Perth, Australie

7h30, Perth Australie – Chambre d’Ephram Paye

« Tu tu tu tu !! » Fut ce qui tira Ephram Paye d’un profond sommeil. Le bruit du réveil avait réussit à le tirer d’un de ses rêves qui le hantaient depuis quelques nuits. Ephram n’était pas de ceux qui pouvaient se lever en faisant un mauvais rêve, ainsi remercia t-il l’objet de l’avoir réveillé. Il s’assit, le torse nu et en sueur, et se remémora le rêve. Il s’était encore vu entrain de se recouvrir d’écorce d’arbre, puis de toutes les couleurs autour de lui et courait dans une rue où il n’y avait personne. Et puis le réveil avait sonné. Est-ce que ce rêve avait une signification particulière ? Car il le faisait depuis quelques temps. Il y réfléchit le regard dans le vague, puis secoua sa tête et se leva.
En bas il entendait déjà ses parents s’affairer dans la cuisine. Ils avaient réussit à prendre quelques jours de congés en même temps. Ephram sourit à cette pensée puisque son père ne pouvait s’empêcher d’aller voir si tout allait là où il travaillait. Bref, le jeune homme alla à la douche et quand il en sortit il était vêtu d’un short de plage bleu avec des grandes fleurs blanches arrivant au-dessous des genoux, d’un t-shirt jaune or avec au milieu un smiley « = ) » noir et de tennis jaune aussi. Il revint dans sa chambre, prit ses gants en néoprène qu’il revêtit posa la bague de sa mère par-dessus, son collier et sa montre. Il jeta un bref coup d’œil dans un miroir et se passa une main dans les cheveux, puis descendit enfin.

Il signa (dans le langage des signes) un « bonjour » accompagnant cela d’un grand sourire à ses parents qui lui sourirent en retour. Sa mère posa directement devant un bol de céréales, des biscottes et un fruit. Ephram grimaça intérieurement, se disant que sa mère continuait à le couvrir un peu trop. Ils avaient toujours été là et Ephram n’aurait pas assez de temps dans une vie pour les remercier de cela. Malgré tout ce respect il était irrité quelques fois car ils continuaient à le gâter comme un enfant.
Sa sœur n’était pas là, elle faisait un stage avec son groupe de classe à Sydney et ne reviendrait que dans deux jours. Ephram et elle conversaient tous les soirs par visioconférence pour que le jeune homme puisse signer.

Bref, aujourd’hui il n’avait pas cours et avait décidé d’aller marcher un peu dans la ville, rentrer dans un Fish-and-chip, prendre des photos – oui car Ephram depuis quelques temps c’était passionné de photographie- ou encore aller à l’aquarium. Après avoir finit son petit-déjeuner, il remonta dans sa chambre, prit son calepin et un stylo et passa son appareil photo autour du cou. Il redescendit et dit au revoir à ses parents en se courbant comme les japonais, puis avec un autre sourire sortit.

9h – Fish-and-chip

Ephram s’arrêta devant le Fish-and-chip et prit son appareil photo. Il prit un cliché de la façade orangée où trônait aussi l’enseigne de l’établissement. Ephram entra et signa « bonjour » au gérant qui lui sourit. Il fallait dire que dans son quartier tout le monde le connaissait au moins de nom. Mais il aimait bien venir ici pour siroter une boisson rafraichissante ou grignoter quelque chose. Du coup, le patron avait apprit quelques signes pour comprendre Ephram. Comme quoi tous les hommes n’étaient pas égoïstes. Ephram s’assit près d’une vitre et jeta un coup d’œil au-dehors tandis que le patron déposait un verre de sirop à la menthe.

[hrp : je prends le relais pour les pnj, tu ne peux faire jouer qu'Ephram à présent ]

A une heure aussi matinale, il n'y avait presque personne dans le restaurant. L'établissement était par contre bondé aux heures de repas, et jouissait d'une ambiance conviviale et agréable. Par la vitre, Ephram pouvait observer tranquillement les passants.

Harold, le propriétaire, était retourné à ses affaires au comptoir. Il était occupé à préparer un nouveau cadre pour sa collection : en effet, les murs du restaurant étaient recouverts de photographies de visiteurs, c'était le petit plaisir de Harold de garder un souvenir de ses clients, même les plus anonymes. C'était aussi pour ça qu'il s'était pris d'affection pour Ephram, d'ailleurs, la photo du jeune homme figurait parmi les autres.

L'homme replet et bon vivant dont la calvitie commençait à bien se voir, avait l'air satisfait. Il clipsa les bords du cadre, retourna la photo et la contempla en hochant la tête. Il sortit du comptoir, arpenta le restaurant de long en large à la recherche de l'endroit désiré, puis jeta son dévolu sur une zone, non loin du menu.

"Alors, qu'est-ce que t'en dis mon garçon ?" dit-il après s'être retourné. De là où était Ephram, il ne voyait qu'une silhouette humaine. En se concentrant un peu sur l'image, il put discerner ce qui ressemblait une paire de bras supplémentaires au niveau des côtes de l'homme qui avait été pris en photo.

Ephram savait que le matin il y avait moins de monde qu’à midi, et c’était pour cela qu’il venait à une heure matinale. Cela contrastait fortement avec son envie d’aller voir du monde, d’aller vers les gens, mais aussi son besoin parfois, de se retrouver seul, dans la solitude qui l’avait accompagnée toute son enfance et qu’il ne pouvait pas tout simplement effacer comme on efface un numéro d’un portable. De ce fait, il avait reporté son attention au dehors, appuyant légèrement sa tête contre la vitre et caressant du bout des doigts son sirop à la menthe. Il avait un léger sourire qui flottait sur ses lèvres et cela était du au fait qu’à ce moment il pensait à sa sœur, mais aussi à ses parents et puis à pleins de petits bonheur qu’il avait eut. De simples pensées mais qui pour lui signifiait beaucoup.

Il but une gorgée de sirop à la menthe et poussa petit soupir silencieux –puisqu’il était muet- et observa Harold qui déambulait dans son établissement avec quelque chose à la main, mais il ne pu pas voir ce que c’était l’homme étant de dos. Malgré tout, le jeune homme se demandait si ce n’était pas un autre de ses cadres qu’il aimait accrocher sur les murs. Parfois Ephram lui avait même servit avec joie de photographe, prenant en photo des touristes de passages ou tout simplement un habitué …
Cette intuition fut confirmée lorsqu’Harold le héla en lui demandant ce qu’il en pensait. Tout d’abord Ephram leva un pouce, la photo était bien cadrée par rapport aux autres. Il essaya de s’intéresser au sujet, mais du faire un effort. Il déduisit que c’était une personne, mais lorsqu’il se pencha un peu en avant pour mieux voir, ses yeux s’exorbitèrent et s’il avait pu lancer ne serait-ce qu’un son, cela aurait été « Oohh my God !! ». Il se redressa néanmoins avec raideur, les sourcils froncés et alla lentement vers Harold, la tête fourmillant de pensées.
Une personne « normale » ou même atteinte d’un handicap n’aurait pas eut une paires de bras en plus !! C’était physiquement impossible. Deux solutions se posaient à lui : soit c’était un canular et Harold lui aurait fait une belle peur, soit … soit c’était un mutant. L’une comme l’autre portaient des conséquences. Il était lui-même un mut ant !! Voudrait-il finir accroché à un mur où l’on pouvait voir fixer comme une bête de foire ? Malgré tout, il avait un grand respect envers Harold et décida de lui poser des questions pour en avoir le cœur net. Il détacha avec difficulté ses yeux de la photographie et d’abord interrogea Harold des yeux. Puis il écrivit, sa main tremblait un peu :

« Harold … Qu’est-ce … où avez-vous vu ce … cet homme ? » Il n’avait pas pu dire le mot mutant, il avait peur de faire une gaffe. La question était certes stupide, mais pour Ephram c’était peut-être un grand changement. Il n’avait jamais rencontré des mutants et de toute façon il n’était pas sûr d’en être un, même s’il y avait de grandes chances pour.

Harold lut le mot d'Ephram et parut surpris de l'expression du jeune homme. Il se frotta nonchalament l'arrière du crâne avant de répondre. Sa décontraction contrastait avec la stupéfaction du mutant.

"Ici-même pardi ! C'était il y a deux jours je crois. Il est passé au restaurant et m'a fait une énorme commande, j'avais jamais vu quelqu'un manger autant, et pour tu sais comme moi qu'on a des gloutons ici." expliqua-t-il avec une expression amusée sur les traits.

"C'est dommage que des clients lui aient cherché des problèmes, il était très poli avec moi." ajouta-t-il. Il n'avait pas l'air surpris, ni même dégoûté ou hostile. Le vieil homme avait l'air plutôt fier d'avoir reçu un être aussi particulier dans son établissement.

Deux personnes en imperméables pénètrèrent à ce moment dans le Fish and Chips. Il s'agissait d'un homme et d'une femme, la trentaine, au physique et à l'apparence soignée. Il s'avancèrent vers Harold et Ephram, et dégainèrent une insigne de la police du comté.

"Inspecteur Willis, voici l'inspecteur McDonald." dit l'homme en se présentant ainsi que sa collègue. La femme observait avec intérêt les cadres accrochés au mur.

"Nous menons une enquête sur un meurtre crapuleux qui a eu lieu en ville, nous aurions quelques questions à vous poser." expliqua l'homme en guise d'introduction.

"Euh, oui je... Allez-y." répondit Harold en clignant des yeux.

"Un meurtre en ville, ça par exemple..." ajouta-t-il, incrédule.

L'inspecteur se décala vers le comptoir pour s'éloigner d'Ephram, probablement pour plus d'intimité. L'inspecteur McDonald quant à elle, continua à observer les photos, et gratifia Ephram d'un sourire poli.

La façon dont Harold parla de l’homme aux quatre bras, lui fit monter le rouge aux joues. Il se demanda en se calmant comment il avait pu se laisser aller et montrer sa stupéfaction à se point. Mais bon, circonstances atténuantes, ce n’était pas tous les jours qu’il voyait une photo d’un homme avec une paire de bras en plus. Cependant le jeune homme sourit bien vite à l’expression amusée du patron du fish-and-chip.

Puis, il fronça les sourcils, écoutant la suite. Il était toujours aussi déçu en entendant ce genre de choses. Pourquoi les gens cultivaient autant l’intolérance, cela contrastait tellement avec d’autres personnes comme Harold, pourquoi fallait-il que certains individus ne voient que la différence de l’autre et pas les qualités au-dessus de l’apparence ? Il se sentait proche de cet inconnu même s’il ne le connaissait pas, car lui aussi avait connu les quolibets et les problèmes à cause de son mutisme. Il n’imaginait même pas s’il révélait sa condition de mutant, car maintenant il en était persuadé.

Ephram allait répondre quelque chose de gentil, pour montrer à Harold qu’il ‘avait pas eut peur, juste qu’il avait été étonné de voir un … mutant ici, mais deux personnes entrèrent et il abaissa son calepin. Le jeune homme resta sur place tandis que les deux inconnus, un homme et une femme très propres sur eux. Lorsqu’ils se présentèrent comme agents de l’autorité, il frissonna en entendant le mot meurtre, puis fronça les sourcils en observant Harold.
Celui-ci s’éloigna jusqu’au comptoir avec l’inspecteur, la femme restant près d’Ephram à observer les photos. D’ailleurs elle lui sourit. Ephram en fit de même, puis se tourna vers Harold et signa :

« Qu’est-ce qui se passe ? », puis se disant qu’il n’aurait pas de réponse il regarda une dernière fois la photo, leva son appareil, mais se ravisa et le baissa, et repartit vers sa table, plus proche du comptoir. Curieux, il pourrait peut-être entendre quelques brides de la conversation. Des questions fusaient dans sa tête. Est-ce que l’homme habitait loin d’ici ? De parlait l’inspecteur quand il avait dit « meurtre crapuleux » ? Harold, ou même le mutant avaient-ils quelque chose à voir là-dedans ? Il posa ses mains gantées qui tremblaient quelque peu sur la table en bois. Il eut envie de retirer ses gants mais se ravisa et observa la femme d’un œil discret.

Comme il s'y attendait, Harold était trop occupé avec l'inspecteur pour faire attention à lui. Il semblait en pleine discussion, malheureusement de là où il était, le jeune homme ne parvint pas à comprendre grand chose, mis à part les mots "mutant dangereux", "corps" et "ruelle".

L'inspecteur McDonald se rapprocha de la photo que Harold venait d'accrocher au mur et la regarda avec attention. Elle fit un petit signe de tête à son collègue, puis se rapprocha de la table d'Ephram.

"Je peux ?" demanda-t-elle en s'installant sans attendre de réponse.

"Tu habites dans le quartier ?"

Le jeune homme ne parvint pas à comprendre la conversation qui avait lieu entre l’inspecteur et Harold, et les rares mots qu’il avait pu capter ne lui servaient pas à dresser un portait de la situation. Mais dès qu’il rentrerait chez lui il écouter les informations et ferait des recherches sur Internet. En tout cas il espérait que le patron du fish-and-chip n’est rien à voir dans cette affaire, il l’appréciait vraiment beaucoup. Il joua donc avec le verre de sirop et le tourbillon de boisson était pareil au tourbillon qui passait dans son esprit.

Il fut cependant tiré de ses méditations par l’inspectrice, McDonald s’il se rappelait bien. Même s’il ne la jugeait pas, le simple fait qu’ils viennent voir Harold la rendait quelque peu antipathique, ainsi que son partenaire. Elle demanda à s’asseoir, mais il comprit bien que c’était une question rhétorique puisqu’elle s’assit avant même d’avoir une réponse. Ephram fit tout de même un signe de tête et son léger sourire espiègle habituel pointa sur son visage. Ephram arrêta de jouer avec sa boisson et planta ses yeux bleus océan dans ceux de la femme qu’il lui avait demandé s’il habitait par ici. Ephram hocha de la tête et leva un pouce ganté. Peut-être allait-elle trouver ça impoli et il écrivit sur son calepin :

« Oui j’habite à deux pâtés de maison. » Il montra cela à la femme et attendit sa réaction. Il ne voulait pas être trop précis, ayant déjà vu quelques films policiers il connaissait leur méthodes. Ils posaient des questions anodines mais les analysaient de fond en comble par la suite.

MacDonald parut surprise de voir Ephram écrire sur son blocnote pour lui répondre, puis elle hocha silencieusement la tête en étudiant le visage du jeune mutant.

"Cet appareil photo... C'est toi qui a pris ce cliché au mur ?" demanda-t-elle en pointant la photo que Harold venait d'accrocher. Elle avait parlé avec neutralité, son visage ne trahissant rien de ce qu'elle pouvait penser.

Ephram vit la surprise se peindre juste quelques secondes sur le visage de l’inspectrice, lorsqu’elle aperçut qu’Ephram écrivait pour lui répondre. Cela faisait souvent cet effet aux gens lorsqu’ils apprenaient d’une manière ou d’une autre que le jeune homme était muet. Et ça ne le choquait plus autant qu’avant, lorsque certains soirs il rentrait les larmes séchées sur ses joues parce qu’un professeur lui avait dit de répondre à une cause et qu’il n’avait pas pu faire autrement que de faire des gestes de la main ….
Cependant la surprise de la femme ne dura pas longtemps et le jeune homme regarda son appareil photo lorsqu’elle lui demanda s’il avait prit celle accrochée au mur. Il n’essayait même pas de comprendre à quoi elle jouait, elle devait être entraînée à ne rien laisser paraître. Il resta néanmoins sur la défensive et écrivit :

« Non, d’ailleurs avant que vous n’entriez j’étais entrain de le demander à Harold … enfin au patron qui avait avait prit cette photo. Lui-même d'après ce que j'ai compris ...» Il venait de faire une gaffe, en prononçant le nom du gérant il signifiait qu’il le connaissait. Bah de toute façon ce n’était pas un secret ! Il y avait même sa photo à lui sur un des murs. Il était vrai qu’Ephram en avait prit quelque unes pour Harold, mais il était sur et certain de n’avoir jamais prit la photo du mutant, d’ailleurs il avait été très surpris en la voyant.
Ephram montra ce qu’il avait écrit à la l’inspectrice McDonald. Il remit le calepin devant lui et ajouta :

« C’est arrivé il y a longtemps ? Je n’en ai pas entendu parler aux infos … » demanda t-il par écrit en remontrant le bloc-notes à la femme et feignant la naïveté sur son visage. Ephram avait fait les calculs : Harold lui avait dit que le mutant était venu là il y avait deux jours, donc même si le meurtre avait eut lieu dans cet intervalle et en supposant que le mutant ait quelque chose à voir là-dedans, il l’aurait entendu ou lu quelque part. Il y avait quelques mystères là-dessous pensa t-il en regardant la femme.

L'inspectrice lu le message, puis reporta son regard sur Ephram.

"Je vois..." dit-elle en hochant la tête. "J'imagine donc que tu n'as jamais rencontré cet homme dans le quartier ?" dit-elle en désignant le mur où étaient accrochés les cadres.

"Nous voulons avant tout éviter un vent de panique dans la ville pendant que l'enquête est menée, c'est pour ça que très peu de gens sont au courant. Les gens ont déjà assez peur des mutants comme ça, inutile de rajouter à l'hystérie."

Ephram fit non de la tête quand l’inspectrice lui posa une autre question, à savoir s’il avait déjà vu l’homme dans le quartier. Bien sur que non, puisqu’il avait été étonné de le voir en photo quand Harold lui avait dit qu’il été venu là il y avait deux jours et même si ce n’était pas tout à fait pour ça qu’il avait été étonné, mais bien parce qu’il s’agissait d’un mutant comme lui, Ephram ne l’avait jamais vu par ici. Le jeune homme porta son regard sur les photos accrochées, suivant celui de la femme sur celle du mutant. Que lui était-il arrivé ?

Il sentit son pouls s’accélérer et se ne pu que se féliciter d’avoir mit ses gants, car il était sur que s’il ne les avait pas mit, Ephram se serait recouvert du bois de la table. Bref, la dernière phrase de l’inspectrice McDonald vint rajouter du trouble sur son avenir de mutant. Les gens ne les aimaient pas, c’est ce qu’elle avait dit, mais elle exagérait sans doute, car il n’y avait pas de vent d’hystérie ici dans son quartier en tout cas. Peut-être avait-il formé cette pensée pour se rassurer, mais Ephram savait qu’elle avait raison.

« Cet homme est mort ? » écrivit-il ensuite, pleinement conscient que cette information, si elle était vérifiée, devait être top secrète, mais Ephram voulait en avoir le cœur net. Si elle posait des questions sur l’homme, il devait bien avoir quelque chose à faire dans l’enquête. Ephram glissa son calepin vers la femme et observa ses propres mains, n’osant pas affronter son regard et la brutalité de sa possible réponse positive. Il ne connaissait pas cet homme, mais il était un mutant tout comme lui et il voulait en savoir davantage sur ce qui c’était passé. Sa curiosité avait prit le pas. Malgré tout, il faisait attention à ne pas aller trop loin.

MacDonald pinça les lèvres et se leva de la table.

"Désolée, mais cette information est confidentielle. Merci pour ton aide." dit-elle au jeune mutant, avant de rejoindre Lewis et Harold au comptoir.
Cette affaire faisait bien de mystères...

Les deux inspecteurs discutèrent avec Harold dix bonnes minutes, prenant des notes de temps à autres à l'aide d'un stylet sur un PDA, puis prirent congé et quittèrent l'établissement comme ils étaient venus.

Harold semblait soucieux. Sans un regard vers le mur aux photos, il se mit à essuyer nerveusement des verres avec un torchon.

Le jeune mutant, qui alors se doutait seulement d’en être un, avait visé juste. La question dérangeait et la femme n’allait surement lui donner à lui, un civil, des informations supplémentaires sur cette affaire. Bref, celle-ci se leva, et alla rejoindre son collègue. Ephram sa suivit du regard et continua de temps à autres de leur jeter des regards, se demandant ce qu’ils pouvaient bien demander à Harold, ou alors il observait la photo qui faisait tant parler d’elle ainsi que son sujet et surtout lui. Cette affaire était bien gardée et il lui serait sans doute bien difficile de trouver des informations là-dessus.

Ephram leur lança un regard neutre lorsqu’ils prirent congé d’Harold et dès qu’il fut sur qu’ils étaient partis, il se leva de sa chaise sans un bruit et s’avança vers le patron du Fish-and-chip qui essuyait nerveusement ses verres. Un geste typique de la nervosité, puisqu’il semblait les regarder d’un air troublé, que bien sur Ephram entrapercevait. Il posa une main sur le comptoir, et observa le front du gérant. Le jeune homme tapota du doigt sur la table, pour attirer son attention, puis signa :

« Harold … sa va aller ? Que c’est-il passé avec cet homme ? » questionna t-il avec ses mains avec un air légèrement anxieux qui s’était peint sur son visage. Il regarda tout autour de lui, comme si la question pouvait s’y trouver et son regard se posa encore une fois sur la photo du mutant.

« Vous devriez laisser ce verre tranquille. Il brille déjà assez. » continua t-il à signer en lui faisant un léger clin d’œil pour essayer de détendre l’atmosphère qui était devenue quelque peu tendue avec l’arrivée des deux agents.

Harold ne comprit que le début de la phrase d'Ephram. Après lui avoir demandé d'écrire avec un brin de gêne devant son ignorance, Harold répondit enfin, délaissant momentanément le verre qu'il faisait luire.

"Je suis pas censé t'en parler... Mais t'es un brave petit, je sais que je peux te faire confiance pour garder ça pour toi."

Sur ce mot, le gérant se pencha vers Ephram, accoudé au comptoir.

"Paraîtrait que l'homme de la photo est suspecté dans une sale affaire. La police est à sa recherche pour l'interroger mais personne ne l'a vu depuis hier après-midi apparemment... Je devrais peut-être retirer sa photo..." expliqua-t-il avant de s'interroger sur la photographie.

"Bon en tout cas, promets-moi de faire bien attention à toi là dehors, d'accord ?"

Sur ces mots, le vieil homme recommença à vaquer à ses occupations. Quelques clients firent leur entrée dans le restaurant pour prendre la formule petit-déjeuner. L'heure avançait.

Ephram était tombé sur l'artère principale de la ville. Les commerces ouvraient tranquillement, et les gens s'affairaient ça et là avec animation. C'est la bibliothèque qui croisa la première le regard du jeune muet.

L'édifice aux lignes épurées se trouvait à l'angle d'une intersection qui coupait l'avenue principale. En s'en rapprochant, Ephram fut surpris par le miaulement d'un chat dans une ruelle adjacente, ainsi des bruits suspects de bagarre. Quelqu'un passait un sale quart d'heure là-dedans.

Quelle ne fut pas la surprise d'Ephram lorsqu'il remarqua un homme d'allure robuste et muni de deux paires de bras, aux prises avec trois voyous, d'après leur style vestimentaire.
Malgré l'avantage génétique que lui fournissait objectivement ses deux bras supplémentaires, l'homme avait l'air plutôt mal parti. La ruelle était plus sombre car la lumière du soleil ne l'éclairait que partiellement, mais le jeune mutant put néanmoins voir son visage. Aucun doute n'était possible. Il s'agissait d'un homme d'une trentaine d'années, dont les vêtements sales et déchirés indiquaient beaucoup sur ses conditions de vie.
D'après l'éclat qu'Ephram vit miroiter, l'un d'entre eux au moins, était armé d'une arme blanche.

Deux des types plaquèrent le mutant contre le mur en lui tenant les bras.

"T'es pas le premier et pas le dernier mutos qu'on plantera mon gros !" jeta le type au couteau avec mépris.

Alors qu'Ephram pénétrait dans la ruelle ombragée, il eut l'impression de laisser derrière lui un autre monde : l'innoncence peut-être, la naïveté d'avoir jusqu'ici cru évoluer dans une ville sans vices, loin du mal.

Par chance, les voyous anti-mutants ne l'avaient pas vu arriver, trop occupés qu'ils étaient à passer à tabac l'homme à quatre bras. Ce dernier portait des marques de coups au visage : lèvre fendue, zones rouges qui promettaient de beaux hématomes violacés pour dans quelques heures.

L'appareil photo d'Ephram heurta le type au niveau de la tempe. Le choc et la surprise le déséquilibrèrent. Il lâcha son couteau par réflexe, couteau qui tomba parmi les détritus qui jonchaient le sol, et tituba sur le côté en portant sa main à sa tête.

"Te mêle pas de ça gamin !" cria l'un des deux types.

"Vince ? Ca va ?" demanda-t-il à celui qui devait être le leader du trio.

"Tu vas me le payer, petit..." lança Vince en se redressa. "Tu cherches le contact, c'est ça ? Allez amène-toi !"

L'appareil de photo d'Ephram quant à lui, tomba lourdement par terre et le bruit qu'il fit laissait à présager que quelque chose de très important s'était cassé.

Ephram attendait que les types se décident à approcher tout en tentant d'activer son pouvoir. Sa main restait pourtant désespéremment humaine !
"Vince" finit par s'avancer à sa rencontre, après avoir demandé à ses comparses de maîtriser l'homme à quatre bras.

Il adopta une posture typique du combat de rue, bien moins ordonnée que celle d'Ephram. Poings levés au niveau des joues, il observait Ephram de son oeil torve.
Le jeune mutant se rendit rapidement compte de l'agilité de son adversaire. Une feinte sur la droite plus tard, un jab du gauche atteint le muet sur la pomette droite. La douleur jaillit dans sa joue.
Les vêtements amples et la pénombre de la ruelle n'aidaient pas Ephram à anticiper les mouvements de son adversaire.
Derrière, les encouragements des deux loubards fusaient.

Le loubard n'avait pas paru impressionné par la posture de combat d'Ephram, et il l'apprit à ses dépens lorsque la manoeuvre du jeune mutant le projetta au sol, le souffle coupé.
Vince réagit néanmoins avec vivacité et toujours au sol, balaya à son tour Ephram avant que le mutant puisse s'écarter.
Il tomba lui aussi sur le sol, et le choc ne fut pas agréable malgré les techniques de réceptions que l'on enseignait en arts martiaux.

C'est au moment du choc contre le bitume sale de la ruelle que la sensation reconnaissable de son pouvoir se manifesta dans sa main. La bague que sa mère avait offerte à Ephram sembla fondre sur lui, se répondre sur l'épiderme de sa main, jusqu'à ce que celle-ci soit entièrement recouverte d'une fine pellicule dorée. La bague avait quant à elle disparu.