Chambre d'Ivy et Jenifer

Il semblait y avoir eu un petit quiproquo sur le terme de bouddiste mais Angel, trouvant celà charmant, ne démentit pas et l'observa avec un air amusé.
Lorsqu'Ivy lui parla des autres, Angel se sentit légèrement coupable. Il ne lui avait pas vraiment menti, non, ou alors par omission.
Angel fit donc semblant de rien et laissa Ivy changer de sujet.
Quelque chose à faire? Il ne voyait pas. Il était bien là, tranquille et...

"Rah les cours!!!On a cours, on va être en retard si on se dépéche pas!"

Angel s'était levé en un bond en faisant cette constatation. Ce n'était que son troisième jour de cours et il n'avait pas envie d'être en retard.

Ivy sortit de sa réflexion en tapant du poing sur sa paume ouverte.

"Ahhh voilà, c’était "les cours" qu’il fallait trouver !" s’exclama-t-elle. Elle n’était franchement pas pressée d’y aller, mais elle n’avait pas non plus envie de tendre le bâton pour se faire battre : il était trop tôt dans la journée.

"Allez allez, on se dépêche !" lança-t-elle en suivant le mouvement d’Angel, à cela près qu’elle se dirigea vers la salle de bain. Elle ne s’embarrassa pas de fermer la porte, elle voulait simplement se laver le visage. Elle fit couler l’eau du robinet, tout en continuant à parler toute seule. Entre deux éclaboussures, on put néanmoins distinguer :

"Sors de ce peignoir tout de suite, Jen !"

Ses ablutions terminées, elle s’essuya vivement le visage et jeta un dernier regard gourmand au plateau, avant de quitter la chambre.

"On rangera plus tard !"

Cours puis barbac

Ivy se leva d'un bond et se rua dans la salle de bain. Pendant ce temps, Angel rangea les reliefs de nourriture qui jonchaient le lit, jettant un sourire contrit à Jennifer.
Ivy ne tarda pas à ressortir, plus fraiche qu'une rose, quelques gouttelettes d'eau perlant dans ses cheveux.
Angel dut avoir un sourire un peu niais pendant quelques secondes mais la jeune fille l'exhorta à la suivre.
Angel hocha la tête.
"Okay m'dame Ivy!"

Il s'inclina à nouveau, lança un sourire éclatant à Jen et ne tarda pas à sortir lui aussi.

[hrp]Désolé, mieux vaut tard que jamais, j'ai loupé un passage je crois...[/hrp]

Jen se jeta elle sur l'armoire pour récupérer des affaires, elle entra dans la salle de bain et pendant que Ivy se débarbouillait, Jenifer sauta dans ses fringues.

Alors qu'Ivy sortait suivie de Angel, Jen regarda le sourire du jeune homme et, un petit pain pendu à sa bouche en prémices à être dévoré, elle se contenta de pousser le garçon dehors avant de passer elle-même la porte.

cours puis brieffing

New York

Les NGX étaient rentrés entre chien et loup pouvait-on dire, en pleine nuit, comme des voleurs. L'institut était endormi. C'était d'ailleurs assez étrange de voir ainsi les couloirs vides et dépouillés de la vie qui grouillait en eux chaque jour. A peine arrivée, Ivy s'était éclipsée dans sa chambre sans demander son reste à l'équipe, encore chouignante de ce qui s'était passé durant la mission. Qu'allait-elle bien pouvoir faire maintenant ?

En entrant dans sa chambre, elle fut soulagée de voir que Jenifer était encore à Londres. Elle ne la verrait pas dans cet état, mais ça ne faisait que retarder l'inévitable. Ivy alla se "planter" devant le miroir et s'observa longuement, de grosses larmes chaudes roulant sur ses joues. Rageuse, elle finit par le décrocher et le poser à l'envers sur la commode, avant de monter dans son nid douillet, ultime refuge devant ce qui lui arrivait.
Elle finit par s'endormir, la lampe spéciale allumée, épuisée par la mission et ce qui en avait découlé.

A son réveil, l'Irlandaise crut longuement avoir rêvé, mais il n'en était rien. Elle avait faim mais, exceptionnellement, elle n'avait aucune envie d'utiliser son pouvoir. Elle ne voulait pas non plus ressortir de sa chambre ni voir les autres ainsi. Elle se leva et ferma le verrou de la porte, avant de tirer les rideaux, qui laissaient pourtant filtrer les prémices d'une journée ensoleillée comme elle les aimait. Elle eut un petit soupir éploré et remonta dans son lit d'herbes, de feuilles et de mousses pour se pelotonner en position foetale, sous la seule lumière de leur lampe magique.

Elle repensait à sa grand-mère. L'odeur végétale qui se dégageait de son lit la rassurait, lui rappelait ses souvenirs d'Irlande. Sa mamie lui aurait sûrement dit de ne pas s'en faire. Oui, c'est sûrement ça qu'elle lui aurait dit... mais elle n'était plus là pour le dire. Ivy était seule. Elle en venait presque à regretter que Jenifer ne soiti pas là en fin de compte, même si cela aurait été pénible de voir la tête qu'elle ferait certainement en la voyant. Elle laissa l'heure défiler, tant pis pour les cours.

Georgia avait un peu le bourdon en fait... Les cours s'étaient déroulés convenablement et elle avait quartier libre... Mais pour faire quoi ? Pour aller où ? Avec qui ?

Elle en avait marre de zoner à l'Institut, de passer pour une folle et de se prendre le chou avec le premier mutant venu. En plus, last but not least, Gaby était en mission et bon, ça l'inquiétait quand même un petit peu...

Du coup, ne souhaitant pas se morfondre dans sa chambre, Georgia fit quelques pas dans le couloir... Passant devant la porte d'Ivy, la New-Yorkaise marqua une pause... Ivy ? Elle ne la connaissait pas autant qu'elle aimerait la connaître mais toutefois elle l'aimait bien. En plus, Ivy était amusante, pas prise de tête et rafraichissante... Juste ce dont, elle avait besoin pour l'instant.

Georgia tapa distraitement à la porte de la jeune irlandaise et lança avec entrain :

"Hello Ivy, c'est Georgia, ça te dit de faire quelque chose ?"

Quoi ? Elle ne savait pas mais la rouquine aurait bien une idée intéressante...

Ivy n'avait pas bougé d'un poil. Elle était restée recroquevillée dans son lit à se morfondre dans l'indifférence la plus totale. Cela, elle n'en prit conscience qu'en entendant frapper à la porte. Bien sûr, certaines équipes étaient de sortie, ce qui n'arrangeaient pas les choses, mais il lui apparaissait clairement que son absence ne choquait personne, alors que les NGX avaient fait tout un foin de l'absence de Shiro durant la mission.
Seules les paroles de Nanikana la veille lui avaient apporté un peu de réconfort auquel elle s'accrochait comme du lierre à un vieux puit abandonné.
La petite rouquin sursauta, ouvrit grand ses yeux encore embrumés de sa léthargie matinale en se demandant de qui il pouvait s'agir. Elle aurait parié sur quelqu'un qu'elle n'aimait pas, avec la poisse qu'elle avait dernièrement. Mais la voix de Georgia vint la contredire, pour son plus grand plaisir, enfin à moitié. Tout comme pour Jenifer, Ivy avait envie de sentir une présence amicale, Georgia dans l'équation, mais de l'autre, elle refusait catégoriquement de se montrer après... ce qui lui était arrivé.
Cruel dilemme. Le ton de Georgia était une invitation au voyage, à l'aventure qui n'attendait que les deux jeunes filles... Mais elle appelait l'Ivy d'hier et n'avait aucune idée de la misère de l'Ivy d'aujourd'hui.

La jeune fille se redressa sur son lit en se demandant ce qu'elle allait faire. Après quelques secondes d'hésitation, elle sauta au bas du lit superposé et atterrit dans la mousse dont elle avait tapissé le sol. Les articulations de ses genoux gémirent comme un château hanté.
Elle s'approcha de la porte, la mine curieuse malgré ses soucis... bien enracinés, retira la clé de la serrure et se baissa à son niveau pour pouvoir regarder par le trou.

Elle distinguait les vêtements de la jeune fille de l'autre côté de la porte, son petit oeil vert scrutant le couloir.
Elle ne voulait pas sortir, mais sa voix elle, pouvait sortir sans problème.

"Psst, George !" fit-elle dans la serrure pour attirer l'attention de celle qu'elle avait déjà estampillée "amie" depuis leur rencontre et leur discussion avec Angel. D'ailleurs, c'était précisémment ce que l'abréviation de son prénom signifiait, avec une grande simplicité. Pour Jen c'était pareil. Ces choses là, ça se faisait à l'instinct ou ça se faisait pas, et l'Irlandaise était douée pour faire parler son instinct. Bien sûr, lorsqu'on regardait sa relation chaotique avec Anna, on pouvait se dire que son instinct était peut-être un chtouille basique.

"Chui là..." murmura-t-elle comme si cette révélation était un secret. Ivy dans la chambre d'Ivy ?! Mais que pouvait-elle donc bien faire ici ?!

Georgia attendit quelques instants, prête à retoquer une salve de coups sauvages sur la porte de la rouquine quand... La serrure lui parla. Ou plutôt, la voix de Ivy lui vint de cet endroit.

La New Yorkaise immédiatement s'accroupit sur ses talons et plaqua son oeil contre le trou de la serrure. Bien entendu, elle ne vit rien... Normal, Ivy était au même endroit mais de l'autre côté de la porte et son magnifique oeil vert (l'autre était ailleurs, non loin de là) empéchait tout naturellement la lumière de venir éclairer les deux filles sur ce qui était de l'autre côté... du trou de la serrure !

"Ivy ?"

Georgia se demandait bien pourquoi l'Irlandaise n'ouvrait pas...

"Ca va pas ma puce ? Y'a un problème ?"

Première solution : il y a un problème.

"Ou alors t'es à poil et tu veux pas ouvrir ?"

Deuxième solution : elle est à poil et elle veut pas ouvrir.

"Ou alors c'est un GARCON ?????"

Dernière solution : c'est un garçon.

Georgia avala sa salive. Elle avait réellement envie de voir Ivy. C'était limite un besoin. Du coup, elle coupa court à ses spéculations foireuses et lança, d'une petite voix, comme pour s'excuser...

"Dis moi, Ivy, ça te géne si je rentre un moment ? J'ai envie de voir quelqu'un... et ça me ferait très plaisir que ce soit toi..."

Georgia caressait tristement le bois de la porte.

Ah et voilà, elle s'était faite avoir ! Forcément, manifester sa présence ainsi allait paraître suspect ! Elle avait tellement envie d'une présence familière qu'elle n'avait pas réfléchi aux conséquences de ses actes. A noter qu'elle n'y aurait certainement pas réfléchi dans des circonstances normales non plus, mais c'était plus sympa pour la conscience de trouver une excuse crédible à ses petites absences d'esprit pratique.

"Euh..." dit-elle bêtement de l'autre côté de la serrure. Qu'allait-elle lui dire au juste maintenant ? Mais à peine eut-elle le temps de s'interroger que son vis-à-vis, ou plutôt son vis-à si l'on considérait qu'elle n'utilisait qu'un seul oeil pour regarder à travers la serrure, la mitrailla de questions.

"Ben..." répondit-elle à la première.

"C'ta-dire que..." hésita-t-elle à la deuxième. "Hein ? Pourquoi j'ouvrirai pas toute nue ? Tu vas pas me dire que t'es comme les autres coinços ?!" eut-elle néanmoins la présence d'esprit de relever une fois que l'information eut atteint son cerveau.

"Un garçon ?!" s'exclama-t-elle à la suite de son amie. Que venaient faire les garçons dans cette histoire ? Sven et elle étaient proches, mais ils n'avaient jamais eu besoin de partager leur chambre ! La jeune ingénue ne comprenait pas bien où Georgia voulait en venir.

"M'enfin, tu penses bien que si j'étais nue avec un garçon j'aurais ouvert la porte !" répondit-elle comme une évidence en haussant les épaules, bien que son interlocutrice ne put le voir. Elle venait de contrecarrer en bloc les seules portes de sorties que Georgia lui avait tendues malgré elle. L'Irlandaise se retrouvait de nouveau face à son problème immédiat et à l'étrangeté apparente de son comportement. Elle n'avait plus d'excuse, même si elle n'avait toujours pas compris le problème avec le nudisme et les garçons. Et d'ailleurs, elle ne voyait pas non plus le problème du nudisme et des filles. Qu'ils étaient pudibonds à l'institut !
Cela dit... en l'état actuel des choses, Ivy n'était plus prête de se remontrer dans la légèreté de ses tenues, si ce n'était de se montrer tout court.

Comme un chaton qui miaule et gratte à la porte, Georgia lui demanda si elle pouvait entrer d'une voix un peu suppliante. Ce fut au tour d'Ivy de s'inquiéter. Que pouvait-il bien se passer pour que Georgia ait besoin de la voir ? Elle pensa quelques secondes à des raisons plausibles : besoin de raviver une plante mourante ? Un ou deux morts chez les StryX ? Envie de faire du Sven Ascentionnel ? Cette dernière pensée lui remonta presque le moral.

Elle se replaça correctement pour voir Georgia dans la serrure.

"C'est que... Je... j'ai pas la pêche... J'ai euh... attrapé un truc, peut-être bien un truc contagieux du style grippe aviaire, ou peut-être bien la maladie de la patate, ça a décimé l'Irlande tu sais..." bredouilla-t-elle tout en jetant un coup d'oeil désespéré à ses mains.

"Chui pas sûre que... tu devrais me voir dans cet ét... euh sur mon lit de mort. C'est mieux tu vois, si tu te souviens de moi quand j'étais jeune et jolie et tout ça... Mais je meurs et dès que ça va mieux, promis tu pourras rentrer..." poursuivit Ivy, la voix aussi désolée que celle de Georgia.

C'est vrai ça, à quoi bon la pudeur ? pensa Georgia.

"Bah tu peut ouvrir toute nue, ça me dérange pas... Si y'a un garçon tout nu en revanche, je crois que je te laisserai tranquille surtout, ma belle" répliqua Georgia, calme et détendue. En fait ce qui était drole, c'est qu'Ivy devait passer pour la folle de l'Institut (à moins que Georgia ne lui ait déjà chourée la place), mais ce qu'elle disait était toujours ULTRA PERTINENT. Du coup, avec Ivy on ne savait jamais trop...

"Ben écoutes, ça m'a pas l'air méchant vu que t'es ni une pomme de terre ni une poule, la belle... Je crois plutôt que t'essaye de me faire le tour à l'envers là..."

Mais y'avait un problème tout de même. Un truc qui coinçait. Et bon, Georgia se sentait limite mieux à l'idée que son amie avait peut être besoin d'elle... Parce qu'elle aurait tout le temps de s'apitoyer sur elle même quand Ivy ira mieux !

"Ivy, je suis sérieuse... Si tu n'ouvres pas la porte..."

Georgia marqua une pause. C'était dur d'être sérieuse quand on posait un ultimatum débile.

"Si tu n'ouvres pas la porte, je me mets toute nue et je reste comme ça dans le couloir... Tu auras peut être la mort de mutants coincés sur la conscience !"

Georgia était on ne peut plus sérieuse.

Devant l'insistance de Georgia, Ivy prit le soin de se retourner vers sa chambre pour vérifier si effectivement, aucun mutant facétieux ne s'était planqué là à son insu. L'audacieux aurait souffert mille tourments, comme par exemple se faire agrafer au mur la tête à l'envers dans la chambre d'Alixtide ou se faire saupoudrer le caleçon de poil à gratter fait maison pour avoir osé pénétrer dans la chambre sans y avoir été invité, surtout en ce moment ! Apparemment il n'y avait personne. Ivy pousssa un petit soupir de soulagement.

"Bah nan, je crois qu'y a personne d'autre. On a pas de mutant invisible en ce moment, hein ? Nan parce qu'on en a eu, alors je me méfie..." répondit-elle d'une voix un peu plus assurée.

"Si je voulais te faire une tour à l'envers, je te jeterai du Sven Ascentionnel ! J'te jure, faut me croire, je mens jamais, c'est une tradition chez les O'Willow, croix de bois, croix de fer hein. C'est ma mamie qui m'a élevée comme ça. Elle trouvait toujours quand je mentais alors c'était moins pire de dire la vérité tout de suite. C'est pour ça que les O'Willow sont très malins pour contourner les orties et que je peux battre n'importe qui à la parlotte ! Ouais, ma vieille ! Enfin, n'importe qui, mais pas aujourd'hui." expliqua-t-elle avec chaleur en repensant à sa petite mémé et les fessées qu'elle avait essuyées à raconter des salades. A l'époque, une fessée de sa grand-mère c'était la fin du monde, mais à y repenser maintenant, ça lui apparaissait presque comme un bon souvenir.

L'Irlandaise cligna des yeux plusieurs fois à l'annonce de l'ultimatum de Georgia, puis elle tapa dans ses mains, ce qui produisit un drôle de bruit assourdi. Sa mine se refrogna un instant, puis elle reprit, enthousiaste :

"Grand* ! Alors toi aussi tu milites pour le retour au naturel ?!" demanda-t-elle, visiblement ragaillardie par la proposition de Georgia. Elle ne pouvait que l'applaudir, ça faisait maintenant deux bons mois qu'elle militait seule... Ivy avait réalisé la veille qu'elle n'était pas l'unique incomprise de l'institut, mais voilà qu'elle trouvait une autre âme soeur de conviction.

"C'est génial ! Tu sais que depuis que je suis arrivée, t'es une des seules à penser comme moi ? Ca me fait trop plaisir !" ajouta-t-elle sans pour autant ouvrir la porte. Elle s'imaginait déjà les virées à la belle étoile, les bains de minuit dans la piscine.

"J'ai plein de projets pour nous !" ajouta-t-elle, excitée comme une petite puce. Elles pourraient créer le front de libération de l'espèce humaine où tous les membres danseraient sans chemise sans pantalon. Mais... ça devrait attendre qu'elle ait trouvé une solution à son problème, si elle en trouvait une un jour. Cette pensée la ramena un peu sur terre.

"Tu sais... C'est pas que je veux pas ouvrir... Non... Mais j'crois que tu m'aimerais plus après... Je t'ai dit que j'avais attrapé le choléra au fait ?" dit-elle d'une voix plaintive. Cette situation lui rappelait que trop bien ce qu'elle avait vécu toute son enfance en Irlande. Maintenant qu'elle commençait à se faire des amis à l'institut, elle n'avait pas envie que ça s'arrête.

*Génial

Il fallait la suivre la petite rouquine... Parce qu'en fait, elle parlait (beaucoup) et disait pleins de trucs (un peu farfelus). Le Sven ascentionnel ? Hum... Georgia ne savait pas trop ce que c'était mais elle était presque sure que ça ne se mangeait pas... Bon !

"Pour le retour au naturel... Disons que je ne suis pas très pudique..."

En témoignait ses divers exploits à l'Institut...

"Et bon, chacun fait ce qu'il veut... Une fille devrait avoir le droit d'enlever tous ses vêtements si ça lui chante ! Ca devrait être même garantie par la constitution !"

Sa vieille âme militante revenait au galop... Mais un retour à la nature ? Georgia aimait trop la technologie pour se passer de tout ça... Vivre à poil, pourquoi pas... Vivre sans balladeur, non !

"Pourquoi je t'aimerai plus, Ivy ? Hein ? C'est quoi ces bêtises ? Même si t'avais plein de pustules de partout je t'aimerai encore ! Même si tu avais des verrues contagieuses, je te suivrai encore ! Alors, ouvre, je sens que t'as besoin d'un gros calin et moi aussi... par la même occasion"

Ivy pouvait être pénible en fait : quand elle avait une idée en tête... Mais à ce jeu, Georgia était quasi sure de gagner...

Georgia ne s'était sûrement pas doutée de l'impact de ses propos sur l'Irlandaise évaporée. La constitution... Ivy savait vaguement que c'était un texte très compliqué mais qui déterminait la ligne de conduite des pays, un peu comme la bible du président.

"Alors ça... ! En vla une idée qu'elle est bonne ! La constriction ! T'as raison, et ben c'est décidé, je vais écrire une lettre au président !" s'exclama-t-elle. Pourquoi n'y avait-elle pas pensé plus tôt. Plutôt que lutter seule dans l'institut, elle pouvait lutter à l'échelle mondiale pour le droit à la nudité. Et dans le dictionnaire, à côté de la case O'Willow, on y verrait écrit "Ivy la Rousse, co-inventrice talentueuse du Sven Ascentionnel, libératrice des espaces verts et des corps humains". Et elle avait bien l'intention de rajouter quelques lettres d'or en plus. Elle leur montrerait à tous ces affreux de Dungloe qu'elle était capable de devenir quelqu'un !

Ivy écouta Georgia avec attention. Son discours était touchant, très touchant même compte tenu de son besoin affectif du moment, et pourtant, la rousse se demandait s'il en serait vraiment ainsi. Georgia n'avait aucune idée de ce qui pouvait la pousser à se terrer dans sa chambre. La réalité pouvait parfois couper la chique aux meilleures volontés.

"Pour sûr que je serai pas contre un câlin..." chuchota-t-elle. Un câlin comme quand elle était avec sa mémé. C'était amusant de voir comme ce bout de femme pouvait être à l'origine d'autant de fessées et de câlins à la fois.

"... mais tu vois... les pustules et tout... si je te disais que c'est pire... tu dirais quoi ? Et puis t'as besoin d'un câlin ? Qu'est-ce qui se passe ? Tu peux me le dire à moi..." murmura-t-elle à nouveau tout près de la serrure. Elle venait à peine de percuter : Georgia avait des soucis ? Les trois options auxquelles elle avait pensé plus tôt étaient trop vraisemblables, ça pouvait pas être ça. Alors quoi ? Comme le chagrin de Nan l'avait écartée de son propre nombril, la jeune fille fit diversion de son problème pour l'éclipser deux minutes.

"... Après... je... ptête... je t'ouvre, si t'as pas changé d'avis."

Une lettre au président ? Ecrire à cette baudruche vendue aux sponsors des pouvoirs en place ? Pourquoi pas après tout, Georgia aurait beaucoup à lui dire. Des questions tout d'abord. Des trucs que personne n'ose demander parce que tous ceux qui pourraient parler en faisant sens là dessus, sont déclassés, humiliés, oubliés... Les gens qui comptent sont de toutes manières au bout de 20 ans dans le système partie prenante à tout ça... Pire même ! Oubliés les idéaux originels ! La machine est tellement bien huilée que les bondieuseries officielles sont devenus un vrai mode de vie...

"Ben écoute, on lui écrit à cette crevure et on lui demande des comptes, ma belle... Pour tout. Pour ça. Pour toi. Pour moi. Pour les notres. Parce que dès fois, je me demande très sérieusement, pourquoi on doit vivre comme ça... On va lui écrire, c'est sur !"

Mais la paranoïa antisociale n'était pas réellement le noeud de l'affaire après tout...

Parce que ce qui importait réellement c'était que cette fichue porte s'ouvre. Après le reste pourrait attendre...

"Même si c'est pire, même si t'es devenue aussi laide que les fesses à Lyu, tu seras toujours belle... Parce que tout ça, ça ne compte pas... Et même si c'est contagieux, un calin ça vaut tous les sacrifices..."

Georgia était excédée. Elle s'emportait quand même beaucoup en ce moment.

"En fait, j'aurais besoin en plus d'un calin, d'un conseil et tu me sembles la mieux à même de me répondre..."

Elle avait besoin de l'intelligence toute particulière d'Ivy. Parce qu'elle sentait que d'une certaine manière elles fonctionnaient un peu pareil... A la marge. Toujours.

"Allez ouvre... Je ne changerais pas d'avis de toute façon. Promis"

Satisfaite de se voir enfin ouvrir la porte, Georgia mit les pieds dans l'antre d'Ivy...

Il faisait noir. La rouquine venait d'éteindre la lumière visiblement. On pouvait dire que celle là, elle savait ménager le suspens ! C'était un peu comme un sphinx... Mais avait elle pour autant un secret ?

Répondant à l'invitation, Georgia se mit à cloche patte et retira l'une puis l'autre de ses chaussures... Les chaussettes suivirent et elle put effectivement témoigner d'un bien être podal tout à fait champêtre...

On ne se serait pas réellement cru dans une chambre à coucher. Mais pouvait on s'attendre à autre chose de quelqu'un d'aussi spécial et attachant qu'Ivy ?

"Bah ouais, Lyu est très religieux... Des fois, je me demande si c'est pas un truc qu'il a pour ne pas avoir à réfléchir... Mais pour ses fesses, disons que c'est une image, je n'ai heureusement pas eu ce plaisir douteux que de leur être présentée !"

Georgia s'assit en tailleur. Ca faisait très causerie à la belle étoile tout ça ! Le meilleur lieu pour les confidences après l'oreiller, mais on n'en était pas encore là...

"Ben disons que mon problème est d'ordre relationnel... Pour tout te dire, je ne sais plus trop quoi faire. Tu connais River ? Et bien je crois qu'elle m'aime... Pardon, je sais qu'elle m'aime. C'est facile : je l'ai embrassé deux fois mais ce n'était pas vraiment moi qui voulait... Parce que tu vois, quand on fait des trucs avec quelqu'un, c'est parce qu'on s'ouvre au désir de l'autre... Du coup, contrairement à ce que je pensais, je suis sure que si je l'ai embrassée, eh bien, ça signifie qu'elle le voulait... CQFD !"

Bon dans la tête de Georgia, c'était moins sur, mais la réponse d'Ivy pourrait confirmer tout ça.

"En y réfléchissant même un peu plus, je me dis que tout est cohérent. Parce que ça énerve que je dise ça. Genre River, elle m'aime... Mais c'est qu'elle doit refouler, non ? Et puis elle doit être honteuse que Roscart ne puisse lui donner ce qu'elle veut... Son "plus-de-jouir"... Parce qu'au fond, c'est ça le discours de River, le discours de la Maîtresse, celle qui ne sait pas et qui cherche quelqu'un pour lui donner son savoir... Et de ce savoir, et bien, on a le "plus-de-jouir" ! Et je pense aussi qu'elle cherche à travers moi, le phallus qu'elle a perdu, le phallus symbolique que Roscart n'a pas... Donc du coup, c'est TRES TRES embêtant. Je me retrouve avec un phallus symbolique dont je ne veut pas et Roscart, ben, Roscart il est cocu... Ce qui est quand même génant !"

Georgia avala sa salive. Une théorie était en train d'accoucher dans sa petite caboche.

"Pire même ! Je crois que si Noémie m'en veut, c'est qu'elle aussi en tant qu'amie, elle voudrait répondre au désir de River... Du coup, on se retrouve avec une armée de phallus symboliques d'abord perdus puis retrouvés... Je ne sais plus quoi faire de tout ça ! Tu comprends ?"

Enfin, se rappelant qu'Ivy aussi a des problèmes, elle tenta, timidement :

"Et toi, ma belle ? Tu me cacherais pas quelque chose ? J'ai beaucoup parlé, maintenant j'aimerai savoir ce qui te tracasse... Tu peut me faire confiance, non ?"

La mine goguenarde, Ivy pouffa une nouvelle fois de rire. Elle n'imaginait pas le chinois "présenter" officiellement son derrière à quelqu'un, l'image était comique, d'autant que le sérieux du loustique démentissait toute hypothèse du genre.

"Tu m'étonnes ! C'est tout à fait ça tu sais. Chez moi au pays, y avait tout un tas de religieux, eh bah tout ce qu'ils m'ont appris, c'est que sans leur fichu bouquin, ils savent pas faire grand chose !" approuva Ivy en hochant vigoureusement de la tête. En bonne Irlandaise, elle était préposée au catholicisme affirmé, mais la façon dont elle avait été traitée chez elle l'avait définitivement convertie à l'hérésie.

La conversation bifurqua sur... River ? Si elle s'y attendait ! Y avait apparemment de quoi la détourner de ses petits pépins. Avec une attention studieuse qu'elle ne démontrait que rarement en cours, la rouquine écouta Georgia exposer son épineux problème... d'amour ! Alors là, si quelqu'un était mal placé pour répondre, c'était sûrement Ivy. Elle qui faisait tout pour garder ces préoccupations d'adultes loin d'elle, le monde des grands semblait vouloir la rejoindre sous le masque de l'amitié. Quelle bande de sournois ces adultes alors... Ceci étant pensé, elle se doutait de la détresse sincère de Georgia. Elle ne pouvait pas la laisser tomber maintenant. Et puis elle avait un nom à se faire. Elle remonta donc ses manche imaginaires pour essayer de comprendre l'affaire complexe présentée par Georgia. Ivy ne comprenait pas tout de cette théorie du oui inavoué, du non accepté, mais ça la confortait dans son opinion des histoires de grands : ça craignait le pâté.
Que d'ennuis pour de simples bisous. Sa grand-mère lui en faisait souvent de son vivant, Ivy n'en avait jamais fait un cheddar !

Allons, un peu de bonne volonté, tu vois bien qu'elle a besoin de tes lumières ! se sermonna-t-elle pour dopper sa réceptivité.

"Hum... C'est marrant, je la connais un peu River, et elle m'a jamais parlé de toi... Quelle comédienne alors !" s'exclama-t-elle après un moment de silence en secouant la tête avec amusement. Il ne lui serait jamais venu à l'esprit de douter de la parole de Georgia en qui elle avait toute confiance. Si elle lui rapportait tout ceci, c'est qu'elle savait de quoi elle parlait, et visiblement, l'exprience amoureuse de Georgia était nettement plus développée que la sienne.

"Bon alors, toi tu l'aimes pas mais tu l'as embrassée pour lui faire plaisir, mais elle elle fait semblant que ça lui fait pas plaisir, c'est ça ? Mais en fait elle veut être ta Maîtresse ? Quelle idée ! Elle a passé l'âge quand même... Après on dit que je suis une gamine... Enfin passons ! C'est sûr que si Roscart est mou du spaghetti, c'est un problème... Et à ta place, j'aimerais pas... récolter d'un truc que j'ai pas voulu..." commença-t-elle à élucubrer d'une voix pensive, sa voix hésitant un instant à la dernière phrase.

"Tu sais quoi ? Etre le kiki de quelqu'un c'est beaucoup trop de responsabilités, c'est pour ça que ça m'intéresse pas tous ces trucs de grands là. Moi je dis, comment tu peux dormir tranquille si t'as des phallus partout, non mais franchement ? Si j'étais toi, je rendrais son kiki à Roscart, ça doit lui faire un choc... Si Noémie a envie s'acoquinner à eux, c'est son problème. Regarde, toi maintenant, tu te retrouves prisonnière alors que t'as voulu rendre service, c'est pas acceptable du tout ça... Tsss, tsss, tsss..." poursuivit-elle en agitant l'index en signe de dénégation.

"En gros, tu t'en laves les mains de ces kikis ! T'es pas vraiment concernée en fait, perso j'ai horreur qu'on se serve de moua ! Là vous en au carré pas très magique... Après ça sera juste un triangle môdit... enfin un cercle vicelard, un truc dans le genre. Rendre service oui, mais pas si ça doit te mettre dans le pétrin !" conclut-elle, finalement assez satisfaite de la façon dont elle s'en était sortie. Le plus généralement, rendre service était synonyme de pétrin à l'institut, qu'on le veuille ou non, mais refuser en bloc permettait parfois de s'esquiver des embrouilles, comme quand Ivy faisait le mur pour ne pas avoir à faire la vaisselle.

"Mais attention ! Faut que tu fasses ça en douceur tu vois, parce que si tu retires trop brusquement, l'autre s'accroche à toi et alors là c'est foutu, tu vois ? Si tu lui brises le coeur, forcément elle va te courir après, c'est élémentaire. Alors que si tu la joues finement, elle se rendra pas compte de la différence. C'est comme quand tu changes de coiffure cheveux par cheveux, les types à la télé ils font ça, cheveux par cheveux... du coup tu te rends même pas compte qu'ils sont moins moches comme ça !"

Exposé triomphal. Finalement, Ivy était peut-être plus douée que prévu pour les trucs d'amour. Concrètement, ça signifiait des bisous de plus en plus courts de Georgia, et puis River serait vite sevrée et pourrait se retourner vers Noémie et Roscart. Telle un Houdini du 21ème siècle, Ivy avait escamotté Georgia de l'équation avec la ruse du renard.
Elle baissa ensuite la tête comme si elle regardait ses pieds lorsque Georgia la questionna sur son propre problème. Si l'on exceptait la lumière éteinte, Ivy ne cachait strictement rien en vérité, mais elle l'avait dit : elle était incapable de mentir. Bidouiller la vérité ça c'était possible, mais mentir foncièrement, non. Si elle le faisait, le fantôme de sa mémé viendrait sûrement lui botter les fesses.

"Ca pour sûr que je te fais confiance... Seulement... c'est un truc horrible que même toi tu me regarderas plus jamais pareil... Alors j'imagine même pas les autres... J'crois... enfin je me dis que, j'ferai même ptête mieux de filer à l'angl... à l'irlandaise."

"Ouais les religieux, ça craint... En fait, ils se rendent même pas compte que pour la plupart ils ne font que sponsoriser les pouvoirs en place avec des histoires à dormir debout ! Parce que bon, si ici il faut trimer, en gros c'est l'enfer social pour tout le monde, peut être que si t'as pas moufté et que t'as marché droit, peut être, je dis bien peut être, t'iras dans un monde super chiant, où tout le monde est coincé et où tout le monde il est content de l'être... Super !"

En fait, Ivy avait tout capté tout bien ce que disait Georgia. Meilleur même ! Elle allait dans son sens... En effet, la stratégie de l'évitement progressif semblait le mieux pour elle... Une belle éloge de la fuite en somme !

"Ouais River simule bien... Remarque ça doit être pratique avec Ros, comme ça il est content et il se dit que tout roule dans son monde impeccable... Mais j'ai un peu peur qu'un jour il se rende compte que je lui ai chouré son phallus. Alors que moi, j'ai rien demandé ! Je suis déjà mutante, prolétaire, un peu folle alors j'ai pas envie, en plus d'être un kiki !"

Le discours du kiki d'Ivy lui semblait au fond, une belle illustration de sa propre pensée... Comment faire quand on est soi même un phallus retrouvé et qu'on vit entouré d'organes éréctiles masculins ? A y réfléchir, Roscart ne devait pas être le seul à l'avoir perdu... Peut être qu'il faudrait passer une annonce ?

"Oui, oui, elle veut être la Maîtresse... En fait, de mon expérience, ça signifie pas grand chose... Si ça marche comme dans l'usine de mes parents, ça veut dire : paresser. Et donner des ordres de temps en temps. Et : récolter la plus-value. Moi c'est du "plus-de-jouir" qu'elle veut me chourer... Pas que j'en ai spécialement besoin, mais bon, j'ai ma fierté quand même ! Et puis, c'est pas facile d'être un kiki pour une autre que soi... En plus, bon vu qu'on parle de Roscart, ça doit pas être beau à voir, non ? Même si c'est comme les fesses à Lyu, on n'a pas été présenté... Peut être qu'il faudrait les présenter les unes à l'autre ?"

L'image était cocasse mais Georgia la chassa rapidement de son esprit. Pas de temps à perdre. Ses pensées étaient déjà bien confuses alors inutile d'en rajouter !

"Enfin, maintenant j'ai compris qu'il fallait me retirer... mais progressivement. Pas plus d'un bisou par jour ! C'est décidé ! Comme ça, ils feront leurs affaires à 3, ce qui n'est déjà pas si mal pour un couple idéal... Et puis si Roscart a des problèmes, peut être que Noémie pourra l'aider ? Ca serait comme... Comment dire ? Du kiki accompagné ? Après, il pourra le récupérer une fois qu'il saura quoi en faire... symboliquement"

Le trip sur les cheveux en revanche était intéressant... Si Georgia un jour devait se raser la tête, elle le ferait mêche à mêche...

"Au fond, t'es vraiment profonde comme fille... Parce que là tu m'aides vraiment. Je crois même avoir une petite idée pour faire une sortie honorable de ce lupanar... Parce qu'y a urgence ! Ca va finir très mal cette querelle des phallus. A force d'y penser, j'en ai même l'entrejambe qui me gratte..."

En revanche, Georgia fit la moue en entendant les éternelles excuses d'Ivy...

"Filer ? Mais t'es pas bien, toi, non ? Bon maintenant tu vas passer à table ma belle... Parce qu'il faut que je sache. Et puis si c'est SI TERRIBLE que ça, ça t'aideras d'en parler..."

Elle marqua une pause. Un doute débile et machinalement, elle ajouta :

"C'est quand même pas un kiki qui te pousse là ?"

Ivy haussa les épaules, résignée.

"Bof, moi je sais ce qui m'attend d'après eux, quand on est dans la colonne "sorcellerie", la route est bien tracée. Ca commence par le bûcher et hop, la rôtissoire en enfer. D'ailleurs, quand t'y réfléchis, ils ont tout compris de comment marche le monde, puisqu'ils te font passer le bûcher avant l'enfer. Tu vois le truc, progressif... Tout comme je t'ai dit. Je suis sûre qu'ils se trouvent hyper charitables, tiens !" releva Ivy avec humeur.

"En tout cas, je suis contente que tu vois la vérité en face. Tu peux pas continuer comme ça, faut pas se laisser marcher sur les pieds, surtout pas par des kikis, pouah !" s'exclaffa la jeune fille en rigolant. Elle ne comprenait que trop bien la fierté de Georgia dans cette affaire, c'était primordial.

"Tu devrais peut-être en parler à Noémie pour qu'elle sache quoi faire quand River sera triste... La pauvre, ça me fait de la peine pour elle alors si Noémie peut lui donner un coup de main..." ajouta-t-elle en pensant au tourment de la pauvre River avec qui elle avait sympathisé. Elle ne pouvait pas décemment s'impliquer elle-même dans l'histoire après avoir conseillé la poudre d'escampette à Georgia, en plus cela trahirait le fait que Georgia lui avait révélé le pot aux roses.
Ivy entortilla une mèche de cheveux autour de son doigt. Un compliment ! Elle en avait bien besoin en ce moment ! C'est vrai qu'elle était profonde comme fille, sauf que peu de gens semblaient le remarquer... Et puis ça lui remontait le moral d'avoir réussi à résoudre le problème de Georgia.
Elle se pencha en avant pour observer la zone sensible désignée par Georgia avec attention.

"Non... rassure-toi, j'crois que y a rien..." dit-elle après quelques secondes. Dans cette pénombre, c'était vite dit d'ailleurs. Ivy détourna le regard quand Georgia repassa à l'attaque.

"Ben... pas vraiment un kiki non... ça serait peut-être plus naturel remarque..." marmonna-t-elle. L'issue de la conversation semblait inéluctable maintenant que Georgia était dans la chambre et qu'elle avait en plus divulgué son propre secret.
Elle fit une pause durant laquelle elle essaya une façon de tourner la chose sans faire paniquer Georgia.

"Disons que euh... Hier soir... tu vois on était en mission là et j'ai eu... un problème technique, voilà c'est ça, un problème technique... incurable... Je sais pas comment faire maintenant... Et puis Olivier il est pas au courant mais il va m'enguirlander, je le sens ! Mais c'est pas ma faute..." geigna la jeune fille, tête baissée comme une enfant prise en faute.

"Ben ouais, quand on est convaincu d'avoir raison... plus besoin de se casser les fesses à réfléchir ! Et y'a pas que les curés... Y'a aussi les flics, les psy, les politiques... Ils veulent tous que tu les aimes. Alors que bon, c'est pas possible. Au fond, ils sont là pour te les briser. Et toi, t'aimerai juste qu'ils te foutent la paix... Mais non, ça aussi c'est pas possible. S'ils avaient personne à gonfler, ils feraient partie des personnalités inutiles... Alors à coups de matraques, de seringues ou de sermons, ils t'assomment... Et en plus, il faut les en remercier !"

Peut être Ivy serait elle une bonne complice pour un mouvement anarcholibertaire de libération et de défense des mutants ? Une internationale mutante ?

"Ouais bonne idée, je parlerais à Noémie... Lui dire ce que River aime bien qu'on lui fasse avec la langue, ce genre de choses... Et peut être à Ros aussi, pour lui dire que j'ai retrouvé son petit kiki..."

Georgia se calma quelque peu. Ivy était toujours aussi mystérieuse avec son problème. Mais c'était quoi ? Ca se traduisait par quoi ? La petite était retorse...

"Ben Olivier... Il m'a l'air plutôt gentil, non ? Et puis c'est un docteur avant tout... Et pas un psy ! Alors, il est là pour aider les gens... Mais fais plutôt voir ce que c'est..."

Et Georgia s'avanca la main tendue en avant, pour faire un examen physique de son amie... Pas question de rester plus longtemps dans le doute !

"Ben oui, avec la langue... Pourquoi ça ? Je devrais pas ? Tu sais, je me brosse les dents et Riv' aussi je suppose..."

L'hygiène bucco-dentaire c'était important. Une belle langue bien rose. Des dents bien blanches. Ni Camille, ni Gaby n'avait fait d'objection, donc la colère de Riv' ne devait pas se situer à ce niveau là... A creuser, toutefois...

"Qu'est ce qui se passe avec ton équipe ? Tu t'entends pas avec eux ? Ils te font des misères ?"

Georgia en touchant la peau d'Ivy ressentit un truc étrange. Des sillons ? Un contact un peu spécial ? Qu'est ce qui se passait ? La main de la New Yorkaise essaya de voir si c'était pareil sur le reste du bras...

"Ma belle, tu te transformes pas en arbre ? Enfin, à part ça, j'aimerai mieux voir ça à la lumière, histoire d'être mieux informée... Mais faut que t'en parles à Olivier, il m'a l'air malin comme un singe. Ca doit être rien de bien grave... En tout cas, rien qui soit de nature à changer l'image que j'ai de toi, la puce et l'envie que j'ai de te faire un gros calin !"

Parce que de toutes façons elle ne savait pas de quoi demain serait fait. Que les changements corporels, elle allait les subir aussi. Son destin, elle le savait, était de finir couverte de cicatrices diverses et variées... Et que bon, Ivy resterait quand même Ivy.

Se brosser les dents... Ivy ne comprenait toujours pas à quoi Georgia pouvait bien faire allusion. Elle avait beau se méfier des trucs d'adultes, elle n'en demeurait pas moins curieuse au sujet de leurs étranges coutumes, surtout si elles impliquaient des muscles dans un usage inhabituel. Mais bon, c'était toujours bon à savoir que Georgia et River prenaient soin de leur dentition, comment elle croquerait les pommes sinon ?

"Eh bah les macaques ça peut être foutrement méchant !" protesta Ivy. Quelqu'un lui posait enfin directement la question qui contenait une grosse partie de son chagrin du moment.

"Ils... Ils... C'est pas mon équipe ! Et puis Anna me traite comme si j'étais une étrangère, je suis sûre qu'elle préfère ces nouveaux qu'on nous a collés là ! Même Olivier il s'occupe plus du japonais que de moi alors qu'on le connaît à peine et ils pensent tous que je sers à rien ! Qu'est-ce qu'ils vont penser maintenant, hein ?" finit-elle par exploser, sa voix se brisant dans un sanglot contenu pendant plusieurs jours.

"Je sais pas ce que je deviens, mais c'est horrible ! J'veux pas ! J'veux pas !" chouigna-t-elle en plaquant ses mains sur son visage, ce qui provoqua un drôle de bruit sourd pinochiesque. Ses pleurs redoublèrent. Le reste du bras d'Ivy semblait identique à son épaule. La confrontation au regard et à la perception de Georgia mettait Ivy face à un miroir qu'elle avait tenté d'éviter depuis la veille, comme si repousser cette échéance lui permettrait d'échapper à ce qui semblait s'abattre sur elle.

Le coeur de Georgia se serra. Elle n'aimait pas trop entendre les autres pleurer, ça lui donnait souvent l'envie de faire de même... Les sanglots d'Ivy n'étaient pas feints. La jeune irlandaise semblait souffrir réellement et bon, la New Yorkaise ne savait pas trop comment s'y prendre pour la consoler...

Elle prit Ivy dans ses bras, l'entourant bien et lui embrassant le sommet du crâne tout en lui caressant le dos lui dit :

"Allez, allez... Je suis sure que personne ne pense que tu ne sers à rien... Je sais que tu es utile. Tu es même vitale. Regarde ? T'as réglé mon problème, alors bon tout le monde doit ou devrait savoir que t'es utile, ma puce... Et t'as essayé d'en parler à Anna ?"

Marquant une courte pause, Georgia chercha les mots, les mots pour ne pas dire n'importe quoi, pour ne pas faire plus de mal que de bien... Finalement, elle ajouta :

"Mais non, je suis sure que ce n'est pas horrible. Je suis sure que tu es toujours belle. Au contact ce n'est pas déplaisant, alors à la vue, ça doit être pareil... Et puis je peut te comprendre, la Miss, moi, à terme je vais finir couverte de cicatrices, comme un boxeur... Je suis sure que toi, c'est pas si terrible que ça... Allez fait voir..."

Elle avait dit ça calmement. La gorge nouée par l'émotion. Mais aussi calmement qu'elle le put...