plus rien faire en ce sens.

Samantha faisait des efforts pour se rappeler de tout ce qui c'était passé mais le soulagement d'avoir échappé aux pseudo-militaires et le choc de son affrontement avec Loïc avait effacé les détails de la rencontre entre les braconniers étrangers et leurs clients.

Ils ont éliminé tout un groupe de quelques choses ce qui contentaient les autres sinon ils parlaient dans une langue que je ne comprends pas entre eux. En tout cas ils m'ont fui comme la peste.

Quand sa mère lui raconta qu'elle avait l'intention de retourner sur la plage avec son père elle paniqua totalement et lui parla très vite.

Il ne faut pas y retourner, ils ont voulu se débarrasser de toi et c'est pour cela que je suis sortie de ma cachette. Même si vous vous faites passer pour des promeneurs ils vous élimineront!

Samantha préférait cent fois que les braconniers s'en sortent que perdre ses parents dans la tentative de les amener à répondre de leurs actes devant la justice. Quand elle lui proposa de repartir à la maison ou de ce cacher à nouveau dans la mer sa décision fût vite prise.

Si tu veux vraiment retourner sur la plage je veux que vous soyez dans mon champ de vision au cas où car sans t'offenser maman, il y a plus de chance que j'arrive à me débarrasser d'une de ces brutes que toi ou papa.

En fait, elle souhaitait ardemment que sa mère abandonne la folle idée de retourner sur la plage et qu'elles rentent à la maison toutes les deux. La mutante adorait la mer mais elle aimait beaucoup plus ses parents et ferait tout pour les protéger.

Madame Lemoine sembla refroidie dans ses ardeurs de militante écologiste par la frilosité de sa fille. Elle se passa la main dans les cheveux en regardant par terre, signe d'une réflexion intense, et sans doute d'un conflit intérieur non moins fort. Elle était tiraillée entre ses convictions et les appels à la prudence de sa progéniture.

- Bon. Soit.

Elle haussa les épaules.

- Nous n'y retournons pas. Mais il va falloir que j'aille séance tenante au commissariat, pour tout expliquer. Par téléphone, ils ne viendront pas, l'endroit est trop difficile d'accès, et ce pourrait être un canular, alors que si j'y vais en personne...

Le compromis lui semblait satisfaisant, elle reprenait du poil de la bête.

- D'abord, j'appelle ton père pour lui dire d'aller chercher tes places. Ensuite, il va falloir que j'aille voir les policiers.

Un problème se posait dans son esprit, et l'indécision refit son apparitions sur ses traits.

- Mais il faut aussi que tu rentres...je ne sais pas si tu préfères venir avec moi, ou attendre ici que je revienne avec les policiers...

Après tout, elle avait été quelque peu surprise que sa fille préfère rentrer avec elle, un peu plus tôt, plutôt que prolonger sa journée exceptionnelle dans la nature. Du coup, elle ne cherchait même plus à savoir ce qu'elle désirait.