Londres, centre équestre

River avait été servie rapidement, et il lui restait encore un bon quart d'heure avant le prochain bus. La jeune fille commença à faire du stop. Il faut dire que les Smith n'habitaient pas sur un boulevard de forte affluence. Quelques voitures passèrent sans s'arrêter, et River se fit siffler par une camionette transportant des jeunes débraillés.
Une vieille femme sortit à son tour de la boulangerie, traînant derrière elle un petit caddie à roulettes. Elle consulta les horaires de bus puis s'assit à l'abri. Elle avait la tête de ces grand-mères qu'on aimerait bien avoir, mais qu'on ne voit que sur les couvercles de yaourt recette traditionnelle. Elle regarda River une seconde puis prit la parole :

"hé bien ma petite demoiselle, vous devriez pas faire du stop comme ça, de nos jours, on ne sait plus à qui se fier..."


Chez les Smith, Cloud et Rain s'étaient levés doucement pour aller consulter l'écran, non sans un regard étrange de Cloud à sa jumelle. Trop d'événements inexpliqués arrivaient autour d'elle récemment...
Le silence régna dans la pièce une bonne minute, puis le regard, très sérieux de Cloud se braqua sur Wind :

"Qu'est-ce que c'est que cette histoire de mutants... ? T'étais au courant, Wind ?" demanda-t-il en pointant l'écran du doigt. Rain quant à elle, ne semblait pas saisir l'importance des lignes du message. Elle avait l'air plutôt contente de recevoir des nouvelles de son frère disparu.

Personne ne s'arrêtait. Et, quand bien même les jeunes dans la camionnette l'aurait fait, elle ne serait pas montée avec eux. elle résolut donc de s'asseoir à côté de la grand-mère qui attendait le bus.

"hé bien ma petite demoiselle, vous devriez pas faire du stop comme ça, de nos jours, on ne sait plus à qui se fier..."

"Vous avez raison, mais... Je dois rejoindre mon frère... Il a fait une fugue et est parti aux Etats-Unis..."expliqua-t-elle rapidement.

Elle baissa le nez, comme honteuse, et reprit:

"Je suis partie de chez moi comme lui l'a fait la semaine dernière, mais c'est pour le ramener ici. Il n'avait pas le droit de nous abandonner... Il n'avait pas le droit de m'abandonner..."

Jamais plus qu'en cet instant, River n'avait semblé être une enfant. Elle semblait même presque plus jeune que ses quinze ans, mais l'espace d'un instant seulement puisque, lorsqu'elle releva la tête, elle avait un air buté et décidé, l'air de dire que rien ne l'empêcherait de rejoindre le frère ingrat, sauf...:

"J'espère juste avoir assez d'argent pour le billet d'avion..."

Elle n'avait pas besoin de voir le regard le Cloud pour sentir l'atmosphère devenir pesante et imaginer parfaitement ce qu'elle y aurait trouvé. Quelque part, elle regrettait de leur avoir montré le mail de leur cadet, parce qu'il impliquait trop de choses, parce qu'indirectement, il la mettait en cause, elle aussi. Mais d'un autre côté, elle n'aurait jamais pu leur taire, justement à cause de tout ce qui en découlait.
Avait-elle seulement envie qu'on la regarde de travers après ça ? Pas vraiment... Elle aurait préféré faire comme si de rien n'était et surtout, surtout, ne pas croiser les yeux froids de sa moitié. Pourtant elle dut bien quitter l'écran lorsqu'il l'accusa presque d'en savoir plus qu'elle n'en avait dit. Elle serra les dents pour ne pas crier, certaine qu'encore une fois, ça tournerait mal, mais signa à geste rapides qui mangèrent la fin de certaines de ses phrases une réponse aussi cinglante que la question de son jumeau.

[Non je n'étais pas au courant ! Tu crois peut-être que si je l'avais été je me serais autant inquiétée ? Tu crois surtout que je vous aurais laissés tous vous faire du mourron l'esprit ... ? Je croyais que tu me connaissais mieux que ça ! Tu sais bien que tu es le seul à qui je me confie, tu aurais été le premier ..., et nos parents ensuite. Je ne sais pas ce que c'est que cette histoire de mutants, c'est la première fois que j'en entends parler, mais ça pourrait expliquer ... . L'inconscience de sa prof et de Charleston, d'abord, et puis...]

Elle s'arrêta brusquement, les mains tremblantes et les yeux brillants.

[Si c'est vrai, s'il y a des gens qui ont des aptitudes étranges, au-delà des capacités humains, si ça se trouve, j'en fais partie aussi... Je ne sais pas comment c'est arrivé, mais c'est ma voix qui a causé cette catastrophe au centre équestre. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne la contrôle plus, alors il vaut mieux pour tout le monde que je ne l'utilise pas. Pourquoi tu crois que j'utilise mes mains ?]

Elle détourna le regard, incapable de soutenir plus longtemps ceux de son frère et sa soeur.

[Je suis sûre que River est partie à la recherche de Wood, je vais la chercher.]

Elle tourna les talons d'un pas tremblant, renfila son manteau rose et attrapa son écharpe qu'elle noua en hâte d'une main en ouvrant la porte de l'autre. Autant dire que l'étoffe blanche tenait à peine... Il ne lui restait plus qu'à prier pour que son petit ange ne se soit pas fait prendre en stop...

La petite dame eut l'air vraiment émue par l'histoire de River : sa lèvre inférieure se mit à tremblotter comme si elle avait oublié de mettre son dentier.

"Ma pauvre petite, c'est si triste de perdre un être cher..." répondit-elle en tapotant l'épaule de River en hochant son visage compatissant.

"Je me souviens comme si c'était hier... Quand j'ai perdu mon Alfred..." continua-t-elle, le regard perdu dans ses souvenirs.

C'est à ce moment que Wind déboula dans la rue à proximité de l'abri-bus vitré. Devant sa réaction impulsive, Cloud n'avait même pas cherché à la retenir. Cela ressemblait si peu à Wind...
Les regards des deux soeurs se croisèrent alors que la grand-mère continuait son laïus sur les liens familiaux.

*Et m***e* songea la cadette en voyant arriver sa soeur.

Une chose était claire, c'était qu'elle ne retournerait pas à la maison. Elle allait chercher Wood, un point c'était tout. Plutôt mourir que de rester ici à ne rien pouvoir faire. Au moins, si elle partait, elle pourrait se rendre utile et servir à quelque chose... Elle regarda la petite vieille avec un sourire. celle-ci lui était vraiment sympathique, mais son empêcheuse de partir droit (pas pu m'en empêcher^^) de soeur allait tout foutre en l'air. Elle fit comme si elle n'avait pas reconnu Wind alors même que leurs regards s'étaient croisés. Elle n'aurait qu'à faire comme si elle ne comprenait pas le langage des signes et puis le tour serait joué. Elle serait tranquille, puisque sa soeur refusait d'utiliser sa voix...

"Perdre un proche fait mal.. Mais le plus mal, c'est lorsqu'il vous tourne le dos sans une explication..."répondit-elle à la petite dame avec une larme au coin de l'oeil.

Cette larme était vraie. Elle était incapable de faire semblant. Mais, en même temps, ce qu'elle voulait, c'était qu'en cas de problème la petite vieille prenne sa défense. Elle ajouta:

"Il faut absolument que je le ramène à la maison... Papa et maman souffrent beaucoup, à cause de lui..."

A peine leurs regards s'étaient-ils croisés que River tournait la tête, se focalisant sur la dame âgée qui attendait le bus, assise sous l'abri.

"Perdre un proche fait mal.. Mais le plus mal, c'est lorsqu'il vous tourne le dos sans une explication... Il faut absolument que je le ramène à la maison... Papa et maman souffrent beaucoup, à cause de lui..."

[Et tu fais la même chose que lui en partant sans rien dire. Pire encore, tu nous as menti. Comment tu crois que papa et maman vont réagir en réalisant que toi aussi, tu nous as quittée ?]

Sa cadette faisait mine de ne pas la voir, ou de ne pas la comprendre. Qu'importait, Wind ne se priverait pas pour lui expliquer sa façon de penser. Pourtant, elle prenait son temps, comme si elle était détachée de ce qu'elle commentait.

[Tu penses vraiment pouvoir aller le chercher et le ramener à la maison avec le peu d'argent que tu as sur toi, sans aucun bagage ? As-tu au moins ton passeport ? Ils ne te laisseront pas partir sans, tu sais.]

Ca ne servait à rien de l'enguirlander, mais elle pouvait au moins tenter de lui expliquer. Contrairement à l'instant d'avant, ou ses mains bougeaient de façon frénétique pour signer ce qu'elle cherchait à dire à son frère, elle semblait plus calme. Ce n'était qu'une apparence, mais elle ne voulait pas braquer davantage la jeune fille, bien que ses yeux brillants et ses pommettes légèrement empourprées la trahissent quelque peu. A moins que ce ne soit dû au froid ?

[J'ai vu le message de Wood. Je me demande s'il est vraiment aussi bien qu'il le dit là-bas... Tu crois que les autres l'ont regardé comment quand il est arrivé ? Comme Wood à l'instant et toi tout à l'heure quand ma voix a sonné bizarrement ?... Oui, peut-être...]

Elle hocha la tête, comme si elle réfléchissait pour elle-même.

[Apparemment, il a trouvé d'autres gens qui ont des capacités hors-normes, et il semblerait qu'ils soient capables de lui apprendre à vivre avec. Peut-être que je devrais partir moi aussi...]

Elle s'arrêta un instant, fixant encore sa soeur, puis fouilla dans sa poche, en sortit son téléphone mobile et ajouta :

[Oui. Je vais faire ça. Tiens. Il y a une option monde sur le mien, tu pourras toujours appeler. Moi je rentre. Je vais prendre ses affaires comme il l'a demandé et les miennes, et j'abandonnerai les autres. Toi, tu es grande, je peux te laisser te débrouiller toute seule, n'est-ce pas ?]

Elle tourna les talons sans plus attendre, et laissa sa soeur en plan. Pas que ça l'enchante plus que ça, elle aurait préféré la ramener de force, mais elle s'en savait incapable, elle n'avait pas la carrure de l'infirmier de ce matin...

"Oh, je comprends ma petite, mais j'imagine que tes parents seront encore plus inquiets si toi aussi tu disparais... Perdre un enfant, quelle horreur..." répondit la petite dame, avant que son oeil d'un bleu délavé par le temps ne tombe sur Wind. Elle la regarda signer quelques instants sans bien comprendre de quoi il s'agissait, puis reprit la parole :

"Ca c'est sur que mon Alfred, c'était toute ma vie..."

Finalement, River se retourna vers sa soeur, qu'elle regarda d'un regard glacial. Elle l'écouta, ou plutôt la regarda signer et finit par lui répondre d'une voix à la même tonalité que son regard:

[Et tu fais la même chose que lui en partant sans rien dire. Pire encore, tu nous as menti. Comment tu crois que papa et maman vont réagir en réalisant que toi aussi, tu nous as quittée ?]

"Et tu préfères que je reste là à tourner en rond comme un lion en cage? Je ne peux plus RIEN faire... RIEN!! Tu m'entends? Je serais dans un fauteuil que ça ne changerait rien! Plus déquitation pendant un mois, mon frère parti et moi, je dois rester ici à mourir à petits feux? Non!!!!!"

Elle se tut pour écouter la suite des paroles de sa soeur.

[Tu penses vraiment pouvoir aller le chercher et le ramener à la maison avec le peu d'argent que tu as sur toi, sans aucun bagage ? As-tu au moins ton passeport ? Ils ne te laisseront pas partir sans, tu sais.]

"Et bien je me débrouillerai. Et s'il le faut, je passerai en fraude. Voilà! Mais je refuse de rester là à me rouler les pouces pour rien... Si tu veux que je me laisse mourir, c'est tout à fait ce qu'il faut me forcer à faire..."

De nouveau elle se tut et croisa les brass sous sa poitrine. Elle avait son petit air buté et colérique qui était celui qu'elle prenait le plus souvent depuis une semaine maintenant. A part avec les chevaux, qui pouvait se targuer de l'avoir vu sourire? Personne... Elle qui avait été la joie de vivre, aujourd'hui était plus dépressive qu'autre chose. Rester ici un mois à ne rien faire n'était sans doute pas la meilleure des choses à faire pour elle.

[J'ai vu le message de Wood. Je me demande s'il est vraiment aussi bien qu'il le dit là-bas... Tu crois que les autres l'ont regardé comment quand il est arrivé ? Comme Wood à l'instant et toi tout à l'heure quand ma voix a sonné bizarrement ?... Oui, peut-être... Apparemment, il a trouvé d'autres gens qui ont des capacités hors-normes, et il semblerait qu'ils soient capables de lui apprendre à vivre avec. Peut-être que je devrais partir moi aussi...]

"Alors maintenant, c'est toi qui veut nous abandonner????????"s'écria la fillette qui avait attendu la fin du discours de sa soeur, incrédule.

"Tu veux faire comme Wood et me laisser Je... Je... Je te déteste!!!!!"

[Oui. Je vais faire ça. Tiens. Il y a une option monde sur le mien, tu pourras toujours appeler. Moi je rentre. Je vais prendre ses affaires comme il l'a demandé et les miennes, et j'abandonnerai les autres. Toi, tu es grande, je peux te laisser te débrouiller toute seule, n'est-ce pas ?]

Et Wind renchérit sur le fait qu'elle allait bien partir, l'abandonnant à son tour. Les larmes emplirent les yeux et le visage de River qui lâcha:

"Je vous déteste toi et Wood! Vous m'avez abandonnée!"

Et sans prendre le téléphone, elle partit en courant vers le centre équestre, puisqu'elle n'avait plus que cet endroit où aller, au mépris de sa côte blessée.

La dame âgée n'avait pas vraiment prêté d'attention à Wind, et quelque part, cette dernière préférait qu'elle ne pose pas de question. Ce qu'elle signait pour River la fit bondir aussitôt. Au moins elle avait réagi, elle cessait de l'ignorer. Mais la voir partir en courant, ça n'était pas tout à fait l'effet escompté. Wind se mit à sa poursuite. Elle n'était pas très sportive, mais sa soeur était blessée, ce qui la freinerait sans doute malgré elle. Et l'aînée avait au moins son souffle pour elle...

Les propos que sa cadette lui avait tenus cinglaient encore à ses oreilles. Il y avait une différence entre ne rien faire et agir sur un coup de tête. Mettre en place un plan de bataille pour savoir ou on va, ça pouvait aussi être une option, mais sans doute sa soeur était-elle encore un peu jeune et réagissait-elle quelque peu à chaud. Quelque part, cette pensée faisait plaisir à l'aînée qui n'avait peut-être pas totalement perdu son petit ange. Celle-ci ne réalisait même pas les dangers que son entreprise représentait... Passer en fraude ? Aux Etats-Unis ? C'était de la folie pure ! Rien de tel pour, si jamais elle parvenait à fouler le sol américain, faire demi-tour illico. S'il y avait bien un pays qui ne rigolait pas, c'était celui-là.

Lorsqu'elle parvint enfin à rejoindre sa soeur (au centre ? avant ? jamais ), elle la prit dans ses bras, certaine pourtant d'être aussitôt rejetée, et lui prit un poignet pour l'empêcher de s'enfuir encore (ou tout au moins tenter de le faire). Seulement ça impliquait aussi qu'elle ne pouvait pas signer... Elle ouvrit la bouche une fois, deux fois, mais ne put se résoudre à émettre quelque son que ce soit, de peur que la catastrophe de ce matin ne se reproduise. C'était le comble, pour une chanteuse, tout de même, que de ne plus pouvoir utiliser sa voix.

Elle dut se résoudre à la lâcher pour signer rapidement, espérant que River s'intéresse quand même à son message.

[Je ne veux pas t'abandonner, c'est toi qui nous abandonne en partant sans rien dire. Si toi aussi tu pars, à quoi ça sert que je reste, je ne pourrai plus vous protéger. Est-ce qu'on ne pourrait pas revenir à la maison, et essayer de trouver une solution tous ensemble plutôt que de chercher chacun à faire n'importe quoi dans son coin.]

Oui parce qu'elle aussi faisait n'importe quoi. Cette idée de rejoindre Wood, c'était plutôt pour que River sorte de son mutisme, mais à tout bien y réfléchir, il y avait un fond de vérité. Wind ne pouvait pas nier qu'elle avait envisagé cette possibilité un quart de seconde, avant de repenser à tous ceux qu'elle laisserait ici. Et si elle aimait énormément son cadet, il n'était pas question qu'elle abandonne les autres... Cruel dilemme en vérité, qui, chaque fois qu'elle y songeait, ravivait le souvenir du visage de Cloud lorsqu'il avait vu le mail, et lui serrait le coeur...

La petite dame eut un petit "oh !" de surprise lorsque River se mit à courir, bientôt poursuivie par sa soeur.
Alors que River s'élançait, sa blessure se rappela cruellement à son bon souvenir. Malgré tout, la jeune cavalière tentait de distancer sa soeur avec beaucoup d'entêtement, au détriment de sa propre santé.
Petit à petit, Wind gagnait du terrain, jusqu'au moment où elle put se saisir de son poignet pour l'arrêter. Elles étaient à environ 200 mètres de leur domicile, sur le trottoir. Quelques passants les regardèrent rapidement : la plupart des gens du coin connaissait les Smiths et leur ribambelle d'enfants.
A quelques mètres, un jeune homme promenait un gros Saint-Bernard pataud. En passant près des filles, il se mit à tirer sur sa laisse en poussant de petits gémissements de détresse.

Sa côte lui faisait un mal de chien, alors qu'lle tentait de distancer sa soeur qui la poursuivait. Elle ne voulait pas la voir. Elle ne voulait pas lui parler. Mais il fallait croire qu'elle était trop diminuée, et Wind ne tarda pas à la rattraper. Elle lui prit le bras pour la stopper, arrachant un cri de douleur à l'adolescente qui se retourna vers sa soeur avec de la haine dans le regard. Elle s'arracha rapidement à l'étreinte de celle-ci et maintint entre elle un bon mètre de distance.

"Ne me touche pas..."fit-elle d'une voix lourde de menaces.

[Je ne veux pas t'abandonner, c'est toi qui nous abandonne en partant sans rien dire. Si toi aussi tu pars, à quoi ça sert que je reste, je ne pourrai plus vous protéger. Est-ce qu'on ne pourrait pas revenir à la maison, et essayer de trouver une solution tous ensemble plutôt que de chercher chacun à faire n'importe quoi dans son coin.]

Elle ricana aux signes de sa soeur. Pour ce qu'elle en avait à faire de ce que celle-ci pouvait lui dire... A ce moment-là, un jeune homme passa à côtés d'elles, un Saint Bernard en laisse. River le regarda un instant s'agiter, ne comprenant pas ce qu'il avait. Elle se retourna vers sa soeur et cria:

"Laisse moi partir!!!! Je ne veux plus rien avoir à faire avec vous!!!!!!"

Sa rage était telle qu'elle était incapable de se contenir. Finalement, peut-être valait-il mieux qu'elle ne soit pas allée jusqu'au club. Sinon, elle l'aurait sans aucun doute transmise aux chevaux... Elle ajouta:

"Je ne suis pas un animal que l'on peut tenir en laisse ou bien enfermer dans une cage... J'ai besoin de liberté!!!! Même ce chien, il a besoin de liberté!!"

Ô surprise, River se dégagea rapidement de l'étreinte de son aînée, et lui intima de ne pas la toucher. Elle n'aurait jamais cru voir un jour un tel regard sur le visage de son petit ange. Qui n'en était plus un à cet instant. Elle aurait aussi bien pu lui enfoncer une lame dans le coeur que prononcer les mots qu'elle hurlait à l'instant.

"Laisse moi partir !!! Je ne veux plus rien avoir à faire avec vous !!! Je ne suis pas un animal que l'on peut tenir en laisse ou bien enfermer dans une cage... J'ai besoin de liberté !!! Même ce chien, il a besoin de liberté !!!"

Wind ne comprenait pas. Depuis quand considérait-elle que leur famille l'étouffait, la maintenait en cage, pour reprendre ses termes ? Il y avait quelque chose qui s'était brisé, et elle doutait de retrouver un jour la petite soeur qu'elle avait presque élevée - en tout cas était-ce son ressenti. Le lien qu'elle pensait avoir avec elle était donc mort ? Etait-ce parce qu'elle avait fait du mal à tout le monde aujourd'hui, ou est-ce que ça datait de plus longtemps ?

"Laisse-moi partir. Je ne veux plus rien avoir à faire avec vous." Elle se répétait ces mots comme si elle avait ainsi pu en modifier le sens. En vain. Elle ne pouvait donc rien faire ? Elle s'y était donc si mal pris toutes ces années ? Il fallait croire que oui. Ses prunelles vert pâle restaient fixées sur le visage de sa cadette, bien que ses yeux s'embuèrent de larmes. Ses mains tremblantes se levèrent pour signer quelques mots.

[C'est ce que tu souhaites, toi aussi : partir ?]

Elle s'arrêta un instant, serra ses mains l'une dans l'autre comme si ça avait pu en interrompre les spasmes, puis reprit.

[Wood aussi a préféré partir... Est-ce que je ne peux vraiment rien faire pour vous garder près de moi ?]

Ses mains de nouveaux serrées l'une contre l'autre, posées sur sa poitrine, elle ne quittait plus sa soeur du regard, attendant avec appréhension sa réaction. Alors ça y est, elle aussi, elle allait tourner les talons et l'abandonner ? Les gens qui passaient, elle s'en fichait pas mal, tout autant de l'homme qui promenait son Saint-Bernard. Ils n'auraient pas été là, en cet instant précis, ça n'aurait rien changé pour elle.

"Rufus ! Viens ici !" s'écria le propriétaire du chien en le voyant dévier de sa trajectoire.
Le timbre de voix de River était chargé d'émotions. La colère, la détresse, tout cela se mélangeait en elle dans une spirale d'ondes négatives.
Alors que Wind reprenait "la parole", le Saint Bernard échappa au contrôle de son maître en poussant un aboiement menaçant à l'encontre de l'aînée.

"Rufus !" cria le jeune homme en s'étalant par terre. Rufus se jeta sur la frêle Wind, la plaquant au sol de toute sa masse imposante, et se mit à lui grogner au visage dans un râle intimidant, quelques filets de bave s'échappant de ses babines.

Wind n'avait même pas eu le temps de terminer ce qu'elle avait à lui dire que, déjà, l'énorme Saint Bernard venait de se jeter sur elle, babines retroussées en grognant. Qui avait déjà vu un tel chien se comporter ainsi? Franchement, pas moi... Bref. Toujours est-il que la colère de la jeune fille retomba d'un coup. Enfin... Non, pas réellement... Elle venait de se rendre compte que les chevaux n'étaient pas les seuls à ressentir les émotions des gens et venait de reprendre le dessus. Si elle était en colère, elle ne voulait pas qu'il arrive quelque chose à sa soeur... Elle s'approcha de la masse poilue qui maintenait Wind au sol et entourra le cou du chien de ses petits bras.

"Là... Calme-toi... C'est fini..."

La fillette était à deux doigts de piquer une crise de nerfs, pourtant, elle se retenait. Il fallait asolument qu'elle se contrôle. Ca, elle l'avait compris. C'était comme avec les chevaux, comme avec Charleston.

"Qu'est-ce qu'il t'arrive, Rufus?"lui demanda-t-elle en lui caressant la tête pour essayer de le calmer.

En un éclair, Wind se retrouva à terre, la masse imposante du saint-bernard sur le corps, l'empêchant de bouger. La gueule menaçante de l'animal déversait quelques filets de bave sur sa gorge, mais elle n'y avait pas prêté la moindre attention. Par réflexe, elle avait crié quand elle s'était sentie emportée par la bête qu'elle considérait comme enragée, et une fois à terre, privée de toute liberté de mouvement, elle n'avait rien pu faire d'autre que fermer les yeux, se mordant la lèvre pour ne pas hurler encore, mais refusant de voir la suite. Des larmes perlèrent aux coins de ses paupières closes, et puis elle entendit des pas, et enfin la voix de sa cadette.

"Là... Calme-toi... C'est fini... Qu'est-ce qu'il t'arrive, Rufus?"

Le chien avait-il donc finalement plus d'importance que sa famille aux yeux de River ? Ou était-ce juste elle qui avait droit à autant de dédain ? Dès que ses bras furent libérés, elle porta les mains à son visage, mais refusa de se relever. A quoi bon ? Elle ne pouvait plus chanter, ni parler, au risque d'encore faire du mal à ceux qu'elle aimait, et son trésor la détestait...

Rufus gesticula un moment dans les bras de River, tout en pleurnichant et en secouant la tête. Au bout de quelques secondes, l'animal effarouché se détendit, puis se calma complètement. Le changement de comportement avait été très rapide, et pour le moins déconcertant. Rufus posa son gros postérieur sur la jambe de Wind et se mit à regarder River avec dévotion.
Son propriétaire s'était relevé et approchait craintivement des deux soeurs. Il se baissa pour ramasser la poignée de la laisse de Rufus.

"J-Je suis vraiment confus, il est très sociable d'habitude... C-C'est la première fois... Vous n'avez rien mademoiselle ?" demanda-t-il à Wind après un regard stupéfait vers son chien. Il lui tendit la main pour l'aider à se relever, avant de remarquer que son chien était assis sur sa jambe.

"Allez, Rufus, lève-toi..." demanda l'homme avec précaution. Rufus observa son maître sans bouger, pour retourna son regard de nounours sur River en penchant légèrement la tête sur le côté, comme attendant son approbation.

Le chien avait fini par se calmer, même si cela avait été long. Il pesait à présent moins sur sa soeur. River s'écarta du chien et caressa la joue de sa soeur quand le propriétaire s'excusa auprès de Wind. Rivy se contenta de hocher la tête, considérant que c'était à Wind d'accepter ou non les excuses du jeune homme. L'ado remarqua alors à son tour que Rufus était sur la jambe de sa soeur. Son propriétaire tenta de le faire bouger, mais le chien, loin de l'écouter, regarda River avec dévotion, comme s'il attendait qu'elle lui donne elle-même l'ordre de bouger.

"Allez Rufus, enlève ta patte de sur ma soeur... S'il te plait."

Elle avait parlé d'une voix quelque peu hésitante, ne sachant pas trop quoi dire. Elle n'était pas son maître, après tout... Etait-il possible que ce soit de sa faute si le chien avait sauté sur Wind? Tout comme Wind avait poussé un hurlement horrible? Cela ne pouvait-être vrai... Elle devait avoir simplement communiqué sa tension au chien...

Elle secoua la tête et pris Wind par les épaules pour l'asseoir avant de la prendre dans ses bras et d'enfouir sa tête dans les ceveux blonds de sa soeur.

"Je suis désolée..."murmura-t-elle.

Le chien avait fini par cesser de la menacer, elle ne sentait plus son haleine chaude sur son visage, mais il trônait encore majestueusement sur sa jambe, l'empêchant de se relever. Son propriétaire avait dû se rapprocher aussi, comme sa voix sonnait tout près. Il s'excusait de ce qu'il venait de se passer, et demandait au Saint-Bernard de se relever, mais ce dernier ne réagit qu'à la voix de River, étrangement douce par rapport à ce qu'elle avait entendu depuis le matin.

Wind s'était plutôt attendue à voir sa cadette s'éloigner à présent, et pourtant, elle était auprès d'elle, l'aidait à se redresser - bien qu'en cet instant, l'aînée n'en ait eu aucune envie - et la prenait dans ses bras, enfouissant sa tête dans ses cheveux. C'était là un geste qu'elle n'avait plus fait depuis une éternité, et, si son regard vert pâle restait embué, c'était comme si on lui avait ôté un poids immense de la poitrine. Et ça n'avait rien à voir avec celui de Rufus...

"Je suis désolée..."

Les bras de la jumelle se refermèrent autour de son petit ange, et si elle ne répondit pas, refusant encore et toujours d'utiliser sa voix, elle n'en pensait pas moins. Elle aurait pu lui pardonner les pires horreurs, rien que pour pouvoir encore la serrer ainsi dans ses bras. C'était sans doute un peu fort, mais c'était là ce qu'elle pensait en cet instant. Et il fallait avouer que tout ce qu'elle avait pu débiter quelques instants plus tôt avait de quoi horrifier n'importe quel membre de la famille...

Après quelques instants où Wind caressa les mèches à présent brunes de River, l'aînée s'écarta légèrement et signa quelques mots afin que sa cadette les transmette au propriétaire du chien.

[Dis-lui que ce n'est rien, qu'il n'y a rien de cassé, c'est l'essentiel...]

Et puis un pâle sourire étira ses lèvres et elle ajouta :

[Est-ce que tu veux bien rentrer à la maison avec moi ? Qu'on réfléchisse tous ensemble à ce que nous allons faire concernant Wood...]

Elle aurait pu lui imposer de rentrer, mais ce serait risquer de la braquer encore, et elle ne le souhaitait pas. River était à présent libre de choisir ce qu'elle voudrait faire à présent, même si l'aînée espérait fortement qu'elle abondrait dans son sens...

De nouveau totalement calme, Rufus retourna auprès de son maître de son pas bon-vivant et se mit à lui lécher la main, comme si rien de s'était passé.
Le propriétaire du chien semblait complètement tomber des nues. Non seulement son chien se comportait bizarrement mais en plus il ne lui obéissait qu'à moitié !

"On peut dire que vous savez y faire avec les animaux, mademoiselle." commenta-t-il en observant son animal , qui venait de s'asseoir tranquillement à ses pieds, d'un oeil inquiet.

Après un long moment à serrer sa soeur dans ses bras, River laissa celle-ci s'éloigner quelque peu pour signer. Elle se retourna ensuite vers le propriétaire de Rufus auquel elle traduisit:

"Ma soeur m'a dit que ce n'était rien. Elle n'a rien de cassé. Il n'y a donc pas de mal."

Elle esquissa un petit sourire gêné, surtout lorsque ce dernier prit la parole.

"J'ai passé beaucoup de temps avec les animau, notamment les chevaux..."fit-elle comme si c'était une explication.

A dire vrai, elle ne savait pas ce qui s'était passé, ni pourquoi Rufus lui avait obéi à elle et pas à son maître. Wind lui demanda alors si elle voulait bien rentrer avec elle. River baissa la tête. Non, elle ne voulait pas rentrer. Elle voulait partir. Mais elle ne savait comment le dire. Elle poussa un soupir et décida de signer à son tour.

[Je ne veux pas rentrer. Je veux partir, le plus vite possible. Je ne pourrai pas être tranquille tant que Wood sera là bas, tant qu'il ne m'aura pas expliqué, tant que je ne l'aurai pas giflé pour ce qu'il nous a fait...]

Comme River expliquait ce qu'elle venait de signer au propriétaire de Rufus, Wind esquissa un sourire à l'attention du jeune homme embarrassé. C'était terminé, il pouvait partir à présent... Les deux soeurs auraient besoin d'un peu de calme pour aplanir les choses. Et ça n'était manifestement rien de le dire. Les derniers propos que River signait plutôt que de les prononcer devant l'étranger lui firent perdre aussitôt l'ébauche de sourire qu'elle venait de plaquer sur son visage, et elle soupira à son tour.

[Je ne veux pas te laisser partir seule. Je ne te demandais pas de rentrer définitivement, ni d'oublier tout ça... Je voulais juste qu'on prenne le temps de s'organiser pour aller le chercher. Mais j'imagine que tu es trop grande maintenant pour que j'ai quelque autorité que ce soit...]

Un sourire contrit effleura ses lèvres, et ses yeux reflétaient plus de tristesse qu'autre chose, tandis qu'elle signait calmement, comme si elle ne faisait qu'établir un constat anodin. Pourtant c'était tout son petit monde qu'elle voyait s'effriter. Elle avait tenté de faire abstraction de ce qui se déroulait depuis le départ de Wood, ou peut-être avant. Elle avait cherché à empêcher tout cela. Mais rien n'y faisait, et elle ne pouvait que se résoudre à l'évidence : sa famille, telle qu'elle la décrivait naguère, qu'elle chérissait plus que tout, n'existait plus. Certes, ils étaient tous encore en vie, mais plus rien ne serait comme avant désormais. Même si Wood revenait. Même si les choses bizarres qui s'étaient produites aujourd'hui venaient à être oubliées, ça ne serait plus jamais pareil. Elle, elle se souviendrait toujours des mots blessants de son petit Ange, du regard outré de Cloud tout à l'heure, et de l'horreur et de la panique qui l'avaient envahie le matin-même au centre. Non. Rien n'effacerait les stigmates de cette dernière semaine, elle en était certaine.

Elle épousseta légèrement ses affaires, esquissa un dernier sourire à l'attention du maître de Rufus et un signe de la main en guise d'au revoir, puis se tourna vers sa soeur.

[Je rentre. Si on me demande, je dirai que je ne t'ai pas trouvée, puisque c'est là la liberté que tu souhaitais... Je préfererais rester auprès de toi mais...]

Elle haussa les épaules et eut un geste de désinvolture de la main, comme pour signifier le peu d'importance que cela pouvait avoir. Oh ! Pour elle ça en avait de l'importance, mais ça n'était le cas que pour elle apparemment, alors mieux valait sans doute qu'elle le taise. Ces derniers temps, à chaque fois qu'elle avait tenté de préserver ce qui lui était précieux, elle n'avait fait qu'empirer la situation. Peut-être valait-il mieux qu'elle s'éloigne pour le bien de tous...

[Prends soin de toi, mon petit ange.]

Et comme si ça devait signifier la fin de toute discussion, elle avait fourré les mains dans les poches de son manteau, et adressé un dernier sourire fade aux deux jeunes gens avant de tourner les talons pour reprendre le chemin de la maison...

Le maître de Rufus hésita un instant, surtout en voyant Wind s'éloigner.

"Je euh... Bon ben, encore désolé." dit-il en attirant Rufus pour s'éloigner à son tour. Le chien regarda une dernière fois River avec dévotion, puis finit par suivre son maître vers de nouvelles aventures.

River n'avait pas répond à sa soeur. Elle en était en effet incapable. Si elle ne voulait pas rentrer, elle ne voulait pas partir seule non plus. Le problème restait don entier. Elle se trouvait sur le chemin du centre. Perdue (mentalement parlant), la jeune fille décida de s'y rendre pour remettre ses idées au clair. Chemin faisant, elle s'arrêta sur un banc et fouilla dans son sac pour voir combien d'argent elle avait, ainsi que les papiers qu'elle avait emporté avec elle. Elle poussa un petit soupir. Que devait-elle faire? Pourquoi, surtout, quand elle avait besoin d'aide, n'y avait-il personne pour la conseiller?

Wind n'était pas objective, Rier le savait, bien qu'elle fut en général de bon conseil. Mais cette fois, elle voulait trop garder sa cadette avec elle, et ça, la petite brunette ne le voulait pas. Elle ne voulait plus être surprotégée. Y avait-il pourtant d'autres solutions?

River ne répondit pas, et Wind ne s'arrêta pas non plus. Elle avait espéré, pourtant, que la cadette la rattrape, l'appelle, ou tente de quelque manière que ce soit, de l'empêcher de partir, mais il n'en était rien. Et même si elle s'était promis de se montrer forte, de ne pas céder à son instinct, à sa nature qui lui intimait de rebrousser chemin et de ne pas se séparer de son petit ange, elle ralentit plusieurs fois le pas, et ne put empêcher les larmes de rouler sur ses joues comme elle poursuivait malgré tout sa route vers la demeure familiale. Elle le lui avait dit. Elle aurait préféré rester auprès d'elle, mais ça n'était pas ce que celle-ci souhaitait. Elle voulait être libre, elle n'avait pas le droit de l'en empêcher. Elle espérait seulement que cette soif de liberté ne la mettrait pas en danger. Mais rien n'était moins sûr, et l'aînée savait d'ores et déjà qu'elle se rongerait les sangs si River ne donnait pas régulièrement des nouvelles de son périple à la recherche de Wood.

Elle s'arrêta un instant devant le portillon, contemplant la bâtisse qu'elle connaissait depuis toute petite et qui lui semblait aujourd'hui étrangement différente. Que pensaient Cloud et Rain de tout cela ? Que pensaient-ils d'elle ? Est-ce qu'ils la regarderaient encore bizarrement après cette journée ? Elle secoua la tête comme pour chasser les questions qu'elle se posait. Première chose à faire, prévenir les parents de la disparition de River, et répondre à Wood. Prévenir son prof de chant qu'elle avait une extinction de voix - disons-le ainsi - et qu'il valait mieux qu'elle soit remplacée. L'idée lui était pénible. Cela signifiait abandonner ce qui, en dehors de la famille, lui tenait le plus à coeur. Avec un brin d'amertume, elle songea encore une fois que son petit trésor n'était pas le seul à se voir privé de sa passion...

Ensuite ? Ensuite, il faudrait qu'elle se décide elle-même sur ce qu'elle allait faire... Rester auprès de son jumeau et de sa cadette, ou partir rejoindre les deux derniers ? Cruel dilemme, auquel elle n'était pas prête de trouver une réponse. Pourquoi fallait-il que tout ce qu'elle chérissait éclate aujourd'hui en mille morceaux ? Elle sécha ses larmes et poussa la porte d'entrée sans un mot, comme elle n'osait plus en prononcer depuis un moment. Même quand ça lui avait échappé, ça avait été un désastre. Sa liste de tâches à accomplir toute prête dans sa tête, elle entra dans le salon où elle avait tout à l'heure laissé les deux autres membres de la famille Smith.

En fouillant dans son sac, River put trouver sa carte d'identité mais pas son passeport. Son porte-monnaie contenait £85, ce qui représentait une somme non négligeable pour une jeune fille de son âge, mais cela suffirait-il à acheter un billet d'avion pour les Etats-Unis ? River avisa qu'une voyageuse mineure et sans bagages, ça risquait d'attirer une attention indésirable sur elle.

De son côté, Wind retrouva Cloud et Rain assis devant l'ordinateur. Elle ne s'était absentée qu'un petit quart d'heure à peine. Ils avaient l'air absorbés dans la lecture d'un site internet, mais il ne s'agissait pas du message de Wood. A son arrivée dans le salon, Cloud se retourna. Son visage s'assombrit en voyant Wind seule.

"Où est River ? Tu l'as retrouvée ?" s'enquit-il immédiatement, la voix grave.
Rain se retourna à son tour vers Wind, la mine triste.

"Vous allez partir chez les mutants ?" demanda-t-elle de but en blanc.